Frédéric Dard - Mes hommages à la donzelle

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Mes hommages à la donzelle: краткое содержание, описание и аннотация

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Il y a une multitude de choses dont j'ai horreur. Les jeunes filles de plus de quatre-vingt-dix-sept ans, tout d'abord. Le poisson mal cuit, aussi. Puis les liaisons mal-t-à-propos ; les ouatères de wagons de seconde classe ; les bitures de Bérurier et les imparfaits du subjonctif de Pinaud. Mais s'il y a une chose qui m'énerve par-dessus tout, qui me file au bord du delirium très mince, c'est qu'on s'asseye sur mon chapeau… Surtout au cinéma… Surtout quand on l'a fait exprès… Surtout quand c'est le dargeot d'un truand qui est l'outrageur… Surtout quand tout ça cache le commencement d'une aventure insensée !

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— Merci, boss, c’est chic à vous !

— San-Antonio !

— Patron ?

— Il faut que…

— Entendu, chef.

— Vous avez compris ?

— Vous voulez le professeur, et la bande d’espions à votre apéritif de demain ?

— C’est un peu ça…

— Eh bien, vous les aurez.

— Je compte sur vous. Où puis-je vous toucher en cas d’urgence ?

— Avant une demi-heure je serai à la grande boite… Laboratoire…

— Parfait.

Je tourne le bouton du poste et le silence retombe dans l’auto.

Je baisse le rétroviseur pour voir à quoi ça ressemble le type le plus culotté du monde et de ses environs. J’ai le regard fiévreux ; ma barbe a poussé… Bref, j’ai pas du tout la bouille du Tarzan qui doit pourfendre une organisation d’espionnage en quelques heures. Mais alors pas du tout !

Je tourne mélancoliquement mon démarreur et je vais faire un tour du côté de chez la mère Tapedur.

CHAPITRE VIII

PRESTIDIGITATION EN FAMILLE !

Les studios de la vieille dame distinguée sont silencieux lorsque j’arrive. C’est le grand K.-O. des viandes apaisées. Les couples qui les occupent ont rassasié leur soif d’eux-mêmes… Pas un bruit de lavabo, pas un soupir, pas un cri de souris appelant sa maman, pour faire croire à son mironton de service qu’il lui cloque le grand frisson, l’immense, le vrai, celui qui vous met les doigts de pied en bouquet de violettes.

Je carillonne pendant un bout de temps. Enfin la mère Tapedur s’annonce dans un peignoir de pilou rouge. Elle a autant de hanches qu’une jument berrichonne, avec un quintal de roploplos sur le devant, complètement livrés à eux-mêmes.

Elle essaie de me faire du charme, de me vamper ; pour cela, elle veille à ce que le haut de son corsage bâille comme un crocodile occupé à lire un roman de Mauriac. Ce que je découvre alors entre les pans du peignoir ferait reculer un bataillon de légionnaires ivres.

Histoire de lui faire comprendre que je suis réfractaire à ses charmes, je lui dis :

— Avant toute chose, fermez ce peignoir, chère madame, ou bien vos machicoulis vont s’écrouler sur le parquet.

Elle est vexée. D’un revers de main elle rappelle à l’ordre son râtelier, lequel cherche à recouvrer son autonomie.

— Voyons, lui dis-je, pendant mon absence, que s’est-il passé ?

Elle reprend son souffle qui lui aussi se barrait. Décidément, si elle n’y prend point garde, elle va se morceler comme un puzzle.

— Sitôt après votre départ on a appelé le monsieur au téléphone.

— Vous saviez son nom ?

— Il s’appelle Maubourg…

— Comme Latour ?

— Quelle tour ?

— Latour-Maubourg…

— Oui. Un homme m’a dit de l’appeler. J’ai commencé à jurer qu’il n’était pas là ; je pensais que vous m’auriez demandé d’agir ainsi si vous aviez prévu cet appel…

Je tique un peu. Cela m’en met plein les lotos ; c’est ce que les gens qui savent jaspiner appellent « une pierre dans mon jardin ».

— Et alors ? poursuis-je.

— Alors celui qui appelait a dit qu’il était inutile de le chahuter ; qu’il savait à quoi s’en tenir, qu’il était un ami au monsieur qui venait de sortir (donc à vous) et que si je ne me hâtais pas de prévenir M. Maubourg, il viendrait m’arroser d’essence et mettre le feu à mes fringues…

— Vu, vous avez donc appelé le type. Et puis ?

— Il a eu l’air épouvanté.

— Ah oui ?

— Oui ; il n’a dit que quelques mots…

— Lesquels ?

Elle fronce ses sourcils épilés, comme un derrière de singe.

— Il a dit d’abord : « Qui est-ce ? » Puis il a fait « Ah ! bon. ». Ensuite il s’est écrié : « Comme ça ! de suite. » Alors l’autre a parlé fort ; j’entendais de la pièce voisine ses éclats de voix, M. Maubourg s’est décidé. Il avait l’air contrit. Il a dit : « Dans ce cas… ». Il a raccroché et a regagné sa chambre. Cinq minutes plus tard, ils sont partis presque en courant…

J’opine du bonnet. Elle sait faire un rapport la mère Truquemuche ! Comme si vous y étiez, dirait Audouard.

— Dites-moi, maman, lui fais-je, (Et soit dit entre trois yeux, comme faisait la femme du borgne à son mari, cette appellation ne semble pas lui plaire.)

« Dites-moi, l’interlocuteur, il n’avait pas une voix basse et traînante ? »

J’imite la voix du mec qui m’a appelé au « Champignon ».

— C’est tout à fait cela ! s’écrie-t-elle.

— Bon, merci.

Je grimpe dans la chambre mise à ma disposition précédemment et je débranche mon magnétophone. Avant de filer, je vais jeter un coup d’œil à la pièce qu’ils occupaient.

Le désordre me laisse rêveur. J’ai idée que la môme Héléna devait être une affaire cotée en bourse du point de vue amour. On devait, avec une gerce pareille, avoir l’impression de faire l’amour avec le Stromboli, je m’y connais un brin, n’ayant pas fait mon éducation sexuelle par correspondance, mais sur le champ de manœuvres…

Tout est ravagé sur le pucier. Je bigle à fond le spectacle ; non par sadisme, mais parce qu’après tout je suis un sacré salaud de flic et que le premier devoir d’un flic, lorsqu’il a des mirettes, c’est de les faire fonctionner.

Je découvre, sur l’oreiller, quelques cheveux. On trouve toujours des tifs sur un oreiller, sauf évidemment sur celui de Yul Brynner.

Je les ramasse, non que j’aie l’intention, de m’en faire tricoter un passe-montagne, mais quelque chose attire mon attention. Je m’aperçois que les crins de la pauvre môme Héléna n’étaient pas bruns à l’origine, mais d’un blond vénitien. Elle se faisait teindre comme la plupart des souris. Près de la racine, les cheveux sont brillants comme des fils d’or rouge.

Rappelez-vous qu’il faut vraiment être une gonzesse déplafonnée pour se faire peinturer la tignasse, quand on a des douilles pareilles !

Enfin, il n’est plus question d’esthétique au sujet de cette fille. Maintenant, avec sa tête tranchée elle aurait des tifs en platine que ça n’améliorerait pas son sort.

Je hausse les épaules avec tout le fatalisme qui convient à la situation.

— Si, par hasard vous revoyez ce Maubourg, dis-je à la vieille dame, prévenez-nous illico.

« Vous avez une idée de son adresse ? »

— Aucune.

— Tenez-vous à la disposition de nos services…

Elle me jure que oui. Je les salue, elle et ses roploplos.

J’arrive au laboratoire. Le chef m’y attend en rongeant son cure-dents. Lorsqu’il est énervé, ou bien il chante « Les jolis soirs dans les jardins de l’Alhambra », ou bien il se nourrit de cure-dents.

Il regarde mon magnétophone comme s’il s’agissait d’une tortue de mer.

Je l’affranchis sur l’usage que j’ai fait de l’appareil.

— Pas mal, convient-il.

Le type du labo s’empare de la boîte noire, et s’éclipse. Quelques minutes plus tard il nous fait signe d’entrer dans la cabine du son. Ce que nous entendons alors flanquerait de la virilité à un bahut normand.

Le chef, le technicien et mégnace, nous n’osons plus nous regarder. Ce sont des gloussements, des soupirs, des petits cris, des râles… La môme aimait mieux ça que la pêche au lancer léger ! Elle a dit des mots égarés et certains de ces mots sont dans une langue étrangère.

Le chef prête l’oreille et se fait repasser plusieurs fois ces passages.

— Ce n’est ni de l’anglais, ni de l’allemand, ni du russe, ni de l’italien…, assure-t-il.

Je le regarde avec admiration. Il parle une flopée de langues ; comme dit l’autre, il est polygone, car il habite Vincennes.

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