Louis Boussenard - Aventures périlleuses de trois Français au Pays des Diamants
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- Название:Aventures périlleuses de trois Français au Pays des Diamants
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- Издательство:Marpon & Flammarion
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» Vous ne sauriez croire l’impression que m’a produite la vue de cette femme dont l’image trouble jusqu’à mon sommeil, et celle aussi de l’homme que je hais plus que tout au monde, ce Villeroge, dont je voudrais fouiller la poitrine avec mon couteau.
– Klaas, mon frère, vous baissez.
– Vous verrez tout à l’heure si je baisse, et si ces deux passions, l’amour et la haine m’ont assez aveuglé pour me faire oublier les intérêts des Voleurs de Diamants .
» Ni master Smithson ni les siens n’ont même soupçonné ma présence. J’ai pu cependant m’attacher à leurs pas, vivre de leur vie, et pénétrer leurs secrets, moi la brute, moi le sauvage blanc, bon à suivre la piste d’un hippopotame, j’ai évolué dans une grande ville comme au milieu du désert.
– À la bonne heure. Nous vous retrouvons enfin.
– Eux aussi sont sans ressources. Ils ne comptent plus, pour le moment du moins, que sur une chose folle, absurde pour tout le monde, mais à laquelle, je crois, peut-être seul.
– Dites, Klaas, interrompirent les auditeurs vivement intéressés.
– Vous connaissez la légende du trésor prodigieux des rois Cafres, ce fantastique amas de diamants cachés, dit-on, non loin des cataractes du Zambèze.
– Le malheureux est fou, interrompit le Révérend, et nous perdons notre temps à écouter ses sornettes.
Klaas haussa les épaules, engloutit une large rasade d’eau-de-vie et continua froidement.
– Le secret du trésor leur a été donné par le cafre Lakmi, ce drôle que vous avez bien connu, et dont je n’ai rien pu tirer jadis, bien que je lui aie rôti la peau des pieds sur un brasier de bauhinia.
» Ils ont un plan, je le sais ; et ils comptent si bien sur la découverte de la « cache », que ce Villeroge maudit est parti en expédition pour aller à sa recherche.
» Je l’ai suivi pas à pas jusqu’au kopje de Nelson’s Fountain où il était encore hier soir. J’ai entendu sa conversation avec un mineur français qu’il s’est associé. J’ai même failli recevoir un coup de revolver de ce dernier, au moment où j’écoutais, l’oreille collée à la toile de sa tente. Si j’avais dû conserver le moindre doute, leur entretien, dont je n’ai pas perdu un mot, eût suffi à le dissiper.
» L’existence du trésor ne peut donc plus faire l’ombre d’un doute, et j’ai la certitude qu’ils le trouveront.
– Eh ! bien, la chose est parfaitement limpide. Il suffit de continuer à les suivre, puis les délester proprement du magot, lorsqu’ils auront mis la main dessus.
» Les procédés les plus simples sont toujours les meilleurs.
Klaas eut un sourire méprisant et sembla regarder ses auditeurs du haut d’une supériorité qu’il ne devait posséder qu’exceptionnellement.
– Les suivre à la piste ne suffit pas. Il faut les accompagner, user de ruse et réussir à se faire admettre parmi eux. Cela nous est impossible. Ils nous connaissent trop bien.
– Mais, dit le Révérend à moitié convaincu par l’assurance du bandit, cette opération est très praticable pour moi.
– J’ai effectivement compté sur vous.
– Vous avez eu raison, mon camarade, et je ne serais pas fâché de revoir nos anciens auxiliaires, les Betchuanas de l’Ouest.
» Il me sera facile de recruter une troupe de ces drôles, de les conduire sur les pas des Français, et de constituer à ces derniers une garde d’honneur composée des plus fieffés coquins du désert.
– Bon. Je n’attendais pas moins de vous. Le motif de votre rencontre et de votre jonction, est d’une simplicité enfantine. La guerre va éclater entre les Cafres et les Anglais. Je sais cela à des signes infaillibles. Vous serez censé guider de pauvres diables qui émigrent vers le Nord pour fuir la lutte, et fonder une colonie.
– Savez-vous bien, Klaas, que vous devenez réellement très fort. Jusqu’à présent, il n’y a rien à reprendre à votre plan de campagne.
– C’est que, répliqua le bandit d’une voix sombre, deux passions implacables me surexcitent jour et nuit. Pour arriver à la satisfaction de ma haine et de mon amour, je suis capable de tout, même d’une bonne action.
– Vous pourriez ajouter à ces deux sentiments, la cupidité.
– Je n’en sais rien. J’aime et je hais, voilà tout. Certes, je partagerais volontiers, avec vous, si comme je l’espère, nous réussissons à ravir son trésor à ce maudit Français, mais, je renoncerais volontiers à ma part pour être sûr de pouvoir lui arracher le cœur de la poitrine, et tenir en mon pouvoir celle dont le souvenir me hante comme un cher et douloureux cauchemar.
– Voilà qui est entendu, répondit le Révérend. Je me mets en route dès aujourd’hui, je rallie nos pillards du Bakalahari, je rejoins nos trois aventuriers, je gagne à tout prix leur confiance, je prêche à tort comme à travers, et je finis par les accompagner.
» Mais, vous, pendant ce temps, que ferez-vous ?
– Cornélis et Pieter resteront ici en m’attendant. Moi, je retourne à Cape-Town.
– Je ne comprends plus.
– Deux mots encore. J’abrège, car le temps s’écoule. Il faut que la femme de Villeroge quitte la ville où elle est en sûreté et qu’elle vienne jusqu’ici. Attaquer en route son convoi, et nous emparer de sa personne, sera un jeu pour nous.
– Je n’en doute pas. Mais comment la déciderez-vous à partir.
– Ceci, Révérend, est encore votre affaire. Je ne sais ni lire ni écrire, et vous allez nous griffonner séance tenante une lettre et un fait divers.
» Vous avez de quoi écrire, n’est-ce pas ?
– Oui, à peu près.
– C’est bien. Confectionnez-moi une lettre que Villeroge blessé grièvement, fait écrire à sa femme par le premier venu. Dites que son état est très alarmant et qu’il réclame des soins immédiats.
» Je me charge de la faire parvenir. Quand elle l’aura reçue, elle partira sans désemparer.
– Quant au fait divers ?...
– Il relatera l’assassinat du juif et l’imputera naturellement à l’aventurier français.
– Mais, nul ne le croira.
– Comme il sera publié le lendemain du départ de la jeune femme, ce départ précipité ressemblant à une fuite inspirera des soupçons à l’autorité.
– Mais, vous allez nous attirer ici toute une horde de policiers.
– La belle affaire !... Vous les connaissez aussi bien que moi, et vous savez combien ils sont inoffensifs.
– Quel est donc votre intention ?
– De fermer à Villeroge, au moins pendant un temps, le territoire de la colonie. Sa femme étant en notre pouvoir, il n’aura pas le loisir de rester au Cap pour se disculper. Il mettra tout en œuvre pour la délivrer, mais, réduit à ses propres forces, il ne pourra demander assistance ni aux Anglais, ni aux Boërs d’Orange, sous peine d’être arrêté et de perdre un temps précieux.
– Il n’y a rien à ajouter à ce que vous venez de dire, ami Klaas. Voici vos deux documents. Le fait divers est plié en long, et la lettre en carré. N’allez pas vous tromper, au moins.
– Soyez tranquille.
» Maintenant, reposons-nous. Dans quelques moments on va découvrir le cadavre du juif et son dray mis au pillage. Je vais me mêler aux groupes et tâcher de lancer les officiers de police sur une fausse piste.
– Défiez-vous de master Will...
» À propos, avez-vous au moins opéré une capture sérieuse dans le chariot du mécréant ?
– Peu de chose, mais qu’importe. J’avais surtout besoin d’un cadavre, je l’ai pris où je l’ai trouvé...
VII
Réflexions d’un policeman présomptueux, mais irrésolu. – Un homme qui croit aux pressentiments. – Concert de fauves. – Rugissements de lion ou d’autruche. – Le chacal chasse pour le lion. – Nouvel exploit d’un habile chasseur. – Au secours !... – Dans la gueule du lion. – Il était temps. – Délire. – Appareil à fracture. – Rôti de pieds d’éléphants. – Aux gourmets civilisés. – Opinion du docteur Livingstone sur le lion de l’Afrique Australe. – Arrivée du Révérend qui reconnaît dans le blessé master Will, lui-même.
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