Frédéric Dard - Champagne pour tout le monde !

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Champagne pour tout le monde !: краткое содержание, описание и аннотация

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Je vais te dire…
Moi, quand je prête mon aimable concours à une gourgandine pour l'aider à perpétrer un vol et que ma carrière de flic d'élite ne sombre pas dans l'aventure.
Quand les bombes m'éclatent sous les claouis sans me causer la moindre égratignure.
Quand je suis expédié à perpète au fond d'un puits, d'où personne n'est jamais sorti, pas même la vérité, et que j'en remonte frais comme un gardon.
Oui, moi, quand tout ça, plus le reste m'arrive, à la fin de ces délicatesses je respire un grand coup et je m'écrie :
— Champagne pour tout le monde !
A la bonne mienne, les gars !

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Il boit pour lubrifier son conduit à paroles.

— Cause un peu, j’sus un nain terlucoteur valab’, non ?

— Je n’ai pas à dire, je gamberge.

— Gamberge à voix haut’qu’j’profite, au lieu d’cavaler seul.

— A vrai dire, je cherche une logique à tout ça.

Le Mastard déclare alors une chose qui va me valoir les foudres de ces gentilles connes du « aime ail Elf » :

— Peut pas y avoir d’logique, c’t’une histoire de gonzesses.

Il aspire deux cents mètres de spaghetti, éclaboussant copieusement sa limouille, son costard, et un peu le mien de pomodoro.

— Essayons cependant d’en trouver une.

— Comment-ce ?

— En récapitulant et en interprétant les faits.

Béru opine avec énergie. Il crie au loufiat de lui ramener une « excalope » milanaise, mais de veiller à ce qu’elle soit moins mince que la précédente, sinon il ira causer au chef après l’avoir assis dans son bac à friture.

— Attaque, gars, je j’ouïe à pleines portugaises.

— Corvonero, industriel versé dans les produits chimiques, connaît le démon de la cinquantaine sous les traits d’une pétasse folle de son corps qui se met à l’éponger de fond en comble. Pour s’en sortir et ramasser le blé qu’elle lui briffe, il accepte de traiter de la drogue dans ses labos. Il planque certains papiers relatifs à ce trafic dans une cache ménagée dans sa voiture. La futée Letizia apprend la chose…

— Stop ! dit le Gros, j’peux poser une question à cent balles ?

— Bien sûr.

— Elle a appris ça comment ? Tu croyes qu’ c’est Momo qui y aurait bonni ?

— Très bonne question, je la note en réserve. Donc, sachant cela, Letizia se met en cheville av’c une potesse pour faire engourdir les fafs compromettants et ainsi avoir barre sur l’amant. L’amie en question se nomme Antonella Mariani. Nous ne savons rien d’elle sinon qu’elle paraissait exister seule dans un luxueux appartement. Mon flair me pousse à croire qu’elle y vivait de ses charmes.

— Une pute ?

— Pas la tapineuse classique, plutôt la belle qui marne sur rendez-vous pour une quelconque Madame Claude romaine. Ayant réussi à piquer les papiers…

— C’est à c’t’endroit qu’tu dois toussoter et r’garder alieurs, ricane l’Imbécile Heureux.

Je reprends, sans broncher :

— Ayant réussi à piquer les papiers, la môme parle de la chose à une troisième personne. Peut-être a-t-elle décidé de faire cracher le professeur Corvonero sans Letizia et s’assure-t-elle d’un concours plus musclé, ne s’estimant pas de taille pour mener à bien d’aussi délicates tractations.

— Tu me la sors bonne, assure ce fin lettré, c’t’un plaisir d’t’entendre éjaculer ta pensée. Bien, je présume : la garnemente affranchit donc un pote, le gonzier veut alors opérer pour son compte et engourdit les papelards après avoir effacé la gamine. Dans ton conte d’Noël, tout l’monde enviande tout l’monde : Letizia arnaque son vieux, Antonella arnaque Letizia, et M. « X » (il prononce isque) baise Antonella d’première.

Content de m’avoir brûlé la fin, il se remplit l’assiette puis la panse, tout ici-bas n’étant que question de transfert après de brefs séjours.

— Tu n’trouves pas qu’ça fait un peu beaucoup, l’Artiss ? J’sais bien qu’on a affaire à des genss qui n’font pas leur première communion c’ t’année, mais c’t’un peu sismographique, le principe. En tout cas, faut qu’on va mettre la pogne sur ce m’sieur X.

Je soupire profondément.

— M’étonnerait que nous le dégauchissions dans un musée. A force de bricoler les six chiffres du numéro mystérieux, nous sommes arrivés à en former un qui correspond à la réalité, mais je doute que ce soit le bon.

Moins pessimiste que ma pomme, il branle ce que tu sais.

— On risquera rien à vérifier, objecte-t-il.

— J’ai une propose à t’faire, mec ; pour peu que tu ne mettes pas cent trente ans à dévorer ton carré d’agneau-de-Dieu-qui-efface-les-péchés-du-monde.

— Elle est acceptée d’avance, Monseigneur.

— Ce soir, la mère Letizia soupe en ville. On pourrait aller couler un œil dans sa carrée, non ?

* * *

Les Italiens, tout comme nous, n’ont pas de pétrole, mais ils ont du marbre. Je t’ajouterai pas que chez eux, ce n’est pas un cas rare, mais j’ai dû te le fignoler une bonne douzaine de fois dans des œuvres préposthumes et tu me taxerais de rabâchage à moi (comme disent les pieds-noirs) qui me renouvelle constamment au point que je ne me reconnais jamais dans ma glace d’un jour sur l’autre.

L’immeuble luxueux de la maîtresse à Momo ressemble à une carrière. Mes aînés n’y étant plus, j’y entre délibérément. C’est ancien, mais fastueux, avec un escadrin magistral, des lanternes circulaires d’un diamètre impressionnant, des portes dont la plus petite possède les dimensions de la porte Saint-Denis (ça, c’est vrai, ça !). Elle bivouaque au premier, la chérie. Elle possède l’étage entier. Ça s’envole, ces petites péteuses lorsque ça a mis le frifri sur un pigeon huppé. Je sonne, selon les règles du parfait fricfraqueur, tout en me disant que trois visites illégales dans une même journée, ça commence à faire pas mal et que si je contracte cette marotte, je vais bientôt effractionner celles du Colisée.

On ne répond pas. Donc j’ouvre.

Je ne vais pas tomber dans l’immobilier en te proposant un descriptif détaillé, comme t’es pas acheteur, inutile de procéder à un état des lieux.

Que je t’annonce simplement du cossussimo : tapis, meubles rares, tableaux, grelingrelin combien ai-je de cailloux dans ma main ; tchlaof !

Le temps qu’on s’imprègne de la majesté ambiante, de tout le tralalalalère tsoin-tsoin : et de l’opaline par-ci, de l’entre-deux-Sèvres par-là, moire, soie sauvage, velours, chieries de grand prix, lambrequins de mes fesses, pendillons, Louis XV italoche : le pire. Oui, le temps qu’on, et voilà qu’une lourde s’ouvre au fond du couloir et qu’un gonzman surgit. Un Asiatique fringué valet de chambre : futal noir, veste blanche. Devait être aux chiches lorsque nous avons sonné, l’apôtre, ou bien en train de se taper une plume devant la photo de Madame Butterfly (pas la mère : la fille).

Le plus indicible c’est qu’il ne semble pas effaré le moins par notre venue un temps pestive. Il nous marche contre, de son pas feutré et papelard, le regard en code, avec les pommettes qui haussent les épaules. Parvenu à faible encablure de nos rivages, il s’incline.

Instant louftingue. On est là à le mater à l’emplacement des yeux, lui attend on ne sait quoi ni qui. Quelques secondes mettent un peu d’ordre dans nos esprits en déroute. Et puis il finit par articuler dans un très mauvais italien :

— Mademoiselle n’est pas là ?

Pour lors, il y a début de surprise dans son intonation. De prime abord, il a cru que nous étions introduits par sa maîtresse (laquelle est également celle de Corvonero, je te le confirme à toute volée).

— Elle nous a priés de monter et nous a donné les clés pendant qu’elle s’attarde un peu avec le professeur.

J’ai dit négligemment. Mais enfin, ça reste foireux malgré mon ton enjoué. Le Jaunet ne se démonte pas.

— Vous pouvez me montrer les clés, s’il vous plaît ?

Pas folle la guêpe !

Je me tourne vers le Gros.

— Tu veux bien montrer les clés à monsieur, Alexandre-Benoît ?

— Mais certainely, dit Son Importance, avec beaucoup de parfaitement.

Et de t’aligner une pêche (ou un litchi) au menton du petit valet qui le décolle du tapis pour l’expédier dans des matins calmes.

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