Сорж Шаландон - Mon traître

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Mon traître: краткое содержание, описание и аннотация

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C’était une documentation sur Michael Coleman, le grand violoniste irlandais né dans un village du comté Sligo, le 31 janvier 1891. Je l’avais demandé à Tyrone. J’avais oublié. Avec, mon ami avait joint un vieux disque 45 tours et un dictionnaire franco-anglais des termes de lutherie. Grâce à ces pages, je saurais désormais que spruce veut dire épicéa, que l’aulne se dit aider, que birdseye maple est le nom anglais de l’érable moucheté, que plane est un rabot et reamer l’alésoir.

*

En octobre 1979, je suis resté neuf jours à Belfast. J’ai vainement attendu que Tyrone Meehan passe en procès. Chaque matin, j’accompagnais Sheila à la porte de la prison de Crumlin pour avoir des nouvelles. Je restais sur le trottoir, en face, mains dans les poches comme les hommes qui étaient là. Dans la rue, la tension était intacte. Chaque jour, un ou deux nationalistes étaient emmenés. La nuit sursautait à l’éclat bref d’une arme. Parfois, nous croisions des combattants républicains. Ils n’étaient plus à la parade. Ils n’avaient pas d’uniformes, juste des capuches de parka tombées sur le visage. Ils couraient de ruelles en jardinets, un fusil d’assaut ou un pistolet en main. Ils sautaient par dessus les murets des maisons basses, entraient brusquement dans les salons tranquilles pour ressortir par les cuisines de derrière, restées ouvertes exprès. Je sentais la guerre. Je la sentais dans l’odeur de charbon et de tourbe, d’huile grasse et de pluie froide. Cette odeur de Belfast, cette saveur d’inquiétude. C’était la première fois que je la sentais vraiment. La veille de mon départ, une unité de l’IRA a ouvert le feu sur une patrouille à pied, en plein jour, en pleine rue, à quelques mètres de moi. Je n’ai pas vu d’où venaient les coups de feu. Un soldat est tombé le long du mur. Il a lâché son fusil. Bruit métallique. Son casque a heurté le trottoir. Les Britanniques n’ont pas répliqué. Ils hurlaient, l’œil dans le viseur à la recherche des toits. Une mère a pris son enfant sous son bras. Une autre a poussé un long cri. Je me suis caché dans un angle de porte. L’Anglais était couché sur le ventre. Un sang épais coulait sur le sol. La foule hésitait. Un policier a tiré en l’air pour nous disperser. J’ai couru comme les autres. J’avais une rage en moi. Une colère de violence, de tristesse et de joie. Ils en avaient eu un. Nous en avions eu un. Je me suis retourné pour le voir encore. Des blindés arrivaient de partout, et aussi une Land Rover frappée de la Croix-Rouge.

— Ne courez plus ! Marchez normalement ! nous a crié un jeune homme, bras écartés.

Je me suis arrêté tout à fait. Les soldats barraient la rue. Je ne voyais plus que les brodequins du mort et le bas de son treillis. Parce que voilà, il était mort. Je l’ai lu le lendemain dans l' Iris h News. Steeve Remington venait de Brampton, dans le Yorkshire. Il avait refusé de suivre son père, son grand-père et les autres à la mine. Il s’était engagé pour quitter la misère des corons. Il avait 23 ans.

« Y a-t-il une vie avant la mort ? » , demandait une inscription noire sur un mur de Falls Road. Avant de prendre le train pour Dublin, j’ai touché ce mur comme le mur d’un temple. Je l’ai touché longtemps, paume ouverte, pour le froid de la pierre. Plus haut, dans la rue, un soldat britannique escaladait un poteau électrique pour arracher un drapeau républicain. J’ai eu presque envie qu’il me voie. Lui détruisant un symbole et moi m’en nourrissant. La rue palpitait. Tyrone était en prison. A Long Kesh, dans l’immense camp de prisonniers construit en pleine campagne, au sud de Belfast, trois cents républicains irlandais vivaient nus depuis trois ans. Nus, absolument. Enroulés dans leur couverture de lit, ils refusaient de porter l’uniforme des droit-commun. Je regardais leurs photos jusqu’au vertige. Deux d’entre eux, surtout, surpris dans leur cellule par une caméra de télévision, maigres, le visage couvert de barbe, les cheveux sur leurs épaules, donnant aux couvertures rêches l’élégance d’un drapé. J’avais cette image avec moi partout. Dans mon portefeuille, dans mon atelier. Quand je levais les yeux du bois blond, c’était pour ces peaux blanches. Un matin de 1979, pour briser la résistance, les surveillants ont refusé que les prisonniers vident leurs tinettes. Alors ils sont entrés en « dirty protest », la protestation dégueulasse. Ils ont pissé par terre. Ils ont étalé leurs excréments à la main sur les murs de leurs cellules. Ils se hurlaient prisonniers politiques. Nus et dans leur merde, les pieds couverts d’urine, sans visite, sans promenade, sans courrier, sans rien, seuls, pendant encore des mois et des mois qui dureront deux ans.

Vus du ciel, les bâtiments du camp étaient en forme de « H ». La lettre blanche fut bientôt le symbole du martyre républicain. Peinte sur les murs, portée aux revers, collée dans les chambres adolescentes, imprimée sur les maillots, gravée dans la pierre, marquée au fer dans le bois, criée par les enfants, répétée à l’infini. « Dieu nous a fait catholiques, le fusil nous a fait égaux » , disait un autre mur. Chaque balle tirée par les hommes libres répondait à l’humiliation des hommes emprisonnés. « Et toi ? Que fais-tu pour les prisonniers ? » , interrogeait une affiche au-dessus d’un bar. Qu’est-ce que je faisais ? Mais rien, strictement. Je passais. Je marchais avec ma veste en tweed d’ici. Je regardais si l’on me regardait. Je prenais des airs. Je regardais des photos. Je me dégoûtais de tristesse.

Jim m’a accompagné à la gare en voiture. Il ne voulait pas que je prenne un taxi. En quelques semaines, deux catholiques avaient été abattus par des loyalistes dans l’est de Belfast après avoir fait confiance à un chauffeur inconnu. Nous avons roulé doucement. Jim était fermé. Il regardait sans cesse son rétroviseur.

— Je te laisse devant la gare, je ne reste pas, m’a-t-il dit.

La voiture était à l’arrêt. Je n’ai pas bougé. Je regardais la rue.

— Ça va ? il m’a demandé.

— Je veux vous aider, j’ai murmuré.

Jim s’est retourné vers moi. Il m’a observé longtemps. Il avait un visage de pierre. Il n’a pas parlé. Juste, il a mordu sa lèvre. Puis il a hoché la tête. C’est tout. Je suis descendu de la voiture. J’avais l’impression que tout était changé. Je venais de faire quelque chose de compliqué, d’irréversible, d’immense. Jim est parti. Il m’a salué d’un doigt levé sur le volant. Il y avait du monde dans la salle d’attente. J’ai pris mon billet pour Dublin. J’ai eu l’impression que les gens me regardaient différemment. J’étais comme étrange, ou louche, ou suspect de quelque chose. Une belle femme portait un badge au revers de sa veste. « Mise Éire. » J’ai mis longtemps à prononcer correctement cette phrase. « Miche éïra. » « Je suis l’Irlande. » Dans le train, front contre la vitre, j’ai cherché une image qui serait mon refuge. Une scène, un personnage ou un lieu, quelque chose que j’appellerais les yeux clos pour rassurer mes nuits. La femme de la gare était grande, longue, trop bien habillée. Elle devait être d’ailleurs. Je voulais une femme d’Irlande. Alors je l’ai imaginée dans les cahots du train, enveloppée dans un mauvais drap de laine noire, forgée ride à ride par la guerre et la terre, très âgée et très belle. Je la voyais debout, penchée en avant, mains ouvertes, cheveux blancs tombés sur les yeux, qui hurlait sa colère en face des soldats. Ce serait elle. Mise Éire. Mon Irlande rebelle, ma rassurante. Son regard était bleu sauvage et ses lèvres tremblées. En gare de Dublin, l’image était parfaite. Cette femme existerait désormais. Je ne le savais pas encore, mais pendant des années, j’allais la faire revenir devant mes yeux. Je l’ai appelée à mon chevet. Je lui ai demandé de veiller sur moi comme un saint de baptême. Son courroux est resté intact. Longtemps. Jamais je n’ai osé l’imaginer une scène plus loin. Elle était là, comme ça, en colère muette, comme une photo à vif regardée à jamais.

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