Robert Heinlein - Job - une comédie de justice

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Job : une comédie de justice: краткое содержание, описание и аннотация

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Promis à une brillante carrière militaire lorsqu’une grave maladie l’obligea à y renoncer en 1934, il est devenu un des auteurs les plus prolifiques de notre époque. Qui donc se mêle de bouleverser ainsi la vie du pasteur Alex Hergensheimer alors qu’il regagne son cher Kansas après un long voyage ? Dieu ou Satan ?
Tout commence par un épisode de très païenne magie lors d’une escale en Polynésie…
Et quand il se retrouve à bord, l’honorable pasteur découvre que tout a changé, y compris lui-même : pour ses compagnons, il est Alec Graham, homme d’affaires, et pour Margrethe, la jolie stewardess, un parfait amant ! Plus dangereux encore : il se retrouve à la tête d’un million de dollars fort mal acquis.
Quant au temps historique, là, c’est le total chamboulement. Dans quel passé… ou quel futur est-il ?
Sentant se perdre son identité et son âme, Alex s’affole, craint l’approche de quelque Armaguedon…

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— Vous m’avez mis au lit ?

— Ori m’a aidée. C’est le garçon avec qui j’ai dansé. (Mon expression a dû me trahir car elle a ajouté vivement :) Oh, mais je ne l’ai pas laissé entrer dans votre chambre, monsieur. Je vous ai déshabillé moi-même. Mais il fallait bien que quelqu’un m’aide pour monter les escaliers.

— Mais je ne vous critiquais pas. (Et après, vous êtes retournée à la soirée ? Il était encore là ? Et vous avez dansé encore avec lui ? Jalousie, cruelle comme la tombe, dont les pierres sont des charbons ardents… Mais je n’ai pas le droit de penser cela.) En fait, je vous remercie tous deux. J’ai dû être insupportablement grossier.

— Ma foi… les hommes courageux boivent souvent trop lorsque le danger est passé. Mais ce n’est pas bon pour vous.

— Non, certainement pas. (Je me suis levé et j’ai gagné la salle de bains en déclarant :) Je vais la prendre très chaude. Promis.

J’ai refermé la porte au verrou, puis j’ai fini de me déshabiller.

(Ainsi, j’avais été saoul, inerte et puant au point qu’un indigène avait dû aider à me mettre au lit. Alex, tu es un vrai désastre ! Et tu n’as aucun droit de te montrer jaloux avec une jolie fille. Elle ne t’appartient pas. Et elle ne s’est pas mal comportée par rapport aux usages de ce monde – quel qu’il soit – et tout ce qu’elle a fait c’est prendre soin de toi et te dorloter. Ce qui ne te donne aucun droit sur elle.)

J’ai mis la douche sur chaud, mais ce pauvre Alex a bien failli y rester ! J’ai tenu jusqu’à ce que mes nerfs me donnent l’impression d’avoir été cautérisés, et je suis passé à fond sur froid. J’ai poussé un cri.

Je suis resté sur froid jusqu’à ce que ça ne me paraisse plus froid du tout, et puis je me suis séché en ouvrant la porte pour évacuer la vapeur. Je suis revenu dans la pièce et j’ai réalisé tout à coup que je me sentais merveilleusement bien. Plus de mal de tête. Fini ce sentiment que la fin du monde était pour midi. Plus de soubresauts d’estomac. La faim. Rien que la faim. Alex, promets-moi que tu ne te saouleras plus jamais… mais, si cela t’arrive par malheur, fais exactement ce que Margrethe t’a dit de faire. Elle pense pour toi, mon garçon… Tu devrais apprécier.

En commençant à siffler joyeusement, j’ai ouvert la garde-robe de Graham.

C’est alors que j’ai entendu une clé qui tournait dans la serrure. J’ai à peine eu le temps de décrocher sa robe de chambre et je suis parvenu à me couvrir à l’instant où la porte s’ouvrait. Margrethe se déplaçait lentement avec un plateau lourdement chargé. Quand je m’en suis aperçu, je lui ai tenu la porte. Elle a posé le plateau et arrangé les plats et les assiettes sur mon bureau.

— Vous aviez raison à propos de la douche façon sauna. C’est exactement ce que m’a prescrit le docteur. Ou l’infirmière, devrais-je dire.

— Je sais, c’est comme ça que faisait ma grand-mère avec mon grand-père.

— Une femme avisée. Mmm ! Ça sent bon !

(Des œufs brouillés, du bacon, des montagnes de pâtisseries danoises, du café et du lait – plus une petite assiette de fromages, fladbrød , de fines tranches de jambon et un fruit tropical dont j’ignorais le nom.)

— Et qu’est-ce qu’elle faisait, votre grand-mère, quand votre grand-père discutait ?

— Oh, il lui arrivait d’être patiente.

— Mais pas vous, dites-moi.

— Eh bien… Elle disait que Dieu avait créé les hommes pour éprouver l’âme des femmes.

— Elle avait peut-être raison. Vous êtes d’accord ?

Elle sourit et les petites fossettes revinrent.

— Je crois qu’ils avaient aussi d’autres ressources.

Margrethe a mis de l’ordre dans ma chambre, nettoyé ma baignoire (d’accord, d’accord : je veux dire la chambre de Graham , la baignoire de Graham … satisfaits ?) pendant que je mangeais. Puis elle m’a préparé un pantalon et une chemise de sport en tissu imprimé des îles, des sandales, et elle a débarrassé le plateau et les assiettes en me laissant le café et le fruit que je n’avais pas mangé. Je l’ai remerciée comme elle franchissait le seuil, je me suis demandé brièvement si je devais lui offrir quelque « récompense », et aussi si elle offrait les mêmes services à d’autres passagers. Cela me semblait peu probable mais j’étais incapable de fournir une réponse.

J’ai poussé le verrou et je me suis mis à fouiller la chambre de Graham.

Je portais ses vêtements, je dormais dans son lit, je répondais à son nom… et il fallait maintenant que je décide si je devais aller jusqu’au bout et être vraiment A.L. Graham… ou si je devais aller voir l’autorité la plus proche (le consul américain ? Sinon qui ?) pour dénoncer la situation où je me trouvais et demander qu’on m’aide.

J’étais pressé par les événements. Ce jour même, le Skalde du Roi annonçait que le S.S. Konge Knut allait faire relâche à Papeete à 3 heures cet après-midi, avant d’appareiller à nouveau, à 6 heures, pour Mazatlan, au Mexique. Le commissaire de bord avertissait tous les passagers désireux de changer des francs en dollars qu’un représentant de la banque de Papeete serait dans le carré, juste en face de son bureau, dès l’arrivée à Papeete et jusqu’à quinze minutes avant le départ. Le commissaire ajoutait que les notes de bar et d’achats divers ne pouvaient être réglées qu’en dollars, en couronnes danoises, ou par des lettres de crédit dûment certifiées.

Tout cela était très raisonnable. Et troublant. Je m’étais attendu à ce que le bateau fasse escale à Papeete durant vingt-quatre heures au moins. Trois heures d’escale, cela semblait absurde. Ils auraient à peine le temps de se ranger à quai qu’il faudrait déjà penser à larguer les amarres ! Est-ce que la taxe d’amarrage serait quand même de vingt-quatre heures ?

Ensuite je m’avisai que ce n’était pas à moi de diriger les affaires du bateau. Le commandant profitait peut-être de trois heures entre le départ d’un navire et l’arrivée d’un autre. Il pouvait y avoir mille autres raisons différentes. Tout ce qui m’inquiétait, c’est ce que je pouvais arriver à faire entre trois et six heures, et ce qu’il fallait que je fasse à partir de maintenant, en attendant trois heures.

Voici mon butin après quarante minutes de fouille intense :

Des vêtements de toutes sortes : aucun ne posait de problème, si l’on exceptait les deux kilos en trop à la taille.

De l’argent : d’abord les francs dans son portefeuille (que j’allais devoir changer), plus quatre-vingt-cinq dollars. Trois mille autres dans le tiroir du bureau où se trouvait la petite trousse dans laquelle Margrethe avait pris la montre, la bague et les boutons de chemise. J’en conclus que Margrethe avait conservé pour moi le produit du pari que j’avais fait (ou que Graham avait fait) avec Forsyth, Jeeves et Henshaw. On dit qu’il y a un Dieu pour les ivrognes et les idiots. Dans mon cas, il opérait par Margrethe interposée.

Je trouvai encore quelques articles divers, sans rapport avec mon problème immédiat : des livres, des souvenirs, du dentifrice, etc.

Pas de passeport.

Quand je me suis aperçu que je n’avais découvert aucun passeport lors de cette première fouille, j’ai recommencé. Cette fois, j’ai cherché systématiquement dans toutes les poches des vêtements de la penderie, j’ai fouillé à nouveau partout et même dans quelques coins inhabituels auxquels je n’avais pas pensé et susceptibles de dissimuler un petit fascicule de la taille d’un passeport.

Toujours rien. Certains touristes prennent la précaution de garder leur passeport sur eux quand ils quittent le bord. Pour ma part, je préfère le laisser si cela est possible car, lorsque vous perdez votre passeport, vous n’êtes pas au bout de vos ennuis. Ainsi, la veille, je n’avais pas pris le mien… et il était donc à présent au diable Vauvert, au pays de cocagne, en tout cas là où le Motor Vessel Konge Knut était parti. Mais où était-ce ? En tout cas, ce n’était pas le moment de réfléchir. J’avais trop à faire dans ce nouveau monde si étrange.

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