Alexandre Jardin - Des gens très bien

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"Tandis que mon père s'endort peu à peu contre moi, je lui parle une dernière fois: plus tard, tu ne pourras pas vivre avec le secret des Jardin. Il te tuera... Tu feras un livre, le nain jaune, pour le camoufler. Au même âge que toi, j'en ferai un, des gens très bien, pour l'exposer. Et je vivrai la dernière partie de ta vie... La mienne. Dors mon petit papa, dors... Ce livre aurait pu s'appeler "fini de rire". C'est le carnet de bord de ma lente lucidité". (A.J.).

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De tout cela, Nathalie, si mal informée, ne peut évidemment pas parler. Elle a vingt ans et n'a guère approfondi l'œuvre raciale du gouvernement servi loyalement par le Nain Jaune : le tri méticuleux des humains, la paupérisation légale des Juifs, leur dénaturalisation méthodique, leur marquage puis leur éjection hors du périmètre national. Les images acides qu'elle vient de voir à la télévision lui pèsent encore sur l'estomac ; mais elle a tant besoin de croire son grand-père, de l'absoudre. De se faufiler hors de son émotion suffocante. Trop d'amour pur les relie. Il faut qu'elle y parvienne.

Accablé dans son fauteuil, Jean jette un œil à la photographie de Laval et lâche d'une voix désespérée une phrase qui ébranle sa petite-fille :

- Que pouvions-nous faire ?

Naturellement, Nathalie ressort de la bibliothèque réconfortée, réchauffée même, apaisée par les vibrants propos de son grand-père si tendre. Ouf, nous restons des gens très bien. Comment aurait-il pu en être autrement ? Naïve, elle se figure que pour permettre le pire, qu'elle a aperçu à la télévision, il faudrait être un monstre ; et non un homme sensible, cousu de loyauté. Comment, si jeune à l'époque, aurait-elle pu savoir que lorsque quelqu'un de très bien s'égare dans un cadre infernal, il n'est plus nécessaire d'être le démon pour le devenir sans délai ? Le Nain Jaune, lui, est grandement soulagé au sortir de cet entretien.

Il ignore encore que l'un de ses petits-enfants, le petit Alexandre, moins sous l'emprise de son charme, viendra plus tard interroger ses mânes, appuyé sur d'autres connaissances ; et paniqué à l'idée que son propre regard puisse faire de lui le complice d'un silence de famille.

Ce soir-là, le Nain Jaune ne peut pas imaginer que la vie m'apprendra peu à peu, avec l'aide de Zac et de certains autres, que la question du degré de connaissance de la Shoah, à l'été 1942, n'était pas aussi simple que ce qu'il a bien voulu affirmer à Nathalie en cette soirée de 1975.

Poser la question en termes binaires comme on le fait depuis des décennies - les collabos savaient-ils ou ne savaient-ils pas que l'Allemagne anéantissait les Juifs d'Europe - relève d'une vision du psychisme humain assez débile, qui ignore l'art de se truquer soi-même. Notre conscience des choses ne fonctionne pas comme un interrupteur qui ne connaîtrait que deux positions : on et off. Les hommes ont toujours eu un rapport biseauté et mouvant avec la vérité des faits ; et une manière parfois très déroutante de regarder l'évidence placée sous leurs yeux. Entendre une information suppose d'être en mesure de l'écouter sans parasites ; voire de renoncer à son propre système perceptif, à l'effet sécurisant des vieilles convictions, aux fidélités qu'elles impliquent. Discerner une nouvelle épineuse exige au préalable de s'y autoriser. Pour relier des indices, il faut encore désirer le faire. Et puis, on ne conteste pas une pensée dominante, institutionnelle, sans imaginer que la possibilité de s'accorder cette liberté existe bien. Il y a mille méthodes inconscientes pour qui souhaite ignorer une vérité qui crie.

Cette manière d'ondoyer dans les labyrinthes de la pensée criminelle, je la dois à Zac. C'est lui qui, dégagé de toute logique simplette, m'y entraîna.

Zac m'a dit

Automne 1982, à Paris. J'ai dix-sept ans et déjà je suis plusieurs. Gai de façade, lesté d'ombres. Chaleureux avec autrui et froid à l'intérieur. En allant déjeuner place du Palais-Bourbon, au domicile très familial de Zac, je croyais avoir rendez-vous avec sa frénésie de vivre. Pas avec l'une des explications de la cécité du Nain Jaune. Qui fut - sans nul doute - l'un des Français les mieux renseignés de l'époque, en temps réel ; donc l'une des vigies de Vichy qui pouvaient sans grande peine accéder à un fort degré de lucidité.

Je pénètre dans un étonnant appartement tourné vers l'Assemblée nationale. Chaque pièce aux allures d'aquarium contient de quoi assurer une exposition au Louvre ou à la Tate Gallery : tableaux de maîtres à profusion, dessins de Picasso punaisés sur les murs comme des timbres, des cubistes en vrac, du Matisse en veux-tu, en voilà. La famille de Zac en vend et en achète aux quatre coins des terres émergées depuis des générations. Mais seule une gigantesque toile retient mon attention : un Eugène Boudin que j'ai toujours vu chez les Frank, dans leur salle à manger. Ce Boudin me rappelle évidemment celui que les Jardin possédaient jadis à la Mandragore au premier étage, dans la chambre-salon de ma grand-mère. Cette huile de belle taille donnait à admirer une très classique scène de plage trouvillaise en laquelle la mère du Zubial, d'origine normande, se plaisait à retrouver le parfum et les élégantes mœurs estivales de sa jeunesse. Le tableau des Frank, offert en 1965 à l'occasion du mariage des parents de Zac, présentait le même ciel aussi clair qu'éteint, à la fois lumineux et terriblement obscur. Un ciel intensément paradoxal.

Une dame discrète, économe de ses sourires, vient servir notre repas casher. Elle s'exprime en allemand ; comme toujours dans les maisons des Frank. Que ce soit à New York, Londres, Munich ou Paris.

- Tu sais pourquoi les Allemands ont découvert la réalité de la Shoah avec stupéfaction en 1945 ? me demande Zac tout à trac. Alors que tout le monde dans le Reich était en mesure de la deviner. Oui, quasiment tout le monde !

- Non.

- Sur un point précis, Hitler fonctionnait comme les Jardin : ses secrets, il les montrait à tire-larigot de manière à ce qu'on ne les voie pas ! Avec assez de talent pour que personne n'ait l'idée de prendre conscience de ce que chacun savait.

- Où veux-tu en venir ?

- Pourquoi ton Nain Jaune aurait-il été moins frappé de cécité que soixante-dix millions d'Allemands ? En public, Hitler parlait clairement afin qu'on ne le croie pas. Il écrivait son Mein Kampf pour ne pas être pris à la lettre et exhibait ses crimes de manière à les dissimuler. Jamais il n'a caché ses intentions exterminatrices, au grand jamais ! Ni à la tribune du Reichstag le 30 janvier 1939 quand il a annoncé en toute clarté qu'une guerre déclenchée par les Juifs leur serait fatale, ni dans ses meetings hystériques ni dans ses écrits prophétiques. Le Zubial faisait de même : que je sache, il n'a jamais dissimulé que le Nain Jaune était directeur de cabinet de Pierre Laval. Il en a même fait un best-seller primé par l'Académie ! En ayant l'astuce de le célébrer au lieu de le justifier...

- Comment fait-on pour cacher un secret publiquement ?

- On le crie. On le hurle. Pour être vraiment discret, il faut être voyant et bruyant. Ça permet à ceux qui ne veulent pas voir de détourner le regard ou de se boucher les oreilles. La crème des tueurs, les as de la non-culpabilité, clament leurs crimes haut et fort pour ne pas être vus !

- Qu'est-ce que tu racontes ? Tout était minutieusement planqué par les nazis. La conférence de Wannsee n'était pas publique que je sache ! Le langage même de la Shoah était crypté. Ils disaient Solution finale au lieu d'extermination, évacuation à la place de déportation, traitement spécial au lieu d'exécution. Les statistiques des massacres étaient camouflées, les tâches criminelles invariablement segmentées...

- Il fallait permettre aux Allemands de regarder ailleurs pour qu'ils ne sachent pas qu'ils savaient. Ce langage crypté relevait du faux-fuyant de confort, je dirais, de l'assistance à peuple au courant mais ne souhaitant pas voir ! Relis la conférence de Lacan sur La Lettre volée d'Edgar Poe...

- Et pourquoi les Allemands n'auraient-ils pas souhaité voir ?

- Parce que l'élimination des Juifs fut vécue par leur communauté raciale comme une occasion salvatrice enthousiasmante, voire une opportunité de régénération ; pourvu qu'on leur donne la possibilité de regarder ailleurs ! Et cette fausse dissimulation s'est révélée suffisante pour que l'Aryen moyen, soucieux des nécessités historiques et de l'intérêt général, consente au massacre sans en être exagérément incommodé. Eh bien je crois que le mécanisme a également fonctionné avec Laval et ton Daddy ! Il n'aimait pas le Juif même s'il appréciait certains Juifs de sa caste, n'est-ce pas ?

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