Frédéric Dard - Berceuse pour Bérurier

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Berceuse pour Bérurier: краткое содержание, описание и аннотация

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Je file un coup de périscope hors de ma tire et j'avise une Aronde qui se pointe à ma hauteur. L'espace d'une seconde, je me dis qu'il s'agit peut-être d'un coup fourré organisé par des malfrats qui en voudraient à mes os préférés, mais je décide que des truands ne klaxonneraient pas pour se signaler à mon attention et que, d'autre part, ils ne rouleraient pas dans une Aronde. Alors je lève le pied…

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— En Angleterre, rêvassé-je.

— Ça te contrarie ? se tourmente le déchet humain.

— Oh non, fais-je. Au contraire, Pinuche, ça me va.

Pinaud retire son mégot de mégot, l’éteint sur sa semelle et murmure :

— J’aimerais te demander quelque chose, San-A.

— Vas-y.

— Il me serait agréable que tu m’appelasses par mon nom. Lequel est Pinaud, PINAUD, je me permets de te le rappeler. Hiérarchissiquement, je suis ton inférieur, soit. Mais j’ai le bénéfice de l’âge…

J’acquiesce.

— Il en sera fait selon vos désirs, monsieur l’inspecteur principal Pinaud. Par contre, à partir de dorénavant, je vous interdis de me tutoyer…

Il en est meurtri, le cher abîme d’imbécillité.

— T’es c…, soupire-t-il ; si y a plus moyen de plaisanter !

CHAPITRE X

Dans lequel je suis de plus en plus partisan de la méthode San-Antonio

Debout devant le rade d’un troquet, face à un verre de scotch dans lequel fond mollement un cube de glace, je fais ce que les boxeurs appellent « le poing de la situation ».

Cette fois, pas d’erreur, le Petit Marcel est dans le bain jusqu’aux sourcils.

Ce type est un malin. Il m’a bien eu en présence de Béru, en jouant les impuissants. Au contraire, il est doué d’un pouvoir hypnotique beaucoup plus considérable qu’on pourrait le penser. Je suis prêt à vous parier un cas de conscience contre un cassis à l’eau qu’il a envoûté grand-papa la nouille et qu’il lui a soufflé de ramasser ses diams et de venir les lui remettre à Londres. L’autre, vu son grand âge et sa débilité mentale, a obéi. Et, en ce moment même, une louche transaction s’opère sans doute à Londres. Voilà pourquoi le mage tenait tant à ne pas rater le zinzin plein d’ailes de la compagnie Air France.

— Donnez-moi un jeton, fais-je au barman qui respecte ma méditation en bouquinant Détective .

Je vais tuber à mon aminche le standardiste. Une paire d’heures s’est écoulée depuis le premier rapport des poulets londoniens (in english, the London’s chicken ) et comme les Rosbifs sont l’exactitude faite monarque, je suis absolument certain qu’ils ont redonné de leurs nouvelles.

Je ne me suis pas trompé.

— On vient d’appeler, m’annonce le préposé. Il paraît que Zobedenib aurait reçu un coup de grelot à son hôtel. Il a frété un taxi et il est actuellement en route pour une destination inconnue. Vu la situation, les gars du Yard, qui ont pris les choses en main, annoncent un rappel avant deux heures pour le cas où des dispositions seraient à prendre…

— Merci…

Je raccroche. Mon auriculaire à haut-parleur m’annonce que d’ici peu les événements vont se précipiter. Où, je n’en sais encore rien, mais ils vont se précipiter.

Je retourne boire mon whisky. Faut être à la hauteur. Bon. Gamberge posément, San-A. Tu le sais bien que de la réflexion jaillit la lumière.

En somme, cette histoire, c’est quoi ? Un riche-vieux-chnock-gâteux épris de sciences occultes qui fait la connaissance d’un professionnel de la question.

Le professionnel voit le parti qu’il peut en tirer et se met à lui malaxer le subconscient. La chose est reconnue possible.

Le vieux client disparaît avec les cailloux de la famille. Gros émoi dans la basse-cour. On charge officieusement mon service d’enquêter. Le Gros va au théâtre. C’est un courageux, Béru. Un solide gaillard qui n’a pas froid aux châsses.

Il monte sur la scène afin de voir Petit Marcel dans l’exercice de ses étranges fonctions. Petit Marcel découvre qu’il s’agit d’un flic. Après la séance, il endort Béru. Le lendemain c’est relâche et on ne découvrira pas le Gros. Lorsque mon collègue sera découvert, lui, Zobedenib, aura récupéré les diams du vieux. Pas de délit. Le vieux étant ramolli de la coiffe, on l’enverra dans une maison de repos. Et ni vu ni connu… La remise des cailloux ayant lieu en terre étrangère, il est peinard… Même si on fait un rapprochement entre les deux voyages, personne ne peut prouver que…

Jusque-là, je pige. Mais il y a un os. Et cet os c’est le concierge de l’Alcazar. Lorsqu’il a été buté, Zobedenib était à cinq mille mètres d’altitude. Conclusion, ça n’est pas le Petit Marcel qui a embroché le pipelet. Et puisque ce n’est pas lui, c’est que Petit Marcel a un complice.

Dites, les gars, à ma place, vous iriez faire un brin de causette avec le brave Landowski, non ?

Oui ?

Eh bien, pour une fois vous êtes moins patates que je le pensais.

En route !

Je lance un bif au loufiat et, en attendant la mornifle, j’attire à moi un baveux du jour étalé en bout de rade. En bas de page, je lis un entrefilet annonçant que le Congrès international de la magie s’ouvre aujourd’hui à Londres.

Il a bien choisi son coup, Zobedenib.

Un futé numéro un, je vous dis. Qu’il va falloir manipuler avec soin.

* * *

Encore la rue Chanez. Elle est alanguie dans la torpeur de l’après-midi. Je fonce à la Résidence.

Le veilleur de noye a été remplacé par une charmante personne dont le corsage ressemble plus à une carte en relief du ballon d’Alsace qu’à la plaine de la Crau.

Je lui demande s’il y a quelqu’un chez Zobedenib, elle me répond que oui et je lui dédicace mon sourire 76 ter , modèle « décommandez vos rendez-vous, je reviens tout de suite ». Ensuite de quoi je me précipite dans l’ascenseur sur les talons d’une vieille madame au visage tellement plâtré que pour sourire elle est obligée de se faire desceller la bouche au ciseau à froid.

Afin de lui éviter des frais de main-d’œuvre, je m’abstiens de faire de l’esprit et c’est d’un pas léger que j’attaque le Dalami du couloir.

Studio 1406 ! Toc-toc-toc. Qui est laga ? Le chaperon rouquinos ou bien le gros méchant loup ? Combien de lourdes se sont dressées devant moi au cours de ma carrière ? Des milliers… Des millions peut-être. Le vrai rempart des hommes, dans le fond, après leur couennerie c’est leur porte. Un panneau de bois fermé par une serrure de tirelire, et ils se figurent qu’ils sont parés, les hommes ! De vraies patates inconscientes.

Je badaboume encore un brin de moment sur, autour, et au pourtour de la sonnette sans obtenir la moindre réponse.

Donc la préposée d’en bas m’a bluffé : il y a nobody dans le studio du trop célèbre Zobedenib ! Les tourtereaux sont allés roucouler ailleurs ?

Ou si c’est qu’ils ne veulent pas ouvrir ?

À voir !

Sésame en pogne, je tutoie une seconde fois la serrure et, comme elle aime les familiarités, elle s’ouvre comme un melon trop mûr.

Illico mon renifleur entre en action. Il règne une drôle d’odeur dans cet appartement. Une odeur de, disons-le, gaz d’éclairage…

Mordu aux rognons par une légitime inquiétude, je bondis dans l’estanco.

Madoué ! comme s’exprimerait Bécassine. Quel spectacle affligeant !

Landowski et la môme Solange gisent au travers du divan, plus inanimés que deux filets de morue à l’étalage d’un épicier.

La porte de la cuisine est ouverte et le bruit sifflant du gaz mortel se fait entendre de façon continue.

L’âcre odeur me chavire. Je bondis et je constate que tous les robicos de la cuisinière sont ouverts.

Je commence par fermer, puis je cavale aux fenêtres afin d’établir un solide courant d’air.

Faut le voir, San-Antonio, dans les cas d’urgence ! Plus prompt que la foudre ! Plus fougueux que toute l’écurie Boussac. Plus déterminé que le champion du saut en parachute !

Je commence par cramponner la gosse sous les ailerons et je la coltine dans le couloir en criant à la garde.

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