1 ...6 7 8 10 11 12 ...33 De son côté, le Bureau d’état-major menait une importante réflexion sur l’organisation qu’il fallait donner à l’Etat-major général et analysait le projet de loi d’organisation du Conseil fédéral. 16Il pensait que le service du temps de guerre devait constituer la base de réflexion pour la définition des structures du temps de paix. Cette démarche était logique, car l’Etat-major de l’armée serait constitué, en cas de mobilisation, à partir de l’organisation existante. Dès lors, ce furent les organisations du Grand Quartier général et celles de l’Etat-major de l’armée qui furent étudiées et qui reçurent en premier la sanction d’une ordonnance du Conseil fédéral. Les travaux de rédaction du document furent cependant beaucoup plus longs que prévu. 17Mise en chantier dès 1875, l’ordonnance ne fut signée par le Conseil fédéral que le 7 mai 1880, les divergences qui opposèrent le chef de l’infanterie et le chef du Bureau d’état-major étant nombreuses et difficiles à réduire. 18
L’organisation et les missions du Bureau d’état-major furent codifiées dans un règlement daté du 20 février 1875, dont il ne reste plus qu’un brouillon manuscrit, raturé et difficile à lire. 19Simple instruction à caractère provisoire, ce règlement constitua cependant le seul document officiel définissant l’organisation du Bureau d’état-major jusqu’en octobre 1890. On en connaît un peu plus sur la structure et le fonctionnement de l’Etat-major général de la fin des années 1870 par l’article sur le service d’état-major que rédigea Keller dans l’ouvrage de Joachim Feiss, Das Wehrwesen, publié en 1880. 20L’Etat-major général était toujours dirigé, en période de paix, par le chef du Bureau d’état-major. Ayant perdu le service topographique à la fin de l’année 1879, il comprenait désormais le service d’état-major général et le service des chemins de fer. Le Bureau d’état-major se composait de quatre subdivisions, le Bureau du commandant, la Section géographique, la Section tactique et la Section des chemins de fer. Ses activités consistaient avant tout à préparer les plans de mobilisation et de concentration de l’armée, à élaborer des études générales sur la défense de la Suisse et à rassembler la documentation et les cartes nécessaires à ces travaux, qu’ils concernent la Suisse ou les pays voisins.
1.3. L’arrêté fédéral du 14 octobre 1890 et l’organisation du Bureau d’état-major au début des années 1890
Après quinze ans, l’organisation du Bureau d’état-major définie dans le règlement de 1875 ne correspondait plus à la réalité des faits. 21En plus du changement de subordination du service topographique, divers changements avaient eu lieu à la fin des années 1880, dont le plus important fut le remplacement de la Section géographique par deux nouvelles sections, l’une dite «technique», chargée de tout ce qui avait trait aux fortifications, aux infrastructures, aux équipements et à l’armement, et l’autre chargée des études sur les armées étrangères et du renseignement pris dans un sens très général. La nomination du colonel Keller à la tête du Bureau d’état-major laissait par ailleurs le poste de chef de la Section tactique vacant. L’occasion fut saisie et le Conseil fédéral donna, enfin, par un document législatif une organisation officielle au Bureau d’état-major.
La nouvelle organisation ne faisait que sanctionner la solution provisoire mise en place en septembre 1890. Le Bureau d’état-major était structuré en cinq sections et une chancellerie, dont les tâches étaient définies de manière très générale.
Cette organisation et cette répartition des missions, très générales, devaient être précisées ultérieurement. Le chef du Bureau d’état-major devait s’atteler à cette tâche et présenter des projets, le Département militaire gardant le pouvoir de décision. Les documents montrent que la collaboration entre les deux acteurs était bonne et que des dispositions avaient déjà été prises pour régler la question. Un règlement intérieur détaillé fut approuvé, qui entra en vigueur le 17 janvier 1891. 22Il avait pour but avant tout de définir les compétences de chacun au sein du Bureau d’état-major. Il donnait avec force détail et sous forme de liste, pour le chef du bureau, la chancellerie et chacune des sections, les nombreuses tâches qui leur incombaient.
Tableau 1:Organisation du Bureau d’état-major (1890)
Le chef du Bureau d’état-major se voyait attribuer dix-neuf tâches. Outre celles liées à la direction générale de son institution, il était chargé de deux grands domaines de compétence. Le premier était la formation du corps d’état-major, sans toutefois s’occuper de l’instruction pratique. Il devait rédiger les ordres généraux et particuliers pour les écoles, les cours et les voyages, dont il assurait également la direction. Le deuxième domaine était la rédaction des plans de mobilisation et de concentration, ainsi que la préparation des travaux à réaliser en cas de guerre.
Les chefs des différentes sections, outre les tâches spécifiques à chacune de leur subdivision, dont ils devaient s’acquitter de leur propre initiative et sous leur propre responsabilité, étaient chargés de l’instruction dans les cours et les voyages. Ils pouvaient également recevoir des missions spéciales, confiées par le chef du Bureau d’état-major. Ce dernier assurait la surveillance de leurs activités, notamment au moyen des rapports mensuels qu’ils devaient lui remettre.
L’organisation du Bureau d’état-major et la répartition des activités entre les cinq sections avaient été prévues selon une division horizontale du travail d’état-major. La Section des renseignements s’occupait de la collecte des informations et de l’élaboration des études sur les armées étrangères, notamment celles des quatre pays voisins sur lesquels l’attention était concentrée. Elle devait tenir à jour les documents relatifs à leur organisation, tels que les ordres de bataille et les listes des commandants des corps d’armée. Elle devait également s’occuper de tout ce qui avait trait aux questions de géographie militaire et de transports, en relevant plus particulièrement les modifications dans les réseaux de communication des régions limitrophes de la Suisse.
La Section tactique s’occupait des tâches relatives à la mobilisation de l’armée. Elle devait établir les documents de mobilisations, notamment toutes les cartes (cartes des places de rassemblement de corps, des dépôts, des lieux de réquisition pour les chevaux), les formulaires et les timbres, organiser la mise sur pied des chevaux, la réquisition des voitures et tenir à jour les nombreuses listes des personnels et des fonctionnaires employés à la réalisation de la mobilisation. C’est à elle que revenait encore la tâche de recueillir l’ensemble des prescriptions émises par les cantons en matière de mobilisation. Le deuxième grand domaine dont la section avait la charge, et qui lui donnait son nom, était la tactique. A ce titre, elle avait pour tâche de mener des études qui concernait surtout la tactique des trois armes et le service en campagne, et pouvait émettre des propositions de changement des règlements. Dans ce cadre, la section était plus particulièrement chargée de deux missions. D’une part, elle avait la charge de l’étude de la guerre en montagne, tant au point de vue de l’organisation des troupes que de leur équipement et de leur tactique. D’autre part, elle avait la responsabilité d’instruire les formations cyclistes que l’on venait de créer.
Читать дальше