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Frédéric Dard: San-Antonio chez les Mac

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Frédéric Dard San-Antonio chez les Mac

San-Antonio chez les Mac: краткое содержание, описание и аннотация

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Connaissez-vous Stinginess Castle ? Au fin fond des Highlands, en Ecosse, ce château se dresse sur une colline dans les brumes britanniques. Un nouveau fantôme le hante depuis quelques temps. Et un fantôme de poids ! Il a pour nom BERURIER ! Et si vous saviez ce que le Gros et votre valeureux San-Antonio magouillent dans ce château de cauchemar, vous en auriez la chair de poule. Un renseignement : si vous entendez un craquement dans la pièce d'à côté pendant que vous lisez ce chef-d'œuvre, ne cherchez pas, c'est le fantôme de quelque Mac !

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San-Antonio

San-Antonio chez les Mac

À mon cher Marc PERRY, cette prose en forme de cornemuse, en affectueux hommage.

S.A.

CHAPITRE PREMIER

Dans lequel il est question de ce que vous savez… puis de ce que vous ne savez pas

— C’est gentil chez vous, assure ma dernière conquête en franchissant le seuil de notre pavillon. « »

Une fille tout ce qu’il y a de bien : grande, avec juste ce qu’il faut de moustache pour vous donner à penser que. Elle possède des yeux admirables, pris séparément (le gauche ne perd pas de vue la ligne bleue des Vosges, et le droit surveille attentivement les fluctuations de la marée à Brest). Une chevelure façon sirène, des formes qui transforment la main de l’homme en louche à potage, et une bouche tellement sensuelle qu’en l’apercevant, son tube de rouge à lèvres sort tout seul de son étui, vous mordez le topo ?

Elle s’appelle Irène, ce qui est son droit et elle a cinq ans de moins que moi, ce qui est son devoir puisqu’elle est née cinq ans après l’illustre San-Antonio.

J’ai rencontré ce sujet dans le train, ce qui est de bon augure, alors que je rentrais de Dordogne.

Félicie. ma brave femme de mère et moi-même, son fils unique et préféré, étions allés passer une quinzaine chez tatan Rose, la demi-sœur à m’man dont le mari (Alphonse) est garde-chasse là-bas.

En fait nous devions y séjourner un mois ; mais j’en avais eu vite classe de la « Verte douceur des soirs sur la Dordogne ». Moi, la chlorophylle, je ne la tolère que dans mon tube de Gibbs et encore, par petites quantités ! D’autant plus qu’il est un peu casse-bonbons, Alphonse. Ses exploits de 14–18, y en a plein les « Illustrations » empilées dans notre grenier. Poincaré qui lui touche la paluche ; Joffre qui lui cloque la croix de guerre avec félicitations du jury ; sa blessure au mollet et l’infirmière de l’hôpital de Chalon-sur-Saône qui lui jouait « Avec quoi soulèves-tu l’édredon » au trombone à coulisse ou à la clarinette baveuse, ça fait des lustres et des lustres (comme dit un de mes amis qui est dans le luminaire) que j’entends ça, avec les mêmes détails, le même vocabulaire, les mêmes clins d’yeux… Ça devenait franchement intenable, surtout qu’il flottait en Dordogne autant qu’à Londres. Alphonse sous la pluie, c’est l’enfer. Alors un matin j’ai passé un coup de grelot à Bérurier en lui demandant de me coller dare-dare un télégramme me rappelant à Paname pour une enquête. Je crois que Félicie n’a pas été dupe. M’man, pour la repasser, faut se lever matin et ne pas oublier d’allumer ses antibrouillards. Mais elle a fait comme si tout était normal, et elle a joint ses regrets à ceux de Rose et d’Alphonse.

Dans le train qui me ramenait à Pantruche, j’étais heureux comme un collégien. Les vraies vacances commençaient seulement. Y avait Irène dans mon compartiment, l’air sérieux, le maintien réservé. C’était pas Sophia Loren, mais je me suis amusé à lui faire du rentre dedans. Après quinze jours d’inaction dans le secteur calbar, j’aurais fait du gringue à une chèvre déguisée en cheftaine-scout. Pendant deux cents kilomètres, je m’étais heurté à sa réserve (avec mise en bouteille au château), et puis, au wagon-restaurant, je m’étais assis à ses côtés et le maître d’hôtel avait eu la bonne idée de lui filer une saucière de béarnaise sur le corsage.

Rien de tel que la béarnaise pour mettre du liant dans des relations. J’avais pris l’initiative des opérations : ma serviette, la carafe d’eau, l’engueulade-maison au maladroit ! Si vous m’aviez vu, Mesdames, vous ne voudriez jamais plus consommer de béarnaise sans m’avoir à vos côtés.

La glace était rompue. Je lui avais proposé de mon vin et elle m’avait fait goûter du sien ! Après le dessert, alors que tant d’autres circulent en couronne, Je lui avais fait accepter un Cointreau. Bref, en regagnant notre compartiment, et comme le train avait la bonne idée d’emprunter un tunnel, je lui avais roulé ma galoche-fantôme façon croisière dans le soufflet unissant deux wagons. C’était la première fois qu’on lui faisait ça dans un accordéon. Le côté musette et ferroviaire de la chose ne lui avait pas déplu. À cause d’un malencontreux cahot du rail, j’avais raté son amygdale gauche, mais elle ne m’en avait pas tenu rigueur, d’autant plus que pour me faire pardonner j’avais pratiqué sur sa personne un massage express assez complet, qui, partant de son hémisphère boréal s’était achevé dans son hémisphère austral. Bref, lorsque le dur s’était enfin dégagé du tunnel, nous nous étions retrouvés coincés entre la portière du wagon et la bedaine d’un colonel de carrière dont Irène, dans l’obscurité de l’action, pressait frénétiquement le stick en l’appelant chéri.

C’était la première fois qu’elle venait à Paris et elle augurait bien du voyage. Comme personne ne l’attendait et qu’elle ne savait où aller coucher, comme il était très tard et que notre pavillon était vide, je lui avais proposé de l’héberger et, après quelques minauderies de bon thon, comme disent les morues, elle avait fini par accepter.

— C’est vraiment très gentil, renchérit-elle. Vous êtes dans l’industrie ?

— Presque, fais-je sans me mouiller.

Je la drive jusqu’au premier, entièrement refait à neuf depuis notre commencement d’incendie [1] Cf. : DE « A » JUSQU’À « Z ». , et j’ouvre la porte de ma chambre.

— Vous allez coucher ici ! dis-je.

— Et vous ? s’inquiète Irène.

— Moi aussi, assuré-je sans sourciller.

Elle roucoule :

— Ce n’est pas raisonnable.

— Pourquoi ! m’insurgé-je : il y a l’eau chaude et un matelas Simmons.

Miss Province me gazouille un rire d’opéra comique. C’est à ce moment précis qu’il se produit un fait anodin en apparence : le bigophone se met à carillonner. Vu l’heure avancée (minuit vingt-cinq vient de sonner au beffroi de la mairie) cet appel ne laisse pas que de m’inquiéter.

— Vous ne répondez pas ? s’étonne Irène.

C’est la question que je suis précisément en train de me poser avec accusé de réception.

Qui peut-ce être ?

M’man ? Le Vieux ? Un pote ? Un farceur ?

Je décide que c’est M’man qui veut s’assurer que j’ai fait bon voyage et je vais décrocher. Manque de bol, c’est le Vioque.

— Dieu soit loué ! crie-t-il dans sa passoire d’ébonite [2] Expression pittoresque pour qualifier le téléphone lorsqu’on veut éviter une répétition. .

Très entre nous, je n’ai pour ma part guère envie de louer le Seigneur.

Si je m’écoutais, Je courrais porter l’appareil bigophonique dans la boîte à ordures et je reprendrais l’entretien captivant avec Irène. Seulement, moi, vous me connaissez ? Le devoir avant tout. Au lieu d’écouter mes bas instincts, j’écoute mon boss et comme je n’ai pas de la cire à cacheter dans les étiquettes, ça donne ceci :

— Je vous ai appelé à tout hasard, bien que vous sachant en vacances, mon cher San-Antonio, car il vient de se produire quelque chose de très exceptionnel chez un de mes amis, M. Petit-Littré, l’éditeur bien connu. Figurez-vous qu’il donnait une soirée en son hôtel de Neuilly lorsque brusquement, les deux tiers de ses invités se sont trouvés incommodés.

— La langouste n’était pas fraîche ? suggéré-je avec l’amertume que vous devinez si vous n’êtes pas trop lézardés du plafond.

Ça n’amuse pas le Tondu.

— C’est beaucoup plus important qu’une indisposition alimentaire, mon bon. Petit-Littré est une des rares personnes de la soirée à ne pas ressentir les symptômes en question. Affolé, ce brave ami m’a appelé : jugez de son embarras !

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