Michel Houellebecq - La possibilité d'une île

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Au XXIe siècle, une secte promettant l'immortalité à ses membres a supplanté les religions traditionnelles. Chacun des adeptes, devenu vieux, se suicide en laissant un échantillon d'ADN et un récit de vie. Cloné indéfiniment tous les 50 ans, il mène plusieurs siècles d'une vie esseulée où les sentiments n'ont pas cours.

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Elle me répondit après quelques minutes de réflexion, d'une voix pensive: «Je pense qu'elle va trouver que tu es trop vieux…» Oui c'était ça, j'en fus convaincu dès qu'elle le dit, et la révélation ne me causa aucune surprise, c'était comme l'écho d'un choc sourd, attendu. La différence d'âge était le dernier tabou, l'ultime limite, d'autant plus forte qu'elle restait la dernière, et qu'elle avait remplacé toutes les autres. Dans le monde moderne on pouvait être échangiste, bi, trans, zoophile, SM, mais il était interdit d'être vieux. « Elle va trouver ça malsain, pas normal que je ne sois pas avec un garçon de mon âge…» poursuivit-elle avec résignation. Eh bien oui j'étais un homme vieillissant, j'avais cette dis grâce – pour reprendre le terme employé par Coetzee, il me paraissait parfait, je n'en voyais aucun autre; cette liberté de moeurs si charmante, si fraîche et si séduisante chez les adolescents ne pouvait devenir chez moi que l'insistance répugnante d'un vieux cochon qui refuse de passer la main. Ce que penserait sa sœur, à peu près tout le monde l'aurait pensé à sa place, il n'y avait à cela pas d'issue – à moins d'être un commerçant chinois.

J'avais décidé cette fois-là de rester à Madrid toute la semaine, et deux jours plus tard j'eus une petite dispute avec Esther au sujet de Ken Park, le dernier film de Larry Clark, qu'elle avait tenu à aller voir. J'avais détesté Kids, je détestai Ken Park encore davantage, la scène où cette sale petite ordure bat ses grands-parents m'était en particulier insupportable, ce réalisateur me dégoûtait au dernier degré, et c'est sans doute ce dégoût sincère qui fit que je fus incapable de m'empêcher d'en parler alors que je me doutais bien qu'Esther l'aimait par habitude, par conformisme, parce qu'il était cool d'approuver la représentation de la violence dans les arts, qu'elle l'aimait en somme sans vrai discernement, comme elle aimait Michael Haneke par exemple, sans même se rendre compte que le sens des films de Michael Haneke, douloureux et moral, était aux antipodes de celui des films de Larry Clark. Je savais que j'aurais mieux fait de me taire, que l'abandon de mon personnage comique habituel ne pouvait m'attirer que des ennuis, mais je ne pouvais pas, le démon de la perversité était le plus fort; nous étions dans un bar bizarre, très kitsch, avec des miroirs et des dorures, rempli d'homosexuels paroxystiques qui s'enculaient sans retenue dans des backrooms adjacentes, mais cependant ouvert à tous, des groupes de garçons et de filles prenaient tranquillement des Cocas aux tables voisines. Je lui expliquai en vidant rapidement ma tequila glacée que l'ensemble de ma carrière et de ma fortune je l'avais bâti sur l'exploitation commerciale des mauvais instincts, sur cette attirance absurde de l'Occident pour le cynisme et pour le mal, et que je me sentais donc spécialement bien placé pour affirmer que parmi tous les commerçants du mal Larry Clark était l'un des plus communs, des plus vulgaires, simplement parce qu'il prenait sans retenue le parti des jeunes contre les vieux, que tous ses films n'avaient d'autre objectif que d'inciter les enfants à se comporter envers leurs parents sans la moindre humanité, sans la moindre pitié, et que cela n'avait rien de nouveau ni d'original, c'était la même chose dans tous les secteurs culturels depuis une cinquantaine d'années, cette tendance prétendument culturelle ne dissimulait en fait que le désir d'un retour à l'état primitif où les jeunes se débarrassaient des vieux sans ménagements, sans états d'âme, simplement parce qu'ils étaient trop faibles pour se défendre, elle n'était donc qu'un reflux brutal, typique de la modernité, vers un stade antérieur à toute civilisation, car toute civilisation pouvait se juger au sort qu'elle réservait aux plus faibles, à ceux qui n'étaient plus ni productifs ni désirables, en somme Larry Clark et son abject complice Harmony Korine n'étaient que deux des spécimens les plus pénibles – et artistiquement les plus misérables – de cette racaille nietzschéenne qui proliférait dans le champ culturel depuis trop longtemps, et ne pouvaient en aucun cas être mis sur le même plan que des gens comme Michael Haneke, ou comme moi-même par exemple – qui m'étais toujours arrangé pour introduire une certaine forme de doute, d'incertitude, de malaise au sein de mes spectacles, même s'ils étaient (j'étais le premier à le reconnaître) globalement répugnants. Elle m'écoutait d'un air désolé mais avec beaucoup d'attention, elle n'avait pas encore touché à son Fanta.

L'avantage de tenir un discours moral, c'est que ce type de propos a été soumis à une censure si forte, et depuis tant d'années, qu'il provoque un effet d'incongruité et attire aussitôt l'attention de l'interlocuteur; l'inconvénient, c'est que celui-ci ne parvient jamais à vous prendre tout à fait au sérieux. L'expression sérieuse et attentive d'Esther me désarçonna un instant, mais je commandai un autre verre de tequila et je continuai tout en prenant conscience que je m'excitais artificiellement, que ma sincérité elle-même avait quelque chose de faux: outre le fait patent que Larry Clark n'était qu'un petit commerçant sans envergure et que le citer dans la même phrase que Nietzsche avait déjà en soi quelque chose de dérisoire, je me sentais au fond à peine plus concerné par ces sujets que par la faim dans le monde, les droits de l'homme ou n'importe quelle connerie du même genre. Je continuai pourtant, avec une acrimonie croissante, emporté par cet étrange mélange de méchanceté et de masochisme dont je souhaitais peut-être qu'il me conduise à ma perte après m'avoir apporté la notoriété et la fortune. Non seulement les vieux n'avaient plus le droit de baiser, poursuivis-je avec férocité, mais ils n'avaient plus le droit de se révolter contre un monde qui pourtant les écrasait sans retenue, en faisait la proie sans défense de la violence des délinquants juvéniles avant de les parquer dans des mouroirs ignobles où ils étaient humiliés et maltraités par des aides-soignants décérébrés, et malgré tout cela la révolte leur était interdite, la révolte elle aussi – comme la sexualité, comme le plaisir, comme l'amour – semblait réservée aux jeunes, et n'avoir aucune justification possible en dehors d'eux, toute cause incapable de mobiliser l'intérêt des jeunes était par avance disqualifiée, en somme les vieillards étaient en tout point traités comme de purs déchets auxquels on n'accordait plus qu'une survie misérable, conditionnelle et de plus en plus étroitement limitée. Dans mon scénario «LE DÉFICIT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE», qui n'avait pas abouti – c'était d'ailleurs le seul de mes projets à n'avoir pas abouti, et ça me paraissait hautement significatif, poursuivis-je presque hors de moi -, j'incitais au contraire les vieux à se révolter contre les jeunes, à les utiliser et à les mater. Pourquoi par exemple les adolescents mâles ou femelles, consommateurs voraces et moutonniers, toujours friands d'argent de poche, ne seraient-ils pas contraints à la prostitution, seul moyen pour eux de rembourser dans une faible mesure les efforts et fatigues immenses consentis pour leur bien-être? Et pourquoi, à une époque où la contraception était au point, et le risque de dégénérescence génétique parfaitement localisé, maintenir cet absurde et humiliant tabou de l'inceste? Voilà des vraies questions, des problèmes moraux authentiques! m'exclamai-je avec emportement; ça, ce n'était plus du Larry Clark.

Si j'étais acrimonieux, elle était douce; et si je prenais, sans la moindre retenue, le parti des vieux, elle ne prenait pas, dans la même mesure, le parti des jeunes. Une longue conversation s'ensuivit, de plus en plus émouvante et tendre, dans ce bar d'abord, puis au restaurant, puis dans un autre bar, dans la chambre d'hôtel enfin; nous en oubliâmes même, pour un soir, de faire l'amour. C'était notre première vraie conversation, et c'était d'ailleurs me semblait-il la première vraie conversation que j'aie avec qui que ce soit depuis des années, la dernière remontait probablement aux débuts de ma vie commune avec Isabelle, je n'avais peut-être jamais eu de véritable conversation avec quelqu'un d'autre qu'une femme aimée, et au fond il me paraissait normal que l'échange d'idées avec quelqu'un qui ne connaît pas votre corps, n'est pas en mesure d'en faire le malheur ou au contraire de lui apporter la joie, soit un exercice faux et finalement impossible, car nous sommes des corps, nous sommes avant tout, principalement et presque uniquement des corps, et l'état de nos corps constitue la véritable explication de la plupart de nos conceptions intellectuelles et morales. J'appris ainsi qu'Esther avait eu une maladie de reins très grave, à l'âge de treize ans, qui avait nécessité une longue opération, et que l'un de ses reins était resté définitivement atrophié, ce qui l'obligeait à boire au moins deux litres d'eau par jour, alors que le deuxième, pour l'instant sauvé, pouvait à tout moment donner des signes de faiblesse; il me paraissait évident que c'était un détail capital, que c'était même sans doute pour cela qu'elle ne s'était pas assagie sur le plan sexuel: elle connaissait le prix de la vie, et sa durée si brève. J'appris aussi, et cela me parut encore plus important, qu'elle avait eu un chien, recueilli dans les rues de Madrid, et qu'elle s'en était occupée depuis l'âge de dix ans; il était mort l'année précédente. Une très jolie jeune fille, traitée avec des égards constants et des attentions démesurées par l'ensemble de la population masculine, y compris par ceux – l'immense majorité – qui n'ont plus aucun espoir d'en obtenir une faveur d'ordre sexuel, et même à vrai dire tout particulièrement par eux, avec une émulation abjecte confinant chez certains quinquagénaires au gâtisme pur et simple, une très jolie jeune fille devant qui tous les visages s'ouvrent, toutes les difficultés s'aplanissent, accueillie partout comme si elle était la reine du monde, devient naturellement une espèce de monstre d'égoïsme et de vanité autosatisfaite. La beauté physique joue ici exactement le même rôle que la noblesse de sang sous l'Ancien Régime, et la brève conscience qu'elles pourraient prendre à l'adolescence de l'origine purement accidentelle de leur rang cède rapidement la place chez la plupart des très jolies jeunes filles à une sensation de supériorité innée, naturelle, instinctive, qui les place entièrement en dehors, et largement au-dessus du reste de l'humanité. Chacun autour d'elle n'ayant pour objectif que de lui éviter toute peine, et de prévenir le moindre de ses désirs, c ‘est tout uniment qu'une très jolie jeune fille en vient à considérer le reste du monde comme composé d'autant de serviteurs, elle-même n'ayant pour seule tâche que d'entretenir sa propre valeur erotique -dans l'attente de rencontrer un garçon digne d'en recevoir l'hommage. La seule chose qui puisse la sauver sur le plan moral, c'est d'avoir la responsabilité concrète d'un être plus faible, d'être directement et personnellement responsable de la satisfaction de ses besoins physiques, de sa santé, de sa survie – cet être pouvant être un frère ou une sœur plus jeune, un animal domestique, peu importe.

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