LA SACRIFIÉE INDÉCISE
Cet ouvrage est une œuvre de fiction. Tous les personnages, lieux, et événements décrits dans cet ouvrage sont fictifs ou utilisés de manière fictive.
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Copyright © 2019, Ines Johnson.
Tous droits réservés.
Première édition aux États-Unis : octobre 2019
Couverture : Jacqueline Sweet Designs
Titre original : The Dragon’s Ambivalent Sacrifice
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sabine Ingrao
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Épilogue
Clac. Crac. Boum.
Le crâne de Béryl bascula violemment en arrière, touchant pratiquement l’espace entre ses omoplates. Sa pomme d’Adam étira l’arche de son cou comme si elle allait en transpercer la peau. La violence du recul enfonça la lèvre de Béryl sur ses incisives. Un grognement s’échappa de sa gorge.
Ce n’était pas un grognement de douleur. Béryl lécha le sang de sa lèvre fendue. Sa bouche s’étira en un sourire, élargissant la coupure et rendant la douleur plus piquante.
Il marcha avec arrogance vers son adversaire. Cette brute faisait la même taille que Béryl et était tout aussi costaud. Le torse massif de Léander était recouvert d’un tapis de duvet blond qui frisait au contact des gouttes de sueur salée s’infiltrant dans ses boucles. Ses énormes pattes avaient presque la même taille que la tête de Béryl. Ces armes se terminaient par des griffes.
Pas de problème. Béryl aussi avait des griffes, et elles étaient tout aussi acérées. La fourrure dorée heurta les écailles vertes lorsque le lion et le dragon entrèrent violemment en contact sur le ring.
Béryl repoussa le lion métamorphe dans le coin. Il l’avait acculé. La foule rassemblée cria des encouragements. Béryl se retourna, levant les bras en l’air pour accepter les acclamations.
La Bérylmania battait son plein dans la foule, ce soir. S’il avait porté un t-shirt jaune, il l’aurait arraché de son torse. Mais le jaune n’était pas sa vraie couleur. En haut, dans la foule, il y avait quelques bandanas vert émeraude arborant son nom écrit en lettres dorées. Les fées agitaient leurs poings en l’air et scandaient son nom et son titre.
Béryl, le Champion poids lourd du Voile.
Dans son coin, son frère Ilia criait des instructions comme, « Vise son genou ! » ou « Ne lui tourne pas le dos ! » ou « Fais attention, ne sois pas trop sûr de toi ! » Que Béryl n’écoutait absolument pas. C’était lui le champion, pas Ilia qui n’avait pas gagné son match contre un méta-loup un peu plus tôt.
Venant de derrière, Béryl sentit une entaille lacérer ses omoplates. Puis un coup lui fut asséné sur le flanc. Il se plia en deux et reçut un rapide coup de pied au visage.
Il vit rouge, puis des étoiles, puis tout fut noir.
Clignant rapidement des yeux, Béryl se remit péniblement sur ses pieds. Il vit deux Ilia secouer la tête, dans le coin. Il vit deux Léander arriver sur lui depuis le coin opposé. Il cligna encore des paupières, et les deux lions se réunirent en un seul féroce prédateur fonçant sur sa proie.
Stupide lionceau. Ne le savait-il pas ? Les dragons étaient au sommet de la chaîne alimentaire dans ces territoires au-delà du Voile. Et Béryl était le plus grand, le plus méchant, le plus féroce dragon de son clan. Le meilleur combattant de tout le Voile. C’était marqué sur sa ceinture de champion tape-à-l’œil.
Ne quittant pas son adversaire des yeux cette fois-ci, Béryl s’accroupit. S’enfonçant sur ses jambes, il attendit l’assaut. Il n’était pas connu pour sa patience ni pour sa ruse, seulement pour sa force brute. Quand il s’agissait de combattre, la stratégie jaillissait tout naturellement dans sa grosse tête d’imbécile.
Quand Léander ne fut plus qu’à deux pas de lui, Béryl déploya les ailes sur son dos et s’élança dans les airs. Les cheveux parfaitement bouclés du lion se soulevèrent, ébouriffés par les puissantes ailes de Béryl lorsqu’elles le transportèrent au-dessus du mâle, puis derrière lui. Béryl donna un rapide coup de pied dans le sacrum de Léander. Le lion rugit en tombant à genoux. À une vitesse reptilienne, Béryl agrippa Léander autour du cou et le maintint dans une clé de soumission. Les superprédateurs n’aimaient pas se laisser intimider. La raison du plus fort était un proverbe qui trouvait son origine chez les métamorphes, pas chez les humains.
Les fées, trolls, et autres métamorphes qui s’étaient rassemblés dans les entrailles du God’s Teet rugirent leur approbation. Tout en haut, dans une section spéciale, se trouvaient les Valkyries. Les dragons étaient peut-être au sommet de la chaîne alimentaire, mais les Valkyries tenaient cette chaîne dans leurs poings manucurés. Ces femmes habillées de cuir étaient les gardiennes de la paix de ce ramassis hétéroclite de créatures contre nature. Contre nature parce que tous les êtres de ce royaume étaient issus d’une fabrication, et non pas d’une évolution comme les plantes et les animaux du monde des humains.
Une nouvelle fois, l’attention de Béryl étant distraite, Léander échappa à sa prise. Le lion rentra le menton et roula du creux du coude de Béryl comme ils avaient vu Hulk Hogan le faire avec André le Géant. Béryl savait que le lutteur préféré de tous les temps de Léander était l’imposant géant. Ils avaient passé suffisamment de temps dans le repaire de Béryl à regarder le match Wrestlemania III. Mais le lion ne se souvenait-il pas de la façon dont le match se terminait ? Parce que sinon, il allait avoir une piqûre de rappel.
— On va s’affronter comme Dieu l’a voulu ; de façon sportive. Sans ruses. Sans armes. Le talent contre le talent.
Béryl leva les yeux au ciel en entendant Léander citer la réplique de son film préféré. La patte géante du lion frappa, touchant l’œil de Béryl. Le dragon de Béryl fut fou de joie. La bête était impatiente de voir la nouvelle cicatrice. Il aimait le sang, il avait besoin de la violence. C’était la seule chose qui calmait sa bête intérieure. Pas la seule chose à y parvenir. Juste le seul moyen à sa disposition.
Béryl combattait ses frères tous les jours. C’était nécessaire pour leurs dragons qui, jour après jour, devenaient plus animaux qu’humains. Combattre leur donnait un semblant d’équilibre. Mais la jauge penchait en leur défaveur. Et pas juste pour les dragons. L’équilibre était précaire pour tous les métamorphes mâles du royaume.
Béryl en avait fini de jouer avec le lion. Il dansa autour de son ami et rival, léger sur ses pieds, bougeant les jambes rapidement. Il était toujours élégant quand il se battait. Il aimait présenter un beau spectacle à tous ceux qui y assistaient.
Les femmes fées du public poussèrent un soupir audible par-dessus le craquement des os et l’écrasement des chairs. L’air était saturé du parfum sucré de leur désir. Levant les yeux, Béryl vit les fées le regarder avec admiration. Les créatures florales étaient toutes extrêmement souples, avec leurs membres semblables à des lianes. Il aurait le choix parmi les fleurs, ce soir, mais son regard revenait sans cesse vers les Valkyries. Les chasseresses assoiffées de sang étaient plus intéressées par leur bière que par le combat. Les Valkyries ne s’inclinaient devant personne. Mais elles avaient tout de même une faiblesse.
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