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Robert Harris: L’indice de la peur

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Robert Harris L’indice de la peur

L’indice de la peur: краткое содержание, описание и аннотация

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Alexander Hoffmann, patron d'un fonds d’investissement à Genève et génie de la finance, a trouvé un algorithme qui permet de multiplier les gains à l'infini : l’indice de la peur. Mais le scénario idéal bascule, Alexander est espionné. Ou paranoïaque ? La folie le guette et pendant ce temps l'indice de la peur s’emballe, le système devient incontrôlable, est sur le point de provoquer un krach boursier sans précédent. La panique s’empare des marchés et l'étau se referme : Alexander ne pourra peut-être plus détruire le monstre qu’il a créé, un monstre numérique et immortel. Thriller psychologique de haute voltige, trépidant et terrifiant, prouve une fois encore l'incroyable talent de Robert Harris, son goût de l’intrigue et du complot, sa fascinante maîtrise du suspens. Robert Harris est l'auteur de (Pion, 2010, disponible en Pocket), sous le titre et pour lequel Polanski et Harris ont reçu le César du meilleur scénario. Paul Greengrass, réalisateur de La Vengeance dans la peau, adaptera en 2012. Traduit de l'anglais par Natalie Zimmermann

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— Je ne voulais pas t’inquiéter. Et puis, je n’ai jamais pu en être tout à fait sûr.

— Il a peut-être surveillé votre maison pendant quelque temps, avança Leclerc, ou bien il a pu vous suivre. Vous avez pu le voir dans la rue sans en avoir conscience. Ne vous en faites pas. Ça vous reviendra. Qu’est-ce qu’il faisait dans la cuisine ?

Hoffmann jeta un coup d’œil en direction de Gabrielle. Il hésita.

— Il… aiguisait des couteaux.

— Mon Dieu ! s’écria Gabrielle en portant la main à sa bouche.

— Vous pourriez l’identifier si vous le voyiez ?

— Oh, oui, assura farouchement Hoffmann. Comptez là-dessus.

Leclerc tapota son calepin avec son stylo.

— Nous devons faire circuler cette description, dit-il en se levant. Excusez-moi un instant.

Il sortit dans le vestibule.

Hoffmann se sentit soudain trop fatigué pour continuer. Il ferma les yeux et appuya la tête contre le dossier du canapé avant de se rappeler soudain sa blessure.

— Pardon. Je suis en train de bousiller tes meubles.

— On s’en fout, des meubles.

Il la dévisagea. Elle paraissait plus âgée sans maquillage, plus fragile et — une expression qu’il ne lui connaissait pas — effrayée. Cela lui fit mal. Il parvint à lui sourire. Elle commença par secouer la tête puis, brièvement, à contrecœur, elle lui sourit à son tour et, pendant un instant, il voulut croire que toute cette histoire n’était pas si grave que ça : qu’il s’agissait sans doute d’un vieux clochard qui avait découvert les codes d’entrée sur un bout de papier tombé dans la rue, et qu’ils finiraient par rire un jour de toute cette histoire — son coup sur la tête (avec un extincteur !), sa bravoure de pacotille et l’inquiétude de sa femme.

Leclerc revint dans le salon avec deux sachets en plastique transparents contenant des pièces à conviction.

— Nous avons trouvé ça dans la cuisine, annonça-t-il en se rasseyant avec un soupir.

Il brandit les sachets. L’un d’eux contenait une paire de menottes, l’autre ce qui ressemblait à un collier de cuir noir équipé d’une balle de golf noire.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Gabrielle.

— Un bâillon, répondit Leclerc. Il est neuf. Il provient sans doute d’un sex-shop. C’est pas mal utilisé par les adeptes du SM. Avec un peu de chance, on pourra retrouver sa trace.

— Oh, mon Dieu ! s’exclama Gabrielle en regardant Hoffmann d’un air horrifié. Qu’est-ce qu’il allait nous faire ?

Hoffmann ressentit une nouvelle faiblesse. Il avait la bouche sèche.

— Je ne sais pas. Nous enlever ?

— C’est certainement une possibilité, concéda Leclerc, qui regarda autour de lui. Vous êtes riches, et c’est une raison suffisante. Mais je dois dire qu’on n’a jamais entendu parler d’enlèvement à Genève. On est très respectueux des lois, ici. (Il ressortit son stylo.) Puis-je vous demander votre profession ?

— Je suis physicien.

— Physicien, répéta Leclerc, qui le nota en haussant un sourcil et en hochant pensivement la tête. Je ne m’y attendais pas. Anglais ?

— Américain.

— Juif ?

— Mais qu’est-ce que ça vient faire là-dedans ?

— Pardonnez-moi. Votre nom de famille… Je ne pose la question que pour le cas où il y aurait un motif raciste.

— Non, je ne suis pas juif.

— Et M meHoffmann ?

— Je suis anglaise.

— Et vous vivez en Suisse depuis combien de temps, docteur Hoffmann ?

— Quatorze ans, répondit-il, à nouveau submergé par une grande lassitude. Je suis arrivé dans les années quatre-vingt-dix pour travailler au CERN, sur l’accélérateur de particules LHC. J’y suis resté environ six ans.

— Et maintenant ?

— Je dirige une société.

— Qui s’appelle ?

— Hoffmann Investment Technologies.

— Et qui produit quoi ?

— Qui produit quoi ? Qui produit de l’argent. C’est un hedge fund, un fonds spéculatif, si vous préférez.

— D’accord, ça « produit de l’argent ». Vous êtes ici depuis combien de temps ?

— Je vous l’ai dit — quatorze ans.

— Non, je voulais dire ici — dans cette maison.

— Oh… Vaincu, Hoffmann se tourna vers Gabrielle.

— Un mois seulement, dit-elle.

— Un mois ? Avez-vous modifié les codes d’entrée quand vous avez emménagé ?

— Bien sûr.

— Et, à part vous deux, qui connaît la combinaison de l’alarme antivol et tout le reste ?

— La gouvernante, répondit Gabrielle. La femme de ménage. Le jardinier.

— Et aucun d’eux ne vit sur place ?

— Non.

— Quelqu’un connaît-il les codes à votre bureau, docteur Hoffmann ?

— Mon assistante.

Hoffmann fronça les sourcils. Son cerveau fonctionnait avec une lenteur désespérante, comme un ordinateur infecté par un virus.

— Oh, et puis notre responsable de la sécurité — il a tout vérifié avant qu’on achète la maison.

— Vous vous souvenez de son nom ?

— Genoud. Maurice Genoud, ajouta-t-il après réflexion.

Leclerc leva les yeux.

— Il y avait un Maurice Genoud dans la police de Genève. Je crois me rappeler qu’il est entré dans une boîte de surveillance privée. Bien, bien, fit-il, sa figure de chien battu prenant une expression pensive. Évidemment, il faut changer immédiatement toutes les combinaisons, précisa-t-il avant de se remettre à noter. Je vous suggère de ne pas communiquer les nouveaux codes à vos employés tant que je ne les aurai pas interrogés.

Une sonnerie se fit entendre dans le vestibule. Hoffmann sursauta.

— C’est sûrement l’ambulance, dit Gabrielle. Je vais leur ouvrir la grille.

Dès qu’elle fut sortie, Hoffmann demanda :

— Je suppose que la presse va avoir vent de tout ça ?

— Est-ce que ça pose problème ?

— J’essaye de faire en sorte que mon nom n’apparaisse jamais dans les journaux.

— Nous nous efforcerons d’être discrets. Avez-vous des ennemis, docteur Hoffmann ?

— Non, pas que je sache. Et, en tout cas, personne qui ferait une chose pareille.

— Un riche investisseur — un Russe, peut-être — qui aurait perdu de l’argent ?

— Nous ne perdons pas d’argent, répliqua Hoffmann, qui passa cependant en revue la liste de ses clients pour voir qui pourrait être impliqué — mais, non, c’était inconcevable. Vous pensez que c’est sans danger de rester ici, avec ce maniaque en liberté dans les parages ?

— Eh bien, on aura des hommes sur place la majeure partie de la journée, et on peut jeter un coup d’œil cette nuit — placer une voiture en surveillance devant la propriété. Mais je dois dire que, la plupart du temps, les personnes qui se retrouvent dans votre situation préfèrent prendre leurs propres précautions.

— Engager des gardes du corps, vous voulez dire ? dit Hoffmann en faisant la moue. Je ne veux pas vivre comme ça.

— Malheureusement, une maison comme celle-ci vous vaudra toujours des attentions indésirables. Et les banquiers n’ont pas vraiment la cote en ce moment, même en Suisse.

Leclerc parcourut la pièce du regard.

— Je peux vous demander combien vous l’avez payée ?

En temps normal, Hoffmann l’aurait envoyé se faire voir, mais là, il n’en avait pas la force.

— Soixante millions de dollars.

— Vous m’en direz tant ! s’écria Leclerc avec une grimace de douleur. Vous savez que je ne peux plus me permettre de vivre à Genève ? Ma femme et moi avons dû emménager de l’autre côté de la frontière, en France, parce que c’est moins cher. Du coup, évidemment, j’ai de la route à faire tous les jours, mais c’est comme ça.

Un bruit de moteur leur parvint du dehors. Gabrielle passa la tête par la porte.

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