Mathias Énard - Rue des Voleurs

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LE POINT DE VUE DES ÉDITEURS
C’est un jeune Marocain de Tanger, un garçon sans histoire, un musulman passable, juste trop avide de liberté et d’épanouissement, dans une société peu libertaire. Au lycée, il a appris quelques bribes d’espagnol, assez de français pour se gaver de Série Noire. Il attend l’âge adulte en lorgnant les seins de sa cousine Meryem. C’est avec elle qu’il va “fauter”, une fois et une seule. On les surprend : les coups pleuvent, le voici à la rue, sans foi ni loi.
Commence alors une dérive qui l’amènera à servir les textes — et les morts — de manières inattendues, à confronter ses cauchemars au réel, à tutoyer l’amour et les projets d’exil.
Dans
, roman à vif et sur le vif, l’auteur de
retrouve son territoire hypersensible à l’heure du Printemps arabe et des révoltes indignées. Tandis que la Méditerranée s’embrase, l’Europe vacille. Il faut toute la jeunesse, toute la naïveté, toute l’énergie du jeune Tangérois pour traverser sans rebrousser chemin le champ de bataille. Parcours d’un combattant sans cause,
est porté par le rêve d’improbables apaisements, dans un avenir d’avance confisqué, qu’éclairent pourtant la compagnie des livres, l’amour de l’écrit et l’affirmation d’un humanisme arabe.
Mathias Énard est l’auteur de quatre romans chez Actes Sud :
(2003, prix des Cinq Continents de la francophonie),
(2005 ; adapté au cinéma en 2012 par Marion Laine sous le titre
avec Juliette Binoche et Edgar Ramirez),
(2008, prix Décembre 2008 ; prix du Livre Inter 2009) et
(2010, prix Goncourt des lycéens 2010).

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Le type était assis derrière son bureau, il a relevé la tête ; sur son visage j’ai vu de la surprise, puis de la haine, du mépris ou de la pitié. Je m’étais attendu à des insultes ; je m’étais imaginé lui demandant pardon, il m’aurait pardonné, et nous aurions repris nos conversations comme avant. Il restait silencieux, il me fixait, les sourcils froncés ; il ne disait rien ; il contemplait ma bêtise, me noyait dans ma propre lâcheté ; je rapetissais, écrasé de honte ; je n’arrivais pas à parler, pas à sortir l’enveloppe avec les dirhams que j’avais naïvement préparée pour lui, j’ai murmuré quelques mots, bonjour, pardon, je me suis étranglé et j’ai tourné les talons, j’ai fui une fois de plus, fui face à moi-même ; je suis reparti en courant ; il y a des choses qui ne se réparent pas. D’ailleurs rien ne se répare. En quittant le magasin j’ai imaginé qu’il allait me courir après en me disant “reviens, petit, reviens”, mais non bien sûr, et en y repensant aujourd’hui il est tout à fait logique qu’il n’ait eu que mépris pour un gamin perdu qui avait choisi la trique et le Cheikh Nouredine, aucune pitié. Je marchais vite vers les locaux de la Diffusion, ma culpabilité se transformait en agressivité, j’insultais mentalement le pauvre type, qu’est-ce qui m’avait pris, bon Dieu, de retourner là-bas, et deux petites larmes de rage pointaient au coin de mes yeux, il y avait de la fumée dans la nuit, une fumée épaisse, blanchâtre, mêlée de cendres dispersées par le vent ; une vapeur de colère alourdissait l’air du printemps, une odeur de cramé m’envahissait la gorge et ce n’est qu’en parvenant au coin de la rue, en voyant l’attroupement et les camions de pompiers que j’ai compris que le Groupe pour la Diffusion de la Pensée coranique brûlait ; des flammes hautes de plusieurs mètres sortaient des fenêtres et léchaient l’étage supérieur de l’immeuble ; de l’extérieur, avec leurs lances, des pompiers arrosaient les ouvertures, des bouches aux langues de feu qui crachaient des tonnes de débris de papier à moitié consumés, pendant qu’une escouade de gendarmes essayait tant bien que mal de contenir la foule à distance de la catastrophe. Des centaines de livres partaient dans la brise, envahissaient l’air jusqu’à Larache ou Tarifa ; j’imaginais les blisters fondre, la chaleur attaquer les pages compactes des ouvrages entassés qui finissaient par prendre et transmettre à leur tour la destruction à leurs voisins, je connaissais bien mon stock, près de cette fenêtre-ci c’était la réserve d’ Héroïnes , de Sexualité et tous les petits manuels, là-bas les mètres cubes de commentaires du Coran, et au beau milieu, sur les tapis en synthétique qui avaient déjà dû se liquéfier, mes cartons, les Série Noire qui s’envolaient elles aussi, les Manchette, les Pronzini, les McBain, les Izzo et toutes mes belles chemises, mes pompes mirifiques, mes vernis ; le cirage devait bien brûler, la lotion capillaire attiserait le tout et bientôt, si les pompiers ne parvenaient pas à maîtriser le feu, ce serait la bouteille de gaz de la cuisine et celle de la salle de bains qui exploseraient, envoyant définitivement dans les airs ce qui restait de l’institution du Cheikh Nouredine.

Les voisins étaient là, je les reconnaissais ; il y en avait un en robe de chambre, il avait jeté une couverture de survie d’argent éclatant sur les épaules de sa femme, qui devait être en petite tenue ; certains étaient silencieux et contrits, d’autres au contraire braillaient et gesticulaient comme des perdus. Les pompiers semblaient avoir du mal à se rendre maîtres de la littérature faite flammes.

Après trois minutes de contemplation morbide et ébahie j’ai été soudain pris de peur ; j’ai dévalé la colline en direction du centre de Tanger. Tout le quartier savait que j’étais le libraire du Groupe de la Diffusion de la Pensée coranique. La police allait sans doute me rechercher, surtout si, comme je l’imaginais, le Groupe était lié de près ou de loin à l’attentat de Marrakech. Je n’avais nulle part où aller. Seules possessions : une sacoche contenant un ordinateur portable, du fric et l’exemplaire du Pain nu de Choukri que m’avait offert Judit et que j’avais pris pour lire dans le bus.

Au moins, je n’avais pas à me préoccuper de mes cartons, à quelque chose malheur est bon. Quand on part en voyage, disait le Prophète, il faut régler ses affaires comme si on allait mourir. J’avais revu le libraire ; la Diffusion brûlait, et toutes mes possessions avec ; il ne me restait que mes parents. Depuis quelques jours, et malgré l’altercation avec mon frère, j’avais très envie de revoir ma mère. Pas aujourd’hui. Pas la force. L’adrénaline refluait petit à petit, je me suis endormi dans l’autobus qui m’emmenait vers le centre. J’étais soudain épuisé. Je n’arrivais pas à penser. Savoir quoi ou qui avait pu provoquer l’incendie m’était complètement égal. Je suis descendu du côté du Grand Zoco, un peu hagard. Drôle de journée. Il fallait que je trouve maintenant un endroit où dormir ; j’ai hésité à prendre une chambre dans le même hôtel que Judit, mais c’était peut-être un peu violent, qu’elle me trouve installé dans la piaule d’à côté en arrivant à Tanger. Je n’étais d’ailleurs pas sûr qu’elle loge au même endroit, c’était probable mais pas certain. J’ai choisi une autre pension, pas très loin, un peu plus bas vers le port ; le patron m’a regardé comme si j’étais un lépreux, jeune, marocain et sans valise ; il a exigé que je paye trois nuits d’avance et m’a répété dix fois que son bouge était un endroit respectable.

La turne n’était pas mal, avec un petit balcon de fer forgé, une jolie vue sur le port, les toits de la vieille ville et surtout, le wifi. J’ai cherché des nouvelles de l’incendie sur Internet, ça ne devait pas être un événement de première magnitude, personne n’en parlait pour le moment.

J’ai envoyé un message à Judit, puis je suis sorti pour acheter quelques vêtements et manger un morceau.

J’étais prêt au départ. Je n’avais plus de famille depuis près de deux ans, plus d’amis depuis deux jours, plus de valises depuis deux heures. L’inconscient n’existe pas ; il n’y a que des miettes d’information, des lambeaux de mémoire pas assez importants pour être traités, des bribes comme autrefois ces bandes perforées dont se nourrissaient les ordinateurs ; mes souvenirs sont ces bouts de papier, découpés et jetés en l’air, mélangés, rafistolés, dont j’ignorais qu’ils allaient bientôt se remettre bout à bout dans un sens nouveau. La vie est une machine à arracher l’être ; elle nous dépouille, depuis l’enfance, pour nous repeupler en nous plongeant dans un bain de contacts, de voix, de messages qui nous modifient à l’infini, nous sommes en mouvement ; un cliché instantané ne donne qu’un portrait vide, des noms, un nom unique et pourtant multiple qu’on projette sur nous et qui nous fabrique, qu’on m’appelle Marocain, Maure, Arabe, immigré ou par mon prénom, appelez-moi Ismaël, par exemple, ou ce que vous voudrez — j’allais bientôt être fracassé par une partie de la vérité, et regardez-moi courir dans Tanger, ignorant, sans comprendre ce qui venait de brûler avec le Groupe de Diffusion de la Pensée coranique, accroché à l’espoir de Judit et de mon nouveau travail comme aux deux derniers vaisseaux sur la grève. Par moments j’ai l’impression de retrouver les agissements et les pensées de celui que j’étais à l’époque, mais c’est bien sûr une illusion ; ce jeune homme qui s’achète deux chemises noires, deux jeans, des tee-shirts et une valise est une imitation, comme les vêtements qu’il acquiert ; je croyais que la violence qui m’entourait ne m’affectait pas, qu’elle n’avait rien à voir avec moi, qu’elle n’avait pas de prise sur moi, pas plus que celle de Tripoli, du Caire ou de Damas. Aveuglé, je ne pensais plus qu’à l’arrivée de Judit, à ces vers trop sentimentaux de Nizar Kabbani que nous recopiions, au lycée, dans des messages secrets pour des filles qu’ils émouvaient, ceux que j’avais déjà récités à Meryem,

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