Frédéric Dard - Passez-moi la Joconde

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Passez-moi la Joconde: краткое содержание, описание и аннотация

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Un petit loulou de Poméranie qui se tortille dans la clarté de mes phares. Il vient de se faire ratatiner par une bagnole.
Moi, bonne pomme, je descends pour lui administrer la potion calmante et définitive.
Et voilà !
Je viens de mettre le doigt dans un engrenage qui conduit à une Joconde au sourire plutôt inquiétant

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Un gros rouleau de papier blanc, de papier mince…

Je le déroule un brin… C’est du papelard vierge… Il y en a là une cinquantaine de kilos…

Comprenne qui peut…

J’en prélève un morceau, comme on fait d’un coupon, chez le tailleur, afin de l’examiner tout à loisir. Après quoi je les mets.

Ce Compère est un drôle de zig… Si je m’écoutais, j’irais lui dire deux mots à ma façon, histoire de me faire éclairer ma lanterne.

Seulement ça démolirait ses petits vases de Sèvres, car lorsque j’ai une explication avec un mec, on est obligé d’envoyer la voirie par-derrière pour déblayer les gravas !

Mon petit doigt me dit qu’il ne faut rien brusquer. Il y a des enquêtes dans lesquelles il faut bondir les poings serrés, le soufflant à la main, d’autres, au contraire, dans lesquelles on avance, avec précaution, comme dans la jungle Vietnamienne.

Oui, prudence !

Je boucle soigneusement la trappe, puis le rideau du garage.

Tout ce cirque pour un rouleau de faf !

Mieux que l’heure, ce qui rythme l’existence d’un gaillard comme moi, ce sont les repas.

Un terrible besoin de morfiler me triture le gésier.

Je me dis qu’étant à Lyon, patelin de la gastronomie, je peux m’expédier un petit gueuleton confortable. Je ne dois tout de même pas oublier que je suis en vacances !

J’ai suffisamment vadrouillé entre Rhône et Saône pour connaître les bons coins. Duboin, justement, m’a fait connaître les endroits où l’on rencontre le poulet chasseur dans les meilleures conditions.

En m’attablant, je songe à Duboin. Il doit me prendre pour le plus beau tas de fumier que la terre ait porté. Voilà une paye que j’ai embarqué sa tire sans lui donner signe de vie.

Le moins que je puisse faire, c’est de lui tuber mes regrets.

Tandis qu’on met ma poularde en route, je lui téléphone.

Comme prévu, il est dans une rogne noire.

— Ah ! c’est toi, flic d’opérette ! beugle-t-il… Marchand de pétard ! Fesse de poulet ! Figure de rat ! Condé marron !

Il stoppe pour reprendre son souffle. Vite, j’en profite pour shooter.

— Fais gaffe à ton asthme, bouffi ! Deux mots de plus et c’était la syncope ! C’est pour ton horrible brouette que tu fais ce ramdam ! Qu’est-ce que les demoiselles des postes doivent penser en entendant tes invectives !

Il a repris sa respiration. Il en profite pour me dire que les demoiselles des postes il les a au cul. Je lui réponds que de mon côté c’est plutôt le contraire. qui se produit. Et pour cause ! Ça le fait marrer…

— Où en es-tu ? demande-t-il brusquement.

— Ça serait long à t’expliquer…

Il renaude sauvagement. Il m’explique qu’il avait cru dégringoler le type le plus salaud du monde pendant la guerre, en abattant un colonel de la Gestapo qui arrachait les yeux de ses détenus avec une cuillère à café ; mais qu’il s’apercevait maintenant qu’il se berçait d’une douce illusion, vu que le roi des salauds était à l’autre bout du fil.

Cela dit, il reprend un nouveau bol d’air.

— Fais pas le journaleux, Dub, je rouscaille. Je te dis que je n’ai pas le temps, maintenant !

— Et ma tire, dis, tordu ? J’ai peut-être le temps d’attendre des jours entiers comme je fais ? Si c’est la communication qui t’épouvante, appelle en P.C.V. ! Monsieur devient radinus, à cette heure ?

Je comprends que je m’en ferai un ennemi mortel si je n’y vais pas de mon petit résumé.

Il écoute tout sans l’ouvrir, au point que j’ai l’impression d’être seul en ligne.

— Tu es là ? je m’inquiète lorsque j’ai déballé le pactage.

— Et un peu là, affirme-t-il. Dis, ça se corse chef-lieu Ajaccio, ton affaire ! Merde, ça me fait regretter la belle époque où je buvais de l’infusion de queues de cerises pour mieux pisser de la copie !

« Alors, enchaîne-t-il, ce Compère tremperait dans la soupe ?

« Et il cache du papelard comme si c’était de l’or, tu trouves pas ça marrant, toi ?

— Un peu, mon neveu !

— Quels sont tes projets ? demande-t-il encore…

— Bouffer un poulet, dis-je. Le garçon me fait des signes désespérés pour me dire que c’est prêt…

— Je voudrais que tu en crèves !

— Merci ! à part ça, t’as pas d’autres vœux à formuler ?…

Il réfléchit…

— San-Antonio, se décide-t-il, tu n’es qu’un manche, ta matière grise t’est aussi utile qu’un dictionnaire à un mille-pattes !

« Qu’est-ce que t’as dans les châsses, dis, trésor, pour ne pas savoir utiliser les indices en ta possession ? Tiens, tu m’écœures, rappelle-moi ce soir, je vais t’avoir du nouveau.

Et il raccroche.

Je me gratte l’oreille et, pensif, je vais tenir compagnie à mon poulet.

Qu’est-ce qu’il a voulu dire, Duboin, par ses invectives finales ?

Y aurait-il un détail que j’aurais pas interprété ?

J’ai beau faire une petite revue de détail, je n’y entrave que pouic ! Après tout, j’aurais bien tort de me casser le couvercle.

D’un haussement d’épaule, je balaie mes inquiétudes et je me lance sur la tortore.

Le garçon me présente l’addition. Je mets la pogne à la feuille et je tire une pincée de biffetons. J’extrais de quoi cigler mon orgie. Comme je vais pour ranger le restant de mes talbins, j’ouvre la bouche comme si on allait m’installer le chauffage central dans le gosier. Ma surprise est trapue, parole !

Figurez-vous qu’au milieu de mon fricotin, se trouve le morceau de papier que j’ai prélevé sur le rouleau, dans la cave à Compère.

Je constate alors que ce papelard est le même que celui des billets ! Oui, mes vaches, vous entendez bien ? Le même ! Je comprends pourquoi Compère le planque aussi soigneusement : c’est du papelard à biffetons !

Je le bigle par transparence, il est filigrané… Du vrai ! Du vrai de vrai, mes aïeux !

Je reste songeur…

— Voici votre monnaie, Monsieur, fait le garçon.

— Gardez tout ! je lui dis avec un geste noble.

Il fait la grimace. C’est seulement une fois dehors que je réalise pourquoi : il ne restait que dix-huit centimes dans l’assiette !

À la routière, je suis reçu par un jeune blanc bec d’inspecteur, qui me laisse entendre que les collègues de Paris ne l’impressionnent pas.

Il est grand et blême, avec des yeux vaches. Ces yeux qu’ont les représentants de la loi, depuis le garde-champêtre de votre village jusqu’aux plus hautes autorités policières.

— En quoi le vol d’une voiture dans notre secteur peut-il vous intéresser ? dit-il.

J’en reviens pas. Jamais un blanc bec ne m’a parlé sur ce ton et avec cette suffisance.

Je sais bien qu’il ne connaît pas mon nom, mais tout de même.

— Quel rapport pourrait-il exister, entre ma main droite et ta joue gauche, hé, morveux ! je murmure…

— De quoi ! tonitrue-t-il… Vous vous croyez où, ici ?

— En face d’un malotru !

Il me porte un swing ma foi pas trop mal expédié, mais que je ne reçois pas parce que j’ai le don de l’esquive parmi tant d’autres !

Moi, je plonge, je le cramponne par les cannes et je l’envoie valdinguer par-dessus son bureau. Il tombe pile sur un classeur qui se trouve mal et se transforme en fagot de petit bois.

Il est à peu près K.O., le petit gland. Un filet de sang coule sur son front et, assis au milieu d’une débauche de cartons verts, il n’a pas fière allure.

La porte s’ouvre, un type athlétique apparaît.

— Que se passe-t-il ? demande-t-il.

Je le reconnais immédiatement : c’est Riche, un collègue que j’ai connu autrefois.

— San-Antonio ! s’écrie-t-il…

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