Jean-Marie Le Clézio - Tempête. Deux novellas

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Tempête. Deux novellas: краткое содержание, описание и аннотация

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En anglais, on appelle « novella » une longue nouvelle qui unit les lieux, l'action et le ton. Le modèle parfait serait Joseph Conrad. De ces deux novellas, l'une se déroule sur l'île d'Udo, dans la mer du Japon, que les Coréens nomment la mer de l'Est, la seconde à Paris, et dans quelques autres endroits. Elles sont contemporaines.
J. M. G. Le Clézio

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Un vieux Mauritanien vêtu d’une houppelande même en été lisait son livre, puis il récitait des hadiths, en arabe d’abord, puis en français, très lentement, sans fautes :

« L’individu doit faire l’aumône sur chacune de ses articulations, chaque jour où le soleil se lève. Être équitable entre deux personnes est une aumône, aider quelqu’un à enfourcher sa monture ou l’aider à hisser son chargement est une aumône, une parole douce est une aumône, et chaque pas que tu fais pour aller prier est une aumône, et libérer la route de tout obstacle est aussi une aumône. »

Je ne comprenais pas bien le sens de ses paroles, mais elles m’apportaient la paix.

Un jour, il m’a regardée et il m’a dit : « Adore Dieu comme si tu le voyais, car si toi tu ne le vois pas, lui te voit. »

Mais ce n’est pas Dieu que je cherche, avais-je envie de lui dire. C’est ma mère. Celle qui m’a créée, qui m’a nourrie de son sang, de son lait, celle qui m’a portée et m’a lancée dans le monde. Est-ce que le reste m’importe ? Qu’il y ait des guerres ou des famines, des crimes et des révolutions, est-ce que c’est mon affaire ? Ça serait plutôt celle de ton Dieu qui voit tout.

Hakim King parle sans cesse de ci ou de ça dans le monde, il écoute la radio, il regarde la télé et il s’indigne. Le massacre des innocents à Beyrouth, à Djenin, les attentats suicides, les bombardements en Irak, à Gaza, en Afrique. Lui, il a le loisir d’en parler, à l’aise dans son appart, avec ses potes et ses assistants, avec sa paie de travailleur social à Malraux, son autorité. Son foutu théâtre. Lui, il est du bon côté. Lui, il a toujours eu sa mère. Un jour il m’a présentée à elle, dans une banlieue près de Melun, il a frappé à la porte de son appartement et elle est venue ouvrir, une petite vieille fripée et voûtée, vêtue d’un caftan brodé, les mains et le front tatoués en bleu. Elle ne parlait pas bien le français, et lui émaillait ses phrases de mots arabes, elle nous a servi du thé sucré et des dattes sèches, et quand nous sommes partis, Hakim a embrassé sa tête.

J’ai sonné chez le docteur Lartéguy. Je m’attendais à voir Chenaz, mais c’est une jeune fille qui a ouvert. Elle m’a fait remplir un questionnaire. Je ne trichais pas, j’avais mal à presque toutes mes dents. Oui, c’était la première fois que je consultais. J’ai inventé un nom, Rebecca Kuti, j’étais sûre que le docteur n’avait jamais entendu parler d’afrobeat. Pour l’adresse, j’allais écrire Lagos, Nigeria, mais la petite a secoué la tête : « Une adresse à Paris, non ? » Alors j’ai donné l’adresse de Hakim King.

L’examen a été vraiment rapide. Le docteur a regardé ma bouche, il a baissé son masque et relevé ses lunettes et la sentence est tombée : « Mademoiselle, votre denture est dans un tel état qu’il faudrait des mois de travail pour tout réparer, vous devriez envisager une autre option, moins onéreuse. » Et quelle option ? « Faire arracher toutes les dents malades et les remplacer par une prothèse, ça peut être pris en charge par la sécurité sociale si vous n’en avez pas les moyens. » J’ai failli éclater de rire. Est-ce qu’il dirait la même chose à sa fille adoptive, à la délicieuse enfant qu’il avait fait inscrire à la fac de médecine, pour qu’à vingt-huit ans elle n’ait plus de dents et à leur place un partiel avec des crochets de métal fixés sur les deux dernières molaires ? Sur une feuille de papier à en-tête, le docteur a griffonné le nom d’un dentiste à l’hôpital. Il a refusé de se faire payer. Il était pressé que je parte, avec mon sac à dos et mon bonnet, que je retourne à ma rue, et je n’ai pas eu besoin d’écouter à sa porte pour l’entendre dire au téléphone à sa chérie qu’elle devait faire en sorte que je ne vienne plus jamais lui faire perdre son temps à son cabinet.

J’ai rêvé que je mettais le feu.

Je ne sais pas où, ni comment. Je sais seulement que je sentais la chaleur bienfaisante des flammes, que je voyais la lueur orange dans la nuit.

À Malraux, l’entrée du sous-sol n’est jamais verrouillée. J’imaginais l’intérieur du théâtre, peint en noir, et les couloirs, les photos accrochées aux murs, les accessoires, les toilettes graffitées. Le feu a pris dans les cartons, tout de suite, a mordu un grand drap noir qui servait de décor pour la princesse Badoure. Je respirais l’odeur du tissu brûlé, du plastique fondu. Je dansais devant les flammes. J’entendais le ronflement du feu, comme autrefois quand le jardinier brûlait les palmes dans notre jardin. Une fois l’un des palmiers avait pris feu, et Bibi et moi nous regardions avec une horreur gourmande les rats qui couraient au sommet de l’arbre en poussant des glapissements désespérés. C’était une joie sauvage, devant les flammes quand la nuit tombait, les étincelles se mêlaient aux étoiles. Nous écoutions Yao, il chantonnait tout bas, sa voix grave, pendant qu’il jetait dans le brasier des palmes et des branches de dattes sèches. Il nous semblait un sorcier. Immense, son visage mangé par la syphilis, et les cicatrices sur ses joues qui s’allumaient couleur de sang. Papa est arrivé ensuite, il a ouvert la vanne et il a réussi à éteindre. « Il est fou, il ne doit pas rester. » Madame Badou était hors d’elle, mais papa aimait bien Yao, peut-être qu’il l’enviait d’avoir toutes ces femmes, et Yao est resté.

Dans le sous-sol les flammes tordent les cartons, transforment les bouteilles de plastique en flaques brillantes, les flammes rouges, vertes, orange. Je suis assise par terre, le dos contre le mur, je chantonne dans ma tête les paroles de Yao, pas avec des mots, plutôt des hmm, mmm, wooo, wooo, hmmm !… j’ai ouvert mon sac à dos, je jette des papiers dans le feu, les bulletins de l’école, les lettres, les photos, et puis l’histoire de Hakim King, les feuilles du scénario, je ne serai plus la princesse Badoure déguisée en homme, aucun prince ne me trouvera endormie avec ma blouse ouverte sur ma poitrine, je ne connaîtrai pas l’île d’Ébène. Je jette mon acte de naissance, signé par mon père, et qui certifie que je suis née de mère inconnue, née sous x comme on ne disait pas à l’époque, tout cela part en fumée dans le réduit à poubelles, je dois devenir une autre.

Je suis l’enfant du démon. C’est elle qui le dit, elle, Chenaz Badou, l’autre femme de Derek Badou, la mère d’Abigaïl Badou. C’est pour ça que j’aime le feu. Les flammes dansent dans l’étroite pièce du sous-sol, elles ronflent et fusent, elles éclairent les murs sales d’une belle lueur rouge. Le plastique des poubelles commence à fondre, il coule en bouillonnant sur le sol, je n’ai jamais vu de volcan en éruption mais ça doit ressembler à ça. Je suis l’enfant du viol, l’enfant qui s’est accrochée à l’utérus de la femme qu’on forçait, l’enfant d’une chienne qu’un chien a prise dans une cave d’une maison, à la lumière d’une bougie, sur un matelas à même le sol. Je suis l’enfant de la rage, de la jalousie, de la grimace. L’enfant née du mal, je ne connais pas l’amour, je ne connais que la haine.

J’ai cru que c’était arrivé à cause des paroles que j’avais entendues, là-bas, chez nous à Takoradi, quand j’étais montée à l’étage pour écouter à la porte, la voix de cette femme, qui disait, qui répétait que j’étais l’enfant du démon. J’étais accroupie, je lui soufflais, comme au théâtre je soufflais les mots dans sa bouche, et elle les répétait, d’une voix geignarde et aiguë, comme au théâtre les mots que Hakim me faisait répéter, je suis Badoure, déguisée en homme pour traverser le désert et être plus proche de l’homme que j’aime, qui sera mon amant, mon amour.

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