William Gibson - Mona Lisa s'éclate

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Mona Lisa s'éclate: краткое содержание, описание и аннотация

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Une nouvelle macroforme est apparue dans le Conurb :
. Un gigantesque empilement de biopuces capables de reconstituer tous les savoirs, toutes les données de l’univers. Un fantastique instrument de pouvoir !
Tous les pirates de cyberspace sont à sa recherche. Mais qui le détient réellement ? Bobby, un génie du logiciel ? Dame 3Jane, l’héritière clonée de l’empire Tessier-Ashpool ? Ou Angie, vedette de cinéma, fille du savant Mitchell, le célèbre créateur des biopuces ?
L’enjeu est de taille ! Ils l’ignorent encore mais celui qui, au risque de sa vie, saura se rendre maître de l’aleph possèdera les clés d’un monde nouveau, un monde au-delà de l’humanité…

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Ses doigts tâtèrent au hasard un second bouton et elle se retrouva catapultée derrière le mur de parasites, à l’intérieur d’un vaste univers encombré, le vide conceptuel du cyberspace, avec la trame éblouissante de la matrice dessinée autour d’elle comme une cage infinie.

— Angela, dit la maison, d’une voix calme mais insistante, j’ai un appel d’Hilton Swift…

— En priorité d’exécution ?

Elle était en train de manger des haricots blancs à la tomate, installée au comptoir de la cuisine.

— Non, répondit la maison, avec confiance.

— Change de ton, dit-elle, la bouche pleine de haricots. Mets-y une pointe d’anxiété.

— M. Swift attend , reprit la maison, avec nervosité.

— C’est mieux, admit-elle en allant déposer assiette et bol dans le lave-vaisselle, mais je veux quelque chose de plus proche d’une véritable hystérie…

— Allez-vous enfin prendre cet appel ?

La tension étranglait la voix.

— Non, répondit-elle, mais garde ce ton-là, j’aime bien.

Elle passa dans le séjour, en comptant discrètement. Douze, treize…

— Angela, reprit doucement la maison, j’ai un appel d’Hilton Swift…

— En priorité d’exécution, coupa Swift.

Angela pinça les lèvres et fit un bruit de pet.

— Vous savez combien je respecte votre désir de solitude mais je me fais du souci pour vous…

— Je vais très bien, Hilton. Vous n’avez pas de souci à vous faire. Salut.

— Vous avez trébuché, ce matin, sur la plage. Vous paraissiez désorientée. Vous vous êtes mise à saigner du nez.

— Ben oui, j’avais un saignement de nez.

— Nous voudrions vous faire passer un nouvel…

— Super.

— Vous avez accédé à la matrice, aujourd’hui, Angie. Nous vous avons repérée dans le secteur industriel de l’AMAB.

— C’est donc ça !

— Voulez-vous qu’on en discute ?

— Il n’y a rien à discuter. Je m’occupais, c’est tout. Vous voulez quand même savoir, hein ? Eh bien, j’étais en train de remballer des vieux trucs que Bobby avait laissés traîner derrière lui. Vous auriez approuvé, non, Hilton ? J’ai trouvé une de ses consoles et je l’ai essayée. J’ai tapé sur une touche, je suis restée là à regarder ce qui se passait, je me suis débranchée.

— Je suis désolé, Angie.

— De quoi ?

— De vous avoir dérangée. Je vais vous laisser.

— Hilton, savez-vous où est Bobby ?

— Non.

— Vous êtes en train de me dire que la surveillance du Réseau ne le tenait pas à l’œil ?

— Je vous dis que je n’en sais rien du tout, Angie. C’est la stricte vérité.

— Pourriez-vous le savoir, si vous le vouliez ?

Nouveau silence.

— Je n’en sais rien. Même si j’en avais la possibilité, je ne suis pas sûr de vouloir vraiment le savoir.

— Merci. Au revoir, Hilton.

— Au revoir, Angie.

Cette nuit-là, elle resta assise sur la terrasse, à contempler la danse des moucherons sur le sable, sous le faisceau des projecteurs. À songer à Brigitte et à son avertissement, à la drogue dans le blouson et au chargeur de timbres, dans l’armoire à pharmacie. À songer au cyberspace et à la triste impression de confinement qu’elle avait ressentie avec l’Ono-Sendaï, si éloignée de la liberté des loa.

À songer aux rêves de l’autre, à ces couloirs enchevêtrés, ces tons passés des vieux tapis… Un vieillard, la tête couverte de joyaux, un visage pâle et hâve avec des yeux comme des miroirs… Et une plage dans le vent et la nuit.

Pas cette plage, pas Malibu.

Dans le noir d’un petit matin de Californie, quelques heures avant l’aube, parmi les couloirs, les galeries, les visages fantomatiques, les fragments de conversation dont elle se souvenait à moitié, lorsqu’elle se réveilla, face au brouillard pâle accroché aux fenêtres de la grande chambre, Angie parvint à arracher quelque chose qu’elle ramena d’au-delà du mur du sommeil.

Elle roula sur le lit, fouilla dans un tiroir de la table de chevet et sortit un stylo Porsche, cadeau d’un accessoiriste, pour consigner le trésor qu’elle venait de découvrir au revers glacé d’une revue de mode italienne.

— Appelle-moi le Script, dit-elle à la maison, alors qu’elle buvait sa troisième tasse de café.

— Salut, Angie, dit le Script.

— Cette séquence en orbite qu’on a tournée, il y a deux ans. Le yacht belge… (Elle but une gorgée du café qui refroidissait.) Quel était l’endroit déjà, où ils voulaient m’emmener ? Celui que Robin a finalement jugé trop ringard…

— Zonelibre, répondit le système expert.

— Qui a tourné là-bas ?

— Tally Isham a enregistré neuf séquences en Zonelibre.

— Pour elle, c’était pas trop ringard ?

— Ça remonte à quinze ans. À l’époque, c’était à la mode.

— Retrouve-moi ces séquences.

— C’est fait.

— Salut.

— Au revoir, Angie.

Le Script était en train d’écrire un livre. Robin Lanier lui en avait parlé. Elle lui en avait demandé le sujet. « Ça ne marche pas comme ça », avait-il répondu. Il se bouclait sur lui-même et se modifiait en permanence. Le Script ne cessait de le récrire. Elle demanda pourquoi. Mais la question n’intéressait déjà plus Robin : parce que le Script était une Intelligence artificielle et que les I.A. faisaient ce genre de chose.

Son coup de fil au Script lui valut un appel de Swift.

— Angie, à propos de cet examen…

— Vous ne l’aviez pas déjà programmé ? J’ai envie de me remettre au boulot. J’ai appelé le Script, ce matin. Je songeais à une séquence en orbite. Je vais me repasser certains trucs tournés par Tally ; ça me donnera peut-être des idées.

Il y eut un silence. Elle avait envie de rire. Il était difficile de réduire Swift au silence.

— Vous êtes sûre, Angie ? C’est une idée magnifique, mais est-ce vraiment ce que vous voulez faire ?

— Je vais beaucoup mieux, Hilton. Je me sens parfaitement bien. J’ai envie de travailler. Finies, les vacances. Vous allez m’envoyer Porphyre, qu’il me coiffe avant que j’aie à voir quelqu’un.

— Vous savez, Angie, nous sommes tous absolument ravis de vous retrouver ainsi.

— Appelez Porphyre. Arrangez l’examen médical. (Un coup-poudre. Qui ça ? Hilton ? Peut-être toi ?)

Il en avait les ressources, se dit-elle, une demi-heure plus tard, alors qu’elle arpentait la terrasse noyée de brume. Sa dépendance vis-à-vis de la drogue n’avait pourtant pas menacé le Réseau, n’avait pas affecté ses sorties d’enregistrement, ni provoqué d’effets physiques secondaires. Sinon, Senso/Rézo ne l’aurait même pas laissée commencer. Le fabricant de drogue, songea-t-elle. Lui devait être au courant. Même si elle parvenait à le toucher, ce dont elle doutait, il ne lui dirait jamais rien. Suppose , se dit-elle, les mains posées sur le parapet rouillé, suppose que ce n’ait pas été son fournisseur ? Que la molécule ait été conçue par un autre, pour ses propres fins ?

Votre coiffeur, annonça la maison.

Elle rentra.

Porphyre attendait, emmailloté d’un jersey aux couleurs éteintes, la dernière tendance de Paris. Son visage, aussi lisse au repos que de l’ébène polie, se fendit en un sourire ravi dès qu’il l’aperçut.

— Mam’zelle, la réprimanda-t-il, vous avez l’air d’une vraie souillon.

Elle rit. Bavardant sans fin, Porphyre passa ses longs doigts fins dans les boucles d’Angie et prit un air de répulsion.

— Mam’zelle n’a pas été sage. Porphyre vous avait bien dit que ces drogues étaient de la saleté !

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