Arcadi Strougatski - L’Arc-en-ciel lointain

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L’Arc-en-ciel lointain: краткое содержание, описание и аннотация

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Les « charybdes » avançaient de front, d'un bout de l'horizon à l'autre, respectant des intervalles réguliers de cinq cents mètres, dans le fracas et le vrombissement des moteurs super-puissants. Ils laissaient derrière eux, sur la steppe jaune, de larges bandes de terre marron retournée, éventrée jusqu'à la couche inférieure de basalte. Les engrenages des chenilles brillaient sous le soleil. Loin sur la droite, dans le ciel terne, s'agitait un point à peine visible : c'était l'hélicoptère qui guidait le mouvement de ces monstres métalliques. Les « charybdes » marchaient sur la Vague …

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Il descendait, s’accrochant aux charpentes et aux étais, tandis que le vent piquant le criblait de petites poussières, le plaquant contre le métal tiède. Il eut le temps de voir que la poussière avait nettement diminué et que la steppe était à nouveau inondée de soleil. Le mirador continuait à s’incliner. Robert avait tellement hâte de savoir dans quel état se trouvait le ptérocar et où était passé Camille, qu’il sauta alors qu’il restait encore environ quatre mètres jusqu’au sol. En tombant il se fit mal aux jambes et aux bras. La première chose qu’il vit, ce fut les doigts de Camille agrippés à la terre sèche.

Camille était couché sous le ptérocar renversé, ses yeux ronds et vitreux demeuraient grands ouverts, ses longs doigts fins s’accrochaient à la terre, comme s’il avait essayé d’extirper son corps de sous le véhicule brisé, ou qu’il avait eu très mal avant de mourir. La poussière couvrait sa veste blanche, la poussière saupoudrait ses joues et ses yeux ouverts.

— Camille, appela Robert.

Le vent secouait rageusement un morceau de l’aile mutilée du ptérocar au-dessus de sa tête. Le vent apportait des nappes de poussière jaune. Le vent sifflait et hululait entre les charpentes du mirador incliné. Le petit soleil brûlait férocement dans le ciel trouble ; il paraissait ébouriffé.

Robert se releva et, appuyant de tout son poids, tenta de faire bouger le ptérocar. Une seconde, rien qu’une seconde il réussit à soulever le lourd engin. De nouveau, il regarda Camille. Tout son visage était couvert de poussière, sa veste blanche avait pris une teinte rousse et seul son absurde casque blanc ne portait pas le moindre grain de sable et son plastique brillant lançait de gais reflets sous le soleil.

Les jambes de Robert tremblèrent et il s’assit à

côté du mort. Il eut envie de pleurer. « Adieu, Camille. Je vous ai aimé, parole d’honneur. Personne ne vous a aimé, mais moi, je vous ai aimé. Il est vrai que je ne vous ai jamais écouté, tout comme les autres, mais, parole d’honneur, si je ne vous écoutais pas, c’était uniquement parce que je n’espérais pas pouvoir vous comprendre. Vous étiez tellement au-dessus des autres, alors par rapport à moi … Et voilà que maintenant je suis incapable d’enlever ce tas de ferraille qui écrase votre poitrine. Par devoir d’amitié, je devrais rester à côté de vous. Mais Tania m’attend, même Malaïev m’attend peut-être, et puis, j’ai terriblement envie de vivre. Là, aucun sentiment, aucune logique n’y peuvent rien. Je sais que je n’irai pas loin. Et néanmoins, je vais essayer. Je vais courir, je vais clopiner, probablement ramper, mais je continuerai jusqu’à mon dernier souffle … Je suis un crétin, j’aurais dû écouter votre sept millième conseil, mais, comme d’habitude, je ne vous ai pas compris, et pourtant, à bien réfléchir, qu’y avait-il de si difficile à comprendre ? »

U se sentait tellement brisé, tellement las, que c’est avec le plus grand mal qu’il se força à se mettre debout et à marcher. Et lorsqu’il se retourna pour jeter un dernier regard à Camille, il vit la Vague.

Loin, très loin au nord, au-dessus de la ligne d’horizon, derrière le voile rougeâtre de la poussière qui retombait, dans le ciel délavé, étincelait une bande éblouissante, brillante comme le soleil.

« Eh bien, c’en est fini, pensa mollement Robert. Je n’irai pas loin. Elle sera là dans une demi-heure et continuera son chemin, ne laissant qu’un désert lisse et noir. Bien sûr, le mirador n’aura rien, ni les ulmotrons ; le ptérocar non plus, et son aile brisée pendra dans l’air immobile et chaud. Peut-être le casque de Camille passera-t-il à travers. Mais de moi, il ne restera rien. » En guise d’adieu, il se contempla, tapota sa poitrine nue, tâta ses muscles. « Dommage », pensa-t-il. Et là, il vit un flyer.

Le flyer stationnait derrière le mirador ; un petit flyer à deux places, ressemblant à une tortue bigarrée, rapide, économique, étonnamment simple et facile à conduire. C’était le flyer de Camille. Mais bien sûr que c’était le flyer de Camille !

Robert fit quelques pas incertains dans sa direction, puis, contournant le mirador, se précipita à toutes jambes. Il ne lâchait pas le flyer des yeux, comme s’il avait peur que l’appareil disparaisse d’un seul coup ; il trébucha sur quelque chose et tomba à plat ventre dans l’herbe piquante, s’écorchant la poitrine et le ventre. U se remit sur ses pieds d’un bond et se retourna. Le cylindre de l’ulmotron, lourd, lisse, poli à en devenir bleu, oscillait encore doucement après la secousse. Robert regarda au nord. Le mur noir se dressait déjà à l’horizon. Robert courut vers le flyer, soulevant une montagne de poussière, sauta sur le siège et, ayant à peine trouvé en tâtonnant la manette de direction, démarra en trombe.

La steppe s’étendait jusqu’à Greenfield, et Robert la survola à une vitesse moyenne de cinq cents kilomètres heure. Le flyer dévorait la steppe, progressant à la manière d’une puce, par bonds énormes. Bientôt, la bande aveuglante disparut derrière l’horizon. Dans la steppe, tout semblait comme d’habitude : l’herbe sèche et drue, les brumes de vapeur tremblant au-dessus des terrains salifères, les rares taillis de buissons nains. Le soleil brûlait, impitoyable. Curieusement, il n’y avait ici aucune trace ni des mange-blé, ni des oiseaux, ni de l’ouragan. Celui-ci avait dû tous les disperser pour se perdre ensuite à son tour dans ces espaces stériles, désertiques depuis que l’Arc-en-ciel existait, comme destinés par la Nature elle-même aux expériences folles des physiciens-zéro. Une fois, lorsque Robert était encore un novice, lorsque la Capitale s’appelait simplement la capitale, et que Greenfield ne figurait pas sur les cartes, la Vague avait déjà visité ces lieux, provoquée par l’expérience grandiose de feu Lu Fin-Sen. A l’époque, tout ici était noir, mais sept ans après seulement, l’herbe tenace et peu exigeante commençait de nouveau à faire reculer le désert loin vers le nord, vers les régions même des éruptions.

« Tout se remettra en place, pensait Robert. Tout sera comme avant, à la différence qu’il n’y aura plus de Camille. Et si un jour quelqu’un apparaît de façon particulièrement soudaine dans le fauteuil derrière mon dos, je saurai alors avec certitude que ce n’est qu’un revenant. Maintenant, je vais aller directement chez Malaïev et je lui dirai, le regardant dans le blanc des yeux : « Vos ulmotrons, je les ai laissés tomber. » Lui, il émettra entre les dents : « Comment avez-vous osé, Skliarov ? » Et alors, je lui dirai : « Je m’en fous de vos ulmotrons, parce que Camille est mort à cause d’eux ! » Lui, il dira : « Bien sûr, c’est très dommage, mais vous auriez dû apporter les ulmotrons. » Alors, je finirai par me mettre en rage et je lui sortirai tout. « Un monstre de glace, voilà ce que tu es ! lui dirai-je. Tu es un bonhomme de neige électronique. Comment oses-tu penser aux ulmotrons alors que Camille est mort ? Tu es un sans-cœur, un lézard ! »

A deux cents kilomètres de Greenfield il vit des « charybdes » — de gigantesques chars télémécaniques montés de gueules béantes captrices d’énergie. Les « charybdes » avançaient de front, d’un bout de l’horizon à l’autre, respectant des intervalles réguliers de cinq cents mètres, dans le fracas et le vrombissement des moteurs super-puissants. Ils laissaient derrière eux, sur la steppe jaune, de larges bandes de terre marron retournée, éventrée jusqu’à la couche inférieure de basalte. Les engrenages des chenilles brillaient sous le soleil. Loin sur la droite, dans le ciel terne, s’agitait un point à peine visible : c’était l’hélicoptère qui guidait le mouvement de ces monstres métalliques. Les « charybdes » marchaient sur la Vague.

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