[36] Orlando furioso, canto XXVII.
[37]Depuis les hennissements du cheval de Darius, qui lui donnèrent la couronne de Perse, et ceux du cheval de Denis le Tyran, qui lui promirent celle de Syracuse, les faiseurs de pronostics ont toujours donné à cet augure un sens favorable. Il était naturel que don Quichotte tirât le même présage des hennissements de Rossinante, lesquels signifiaient sans doute qu’on laissait passer l’heure de la ration d’orge.
[38]L’Aragon était sous le patronage de saint Georges, depuis la bataille d’Alcoraz, gagnée par Pierre I ersur les Mores, en 1096. Une confrérie de chevaliers s’était formée à Saragosse pour donner des joutes trois fois l’an, en l’honneur du saint. On appelait ces joutes justas del arnes.
[39] Santiago, y cierra Espana, vieux cri de guerre en usage contre les Mores.
[40]La qualité de vieux chrétien était une espèce de noblesse qui avait aussi ses privilèges. D’après les statuts de Limpieza (pureté de sang), établis dans les quinzième et seizième siècles, les nouveaux convertis ne pouvaient se faire admettre ni dans le clergé, ni dans les emplois publics, ni même dans certaines professions mécaniques. À Tolède, par exemple, on ne pouvait entrer dans la corporation des tailleurs de pierre qu’après avoir fait preuve de pureté de sang.
[41]Le goût des acrostiches avait commencé, dès le quatrième siècle, dans la poésie latine; il passa aux langues vulgaires, et se répandit notamment en Espagne. On l’y appliquait aux choses les plus graves. Ainsi, les sept premières lettres des sept Partidas, ce code monumental d’Alphonse le Savant, forment le nom d’ Alfonso. Entre autres exemples d’ acrostiches, je puis citer une octave de Luis de Tovar, recueillie dans le Cancionero general castellano:
Feroz sin consu elo y sa ñuda dama,
Remedia el trabajo a na die credero
A quien le si guio mar tirio tan fiero
Nos seas leon, o re ina, pues t’ama.
Cien males se do blan ca da hora en que pene,
Y en ti de tal gu isa bel dad pues se asienta,
Non seas cru el en a si dar afrenta
Al que por te amar y a vida no tiene.
Il y a dans cette pièce singulière, outre le nom de Francina, qui forme l’ acrostiche, les noms de huit autres dames: Eloisa, Ana, Guiomar, Leonor, Blanca, Isabel, Elena, Maria.
[42]Les commentateurs se sont exercés à découvrir quels pouvaient être ces trois poëtes que possédait alors l’Espagne, en supposant que Cervantes se fût désigné lui-même sous le nom de demi-poëte. Don Grégorio Mayans croit que ce sont Alonzo de Ercilla, Juan Rufo, et Cristoval Viruès, auteur des poëmes intitulés Araucana, Austriada et Monserate. (Voir les notes du chapitre VI, livre I, 1 èrepartie.) Dans son Voyage au Parnasse, Cervantes fait distribuer neuf couronnes par Apollon. Les trois couronnes qu’il envoie à Naples sont évidemment pour Quevedo et les deux frères Leonardo de Argensola; les trois qu’il réserve à l’Espagne, pour trois poëtes divins, sont probablement destinées à Francisco de Figuéroa, Francisco de Aldana, et Hernando de Herréra, qui reçurent tous trois ce surnom, mais à différents titres.
[43] Dulcinea del Toboso.
[44] Castellanas de a cuatro versos.
[45]C’est à cause de cette manière de parler, et de ce que dira plus bas Sancho, que le traducteur de cette histoire tient le présent chapitre pour apocryphe.
[46]Plusieurs anciens romances, très-répandus dans le peuple, racontent l’histoire de l’infante doña Urraca, laquelle, n’ayant rien reçu dans le partage des biens de la couronne que fit le roi de Castille Ferdinand I erà ses trois fils Alfonso, Sancho et Garcia (1066), prit le bourdon du pèlerin, et menaça son père de quitter l’Espagne. Ferdinand lui donna la ville de Zamora.
[47]Jeu de mots entre almohadas, coussins, et Almohades, nom de la secte et de la dynastie berbère qui succéda à celle des Almoravides, dans le douzième siècle.
[48]On peut voir, dans Ducange, aux mots Duellum et Campiones, toutes les lois du duel auxquelles don Quichotte fait allusion, et le serment que la pragmatique sanction de Philippe le Bel, rendue en 1306, ordonnait aux chevaliers de prêter avant le combat.
[49]Palmérin d’Olive, don Florindo, Primaléon, Tristan de Léonais, Tirant le Blanc, etc.
[50]Vêtement des condamnés du saint-office. C’était une espèce de mantelet ou scapulaire jaune avec une croix rouge en sautoir. San-benito est un abréviatif de saco bendito, cilice bénit.
[51]Dans cette tirade et dans le reste du chapitre, don Quichotte mêle et confond toujours, sous le nom commun de cavalleros, les chevaliers et les gentilhommes.
[52]Othman, premier fondateur de l’empire des Turcs, au quatorzième siècle, fut, dit-on, berger, puis bandit.
[53]Horace avait dit:
Nos numerus sumus et fruges consumere nati.
(Lib. I, epist. I.)
[54]Garcilaso de la Vega. Les vers cités par don Quichotte sont de l’élégie adressée au duc d’Albe sur la mort de son frère don Bernardino de Toledo.
[55]L’oraison de sainte Apolline (santa Apolonia) était un de ces ensalmos ou paroles magiques pour guérir les maladies, fort en usage au temps de Cervantes. Un littérateur espagnol, don Francisco Patricio Berguizas, a recueilli cette oraison de la bouche de quelques vieilles femmes d’Esquivias, petite ville de Castille qu’habita Cervantes après son mariage. Elle est en petits vers, comme une seguidilla; en voici la traduction littérale: «À la porte du ciel Apolline était, et la vierge Marie par là passait. «Dis, Apolline, qu’est-ce que tu as? Dors-tu, ou veilles-tu? – Ma dame, je ne dors ni ne veille, car d’une douleur de dents je me sens mourir. – Par l’étoile de Vénus et le soleil couchant, par le très-saint sacrement, que j’ai porté dans mon ventre, qu’aucune dent du fond ou de devant (muela ni diente) ne te fasse mal désormais.»
[56]Il y a dans l’original une grâce intraduisible. À la fin de la phrase qui précède, Sancho dit, au lieu de rata por cantidad (au prorata, au marc la livre), gata por cantidad. Alors don Quichotte, jouant sur les mots, lui répond: «Quelquefois il arrive qu’une chatte (gata) est aussi bonne qu’une rate (rata).» Et Sancho réplique: «Je gage que je devais dire rata et non gata; mais qu’importe… etc.»
[57]L’original dit revolear (vautrer), pour revocar.
[58]L’usage des pleureuses à gages dans les enterrements, qui semble avoir cessé au temps de Cervantes, était fort ancien en Espagne. On trouve dans les Partidas (tit. IV, ley 100) des dispositions contre les excès et les désordres que commettaient, aux cérémonies de l’église, ces pleureuses appelées lloraderas, plañideras, endechaderas. On trouve dans celui des romances du Cid où ce guerrier fait son testament (n° 96): «Item, j’ordonne qu’on ne loue pas de plañideras pour me pleurer; il suffit de celles de ma Ximène, sans que j’achète d’autres larmes.»
[59]Garcilaso de la Vega. Ces vers sont dans la troisième églogue:
De cuatro ninfas, que del Tajo amado Salieron juntas, a cantar me ofresco, etc.
[60]Le Panthéon, élevé par Marcus Agrippa, gendre d’Auguste, et consacré à Jupiter vengeur.
[61]Cervantes se trompe. Suétone, d’accord avec Plutarque, dit au contraire que ce fut un augure favorable qui décida César à passer le Rubicon, et à dire: Le sort en est jeté. (Vita Caesaris, cap. XXXI et XXXII.)
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