Emile Gary - Gros-Câlin

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— Eh bien, heureusement que tu as quelqu’un pour s’occuper de toi, dit le garçon de bureau.

Je n’ai pas relevé. J’ai horreur de la gouaille.

Un de ses copains demanda :

— Qu’est-ce qu’il mange ?

C’est une question que je déteste et j’ai fait semblant de ne pas entendre.

— Qu’est-ce que ça mange, un python ? insista-t-il.

— Des pâtes, du pain, du fromage, des choses comme ça, lui dis-je.

L’idée de bouffer des souris, des cochons d’Inde, des lapins vivants m’est odieuse. J’essaye de ne pas y penser.

— On t’a apporté des trucs à lire, dit le garçon de bureau.

Et ne voilà-t-il pas qu’ils sortent de leurs poches des brochures, des tracts, des publications.

— Tu devrais essayer de t’orienter, dit le garçon de bureau. Lis ça, renseigne-toi. Tu peux pas continuer comme ça. Tu peux encore t’en sortir.

J’ai bourré ma pipe et je l’ai allumée, dans le genre anglais. Quand c’est l’angoisse, j’essaye d’imaginer que je suis anglais et que rien ne peut me toucher, à cause de mon côté imperturbable.

— Ils vont finir par t’embarquer, tu sais, dit le garçon de bureau. Les voisins ou quelqu’un vont remarquer et tu auras des ennuis de santé, comme ils appellent ça.

— J’ai des autorisations, lui dis-je. J’ai un permis d’avoir un python chez moi. Je suis en règle.

— Ah ça, j’en suis sûr, dit-il. Ce qu’on appelle vivre, chez nous, ça consiste uniquement à être en règle.

Ils sont partis. Je me suis approché de mon pauvre Gros-Câlin et je l’ai pris dans mes bras. Il est difficile d’être Gros-Câlin dans une ville qui n’est pas faite pour ça. Je me suis assis sur le lit et je l’ai gardé longuement dans mes bras et autour de moi avec l’impression de recevoir une réponse. J’avais même des larmes aux yeux à sa place, parce qu’il ne peut pas, lui, à cause de l’inhumain.

J’ai un collègue de bureau qui est revenu tout bronzé des vacances dans le Sud tunisien.

Je le dis pour montrer que je sais voir le bon côté des choses.

Le soir, j’ai fait un truc inouï pour « sortir », comme disent les garçons de bureau. Je faisais dînette sobrement au restaurant des Châtaigniers, rue Cave. À côté de moi, il y avait un couple de moyen âge qui ne m’a pas adressé la parole, comme on doit entre étrangers. Ils mangeaient une entrecôte-frites.

Je ne vois pas où j’ai trouvé le courage de faire ça. Bien sûr, j’ai toujours envie d’avoir quelque chose en commun, c’est les années d’habitude, à cause du manque, qui font ça. Mais il y a la répression intérieure, pour ne pas déborder en société, comme il faut pour vivre dans une immense cité sans se gêner. Seulement, bien sûr, parfois ça déborde.

C’est ce que j’ai fait.

J’ai tendu la main et j’ai pris une frite dans leur assiette.

Je souligne leur à cause de l’énormité.

Je l’ai mangée.

Ils n’ont rien dit. Je crois qu’ils ne l’ont pas remarqué, à cause de la monstruosité, de l’énormité, justement.

J’ai pris une autre frite. C’était la faiblesse qui faisait ça, c’était plus fort que moi. J’ai continué.

Trois, quatre frites.

J’étais couvert de sueur froide, mais c’était plus fort que moi. La faiblesse, croyez-moi, c’est irrésistible.

Et encore une frite, comme ça, en toute simplicité, entre amis.

J’étais complètement épouvanté par mon fort intérieur. Je faisais une sortie, quoi. Une percée.

Et encore une frite.

Le commando de l’amitié.

Je ne sais pas ce qui s’est passé ensuite, parce que j’ai senti un tremblement de terre, ça s’est brouillé et lorsque j’ai repris connaissance, tout était en ordre. Rien n’était arrivé, rien n’avait changé. J’étais assis là, devant mon artichaut vinaigrette, et à côté, il y avait le couple qui mangeait une entrecôte avec des frites.

J’avais fait ça seulement dans mon fort intérieur. Le commando avait fait une tentative de sortie mais il a été refoulé par lui-même et il s’est replié sans frites. C’est ce qu’on appelle sur les murs « l’imagination au pouvoir ». C’est écrit sur les murs, on peut le voir partout. Les murs, on peut écrire dessus n’importe quoi, ça tient. C’est solide, les murs. Ce sont les graffiti qui le prouvent.

Je me suis fait tellement peur que je m’étais évanoui. Heureusement, je n’étais pas tombé et personne n’a rien remarqué. J’ai eu de la chance.

Je suis tout de même content d’avoir eu cette idée, il faut le faire, je le dis sans fausse modestie.

Après, j’ai rampé chez moi, complètement vidé par l’effort que je venais de faire et j’ai jeté un coup d’œil à la littérature que les garçons de bureau m’avaient apportée. Enfin, ils n’étaient pas tous garçons de bureau, mais c’est la même chose. J’ai donc feuilleté prudemment les brochures, tracts et gazettes qu’ils m’avaient laissés. Je dis « prudemment », pas parce que je me méfiais particulièrement du danger public, mais parce que je fais tout prudemment, c’est chez moi un principe. Je n’y ai rien trouvé qui eût pu se rapporter au présent ouvrage et j’ai jeté tout ça à la poubelle. Ensuite, j’ai pris Gros-Câlin sur mes épaules et nous sommes restés là un bon moment à nous sentir bien ensemble. Beaucoup de gens se sentent mal dans leur peau, parce que ce n’est pas la leur.

Nous sommes donc restés comme ça un bon moment à rêvasser. Il faut dire que cela fait déjà dix mois que je prends tous les matins l’ascenseur en compagnie de M lle Dreyfus et en additionnant les temps de parcours, on arrive à un total assez impressionnant. Il y a onze étages et pour me changer les idées je donne un nom différent à chaque étape, Bangkok, Ceylan, Singapore, Hong Kong, comme si je faisais une croisière avec M lle Dreyfus, c’est marrant, quoi. L’autre jour, j’ai même essayé de faire un peu d’humour, c’est mon côté anglais. L’ascenseur venait de toucher le sixième étage, qui est Mandalay, en Birmanie, sur ma carte. Je dis à M lle Dreyfus :

— Les escales sont tellement rapides que l’on n’a pas le temps de visiter.

Elle ne comprit pas, parce qu’on n’est pas toujours dans le même rêve, et elle m’a regardé avec un peu d’étonnement. Je dis :

— Il paraît que Singapore, c’est très pittoresque. Ils ont là-bas les murs de Chine.

Mais on était déjà arrivés et M lle Dreyfus est sortie en minijupe, avec incompréhension.

Je passai une journée sinistre, au cours de laquelle je remis tout en cause. J’étais plein de moi-même avec bouchon. Je me trompais peut-être complètement sur la nature des sentiments que M lle Dreyfus éprouvait à mon égard. Étant une Noire, elle était peut-être sensible à la solitude des pythons à Paris et ne me fréquentait que par pitié à leur égard. Moi, la pitié, je n’en veux à aucun prix, j’en ai déjà assez moi-même. C’était l’angoisse. Je me sentais complètement libre sans aucun lien de soutien avec personne, une liberté sans dépendance aucune et avec personne à l’appui, qui vous tient prisonnier pieds et poings liés et vous fait dépendre de tout ce qui n’est pas là et vous rend à votre caractère prénatal, avec anticipation de vous-même. J’en venais à me demander, par astrologie, si la planète n’est pas composée de deux milliards et demi de signes astrologiques dont on se sert ailleurs pour lire l’avenir d’une espèce humaine sur une tout autre galaxie. Je pensais que Jean Moulin et Pierre Brossolette étaient des prénaturés, des pressentimentaux anticipaires et qu’ils ont été rectifiés à ce titre, pour erreur humaine. C’était la banque du sperme, quoi. La liberté est un truc particulièrement pénible, car si elle n’existait pas, au moins, on aurait des excuses, on saurait pourquoi. La liberté, il ne faut pas que ce soit seulement bancaire, il faut quelque chose d’autre, quelque chose, quelqu’un à aimer, par exemple – je dis ça en passant – pour ne plus être libre à bon escient. Moi, je suis contre le fascisme, mais l’amour, c’est quand même tout autre chose. Je répète ici pour la dernière fois et si on continue à l’insinuer, je vais me mettre en rogne, que ce n’est pas pour ça que je garde Gros-Câlin chez moi, car même si je ne vivais pas avec un python, rien ne prouve que je trouverais quelqu’un à aimer qui soit disposé. Au moins, dans un État policier, on n’est pas libre, on sait pourquoi, on n’y est pour rien. Mais ce qu’il y a de dégueulasse en France, c’est qu’ils vous donnent même pas d’excuses. Il n’y a rien de plus vachard, de plus calculé et de plus traître que les pays où l’on a tout pour être heureux. Si on avait ici la famine en Afrique et la sous-alimentation chronique avec dictature militaire, on aurait des excuses, ça dépendrait pas de nous.

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