Frédéric Dard - Mes hommages à la donzelle

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Mes hommages à la donzelle: краткое содержание, описание и аннотация

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Il y a une multitude de choses dont j'ai horreur. Les jeunes filles de plus de quatre-vingt-dix-sept ans, tout d'abord. Le poisson mal cuit, aussi. Puis les liaisons mal-t-à-propos ; les ouatères de wagons de seconde classe ; les bitures de Bérurier et les imparfaits du subjonctif de Pinaud. Mais s'il y a une chose qui m'énerve par-dessus tout, qui me file au bord du delirium très mince, c'est qu'on s'asseye sur mon chapeau… Surtout au cinéma… Surtout quand on l'a fait exprès… Surtout quand c'est le dargeot d'un truand qui est l'outrageur… Surtout quand tout ça cache le commencement d'une aventure insensée !

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— Ça va, je dis au patron, rengainez votre lanterne magique, chef. Pas besoin de toute cette pellicule, il suffisait de me dire que c’était la plus belle gerce de Paris.

Il arrête l’appareil et redonne la lumière.

— Ce que je vous demande, fait-il, c’est d’agir avec précaution. Un pas de clerc peut avoir les plus graves conséquences, car nous risquerions d’indisposer le professeur Stevens ; or, c’est un homme très sollicité, et son départ de France — m’a laissé entendre le ministre de l’Intérieur — serait une espèce de petite catastrophe, vous saisissez ?

— Très bien.

— Vous agirez comme bon vous semblera. Tenez-vous à conserver les « anges gardiens » attachés à la personne de la jeune fille ?

Je secoue la tête.

— Je préfère m’occuper d’elle tout seul.

Il réprime un léger sourire.

— Faites au mieux. La secrétaire habite chez le professeur : un petit hôtel particulier à Boulogne.

« Mais, qu’avez-vous ? »

La bobine que je dois faire en ce moment n’est pas descriptible.

— L’adresse, dis-je, n’est-ce pas 64, rue Gambetta ?

Pour le coup, c’est lui qui est asphyxié.

— Si, mais…

Je consulte ma breloque. Il est quatre heures moins un quart.

— Merde arabe ! je gueule.

Je me propulse dans le couloir ; je dévale les escadrins, bousculant les flics de garde et je saute dans une voiture de la maison. Le chauffeur qui était en train de la passer à la peau de chamois essaie timidement de protester.

— Mais, monsieur le commissaire…

— Oh ! ça va, je lui crie. Direction Boulogne, rue Gambetta, tu connais ?

— C’est pas dans ce coin qu’habite Lana Politen ?

Je lui réponds que c’est possible, que je n’ai aucune certitude là-dessus et que, de toute façon je m’en fous copieusement.

Tout ce que j’attends de lui et de son tréteau c’est de la vitesse. Il me connaît, il comprend ! C’est incroyable le nombre de mecs qui me comprennent lorsque je leur parle d’une certaine façon…

Il fait un démarrage à grand spectacle pour essayer de m’épater. Si j’avais un râtelier, celui-ci aurait déjà plus d’un kilomètre d’avance sur mes gencives.

Il est quatre heures dix lorsque nous débouchons dans la rue Gambetta. C’est une artère tranquille, cossue, que bordent des maisons rupinos. Il n’y a pas un greffier à l’horizon. J’ordonne à mon chauffeur de ranger sa brouette et j’arnouche les numéros. Nous sommes arrêtés à la hauteur du 58. De la bagnole j’aperçois parfaitement la cabane du père Stevens. C’est de la jolie masure… Deux étages, de la baie vitrée comme s’il en pleuvait ; un bref jardinet bien entretenu ; une grille en fer forgé…

Le chauffeur se retourne et me regarde avec surprise. Ses yeux me disent :

— « Et alors ? Tu m’as fait foncer à tombeau ouvert jusqu’ici et au lieu de te ruer quelque part tu joues au pacha dans mon autobus ! »

C’est un grand rouquin qui a l’air aussi futé qu’un baril de bière. On suit ses pensées dans ses prunelles comme la trajectoire d’une fusée volante dans une belle nuit de juillet.

Ce qu’il pense m’indiffère presque autant que la révocation de l’édit de Nantes. Je reste à mon poste d’observation. Mon attente, comme on dit dans les romans de boy-scouts, est couronnée de succès. Au bout de cinq minutes je vois s’ouvrir la porte de service, à gauche de la grande grille et mon ouistiti de Ferdinand se glisse hors de la crèche au Stevens comme un suppositoire qui choisit sa liberté. Je le laisse évacuer le quartier. Je sais où le trouver.

— Qu’est-ce qu’on fait ? questionne le chauffeur.

Je le reluque sauvagement.

— Toi, je lui fais, tu serres tes deux lèvres l’une contre l’autre et tu y fais un point de suture. Quant à moi, c’est mes oignes, vu ?

Il se tasse derrière son volant, faudra probablement un crochet à bottines pour le tirer de la carriole…

Le gars San-Antonio attend. Il attend comme il est pas possible d’attendre parce que, dans son crâne de génie une idée croît comme une plante tropicale. Et cette idée, je vais vous l’exposer, bien que vous m’ayez tous l’air d’une belle bande de mous-de-la-tronche.

Je me dis qu’il est pas naturel de payer grassement un gnace pour ouvrir un coffre lorsqu’on n’a rien à lui faire agripper à l’intérieur. À moins que…

Et c’est justement cet « à moins que » qui me titille la matière grise.

Ramassez ce qui vous reste de jugeote pour essayer de suivre ma gymnastique cérébrale ! Ouvrez grandes vos manettes et écoutez !

Le coffre du savant contient des documents. Il n’est pas un obstacle pour ceux que ces documents intéressent puisque nous avons la preuve que des fuites existent. Donc les dégourdis que son contenu passionne y ont accès, d’une façon ou d’une autre… Alors, me direz-vous, avec votre sacrée logique en fonte renforcée, s’ils peuvent tripoter à l’intérieur, y a pas de raisons pour qu’ils ciglent un Ferdinand quelconque pour l’ouvrir. On tourne en rond comme sur le pont d’Avignon… Ben non ! M’est avis que quelqu’un de la maison s’occupe activement. Ce quelqu’un, je suis prêt à vous parier une douzaine d’éléphants blancs contre une glace à la pistache que c’est la môme Héléna. Si le chef a pensé à elle, c’est qu’elle n’a pas le nez propre. Le chef, c’est un type qui possède un sixième sens. À côté de lui, Tara bey est tout juste bon à manœuvrer une machine à calculer chez Félix Potin…

Je vois les choses ainsi. Héléna fait de l’espionnage pour le compte d’une autre puissance que les travaux de Stevens intéressent davantage que l’almanach Vermot. Un jour, elle constate qu’elle est surveillée. Elle se dit que ça commence à renifler la brûle et qu’on a dû s’apercevoir que le système de protection des travaux du prof n’était pas absolument étanche. C’est une fine mouche et elle décide de donner le change. Alors elle paie une cloche pour ouvrir le coffre. Du coup la voilà blanchie car c’est la preuve qu’elle ne trempe pas dans les salades louches.

Je pousse un petit soupir d’aise. Je suis content de moi ; si j’étais devant mon armoire à glace je me le dirais…

En ce moment, le coffre est béant. Et Héléna possède le plus balaise des condés puisqu’elle a les matuches au train. Bravo ! J’ai hâte de la connaître cette souris. J’aime m’occuper des dégourdies de son format…

En somme je suis glandibus d’attendre davantage. Il ne se passera rien. Simplement, il serait préférable que le coffre ne demeure pas trop longtemps ouvert. Les documents secrets c’est comme la bidoche ; faut pas qu’ils restent exposés à l’air.

J’interpelle mon chauffeur, lequel commence à somnoler.

— Hé ! Durand !

— Je m’appelle pas Durand, bougonne-t-il.

— Comment veux-tu que je le sache ! je lui fais ; je vais te charger d’une mission de confiance…

Il se rengorge.

— Tu vas sonner à la grille du 64. Tu diras au gardien qui vraisemblablement viendra t’ouvrir que, passant devant la cambuse tu as cru distinguer brièvement comme une sonnerie d’alarme.

— Oui, et puis ?

— Et puis tu reviendras et nous irons ailleurs…

Il est déçu. Il croit que je m’offre sa physionomie ; ce qui est partiellement exact. Néanmoins il fait ce que je lui dis. De la sorte le gardien ira vérifier le dispositif d’alarme et il s’apercevra que le coffre est ouvert.

Le chauffeur revient.

— C’est fait.

— Qu’est-ce qu’il a dit le gardien ?

— Rien. Il s’est taillé en courant comme s’il voulait battre le record du monde.

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