De Gaulle hausse les épaules :
« Des chercheurs, on en trouve !… C’est des “trouveurs” que je cherche. »
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Le référendum sur l’élection du président de la République, au suffrage universel, fixé au 28 octobre 1962, ne se présente pas sous les meilleurs auspices… De Gaulle, qui le sait, fulmine :
« Tout le monde est contre mon projet ! Les notables, les parlementaires, les partis !… Si, avec tout ça, j’obtiens 65 % des suffrages exprimés, ce sera un triomphe ! »
Roger Frey, ministre de l’Intérieur, le trouve optimiste :
« Et si vous n’en obtenez que 60 % ?… »
De Gaulle le regarde, très calme :
« Dans ce cas, ce sera un succès. »
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Georges Pompidou présente, en Conseil des Ministres, les promotions qu’il souhaitait soumettre à l’agrément du Président.
Pour François Mauriac, il suggère la Grand-Croix de la Légion d’honneur.
De Gaulle approuve :
« Oui, c’est bien… Après tout, c’est le plus grand écrivain de sa génération… »
À cet instant, il surprend le regard amusé d’un Ministre lorgnant André Malraux qui s’agite sur son siège avec un visible agacement. De Gaulle se penche aussitôt vers lui et, sur le ton de la confidence, il conclut sa phrase :
« … entre autres, naturellement. »
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Invitée très officiellement par M. Lopez Mateos, président du Mexique, M me de Gaulle sera de ce voyage, du 15 au 24 mars 1964.
Avant de partir et d’accompagner son illustre époux, elle aimerait bien se faire donner quelques cours accélérés d’espagnol :
« … Je serai fort gênée, autrement… Quand on me parlera, je ne comprendrai rien et ne saurai que répondre… »
Le Général la rassure :
« Ça n’a aucune importance. Souriez aimablement… C’est encore ce qu’il y a de plus difficile, vous verrez… »
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Compiègne a réservé au Général, le 15 juin 1964, un accueil particulièrement vibrant. Avenues, places et rues sont noires de monde, et le soleil est de la fête…
Escorté des notables, de Gaulle « se baigne dans la foule » avec une évidente délectation et, à son passage, un enthousiaste lui lance :
« Rempilez, mon Général ! »
De Gaulle le repère, sourit et réplique :
« Entendu ! J’essaierai. »
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En janvier 1967, M. Harold Wilson succède à M. Harold Macmillan comme Premier ministre de Grande-Bretagne. Il demande aussitôt à rencontrer le Président de la République française pour poser à nouveau la candidature de son pays à l’entrée dans le Marché commun, entrée à laquelle, dans les circonstances présentes, le Général est opposé.
De Gaulle doute beaucoup de ses capacités à le convaincre :
« C’est un demi de mêlée qui se prend pour un demi d’ouverture… »
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Le 29 mai 1968, en pleine émeute, de Gaulle « disparaît ». Nul ne sait où il est… Le 30 mai, il réapparaît. Nul ne sait d’où il vient…
Georges Pompidou, Premier ministre, digère mal de n’avoir pas été informé et, en termes mesurés, il le reproche au chef de l’État.
De Gaulle esquisse un sourire ambigu :
« Au moins, vous saurez maintenant, tout comme moi en Juin 40, ce que c’est que d’être seul avec la France sur les bras… »
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Le Conseil des Ministres du 17 février 1969 étudie le texte qui sera soumis, par référendum, au peuple français et qui propose une régionalisation décentralisatrice.
La région parisienne pose un problème particulier et, lors de la discussion de l’article 37 du projet, un membre du gouvernement suggère de baptiser « Île de France » l’ensemble des départements qui entourent la capitale.
De Gaulle objecte :
« Nous avons déjà la Corse. Deux îles, en France, ce serait trop. »
Au printemps 1919, le capitaine de Gaulle, cantonné avec son unité à Rembertow, dans les faubourgs de Varsovie, se voit chargé de cours de tactique au bénéfice des fantassins polonais du secteur. Pierre Galante a recueilli, à ce propos, une amusante anecdote…
À la fin de chaque cours, le capitaine de Gaulle récapitulait, au tableau noir, les points essentiels de la leçon du jour afin que ses élèves se les gravent dans la mémoire. Et, naturellement, l’interprète attitré, le capitaine Ignace Wienïewski, traduisait. Parfois, cependant, la traduction s’étirait interminablement et de Gaulle, dans ce cas, ne manquait jamais de lui couper la parole :
« Je vous serais reconnaissant, cher ami, de ne pas développer ma pensée à ma place, ni de broder sur mon exposé… »
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Londres, 1941.
De Gaulle et Churchill devisent paisiblement.
Au fil de la conversation, Churchill évoque « la présence des occupants en France ».
De Gaulle (goguenard) :
« Les occupants… Les occupants… Qu’est-ce que vous faites, vous, à Jersey et à Guernesey ?… »
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Cet officier de l’État-major du Chef de la France libre passe, à juste titre, pour un « tombeur » et ses bonnes fortunes ne se comptent plus. Mais, cette fois, la lady qui s’est prise dans ses filets appartient au gratin de la haute société londonienne, et le très respectable Times juge à propos d’en faire un entrefilet croustillant.
Informé, le Général de Gaulle convoque le séducteur :
« Capitaine, cocufiez les Anglais tant que vous voudrez, mais faites en sorte que le Times n’en fasse pas des manchettes… »
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L’ambassadeur Raymond Offroy rapporte qu’en visite à Leeds, de Gaulle voit venir vers lui une jeune fille qui joue des coudes dans le petit groupe qui entoure le Général : visiblement, elle brûle d’envie de lui être présentée.
Quelqu’un s’en charge, et elle est aux anges :
« Ah, Général, que je suis heureuse de vous connaître !… (Elle est de très petite taille et se hausse sur la pointe des pieds.) J’habite l’Angleterre, mais j’ai grandi en France… »
De Gaulle s’incline pour serrer la main qui se tend et, à son officier d’ordonnance, il glisse à l’oreille, pince-sans-rire :
« Et ici, apparemment, elle ne grandit plus ?… »
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À Londres, en 1941, au Colonel Passy-Dewavrin qui lui expose l’organisation et les méthodes du Service « Renseignement », dont il a la charge, de Gaulle commente :
« C’est bien. C’est très bien… Mais pour gagner, il ne suffit pas de savoir ce que veut l’ennemi : il faut surtout savoir ce que l’on veut soi-même. »
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Après avoir beaucoup hésité, Robert C… vient d’arriver à Londres, via l’Espagne.
Il demande à se présenter au Chef de la France Libre, ce qu’on lui accorde car il compte au nombre des personnalités connues, et, pour manifester des convictions, longuement mûries, (car nous sommes en avril 1943), il fait aussitôt emplette, dans un magasin spécialisé, d’une belle croix de Lorraine qu’il s’épingle au veston.
Il se présente au 4, Carlton Gardens, le Général de Gaulle l’accueille, repère la croix de Lorraine et s’exclame :
« Comme elle est belle ! Comme elle est grande !… Comme elle est neuve !… »
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Deux jours avant son départ pour Alger, le 25 mai 1943, le chef de la France libre va faire ses adieux au « vieux lion », Winston Churchill, et il lui exprime la gratitude de la France pour l’accueil et l’appui qu’il a, depuis près de trois ans, ménagés aux Français libres et à leur chef. Il ajoute :
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