Parce que si on regarde un peu les sondages, on s’aperçoit que dans l’année il a été fait 540 sondages, comme d’habitude en France par an, alors que les États-Unis en font je crois 180. Là, c’est un truc extraordinaire, nous, on est extrêmement balèzes, on est très forts. Alors, il y a un sondage qui dit que soixante-deux pour cent des Français pensent que les hommes politiques sont des menteurs. Il y en a soixante-dix pour cent qui pensent qu’ils s’en foutent, et quatre-vingt-quinze pour cent qui pensent que c’est tous les mêmes.
Mais il y en a soixante-deux pour cent qui pensent que c’est des menteurs, au sens euh… tranché du terme, c’est quand même important, des menteurs… Et le même sondage dit que quarante-trois pour cent des Français pensent que la presse est trop militante, qu’elle est trop attachée à la politique.
Ça veut dire que… Par exemple, j’ai entendu Mourousi parler hier ou avant-hier sur Canal Plus du fait qu’il allait pas voter. Je pense que Yves Mourousi, c’est un leader d’opinion. Je pense que si une petite douzaine de personnes comme ça disaient ça en France, on arriverait à des pourcentages d’abstention effarants.
Car si on regarde bien, à part les politiciens, et puis la presse qui s’est donnée ce titre de quatrième pouvoir avant de l’avoir parce qu’évidemment elle risquait de passer à travers, à part des gens comme ça, je vois pas très bien qui pourrait le prendre, le pouvoir…
Alors, en fait, la question est-ce que c’est un nouveau pouvoir, ça dépend aussi si vous le voulez ou pas ! Et pour qu’on sache si c’est bien, si ça plaît à tout le monde, il faut le faire.
Parce qu’effectivement je parle de ça pour les Restaurants du Cœur, mais il y a plein d’applications au système. À partir du moment où on est en position d’utiliser les médias pour faire autre chose que sa profession, ou d’utiliser sa profession pour faire autre chose, il y a beaucoup de possibilités.
Moi j’ai choisi les Restaurants du Cœur parce que d’abord on a des excédents de production en Europe. D’autre part, l’Europe achète en plus de la nourriture à l’étranger, qu’elle stocke pour revendre après sans jamais l’utiliser, pour des raisons de commerce extérieur, de change avec d’autres pays. On se retrouve donc avec des excédents effarants.
Si on prend l’exemple du beurre, le beurre ne peut pas être vendu plus de 4 F par la Communauté après l’avoir conservé vingt-quatre mois et les vingt-quatre mois de conservation d’un kilo de beurre coûtent 6 F… C’est-à-dire que s’ils nous le donnent, ils gagnent 6 F ! C’est beaucoup…
Notre système administratif est donc l’objet d’un tas de conneries de ce genre-là. L’affaire des Restaurants du Cœur, ça l’intéresse, parce que ça prend à la Communauté européenne très peu de quantités de nourriture, et que ça coûterait aussi très peu à l’État de faire un crédit d’impôt sur le sujet. Dans l’ensemble, c’est jouable sur les deux tableaux.
Alors, aujourd’hui, j’ai fait faire une loi par des énarques qui n’avaient pas réussi à devenir ministres, donc davantage intéressés par le fait d’en faire une alors qu’ils en auraient jamais l’occase donc ils ont fait ça vraiment bien, voyez… Après ça, je l’ai portée à droite, à gauche (c’est le cas de le dire), et puis ils ont tous mis leur grain de sel, ils ont tous pensé que c’était une bonne idée, on a réussi à en réunir quelques-uns avec beaucoup de difficultés, à la télé, dans une émission…
Si ça a pu se faire, cette affaire-là, c’est parce que c’est le show-business qui l’a faite. Tout le monde dit maintenant, c’est Coluche qui a fait tout ça, c’est pas exactement vrai, c’est vraiment l’utilisation du média Europe 1 et puis tous, tous qui étaient pas au courant… La notion que je tirerais de cette affaire-là, c’est que pour réussir à faire du bien, déjà il a fallu baiser tout le monde… Ça, c’est vrai ! Y a pas un mec qui m’a dit, moi je veux bien… Y a des mecs à qui j’ai dit voilà maintenant on va le faire, parce que voyez… Là, ils ont accepté.
J’avais fait l’opération d’Europe 1 avant que l’agriculture soit forcée d’accepter l’ouverture des produits européens… je les ai abusés partout, quoi !
Alors je disais qu’il n’y a que ma profession qui peut faire ça, dans l’état actuel des forces. Si c’est un parti politique qui a l’idée, les autres le suivront pas, donc la moitié des médias se ferme d’un côté, si c’est un journal qui a cette idée, les autres le suivront pas, si c’est une chaîne de télé, les autres suivront pas, parce que ce serait faire faire une publicité trop belle à quelqu’un.
Donc, il y a vraiment que dans le show-business où on peut trouver des frères et des sœurs… enfin des potes, nous on appelle ça, de toutes les couleurs… C’est vraiment le show-business où on peut trouver des gens qui sont engagés à droite et à gauche, et qui s’en foutent.
C’est un peu ça le rapport avec vous… Comme le disait mon introduction, vous laissez tout dehors, en entrant. Nous, c’est un peu le même style, on n’est animé que par le spectacle.
Quand j’ai amené cette idée-là, travaillant avec un mec qui s’appelle Lederman, qui n’est pas venu parce qu’il n’a pas été invité, mais qui est largement plus important que moi, dans l’affaire et dans ma carrière aussi, on a un sens du spectacle, on était sûrs qu’on allait faire un coup fumant, si on s’y mettait tous. Et quand on est tous animés par cette même idée que ça va faire un truc formidable, il faut en être.
Voilà. A partir du moment où nous, dans le spectacle, on a cet état d’esprit, on peut se réunir sur une idée, avec un ou deux leaders d’opinion dans l’affaire, qui amènent le reste.
Là j’avais Montand avec moi au départ, qui est très important. J’avais la promesse de Jean-Jacques Goldman de faire un disque pour les Restaurants du Cœur. C’est lui qui couvre avec Renaud (c’est aussi un camarade à moi) entièrement ce qui se vend en disques, ou presque, en France. C’est très important, et c’est les jeunes.
Alors, on s’est d’abord réunis entre nous. Il y avait des militants du R.P.R. qui étaient avec moi. Je pense à Daniel Guichard, à Gérard Lenorman, c’est vraiment des militants, qui font les galas, un truc que je ne fais pas. Eux, ils font les galas, ils vont chanter dans la première partie de Jacques Chirac.
Ces mecs-là, je leur ai dit : tu sais, je l’ai fait, mais le ministère de l’Agriculture (socialiste) m’a aidé. On s’en fout de ça, on y va. On va le faire. Ça c’est une des raisons que ça réussit, parce que c’est à partir d’une profession généreuse que ça se fait. C’est une profession qui est habituée à donner. Et puis le public sait ce qui se passe.
Il y a quelque chose de désagréable, c’est que ce qui a peut-être plu aux gens un peu plus que dans les autres affaires, c’est qu’ils sont sûrs que l’argent sort pas d’ici, qu’on va s’en servir. Alors que quand on l’envoie en Afrique, ils ont peur que ça n’aille pas aux Africains. Il y a un côté «comme c’est en France, c’est mieux ». Ça, c’est un peu emmerdant. Mais enfin, bon, on ne peut pas se plaindre non plus. Et puis ils ont bien marché, je crois surtout, parce qu’ils savent que nous, on ne va pas détourner l’argent. Ça, c’est vachement important aussi.
On est donc arrivés d’abord par la force de cette radio, j’avais la chance d’y faire une émission qui était vachement écoutée, ça m’a beaucoup aidé, alors je vais vous dire où on en est maintenant.
On a réuni à peu près 45 millions de francs en dons, en espèces. Je ne peux pas évaluer les dons en nature qu’on a recueillis. Je peux vous dire que la première semaine de distribution a été faite que sur les dons en nature, et que pendant les trois mois de l’hiver, on va dépasser sept millions de repas, qui nous coûtent 4,98 F rendus sur place, par personne. Avec le transport. Tout. Rendu sur place, ça nous coûte pas 5 F.
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