William Gibson - Mona Lisa s'éclate

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Mona Lisa s'éclate: краткое содержание, описание и аннотация

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Une nouvelle macroforme est apparue dans le Conurb :
. Un gigantesque empilement de biopuces capables de reconstituer tous les savoirs, toutes les données de l’univers. Un fantastique instrument de pouvoir !
Tous les pirates de cyberspace sont à sa recherche. Mais qui le détient réellement ? Bobby, un génie du logiciel ? Dame 3Jane, l’héritière clonée de l’empire Tessier-Ashpool ? Ou Angie, vedette de cinéma, fille du savant Mitchell, le célèbre créateur des biopuces ?
L’enjeu est de taille ! Ils l’ignorent encore mais celui qui, au risque de sa vie, saura se rendre maître de l’aleph possèdera les clés d’un monde nouveau, un monde au-delà de l’humanité…

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Si Prior ignorait qu’elle avait cette matraque dans sa poche, ça voulait dire qu’il ne savait pas tout, contrairement à ce qu’il essayait de lui faire croire. D’ailleurs, il ignorait également à quel point Eddy détestait jouer.

Elle n’éprouvait pas grand-chose à l’égard d’Eddy, même si elle était convaincue de sa mort. Peu importait l’argent qu’ils avaient pu lui donner, il ne serait jamais parti sans ses valises : même pour sortir renouveler entièrement sa garde-robe, il se serait mis sur son trente-et-un. Se fringuer, c’était une obsession chez lui. Et ses valises en croco étaient tout à fait spéciales : elles provenaient d’un fric-frac dans un hôtel d’Orlando, et représentaient pour lui ce qui ressemblait le plus à un domicile. D’ailleurs, maintenant qu’elle y songeait, elle le voyait mal racheter sa liberté quand ce qu’il désirait le plus au monde c’était de faire partie d’un gros coup. Il pensait qu’ensuite les gens se mettraient enfin à le prendre au sérieux.

Eh bien, quelqu’un l’aura finalement pris au sérieux , se dit-elle, tandis que Prior entrait avec son sac dans la clinique de Gerald. Mais pas comme il l’aurait voulu.

Elle parcourut du regard le mobilier de plastique qui datait d’il y a vingt ans, les piles de magazines japonais consacrés aux stars de la stim. On se serait cru chez un coiffeur de Cleveland. Il n’y avait personne dans la salle d’attente, personne à la réception.

Gerald apparut par une porte blanche, vêtu de l’espèce de combinaison en tissu métallisé que portent les équipes médicales pour les accidents de la circulation.

— Fermez la porte, dit-il à Prior, derrière le masque en papier bleu qui lui dissimulait le nez, la bouche et le menton. Bonjour, Mona, si vous voulez bien passer par ici…

Il indiqua de la main la porte blanche.

Mona serrait à présent l’Élec-Trique dans sa poche mais elle ne savait pas comment la mettre en marche.

Elle suivit Gerald, Prior fermait la marche.

— Asseyez-vous, dit le chirurgien.

Elle s’installa sur un siège émaillé blanc. Il s’approcha, étudia ses yeux.

— Vous avez besoin de repos, Mona. Vous êtes épuisée.

Il y avait une touche sur la poignée de la matraque. Fallait-il la presser ? Vers l’avant ? Vers l’arrière ?

Gerald s’approcha d’un casier blanc à tiroirs, en sortit quelque chose.

— Tenez, dit-il en brandissant un petit objet tubulaire avec des trucs écrits sur la tranche, ça vous aidera…

Elle sentit à peine l’imperceptible dose nébulisée ; il y avait une tache noire devant le flacon d’aérosol, juste dans l’axe où ses yeux tentaient d’accommoder, une tache qui grandissait…

Elle se souvint du vieux, en train de lui montrer comment on tuait un poisson-chat. Les poissons-chats avaient un trou dans le crâne, recouvert de peau ; il suffisait de prendre une tige quelconque, longue et mince, un fil de fer, même un simple morceau de paille, et de l’insérer…

Elle se souvint de Cleveland, une journée ordinaire avant de se mettre au turbin, à poireauter chez Lanette en feuilletant un magazine. Elle avait trouvé cette photo d’Angie au restaurant, en train de rire avec d’autres convives ; tout le monde était beau, tous avaient quelque chose de brillant : même si ce n’était pas flagrant sur le cliché, c’était malgré tout perceptible. « Regarde, avait-elle dit à Lanette en lui montrant la photo, regarde comme ils brillent…

— On appelle ça le fric », avait répondu Lanette.

On appelle ça le fric. Suffit de le glisser.

20. HILTON SWIFT

Il arriva sans prévenir, comme d’habitude, et seul : l’hélico du Réseau se posa, telle une guêpe solitaire, projetant sur le sable humide des brassées de varech.

Appuyée au parapet, elle le regarda débarquer de l’appareil, avec quelque chose d’enfantin, de gauche, dans son ardeur apparente. Il portait un long manteau marron en tweed, déboutonné, qui laissait apparaître le plastron immaculé de l’une de ses chemises à fines rayures ; la rotation des pales ébouriffait ses cheveux châtain clair et soulevait sa cravate Senso/Rézo. Robin avait raison , remarqua-t-elle : il donne tout à fait l’impression d’être habillé par sa mère.

Peut-être était-ce délibéré, songea-t-elle alors qu’il remontait la plage à grands pas, cette naïveté affichée. Elle se rappela que Porphyre lui avait un jour soutenu que les grosses multinationales étaient totalement indépendantes des hommes qui en formaient l’ossature. Pour Angie, c’était un truisme, mais le coiffeur avait insisté, estimant qu’elle avait mal saisi sa thèse : selon lui, Swift était le principal décideur humain de Senso/Rézo.

Songer à Porphyre la mit de bonne humeur. Flatté, à tort, Swift lui rendit un sourire radieux.

Il lui offrit d’aller déjeuner à San Francisco, l’hélicoptère étant extrêmement rapide. Elle riposta en insistant pour lui préparer un bol de potage suisse lyophilisé et passer au micro-ondes une brique de biscuit de seigle surgelé.

Tout en le regardant manger, elle s’interrogea sur sa sexualité. Alors qu’il approchait de la quarantaine, il donnait comme l’impression d’un adolescent extraordinairement brillant dont la puberté aurait été subtilement retardée. La rumeur lui avait successivement attribué tous les penchants sexuels imaginables, plus quelques-uns qu’elle supposait totalement imaginaires. Rien de tout cela ne lui semblait vraisemblable. Angie connaissait Swift depuis qu’elle était entrée à Senso/Rézo ; à son arrivée, il était déjà bien installé aux échelons supérieurs de la production – c’était l’un des principaux collaborateurs dans l’équipe de Tally Isham – et il s’était pris immédiatement d’un intérêt professionnel pour Angie. Maintenant qu’elle y repensait, elle supposa que c’était Legba qui l’avait placé sur son chemin : son ascension était tellement manifeste, même si elle n’avait pas été capable de le discerner à l’époque, tant l’éblouissaient l’éclat et la perpétuelle agitation de ce milieu.

Bobby l’avait immédiatement détesté, manifestant cette hostilité viscérale des Barrytowniens face à l’autorité, mais il était plus ou moins parvenu à dissimuler ses sentiments pour préserver sa carrière. L’antipathie avait été réciproque et Swift avait accueilli leur rupture et le départ de Bobby avec un soulagement manifeste.

— Hilton, dit-elle en lui versant une tasse de thé (il ne voulait pas de café), qu’est-ce qui retient Robin à Londres ?

Il leva les yeux de sa tasse fumante.

— Une affaire personnelle, je pense. Peut-être a-t-il noué quelque amitié nouvelle.

Il n’employait jamais d’autre mot, pour Hilton, Bobby avait toujours été l’ ami d’Angie. Les amitiés de Robin avaient tendance à être jeunes, masculines et athlétiques ; les discrètes séquences érotiques de ses stims avec Robin étaient montées à partir d’images d’archives fournies par le Script et sérieusement travaillées par Raebel et son équipe d’effets spéciaux. Elle se rappelait la seule nuit qu’ils avaient passée ensemble, dans une maison battue par les vents au sud de Madagascar, sa passivité et sa patience. Ils n’avaient jamais fait d’autre tentative, et elle le soupçonnait de craindre qu’une relation plus intime entre eux ne minât l’illusion que leurs stims projetaient si parfaitement.

— Qu’a-t-il pensé de mon hospitalisation volontaire, Hilton ? Vous en a-t-il parlé ?

— Je crois qu’il vous a admirée d’avoir fait ça.

— Quelqu’un m’a dit récemment qu’il racontait à tout le monde que j’étais cinglée.

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