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Paul Féval: Les Habits Noirs Tome VII – Les Compagnons Du Trésor

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Les Habits Noirs Tome VII – Les Compagnons Du Trésor: краткое содержание, описание и аннотация

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Les deux derniers tomes de ce cycle criminel ont pour thème central la recherche frénétique du trésor des Habits noirs, caché jalousement par le colonel Bozzo. Dans les Compagnons du trésor se trouve entrelacée à cette quête la sanglante loi de succession de la famille Bozzo, dont l'ancêtre est Fra Diavolo: le fils doit tuer le père pour lui succéder, à moins que le père ne tue le fils. L'architecte Vincent Carpentier, qui a construit la cache du trésor pour le colonel Bozzo, est poursuivi par l'idée fixe de la retrouver. Son fils adoptif, le jeune peintre Reynier, découvre par hasard qu'il est le petit-fils du colonel Bozzo…

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Vincent fit un mouvement. Toute la France s’occupait alors de la veuve du duc de Berry, qui fuyait traquée par la police de son oncle Louis-Philippe, après sa malheureuse tentative en Vendée.

– Ne bougez pas, répéta le colonel. Les révolutions sont de drôles de mécaniques. Louis-Philippe ou ses fils conspireront à leur tour dans quinze ou vingt ans. Moi, j’aimerais mieux être sur le siège d’un fiacre comme notre cocher que de m’asseoir sur le trône. C’est la misère. Et pourtant, combien de gens se damnent pour avoir cette place-là! Je parie que vous n’y voyez déjà plus.

– Plus du tout, répondit Vincent.

– C’est égal, je vais utiliser le restant de ma soie.

Depuis que Carpentier était aveuglé par son bandeau, la physionomie du colonel avait changé, et quoique ses mains gardassent un tremblement très accusé, il opérait avec une remarquable adresse.

– Il est sûr, reprit-il, que quand un brave garçon peut répondre au commissaire: «Fouillez-moi plutôt! je ne sais rien de rien», cela le met diantrement à son aise. Moi qui parle, du temps du roi Murat, je suis resté onze jours et onze nuits dans une cachette au château de Monteleone. On n’est pas là comme à la noce, mais cela vaut mieux que de passer devant une haute cour de justice, pas vrai, bibi?

– Il s’agit donc d’une cachette? demanda Vincent.

– Qu’est-ce que tu penses de Louis XVII, toi, bonhomme? fit le vieillard au lieu de répondre. Voilà une malheureuse créature! Moi, mes cheveux grisonnaient déjà quand le roi Louis XVI et la reine Marie-Antoinette allèrent à l’échafaud. J’en ai vu couler de l’eau sous le pont! Je sais des tas de choses. Il y a un Bonaparte, fils de la reine Hortense qui était une jolie femme, ou le diable m’emporte! Il est majeur de l’année dernière. Ah! ah! on joue la poule autour des Tuileries! Je connais au moins quatre ou cinq billes numérotées, sans compter celle de la République. Et, veux-tu savoir?… À ce jeu-là on passe souvent par une cachette avant d’entrer dans la chambre du trône… C’est fait! Colin-Maillard, combien de doigts?

Le fiacre tournait le coin de l’Institut pour entrer dans la rue de Seine.

– Ce bandeau est épais comme la mort, pensa tout haut Carpentier.

– Tant mieux, ma chatte! Tu as été bien gentil. Maintenant, nous allons te faire un bout de toilette, à cause des passants qui s’étonneraient de voir la tête d’un brave garçon empaquetée comme celle d’une momie. C’est gênant, les passants!

Il déplia le caban qu’il avait apporté sous son bras.

– Passe ta main droite d’abord, dit-il. J’en sue à grosses gouttes, moi, tu sais! La gauche maintenant. Bon. Je te colle le capuchon, et ni vu ni connu! S’il y a des curieux, j’en serai quitte pour avouer que tu as été opéré de la cataracte par un des premiers spécialistes de la capitale, et j’ajouterai: Quelle joie quand on lèvera l’appareil et que ce cher ami reverra la lumière!

Le fiacre s’arrêtait devant le passage. Vincent était comme étourdi par ce bizarre babil.

Le colonel descendit assez lestement. Ce n’était plus le même homme, depuis que, grâce au bandeau, il échappait aux regards de son compagnon.

Il paya le cocher et lui dit:

– Mon brave, aidez-moi à déballer mon pauvre diable de fils, qui a pris froid et que j’ai emmailloté de mon mieux. Ce sont les jeunes maintenant qui sont infirmes. Heureusement que nous n’allons pas loin. Nous sommes du passage.

– Il fait frisquet, ce soir, répondit le cocher en soutenant Carpentier des deux mains. Je n’avais pas remarqué là-bas que le voyageur était malade. C’est de le fourrer dans son lit tout de suite avec une tasse de vin chaud par-dessus.

Dans le passage, le colonel prit le bras de son prétendu fils, dont la tête était complètement cachée par le capuchon du caban.

– Je fais semblant de te soutenir, dit-il, mais tiens-moi ferme, car il y a longtemps que je n’ai fourni pareille course à pied. Nous allons jusqu’à la station de voitures qui est sur le quai près du pont Neuf.

– Pourquoi avoir changé de fiacre? demanda Vincent.

– Parce que tu aurais pu prendre le numéro de celui que nous venons de quitter. Tu vois que je suis franc, voilà mon caractère. Ce soir, tu n’as peut-être pas fait attention au numéro, parce que ta curiosité n’était pas encore éveillée, mais demain…

– Nous recommencerons donc demain?

– Dans une demi-heure, tu seras en face de la besogne, et c’est toi qui me diras à vue de nez combien de jours il te faudra pour l’accomplir… Attention! il y a un pas: soutiens-moi.

Ils traversèrent la rue Mazarine et prirent le trottoir étroit de la rue Guénégaud.

Le colonel affectait maintenant de peser sur le bras de son compagnon, qui se laissait guider machinalement et marchait tout pensif.

Tout homme, placé en face d’un problème, cherche à résoudre.

Le scrupule et l’inquiétude avaient dominé jusqu’à présent dans l’esprit honnête de Vincent Carpentier.

Les rébus politiques que le vieillard venait de lui jeter comme un leurre avaient occupé vivement son imagination.

Maintenant la curiosité naissait et du premier coup elle prenait les proportions d’une idée fixe.

Le cerveau de Vincent travaillait déjà, cherchant un moyen de voir et de savoir.

On eût dit que le regard du colonel, perçant l’étoffe épaisse du caban, la soie des bandelettes et la boîte du crâne, lisait comme en un livre la pensée intime de son compagnon.

– J’en étais sûr, grommela-t-il. Ça ne pouvait pas manquer d’arriver. Vous voilà parti, mon camarade, vous courez après le mot de l’énigme. Ce serait tant pis pour vous si vous le trouviez; mais soyez tranquille, nous y mettrons bon ordre.

Il s’arrêta devant la porte latérale de la Monnaie pour reprendre haleine, quoique sa physionomie ne trahît aucun signe de fatigue.

– C’est loin, murmura-t-il. Sous l’Empire, je faisais encore une bonne demi-lieue sans m’essouffler; mais en 1820, j’ai eu mon premier coquin de rhumatisme… Eh avant, marche! Parmi ceux qui vont et qui viennent ici autour, il y en aura encore plus d’un qui arrivera avant moi au Père-Lachaise. À quoi penses-tu, bonhomme?

– Je pense, répondit Vincent, à ma petite Irène, qui m’attend, et à ce cher enfant, Reynier, qui me la garde.

– Tu as raison, voilà de sages pensées. En quelques jours, tu peux leur gagner tout un avenir, à ces deux bébés-là.

Il appela un cocher qui ruminait sur son siège, se fit ouvrir la voiture et y poussa Carpentier en disant:

– Case-toi bien dans le coin et ne te découvre pas. Un peu de patience, nous allons bientôt être chez nous.

Puis il s’éloigna de la portière pour parler au cocher.

De ce qui fut dit ainsi, Vincent ne put rien entendre, quoiqu’il prêtât l’oreille avidement.

Au bout d’une demi-minute, le colonel revint et monta à son tour.

– Menez-nous rondement, l’ami, fit-il pendant qu’on refermait la portière, vous aurez pour boire.

Dès qu’il fut assis, il se frotta les mains, disant avec une expression de bien-être:

– Ça fait plaisir de se reposer, hein, mon neveu? Demain soir nous prendrons le passage Vendôme, ou un autre qui soit tout près d’une station: je suis moulu!

Le cocher fouetta ses chevaux qui partirent au grand trot. Vincent se disait:

– On doit pouvoir se rendre compte de la direction et de la distance en faisant bien attention aux détours.

Et il tint son esprit en arrêt.

Chacun sait qu’une voiture, en tournant, fait éprouver une sensation au voyageur, surtout si le coude du voyageur est en communication avec la paroi.

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