Frédéric Dard - Votez Bérurier

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Votez Bérurier: краткое содержание, описание и аннотация

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Par autorisations spéciales du Préfet de Seine-et-Eure et du garde champêtre de Bellecombe, nous reproduisons fidèlement la plus étrange affiche électorale jamais placardée : Bellecombais, Bellecombaises !
On n'est pas ce que vous croyez !
La preuve, c'est que moi, Bérurier Alexandre-Benoît, inspecteur principal, je lance un défi à l'assassin de Bellecombe en me présentant à vos suffrages ! S'il veut m'empêcher de candider, qu'il y vienne !
La politique je m'ai toujours assis dessus, et sans coussins ! C'est pourquoi je me présente sous un parti nouveau dont moi et l'ex-adjudant Paul Morbleut, mon adjoint, on est les fondateurs et les membres virils : le P.A.F. (Parti Amélioré Français).
Ce soir, dans la salle des réunions, on vous définira notre programme.
Venez nombreux, l'assassin y compris ! Et surtout :
Votez BERURIER !!!

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— La porte de la salle de bains est à gauche de l'armoire ! m'avertit dame Monféal.

Je l'ouvre. La salle de baths is blanche et noire. C'est le côté téméraire des locataires ! Ils se sont payés de l'avant-gardisme dans l'endroit le plus discret de leur appartement. Les poignées de lourde représentent des oiseaux ; c'est vous dire s'ils sont allés loin dans le culot ! Ça fait frissonner, non ?

Je m'avance. Au premier regard, je m'aperçois que le fenestron de la salle de bains est garni de barreaux, et puis l'appartement se situe au second étage !

La robinetterie de la baignoire se trouve à l'opposé de la porte d'entrée, si bien que lorsqu'on fait trempette on tourne fatalement le dos à la lourde.

— Sa pauvre tête était renversée en arrière, sa gorge était ouverte et il y avait du sang partout ! Dire qu'on le tuait à deux pas de nous ! Les enfants jouaient… Maman raccommodait… Je…

Elle pleure.

— Où se trouvait le rasoir ?

Elle me désigne le lavabo.

— Là-dedans. On pense que le meurtrier s'est lavé les mains avant de fuir.

Combien d'issues à l'appartement ?

— Une seule !

— Donc, au moment du meurtre, vous vous trouviez avec la bonne dans la cuisine ?

— Oui.

— Votre mère raccommodait dans sa chambre ?

— Non ; dans celle des enfants, elle est plus claire.

Je retourne dans celle des Monféal. Je m'approche de la croisée.

— Elle était fermée, me dit la veuve. Et de plus, le meurtrier n'aurait pu sortir par là ; elle donne sur la place et hier c'était jour de marché !

— En conclusion, fais-je, plus pour moi que pour elle, l'assassin devait avoir la clé de votre appartement. Il s'y est caché. Il a attendu que votre mari soit dans la salle de bains pour l'égorger, puis il est parvenu à repartir sans être vu. Dites-moi, il a pris des risques terribles ! Car, enfin, avec vous tous qui vaquiez à vos occupations, il s'en fallait d'un cheveu qu'il soit aperçu !

— C'est inouï, murmure-t-elle. Cela tient de la magie ! Un peu comme chez Martinet-Fauceau, je crois ?

— C'est pareil, il n'y a que l'arme du crime qui ait changé !

Je réfléchis un instant. Cet appartement paraît si quiet, si sûr… Et puis, la mort… la mort hideuse et mystérieuse.

— Vous avez encore besoin de renseignements ?

— Non, madame…

Je la regarde. Le noir va bien lui aller. Pour peu qu'elle mette aussi des bas noirs, je suis partant pour régler la succession de son mari ! Vous allez dire que je suis un poil nécrophalique sur les bords, mais je dis ce que je pense !

— Oh ! Si ! sursauté-je ; le nom et l'adresse du secrétaire venu apporter les documents en question !

— Jean-Louis Bécollomb. Il travaille rue des Deux-Eglises : la droguerie générale…

— Merci, madame, et toutes mes condoléances. Je prends congé et je mets le cap sur la rue des Deux-Eglises. Lorsque je tourne le coin de la Street je réalise soudain que j'ai oublié le Gros dans le salon de Mme Monféal. Bast, il rejoindra sa base par les moyens du bord, ce gros sac à vin !

CHAPITRE VII

La Droguerie générale est située dans une artère étroite qui sent l'eau bénite. C'est un boyau, plutôt, qui sépare deux églises dont l'une est désaffectée et l'autre désinfectée. Comme l'une est plus petite que l'autre, on a complété ce bout de rue sans soleil par la Droguerie générale. Il faut grimper trois marches pour accéder, au magasin obscur. Des gens furtifs, en blouse grise, s'agitent silencieusement dans un vaste local. L'enseigne représente une tête de cerf. Etant donnée la raison sociale du magasin, on se demande à quoi elle rime. Peut-être après tout est-ce l'emblème du patron ?

J'entre et je demande après M. Bécollomb. Une dame à cheveux blancs, enfermée dans la caisse, me désigne un grand type habillé de maigre, portant sous sa blouse grise une chemise blanche et une cravate noire ; plus, je pense, un pantalon mais comme la blouse lui tombe sur les radis, je ne saurais l'affirmer catégoriquement. Dans mon genre, je suis comme saint Thomas : je ne crois que ce que je vois.

Le zig a une bouille pareille à un croissant de lune, avec par en haut trois centimètres de cheveux coupés en brosse, et par en bas un petit pinceau de poils roussâtres.

— Monsieur Bécollomb ?

— En personne ! répond-il d'une voix qui fait penser à un moulin à légumes râpant des carottes.

(Si peu, me dis-je avec ce sens critique que vous me connaissez bien et qui me permet de situer mes contemporains au premier coup d'œil).

— Commissaire San-Antonio.

Il fronce l'emplacement de ses sourcils, car j'ai omis de vous signaler qu'il n’en possède pas.

— Ah ! Bon ?

— Vous n'avez vu aucun policier depuis l'assassinat de M. Monféal ?

— Non.

On a bien fait de remplacer Conrouge !

— Vous avez rendu visite hier matin aux Monféal ?

— Oui.

Il a les joues creuses et un long nez qui plonge tout droit dans sa lèvre inférieure en forme de bénitier.

Les collègues et les patrons du Bécollomb nous zieutent à la dérobée, de derrière les comptoirs. Ils se demandent ce qui se passe.

— Quelle heure était-il ?

— C'était quelques minutes avant huit heures et demie.

Et d'expliquer :

— Mon service au magasin commence à huit heures et demie.

— Vous avez vu Monféal ?

— Non, il était dans son bain, m'a dit sa camériste.

— En somme, vous n'avez vu que la bonniche ?

Il pince ses narines, ce qui est un exploit vu que les ailes de son nez sont déjà collées.

— Oui.

— Vous lui avez remis des documents ?

— Oui.

— De quel genre ?

— Ils concernaient la campagne électorale, fait sèchement le marchand de naphtaline.

— Vous êtes-vous attardé au domicile de votre candidat ?

— Absolument pas. Cette visite n'a duré qu'une minute, d'ailleurs j'étais pressé.

— Vous n'avez vu personne chez Monféal ?

— Uniquement la camériste.

— Et dans l'escalier ?

— La concierge, en bas, qui lavait le couloir…

— C'est tout ?

— C'est tout !

— La section de votre groupement pense présenter un nouveau candidat ?

— Aucune décision n'a encore été prise, mais je pense qu'elle le fera. Il n'y a aucune raison pour qu'elle ne le fasse pas. Les agissements d'un fou ne doivent pas compromettre la stabilité du…

Je suis déjà dehors. J'éternue à douze reprises car je dois être allergique à l'un des produits de la Droguerie générale, à moins que ce ne soit à Jean-Louis Bécollomb ?

Il est dix plombes. Le temps s'est rebecté pendant mes petites visites et un timide soleil rôdaille au-dessus des clochers.

J'avise un petit bistrot, tout ce qu'il y a de sympa. C'est le café de province, avec de vieux guéridons de marbre, des boiseries encaustiquées et un comptoir d'étain. Voilà que je me mets à jouer les Maigret, à c't'heure. J'entre et je commande un grand noir. Le patron me le sert lui-même. Il porte sa chemise de nuit sous son gilet de laine et il a une casquette.

Je touille mon caoua tout en faisant le bilan de la situation. Deux candidats députés d'opinions nettement opposées ont été tués à leur domicile dans des circonstances extrêmement mystérieuses. Le meurtrier a agi avec une audace inouïe dans les deux cas. Et dans les deux cas, il a bénéficié d'un fabuleux concours de circonstances qui lui ont permis d'évoluer chez les victimes, alors qu'elles n'étaient pas seules chez elles, sans être vu. Je m'offre pourtant un doute en ce qui concerne le premier meurtre, car la disparition du jardinier me donne à croire qu'il a vu quelque chose…

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