Agnès Martin-Lugand - La vie est facile, ne t'inquiète pas

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La vie est facile, ne t'inquiète pas: краткое содержание, описание и аннотация

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« Alors que j’étais inconsolable, il m’avait mise sur le chemin du deuil de mon mari. J’avais fini par me sentir libérée de lui aussi. J’étais prête à m’ouvrir aux autres. » Depuis son retour d’Irlande, Diane a tourné la page sur son histoire tumultueuse avec Edward, bien décidée à reconstruire sa vie à Paris. Avec l’aide de son ami Félix, elle s’est lancée à corps perdu dans la reprise en main de son café littéraire. C’est là, aux
son havre de paix, qu’elle rencontre Olivier. Il est gentil, attentionné et surtout il comprend son refus d’être mère à nouveau. Car Diane sait qu’elle ne se remettra jamais de la perte de sa fille.
Pourtant, un événement inattendu va venir tout bouleverser : les certitudes de Diane quant à ses choix, pour lesquels elle a tant bataillé, vont s’effondrer les unes après les autres.
Aura-t-elle le courage d’accepter un autre chemin ?
Agnès Martin-Lugand est l’auteur des best-sellers
et
. Le premier s’est vendu à plus de 300 000 exemplaires en France et sera bientôt adapté au cinéma.
en est la suite.

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— Tu es parfait, maintenant.

Il me prit par la taille, colla son visage sur mon ventre, et me serra fort. Ma respiration se coupa, je regardai en l’air et restai les bras ballants. Brusquement, il me lâcha et partit jouer avec ses voitures en riant, en se racontant des histoires, ragaillardi par une nouvelle joie de vivre.

— Je te laisse cinq minutes, je vais fumer une cigarette dehors.

— Comme papa, me répondit-il, sans plus se soucier de moi.

Je dévalai l’escalier, attrapai mes clopes et sortis sur la terrasse. En fumant, je téléphonai à Olivier.

— Je suis contente de t’entendre, lui dis-je sitôt qu’il décrocha.

— Moi aussi, tu vas bien ? Tu as une petite voix.

— Non, non, je t’assure, tout va bien.

Inutile de l’inquiéter en lui expliquant ce que je faisais.

— Parle-moi de toi, des Gens, de Paris, de Félix.

Il s’exécuta avec entrain. Petit à petit, il me ramenait chez moi, dans ma vie. Il m’éloignait de mes démons, en m’offrant une bouffée d’oxygène. Les Gens me manquaient, la stabilité émotionnelle qu’ils m’avaient apportée. La douceur d’Olivier, sa simplicité apaisante… Ce répit fut de courte durée ; Declan venait d’arriver dans le séjour, et me cherchait, visiblement anxieux.

— Je te rappelle demain.

— J’ai hâte que tu rentres, Diane.

— Moi aussi. Je t’embrasse fort.

Je retournai à l’intérieur. Declan m’envoya un sourire soulagé.

— Je peux regarder la télé s’il te plaît ?

— Si tu veux.

— Il rentre quand, papa ?

— Je ne sais pas. Tu veux lui téléphoner ?

— Non !

— Si tu as envie de le faire, il ne faut pas avoir peur. Ton papa peut comprendre…

— Non, je veux la télé.

Il se débrouilla comme un chef pour lancer ses dessins animés. Vu l’heure, je décidai de lui préparer à dîner. Je cuisinai au son de ses éclats de rire, avec Postman Pat à mes pieds qui attendait que ça tombe dans sa gueule. Lorsque je me surprenais à sourire, je me répétais que ce n’était pas moi qui faisais tout ça.

Trois quarts d’heure plus tard, nous avions fini de manger — j’avais accompagné Declan —, la vaisselle était faite, il n’était pas loin de 21 heures, et toujours aucun signe de vie d’Edward. Declan était sur le canapé, devant les dessins animés.

— Il va falloir aller au lit, lui annonçai-je.

Il se ratatina.

— Ah…

Il s’extirpa des coussins, éteignit la télévision docilement. Toute joie de vivre avait quitté son visage, il semblait se recroqueviller sur lui-même.

— Je t’accompagne dans ta chambre.

Il hocha la tête. Une fois à l’étage, il alla se brosser les dents sans que j’aie à lui demander de le faire. J’allumai une veilleuse sur sa table de nuit et retapai sa couette. Quand il arriva, il se mit à quatre pattes, et explora le dessous de son lit ; il en ressortit avec une grande écharpe à la main. Il n’était pas difficile de deviner à qui elle avait appartenu. Puis il se coucha.

— Je laisse la lumière allumée ?

— Oui, me répondit-il, d’une toute petite voix.

— Dors bien.

Je n’eus pas le temps de faire deux pas avant d’entendre les premiers sanglots.

— Reste avec moi.

Juste ce qui me terrorisait. Je commençai par me mettre à genoux près de sa tête, il la sortit de la couette, défiguré par le chagrin, ses grands yeux pleins de larmes, comme sidéré par le manque et la douleur, l’écharpe de sa mère contre lui. Doucement, j’approchai ma main, je la fixai pour mesurer la portée de mon geste ; je la passai dans ses cheveux. À mon contact, il ferma brièvement les yeux, puis les rouvrit, m’implorant de faire quelque chose pour atténuer sa souffrance. Je me posai une question. Une seule. Une question interdite : qu’aurais-je fait si ç’avait été Clara ? Par la pensée, je suppliai ma fille de me pardonner cette trahison, c’était avec elle que j’aurais dû faire ça. Faire ce que j’avais refusé avec son petit corps mort, lui dire que tout allait bien se passer, qu’elle irait bien, que je serais toujours là pour elle. Je m’allongeai à côté de Declan et le pris contre moi, respirant son odeur d’enfant. Il se nicha, se frotta à moi, et pleura. Beaucoup, sans interruption. Il appelait sa mère, je murmurais : « Chut, chut, chut… »

Et puis des sons venus de très loin sortirent de ma bouche ; une petite berceuse que je chantais à Clara quand elle faisait un cauchemar. Ma voix ne trembla pas, alors que les larmes coulaient toutes seules sur mes joues. Nous pleurions tous les deux la même perte. Nous étions au même endroit, un gouffre où nous souffrions du manque. Les sanglots de Declan se calmèrent petit à petit.

— Tu es une maman, Diane ? me demanda-t-il en hoquetant.

— Pourquoi dis-tu ça ?

— Parce que tu fais comme ma maman…

Les enfants avaient un sixième sens pour trouver la fêlure. Ce petit garçon me prouvait que mes gestes, mes paroles étaient imprimés, marqués au fer rouge par la maternité, par celle que j’avais été, que je le veuille ou non.

— J’étais maman avant…

— Pourquoi avant ?

— Ma fille, Clara… elle est partie comme ta maman.

— Tu crois qu’elles sont ensemble ?

— Peut-être.

— Maman, elle est gentille avec elle, t’inquiète pas.

Je le serrai contre moi, et le berçai en pleurant silencieusement.

— Je peux encore avoir la chanson ?

Je rechantai. Sa respiration s’apaisa.

Une heure passa avant que j’entende la porte d’entrée s’ouvrir. Edward m’appela, je ne lui répondis pas, de crainte de réveiller Declan que je n’avais pas lâché une seule seconde. Edward monta quatre à quatre l’escalier, et se figea sur le seuil de la chambre de son fils. Il prit appui au chambranle de la porte, serra les poings, leva les yeux au ciel, cherchant certainement à échapper à cette scène. Lui aussi souffrait de la situation. Je compris l’utilité du fauteuil dans la chambre, il devait passer ses nuits, là, à le veiller. Du regard, je lui intimai l’ordre de se taire. Dans son sommeil, Declan lutta légèrement lorsque je me détachai de lui. Je calai au plus près de son visage l’écharpe de sa mère, et me retins de déposer un baiser sur son front. J’en avais fait assez. Je passai devant Edward, hagarde. Il me suivit jusqu’au rez-de-chaussée. J’enfilai mon blouson et ouvris la porte d’entrée. Je lui tournais le dos quand il se décida à parler.

— Je suis désolé d’être rentré si tard. J’aurais voulu t’épargner ça.

— Il faut que je m’en aille.

— Merci pour Declan.

Toujours sans lui faire face, je balayai ses remerciements d’un mouvement de la main.

— Diane, regarde-moi.

— Non.

Il m’attrapa délicatement par le bras, me retourna et me découvrit, ravagée par les larmes.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? Que t’arrive-t-il ?

Il allait prendre mon visage entre ses grandes mains quand je me dégageai vivement.

— Ne me touche pas s’il te plaît… Rien, il ne s’est rien passé. Declan a été adorable.

Je courus jusqu’à ma voiture et roulai à toute vitesse vers chez Abby et Jack. Je restai de longues minutes effondrée sur mon volant. Les enfants apportaient trop de souffrance, trop de chagrin, vivants comme morts. La douleur de Declan m’était insupportable, j’aurais tant voulu l’aider, mais c’était au-dessus de mes forces, et je refusais de trahir Clara. Elle allait croire que je l’abandonnais encore une fois. Je l’avais abandonnée en la laissant partir en voiture, je l’avais abandonnée en n’allant pas lui dire au revoir, je ne pouvais pas l’abandonner en jouant à ça avec Declan ou n’importe quel enfant. Je n’en avais pas le droit.

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