William Gibson - Mona Lisa s'éclate

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Mona Lisa s'éclate: краткое содержание, описание и аннотация

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Une nouvelle macroforme est apparue dans le Conurb :
. Un gigantesque empilement de biopuces capables de reconstituer tous les savoirs, toutes les données de l’univers. Un fantastique instrument de pouvoir !
Tous les pirates de cyberspace sont à sa recherche. Mais qui le détient réellement ? Bobby, un génie du logiciel ? Dame 3Jane, l’héritière clonée de l’empire Tessier-Ashpool ? Ou Angie, vedette de cinéma, fille du savant Mitchell, le célèbre créateur des biopuces ?
L’enjeu est de taille ! Ils l’ignorent encore mais celui qui, au risque de sa vie, saura se rendre maître de l’aleph possèdera les clés d’un monde nouveau, un monde au-delà de l’humanité…

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Prior était en train de boutonner sa chemise bleue. Il approcha du lit et rabattit le drap pour contempler ses seins. Comme s’il regardait une voiture ou un objet quelconque.

D’un geste, elle se recouvrit.

— Je vais aller ramasser des crabes.

Il enfila sa veste et sortit. Elle l’entendit dire quelque chose à Gerald.

Ce dernier passa la tête à l’intérieur.

— Comment va, Mona ?

— J’ai faim.

— Détendue ?

— Ouais.

Quand elle fut à nouveau seule, elle roula de l’autre côté du lit pour étudier son visage, le visage d’Angie, dans le mur-miroir. Les ecchymoses avaient presque entièrement disparu. Gerald lui collait sur la figure des trucs comme des trodes miniatures qu’il raccordait ensuite à un appareil. Il disait que ça accélérait la cicatrisation.

Ça ne la fit pas sursauter, ce coup-ci, de découvrir le visage d’Angie dans la glace. Les dents étaient impeccables ; ça, pas question de s’en séparer. Pour le reste, elle n’était pas sûre, pas encore.

Peut-être qu’elle ferait mieux de se lever à présent, de s’habiller, et de prendre la porte. Si Gerald essayait de l’arrêter, elle pourrait toujours user de l’Élec-Trique. Puis elle se souvint de l’arrivée de Prior chez Michael, comme s’il avait eu en permanence un sbire pour la surveiller, toute la nuit, la filer. Qui sait si quelqu’un n’était pas encore là à la guetter, dehors. L’appartement de Gerald semblait dépourvu de fenêtres, de vraies, il fallait donc qu’elle sorte par la porte.

Et puis l’envie de wiz commençait à la tenailler à nouveau, mais si elle craquait, ne fût-ce qu’un peu, Gerald s’en apercevrait. Elle savait que sa trousse de toilette était là, dans son sac, sous le lit. Peut-être qu’une petite dose l’aiderait à faire enfin quelque chose. D’un autre côté, ce n’était peut-être pas recommandé ; elle devait bien admettre que ses agissements sous l’influence du wiz n’étaient pas toujours couronnés de succès, même si la drogue donnait l’impression d’être à l’abri de toute erreur.

En tout cas, elle avait faim… Pas de pot que Gerald n’ait pas eu de la musique ou un truc quelconque, pour la faire patienter en attendant ce fameux crabe…

24. DANS UN COIN PERDU

Gentry, la Forme brûlant au fond des yeux, brandissait le faisceau de trodes sous l’éclat des ampoules nues en expliquant à la Ruse pourquoi on ne pouvait faire autrement, pourquoi ce dernier devait se mettre les trodes et se brancher direct sur les données, quelles qu’elles soient, qu’injectait le bloc gris à la silhouette immobile étendue sur la civière.

Il hocha la tête, en se remémorant le parcours qui l’avait fait échouer sur la Chienne de Solitude. Et Gentry se mit à parler plus vite, prenant sa mimique pour un refus.

Il était en train de lui expliquer qu’il devrait plonger, peut-être pendant quelques secondes seulement, le temps pour Gentry de repérer les données et d’élaborer une macroforme. Un truc hors de portée de la Ruse, sinon il aurait plongé à sa place ; car ce n’étaient pas les données proprement dites que désirait Gentry mais juste leur contour général. Il était persuadé qu’il atteindrait ainsi la Forme, la grande, celle qu’il traquait depuis si longtemps.

La Ruse se rappelait sa traversée de la Solitude, à pied. Avec la trouille d’un retour de la Korsakov, la trouille d’oublier où il se trouvait et de boire l’eau cancérigène des flaques vaseuses sur la plaine rouillée. Écume rougeâtre et oiseaux morts flottant les ailes étendues. Le routier du Tennessee lui avait dit de continuer droit vers l’ouest à partir de la nationale : au bout d’une heure de marche, il tomberait sur une route goudronnée à deux voies d’où il pourrait gagner Cleveland en autostop mais il avait l’impression d’avoir marché plus d’une heure à présent ; il ne savait plus très bien où se trouvait l’ouest et ce coin lui flanquait les foies, cette immense décharge, balafrée de toutes parts comme si un géant l’avait piétinée. Soudain il avait aperçu quelqu’un, très loin, sur un petit talus, et lui avait fait un signe. La silhouette s’était évanouie, alors il avait poursuivi dans cette direction, sans plus chercher à éviter les flaques mais pataugeant dedans, jusqu’à ce que, parvenu au talus, il découvre qu’il s’agissait de la carlingue, privée d’ailes, d’un avion de ligne à moitié enfoui sous des boîtes de conserve rouillées. Il avait remonté la pente du talus par un sentier formé de boîtes piétinées qui l’avait mené à l’ouverture carrée d’une ancienne issue de secours. Passé la tête à l’intérieur et découvert des centaines de têtes minuscules suspendues au plafond. Figé, plissant les yeux dans cette ombre soudaine, il avait fini par déchiffrer le spectacle qui s’offrait à lui : il s’agissait de têtes de poupées roses, suspendues comme des fruits par leurs cheveux de nylon ramassés en chignon et collés au plafond qui était enduit d’une épaisse couche de goudron. Il n’y avait rien d’autre, hormis quelques plaques déchiquetées de mousse vert sale et la Ruse n’était pas du genre à s’attarder pour découvrir l’identité du propriétaire des lieux.

De là, il avait pris vers le sud, sans le savoir, et découvert la Fabrique.

— Je n’aurai jamais une autre occasion, disait Gentry.

La Ruse regarda le visage rigide, les yeux agrandis de désespoir. Je ne la reverrai jamais…

Et la Ruse se souvint de la fois où Gentry l’avait frappé, quand il avait contemplé la clé anglaise, dans sa main, et senti que… Bon, Cherry se trompait sur leur compte mais enfin, il y avait là autre chose, même s’il ne savait comment le qualifier. Il saisit de sa main gauche le faisceau de trodes, et bouscula rudement Gentry.

— La ferme ! La ferme, bordel !

Gentry heurta le bord de la table en acier.

La Ruse le maudit à voix basse tout en installant maladroitement le réseau délicat de dermatrodes de contact sur ses tempes et son front.

Et cliqua.

Ses bottes crissaient sur du gravier.

Ouvrir les yeux, regarder à ses pieds une allée gravillonnée lisse dans l’aube, d’une propreté inconnue sur la Chienne de Solitude. Il leva la tête, vit qu’elle s’éloignait en décrivant une courbe et découvrit, derrière un bosquet d’arbres verdoyants, le toit d’ardoises pointu d’une maison presque aussi grande que la Fabrique. Près de lui, sur l’herbe mouillée, il y avait des statues : un cerf en métal, et la silhouette brisée d’un homme au corps sculpté dans la pierre blanche, sans tête ni membres. Des oiseaux chantaient, et l’on n’entendait rien d’autre.

Il remonta l’allée, en direction de la maison grise. Parvenu au bout du chemin, il aperçut, derrière la maison, des bâtiments plus petits et une vaste prairie où des planeurs étaient arrimés pour résister au vent.

Un conte de fées , songea-t-il en contemplant la façade en pierre de taille, les fenêtres à vitraux en losange ; comme dans une vidéo qu’il avait vue quand il était petit. Est-ce qu’en vrai les gens habitaient dans des endroits pareils ? Mais ce n’est pas un endroit , se rappela-t-il, on croit seulement que c’en est un.

Gentry ! lança-t-il. Tu me sors de là en vitesse, d’accord ?

Il étudia le dos de ses mains. Cicatrices, crasse incrustée, demi-lunes noires de graisse sous les ongles fendus. La graisse pénétrait et les ramollissait, les rendant cassants.

Il commençait à se sentir idiot, à rester planté là. Peut-être qu’on l’observait, de la maison.

— Et puis merde, dit-il, et il posa le pied sur les larges dalles de pierre, adoptant machinalement la démarche chaloupée qu’il avait apprise chez les Diacres bleus.

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