Маргерит Юрсенар - Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce

Здесь есть возможность читать онлайн «Маргерит Юрсенар - Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Год выпуска: 2012, Издательство: Aelred - TAZ, Жанр: Старинная литература, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

La présence de nos troupes au château m’inquiétait presque autant que le voisinage des Rouges, et devait fatalement drainer les dernières ressources de mon ami. Je commençais à connaître les dessous de la guerre civile dans une armée en dissolution : les malins se constitueraient évidemment des quartiers d’hiver dans des localités qui offraient l’appât d’une provision de vins et de filles à peu près intacte. Ce n’était ni la guerre, ni la révolution, mais ses sauveurs qui ruinaient le pays. De ceci, je me souciais peu, mais Kratovicé m’importait. Je fis valoir que mes connaissances de la topographie et des ressources du district pouvaient être mises à profit. Après des tergiversations sans fin, on finit par s’apercevoir de ce qui crevait les yeux, et je dus à la complicité des uns, à l’intelligence des autres, l’ordre d’aller réorganiser les brigades de volontaires dans la section Sud-Est du pays. Piteux mandat, dont nous prîmes possession, Conrad et moi, dans un état plus piteux encore, crottés jusqu’aux os, et méconnaissables au point de faire donner de la voix aux chiens de Kratovicé, où nous n’arrivâmes qu’à la fin de la plus épaisse des nuits noires. Pour prouver sans doute mes connaissances en topographie, nous avions pataugé jusqu’à l’aube dans les marécages, à deux pas des avant-postes rouges. Nos frères d’armes se levaient de table – ils y étaient encore – et nous firent généreusement endosser deux robes de chambre qui avaient appartenu à Conrad dans des temps meilleurs, et que nous retrouvions agrémentées de taches et de trous brûlés par la braise des cigares. Tant d’émotions avaient aggravé le tic de la tante Prascovie : ses grimaces auraient mis en désordre une armée ennemie. Quant à Sophie, elle avait perdu la bouffissure de l’adolescence ; elle était belle ; la mode des cheveux courts lui seyait. Sa figure maussade était marquée d’un pli amer au coin des lèvres ; elle ne lisait plus, mais ses soirées se passaient à tisonner rageusement le feu du salon, avec les soupirs d’ennui d’une héroïne ibsénienne dégoûtée de tout.

Mais j’anticipe, et mieux vaudrait décrire exactement cette minute du retour, cette porte ouverte par Michel affublé d’une livrée par-dessus son pantalon de soldat, cette lanterne d’écurie soulevée à bout de bras dans ce vestibule où l’on n’allumait plus les lustres. Les parois de marbre blanc avaient toujours cet aspect glacial qui faisait penser à une décoration murale Louis XV taillée à même la neige dans un logis esquimau. Comment oublier l’expression de douceur attendrie et de dégoût profond sur le visage de Conrad à son retour dans cette maison juste assez intacte pour que chaque petite détérioration lui fît l’effet d’un outrage, depuis la grande étoile irrégulière d’un coup de feu sur le miroir de l’escalier d’honneur jusqu’aux marques de doigts à la poignée des portes ? Les deux femmes vivaient à peu près claquemurées dans un boudoir au premier étage ; le bruit clair de la voix de Conrad les décida à s’aventurer sur le seuil ; je vis apparaître au haut des marches une tête ébouriffée et blonde. Sophie se coula le long de la rampe d’une seule glissade, suivie du chien qui lui jappait aux talons. Elle se jeta au cou de son frère, puis au mien, avec des rires et des bonds de joie :

— C’est toi ? C’est vous ?

— Présent, dit Conrad. Mais non, c’est le prince de Trébizonde !

Et il s’empara de sa sœur pour lui faire faire un tour de valse dans le vestibule. Lâchée presque aussitôt par son danseur, qui se précipitait les mains tendues vers un camarade, elle s’arrêta devant moi, rouge comme à la fin d’un bal :

— Éric ! Comme vous avez changé !

— N’est-ce pas ? fis-je. Mé-con-nais-sa-ble.

— Non, dit-elle en secouant la tête.

— À la santé du frère prodigue ! s’écriait le petit Franz von Aland debout sur le seuil de la salle à manger, tenant en main un verre d’eau-de-vie avec lequel il se mit à poursuivre la jeune fille. Voyons, Sophie, rien qu’une larme !

— Vous vous payez ma tête, vous ? dit l’adolescente avec une grimace moqueuse, et, fonçant brusquement sous le bras tendu du jeune officier, elle disparut dans l’entrebâillement de la porte vitrée qui menait à l’office, et cria :

— Je vais vous faire donner à manger !

Pendant ce temps, la tante Prascovie, accoudée à la rampe du premier étage, et se barbouillant doucement la figure de larmes, remerciait tous les saints orthodoxes d’avoir exaucé pour nous ses prières, et roucoulait comme une vieille tourterelle malade. Sa chambre, puant la cire et la mort, regorgeait d’icônes noircies par la fumée des cierges, et il y en avait une, très ancienne, dont les paupières d’argent avaient contenu deux émeraudes. Pendant la brève occupation bolchevique, un soldat avait fait sauter les pierres précieuses, et la tante Prascovie priait maintenant devant cette protectrice aveugle. Au bout d’un instant, Michel remontait du sous-sol avec un plat de poisson fumé. Conrad appela vainement sa sœur, et Franz von Aland nous assura en haussant les épaules qu’elle ne reparaîtrait pas de la soirée. Nous dînâmes sans elle.

Je la revis dès le lendemain chez son frère ; chaque fois, elle trouva moyen de s’éclipser avec une souplesse de jeune chatte redevenue sauvage. Pourtant, dans le premier émoi du retour, elle m’avait embrassé à pleines lèvres, et je ne pouvais m’empêcher de songer avec une certaine mélancolie que c’était là mon premier baiser de jeune fille, et que mon père ne m’avait pas donné de sœur. Dans la mesure du possible, il est bien entendu que j’adoptai Sophie. La vie de château suivait son cours dans les intervalles de la guerre, réduite pour tout personnel à une vieille bonne et au jardinier Michel, encombrée par la présence de quelques officiers russes évadés de Kronstadt, comme par les invités d’une ennuyeuse partie de chasse qui n’en finirait pas. Deux ou trois fois, réveillés par des coups de feu lointains, nous avons trompé la longueur de ces nuits interminables en jouant tous trois aux cartes avec un mort, et sur ce mort hypothétique du bridge, nous pouvions presque toujours mettre un nom, un prénom, celui d’un de nos hommes fraîchement tué par une balle ennemie. La maussaderie de Sophie fondait par places, sans rien lui ôter de sa grâce hagarde et farouche, comme ces pays qui gardent une âpreté hivernale même au retour du printemps. L’éclairage prudent et concentré d’une lampe transformait en rayonnement la pâleur de son visage et de ses mains. Sophie avait tout juste mon âge, ce qui aurait dû m’avertir, mais en dépit de la plénitude de son corps, j’étais surtout frappé par son aspect d’adolescence blessée. Il était évident que seules deux années de guerre n’avaient pas suffi pour modifier chaque trait de cette figure dans le sens de l’entêtement et du tragique. Et certes, à l’âge des bals blancs, elle avait dû subir les dangers de coups de feu, l’horreur des récits de viols et de supplices, la faim parfois, l’angoisse toujours, l’assassinat de ses cousins de Riga collés au mur de leur maison par une escouade rouge, et l’effort qu’elle avait fourni pour s’accoutumer à des spectacles si différents de ses rêves de jeune fille avait pu suffire à lui élargir douloureusement les yeux. Mais, ou je me trompe fort, ou Sophie n’était pas tendre : elle n’était qu’infiniment généreuse de cœur ; on confond souvent les symptômes de ces deux maladies voisines. Je sentais qu’il s’était passé pour elle quelque chose de plus essentiel que le bouleversement de son pays et du monde, et je commençais enfin à comprendre ce qu’avaient dû être ces mois de promiscuité avec des hommes mis hors d’eux-mêmes par l’alcool et la surexcitation continuelle du danger. Des brutes, qui deux ans plus tôt n’auraient été pour elle que des valseurs, lui avaient trop vite enseigné la réalité cachée sous les propos d’amour. Que de coups frappés la nuit à la porte de sa chambre de jeune fille, que de bras serrant la taille, et dont il avait fallu se dégager violemment, au risque de froisser la pauvre robe déjà élimée, et les jeunes seins... J’avais devant moi une enfant outragée par le soupçon même du désir ; et toute la part de moi-même par laquelle je me différencie le plus des banals coureurs d’aventures, pour qui toutes les aubaines féminines sont bonnes, ne pouvait qu’approuver trop pleinement le désespoir de Sonia. Enfin, un matin, dans le parc où Michel dépiquait des pommes de terre, j’appris le secret connu de tous, que nos camarades pourtant ont eu l’élégance de taire jusqu’au bout, de sorte que Conrad ne l’a jamais su. Sophie avait été violée par un sergent lithuanien, blessé depuis, et évacué sur l’arrière. L’homme était ivre, et il était venu le lendemain s’agenouiller dans la grande salle devant trente personnes et pleurnicher en demandant pardon ; et cette scène avait dû être pour l’enfant plus écœurante encore que le mauvais quart d’heure de la veille. Pendant des semaines, l’adolescente avait vécu avec ce souvenir, et la phobie d’une grossesse possible. Si grande qu’ait pu être par la suite mon intimité avec Sophie, je n’ai jamais eu le courage de faire allusion à ce malheur : c’était entre nous un sujet toujours écarté et toujours présent.

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


Маргерит Юрсенар - Les mémoires d'Hadrien
Маргерит Юрсенар
libcat.ru: книга без обложки
Маргерит Юрсенар
libcat.ru: книга без обложки
Маргерит Юрсенар
Маргерит Юрсенар - Блаженной памяти
Маргерит Юрсенар
libcat.ru: книга без обложки
Маргерит Юрсенар
libcat.ru: книга без обложки
Маргерит Юрсенар
libcat.ru: книга без обложки
Маргерит Юрсенар
Отзывы о книге «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce»

Обсуждение, отзывы о книге «Alexis ou le Traité du Vain Combat - Le Coup de Grâce» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x