G.J. Arnaud - Le Commander prend la piste

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Le Commander prend la piste: краткое содержание, описание и аннотация

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Une piste secrète cisaillerait l'Amérique latine du Nord au Sud, aménagée, construite, surveillée par les maquis castristes : la piste Fidel Castro, par laquelle peuvent s'engouffrer des centaines de camions bourrés d'armes et de ravitaillement, une rocade invisible du ciel faisant plus pour la réunification des groupes rebelles que n'importe quelle conférence politique.
Le Commander et Marcus Clark, son adjoint, se font engager comme camionneurs clandestins, descendent la fameuse piste Fidel Castro tracée au cœur de la jungle, sur les hauteurs de la Cordillère, dans les plateaux torrides.
Leur mission ? Établir une carte précise de la piste, placer des balises radio aux points stratégiques, détruire éventuellement

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Il se mit à rire.

— Dans un mois, le chantier se transportera à plus de trente miles. Ce sera encore pire. En pleine jungle, les moustiques, les maladies. Peut-être qu’on obtiendra une augmentation. De toute façon, j’espère en être. On m’enlève le plâtre dans huit jours. Je vais me rééduquer soigneusement et je serai paré ensuite.

Les trois hommes s’installèrent en face de lui. A la tête de chaque lit, il y avait une armoire. A côté du dortoir, plusieurs cabines de douches et des lavabos avaient été prévus. L’eau qui les alimentait était brûlante.

Lorsque Marcus et lui furent prêts, ils partirent en direction de la cantina pour juger de l’atmosphère.

— Je ne vois pas comment on découvrira la piste secrète « Fidel Castro », murmura Marcus Clark, à partir d’ici. Les guérilleros ouvrent le feu sur les camionneurs, ils ne les embauchent pas.

— Patience, nous venons simplement d’arriver. Il se présentera bien une occasion un jour ou l’autre.

— Roy, tu ne crois pas qu’il ait des copains à Langley ? Avec un poste pareil, il peut surveiller son monde.

CHAPITRE VII

Fonçant dans le brouillard de poussière, il dépassa le Berliet de Martinez. Ce dernier agita la main pour le saluer. Le G.M.C. était beaucoup plus rapide une fois chargé, mais Kovask commençait d’en avoir par-dessus la tête. Quatre jours qu’ils travaillaient sans relâche, Marcus et lui. Le camion roulait près de vingt heures par jour. Prudents, ils préféraient ne pas travailler durant les heures les plus chaudes. La température du radiateur montait si haut qu’ils en étaient impressionnés. De plus, il fallait faire des vidanges fréquentes, immobiliser de toute façon le camion. Les heures les plus agréables se situaient au creux de la nuit, entre onze heures et trois heures. Une relative fraîcheur descendait de la sierra et entrait dans la cabine.

Sa montre indiquait onze heures. Il pourrait faire deux voyages avant d’arrêter jusqu’à cinq heures du soir. Il reprendrait le manche jusqu’à neuf heures, puis Marcus le remplacerait jusqu’au lendemain matin. Un enfer. Et pour rien. La région était devenue subitement calme et les guérilleros ne s’étaient pas manifestés. De leur côté, ils n’avaient obtenu que de très maigres renseignements sur les maquis, et presque rien du tout sur la piste secrète « Fidel Castro ». Tout le monde savait que des armes de contrebande, de l’essence et des explosifs circulaient du nord vers le sud, mais nul n’aurait pu donner d’autres détails.

Maintenant, il roulait sur le remblai de la future autoroute, frôlait les profileurs et les bulldozers, klaxonnait lorsqu’il apercevait, dans la gélatine qui constituait l’horizon, les silhouettes noires des terrassiers.

En vue du terminus, il tourna à cent soixante degrés, mit en marche arrière, l’œil rivé à son rétroviseur. Il s’arrêta automatiquement, enclencha le vérin hydraulique. Un cauchemar, chaque fois. Le mécanisme avait une fuite qu’ils colmataient avec de la toile gommée que la chaleur empêchait de sécher. Une panne sur quatre, et l’obligation de poursuivre à la manivelle. Avec cinquante-cinq degrés de chaleur et les lazzis des autres camionneurs. Kovask s’était bagarré trois ou quatre fois déjà, mais il ne pouvait casser la figure aux cinquante camionneurs pour se faire respecter.

Marcus et lui se laissaient presque prendre au jeu. Certes, ils pensaient à leur mission, mais cette vie rude, sous un climat torride, en compagnie de ces hommes habitués aux coups durs, finissait par devenir exaltante. Ivre de fatigue, la peau corrodée par la chaleur et la poussière, on pataugeait en pleine violence physique et mécanique. Personne ne ménageait son voisin, personne ne s’écartait d’un centimètre sur la route et c’était toujours le plus froussard, le plus faible qui cédait le passage. Kovask et Marcus avaient déjà éraflé une bonne dizaine de camions, d’abord pour illustrer leur personnage, et ensuite parce qu’ils commençaient d’aimer ça. A la cantina, on buvait sec et beaucoup, et les bagarres éclataient pour un rien, se poursuivaient dans la nuit lourde où les projecteurs du chantier et les phares de la ronde infernale fournissaient les éclairages publics. Et puis, t’était le dortoir avec le bourdonnement des moteurs, l’impossibilité de se reposer vraiment, sauf après quelques verres d’aguardiente ou de whisky, le sommeil lourd de l’aube avec l’appréhension de l’heure où il faudrait foncer vers son véhicule, tirer sur le démarreur avec inquiétude. Une fois sur deux, le moteur refusait de partir et le grand cirque commençait. D’abord, on essayait de réparer soi-même bougies, vis platinées, filtre à air et filtre à huile, et puis on se ruait vers le premier mécano visible. Il fallait commencer par lui coller dix dollars dans la main pour qu’il réponde :

— De seguida.

Un tout de suite qui durait une heure, deux heures et nouait les nerfs des gars, les épuisait avant d’apprendre que la réparation durerait au moins la journée. Dans ces cas-là, ils finissaient par se retrouver à la cantina, buvaient des quantités énormes d’alcool et de bières glacées. Le patron devait les tirer au-dehors et les coller sous un appentis à l’ombre relative.

Le vérin tint le coup et il démarra sans attendre que la benne soit totalement retombée. Il fonçait à soixante à l’heure sur la future autoroute, sachant que plus loin sa vitesse tomberait à quarante et même à trente. Les gros-culs se traînaient à dix à l’heure dans la forte pente qui conduisait à la carrière de terre.

Là aussi, il s’agissait d’arriver avant les trop gros, ceux qu’on ne remplissait qu’en trois coups de bulldozer, alors que le G.M.C. débordait en une seule fois. Kovask doublait dans les pires conditions, les chauffeurs ne faisant aucun effort pour lui céder le passage. Il lui arrivait de sentir les bas-côtés s’effondrer sous le poids. Dans ce cas, il accélérait vivement, filait avant qu’un contrôleur de la piste ne relève son numéro. Et toujours cette poussière rougeâtre qui pénétrait partout et dont les poumons se tapissaient sournoisement, qui engorgeait les filtres et même l’essence. Malgré l’étanchéité des bouchons, on arrivait à boucher ses gicleurs.

Il soupira de soulagement en constatant qu’il n’aurait qu’une minute à attendre. Le bull achevait le remplissage d’un énorme Mack qui emportait plus de vingt tonnes de terre en une seule fois, mais marchait précautionneusement sur la piste, embouteillant la circulation et se faisant insulter dix fois à la minute.

L’œil rivé au Mack, il déboucha sa bouteille thermos, avala une gorgée de Coca-Cola glacé, de quoi rafraîchir sa bouche et pouvoir allumer une cigarette. En même temps, il surveillait son rétroviseur. Si l’on perdait trop de temps à démarrer, il y avait toujours un salaud pour vous couper la route.

Il fonça à la place du Mack. Au-dessus de sa tête, le gros bulldozer gronda, recula pour que sa lame rafle le plus de terre possible et il repoussa le tout en direction du G.M.C. Au début, Kovask rentrait la tête dans les épaules lorsque toute cette masse s’abattait sur le camion en entier. Il y en avait autant sur le toit, le moteur et par terre que dans la benne. Déjà, il démarrait pour laisser la place, emportant ses cinq tonnes bien tassées, mais inutile de discuter avec Roy à ce sujet une fois le prix d’un voyage décidé. Six dollars pour eux, mais ils en transportaient bien pour huit. Le géant américain devait se faire les choux gras, même si le motif de sa présente était ailleurs.

Le chemin du retour était encore pire, rendu glissant par la terre perdue des autres camions. Malgré la sécheresse, elle restait humide suffisamment longtemps pour provoquer de spectaculaires dérapages. Plusieurs fois, Kovask s’était retrouvé en travers, alors que de gros transporteurs arrivaient à fond de train et ne manifestaient pas l’intention de freiner. Leurs museaux puissamment protégés de tubes d’acier ne risquaient rien, et ils l’auraient envoyé au ravin sans effort pour ne pas perdre quelques minutes.

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