Mathias Énard - Zone

Здесь есть возможность читать онлайн «Mathias Énard - Zone» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Город: Paris, Год выпуска: 2008, ISBN: 2008, Издательство: Éditions Actes Sud, Жанр: Современная проза, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

Zone: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «Zone»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

LE POINT DE VUE DES ÉDITEURS
Par une nuit décisive, un voyageur lourd de secrets prend le train de Milan pour Rome, muni d’un précieux viatique qu’il doit vendre le lendemain à un représentant du Vatican pour ensuite — si tout va bien — changer de vie. Quinze années d’activité comme agent de renseignements dans sa Zone (d’abord l’Algérie puis, progressivement, tout le Proche-Orient) ont livré à Francis Servain Mirkovic les noms et la mémoire de tous les acteurs de l’ombre (agitateurs et terroristes, marchands d’armes et trafiquants, commanditaires ou intermédiaires, cerveaux et exécutants, criminels de guerre en fuite…). Mais lui-même a accompli sa part de carnage lorsque la guerre en Croatie et en Bosnie l’a jeté dans le cycle enivrant de la violence.
Trajet, réminiscences, aiguillages, aller-retour dans les arcanes de la colère des dieux. Zeus, Athéna aux yeux pers et Arès le furieux guident les souvenirs du passager de la nuit. Le train démarre et, avec lui, commence une immense phrase itérative, circulatoire et archéologique, qui explore l’espace-temps pour exhumer les tesselles de toutes les guerres méditerranéennes. Car peu à peu prend forme une fresque homérique où se mêlent bourreaux et victimes, héros et anonymes, peuples déportés ou génocidés, mercenaires et témoins, peintres et littérateurs, évangélistes et martyrs… Et aussi les Parques de sa vie intérieure : Intissar l’imaginaire, la paisible Marianne, la trop perspicace Stéphanie, la silencieuse Sashka…
S’il fallait d’une image représenter la violence de tout un siècle, sans doute faudrait-il choisir un convoi, un transport d’armes, de troupes, d’hommes acheminés vers une œuvre de mort. Cinquante ans après
de Michel Butor, le nouveau roman de Mathias Enard compose un palimpseste ferroviaire en vingt-quatre “chants” conduits d’un seul souffle et magistralement orchestrés, comme une
de notre temps.
Né en 1972, Mathias Enard a étudié le persan et l’arabe et fait de longs séjours au Moyen-Orient. Il vit à Barcelone. Il a publié deux romans chez Actes Sud :
(2003) — Prix des cinq continents de la francophonie, 2004 — qui paraît en Babel, et
(2005). Ainsi que, chez Verticales,
(2007).

Zone — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «Zone», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

— Une autre, dit Ahmad.

Cette fois-ci l’explosion est colossale. Le bâtiment tremble et ils sont recouverts de poussière. Le bruit de cataclysme et les vibrations ont jeté Intissar sur le sol. Ses oreilles sifflent. Elle se relève en s’époussetant. Prudemment, deux combattants sortent par l’arrière pour voir où est tombé l’engin.

Pourquoi continuer à bombarder s’ils savent qu’ils ont vaincu ? Qu’est-ce qui n’est pas déjà brisé ? Elle sent monter une rage impuissante, une colère blanche, comme à chaque fois. Qu’est-ce qu’on peut faire contre les avions ? Les quelques missiles SAM-7 et 8 qu’ils possèdent sont inutilisables, trop peu savent s’en servir correctement. Marwan. Cette nuit ils vont aller chercher le corps de Marwan, elle l’enterrera, elle pleurera, et elle attendra que tout s’effondre.

*

La guerre l’a déplacée plusieurs fois depuis 1975. De la maison de ses parents jusqu’à cette chambre à Hamra. Sept ans. Le premier automne du conflit, au moment de son vingtième anniversaire, fut une boucherie. Francs-tireurs, explosions, massacres à la hache, fusillades, pillages, bombardements. Ensuite, l’habitude s’est installée. Elle se souvient des manifestations, des grèves, des universités fermées, des massacres de la Quarantaine, du siège de Tell Zaatar, une forme de routine macabre. Jusqu’à ce matin d’août 1978, il y a quatre ans presque jour pour jour, où ses parents ont disparu. Tous les deux. L’attentat a entièrement détruit le siège de l’OLP, cent cinquante morts. Le deuil l’a précipitée à terre. Les mois suivants, elle était éteinte. Déambulait en fantôme sans poids sur le sol. L’appartement vide, les vitres scotchées en croix pour éviter qu’elles n’éclatent quand les obus tombent. La pénombre permanente. Les menstruations éternelles, le corps qui n’en finit pas de saigner. Aucune volonté, rien. Elle flottait comme Beyrouth au gré des accords internationaux. Perdre Marwan aujourd’hui n’est pas plus difficile. Pas moins difficile. Tout recommencer, toujours. Perdre la ville, à chaque fois, la ville qui a commencé à se liquéfier sous les bombes, à se vider doucement dans la mer, l’ennemi sous les remparts, partout. Penser est inutile. Advienne que pourra. Elle va aller récupérer le corps de Marwan, pour le laver et l’enterrer, et ensuite, ensuite, selon les décisions des Américains, des Israéliens, des Russes et autres dieux lointains, on fera d’elle ce qu’on voudra.

Attendre la nuit est bien long. Elle se rappelle l’attente de la fin du jeûne de ramadan, au printemps ou en été, interminable. Petite elle trichait, elle avait trop soif en fin d’après-midi, elle allait boire aux toilettes et puis, honteuse, demandait pardon à Dieu. Attendre en aidant à la préparation des plats de l’ iftar et des innombrables pâtisseries était un vrai supplice. Sa mère se doutait qu’elle trichait, bien sûr, mais elle ne disait rien. Elle souriait tout le temps. Comment faisait-elle, elle, pour résister, les mains dans la nourriture, en train de préparer les soupes, les beignets, les gâteaux, les boissons — son père arrivait quelques minutes avant l’ adhan et la rupture du jeûne, le ciel de Beyrouth était déjà teinté de rose et de safran, Intissar était assise à table, les assiettes étaient servies, elle se sentait comme un coureur sur une ligne de départ. Ses parents n’étaient pas religieux. Ils appartenaient à la gauche marxiste du Fatah. Le ramadan n’avait rien à voir avec la religion. C’était une victoire sur soi et une tradition. Une victoire pour la Palestine, presque. Une tradition qui vous rattachait à un monde, au monde de l’enfance et du qamar eddin orange importé de Syrie, de la soupe de lentilles, du jus de tamarin venu d’Inde, de la cannelle, de la cardamome, de la nuit tombant doucement sur tout un peuple qui s’empiffre, avant de chanter, de rire ou de regarder des films égyptiens, de vieux films de fête où Samya Gamal ensorcelait toujours Farid el-Atrache, Intissar essayait de danser comme elle, en balançant ses hanches sèches, en remuant la poitrine qu’elle n’avait pas encore, et tard dans la nuit on dormait un peu, jusqu’aux cris de l’aube et au commencement du nouveau jour de jeûne.

Maintenant elle attend pour aller récupérer le cadavre de Marwan. Habib et les autres ont recommencé à jouer aux cartes en fumant. De temps en temps un des combattants va jeter un coup d’œil dehors, une ronde rapide. A priori les Israéliens ne tenteront rien tant que les négociations seront en cours, mais on ne sait jamais. Ils ont gagné la bataille de Beyrouth. Personne ne pourra empêcher la ville de tomber. Intissar admire le moral des soldats. Pour eux, cette défaite n’est rien qu’une étape. Ils ont survécu à la Catastrophe, à la guerre de 1967, à Septembre noir ; ils survivront à la chute. La Cause survivra. Ils recommenceront de zéro quelque part, où que ce soit. Jusqu’à récupérer un morceau de terre où s’établir. Une patrie qui ne soit pas seulement un nom dans les nuages. Elle non. Si la ville tombe elle tombera avec elle. Elle tombera avec Beyrouth et Marwan. Elle imagine son corps à elle sous le soleil dans une ruelle, percé par les couteaux maronites ou les baïonnettes israéliennes, au milieu d’un tas de cadavres.

Aussi long que puisse paraître le crépuscule, la nuit finit toujours par arriver.

Habib et ses soldats mangent du halva avec un peu de pain. Ahmad lui en offre, elle refuse de la tête. Hier c’est Marwan qui lui en aurait proposé. Les combattants sont les mêmes, ils font exactement les mêmes choses qu’hier, fument, jouent aux cartes, mangent du halva ou des sardines, Marwan est mort pour rien, rien n’a changé dans le monde, absolument rien, quelqu’un joue à sa place, quelqu’un mange à sa place, quelqu’un offre du halva à Intissar à sa place, la ville va tomber, les combattants vont la quitter et Marwan va rester là. Intissar somnole un moment, les bras croisés, le menton contre la poitrine.

C’est Habib qui la réveille en lui touchant doucement l’épaule.

— Prépare-toi, on va y aller.

Elle se lève, se dégourdit les jambes, vide la bouteille d’eau, s’isole dans la salle de bains hors d’usage et jonchée d’excréments, elle en ressort presque immédiatement, l’estomac au bord des lèvres.

Il fait toujours aussi chaud. Elle enlève un moment sa veste, son tee-shirt kaki est trempé. Elle se recule un peu dans la pénombre et retire son soutien-gorge. Tant pis pour la pudeur, la décence, ou le confort de la course. Elle jette dans un recoin obscur le sous-vêtement gorgé de sueur.

Comme toujours avant une opération, son cœur bat plus vite, sa bouche est sèche. Elle a d’étranges crampes dans la mâchoire. Elle se concentre, contrôle son arme, les munitions, les grenades. Elle vérifie les nœuds de ses lacets, le cran de sa ceinture. Elle est prête. Habib et les autres font tourner un dernier joint et une bouteille d’eau. Ahmad, Habib et Intissar vont sortir. Les trois autres restent ici au cas où. L’un s’est installé sur le siège derrière la mitrailleuse pour pouvoir couvrir leur retraite si quelque chose se passe mal. Le deuxième prépare des RPG, et le troisième finit le haschisch en regardant le plafond.

Habib n’a pas besoin d’expliquer de tactique ou de préciser l’ordre de marche. Ils sont entraînés, aguerris, se comprennent en silence. La nuit d’été est claire, il y a un peu de lune, il va falloir raser les murs. Ils savent tous les trois que les Israéliens ne les attaqueront que s’ils se sentent menacés, s’ils pensent qu’un commando cherche à s’infiltrer dans leurs lignes. En théorie, bien que Marwan ait été abattu, un cessez-le-feu est en vigueur. Ils font le tour du bâtiment pour atteindre la rue principale par l’autre côté et longer le trottoir sud. Ils passent à quelques mètres de la meurtrière improvisée où pointe le museau de leur mitrailleuse, et tournent à droite dans une ruelle qui s’enfonce vers les lignes israéliennes. Intissar a une pression étrange dans les oreilles. Elle s’entend respirer. Ils ont déjà parcouru cent mètres. Plus que deux cents. Ils progressent rapidement, le plus silencieusement possible, puis s’immobilisent pour scruter la nuit. Quelques bruits, au loin, des voitures, de temps en temps. Il va falloir porter Marwan. Trois cents mètres. Ahmad les guide dans un passage entre deux immeubles et s’immobilise. Il leur fait comprendre par gestes que le carrefour du lampadaire tordu où Marwan est tombé est juste là-devant. Elle n’aurait pas dû venir. Elle le découvre maintenant. Elle n’aurait pas dû venir, Habib et Ahmad le savaient. Ils savaient aussi qu’il aurait été impossible de la faire changer d’avis. Elle se sent trembler. Le corps est là, de l’autre côté de la rue, derrière cet immeuble effondré. Elle jette un coup d’œil, elle voit le poteau de métal calciné et sinueux comme un arbre, la forme allongée. Ahmad et Habib s’activent auprès de Marwan. Elle observe le fond de la rue d’où les tirs sont partis. Les balles qui ont déchiré le dos de Marwan. Là-bas. Le noir complet. Le silence. Habib et Ahmad traversent la rue rapidement, ils portent Marwan, la tête de Marwan ballotte, en arrière, ses yeux vers le haut comme pour regarder le ciel, ils se dépêchent de revenir vers elle, Habib trébuche, il tombe en avant, lâche le corps qui tombe lourdement sur le sol, Intissar sent des larmes couler le long de ses joues, ils sont à découvert au milieu de la rue, elle a peur, à gauche ils entendent une détonation sèche, un pop minuscule comme un bouchon, suivi d’un sifflement aigu, et c’est soudain la nuit qui s’illumine en rouge, elle voit comme en plein soleil les visages effrayés de Habib et Ahmad, le cou tordu de Marwan par terre, sa bouche ouverte, ses mains crispées, Ahmad lâche les jambes de Marwan et court pour se mettre à couvert, Habib se recroqueville, ramasse Marwan et commence à le tirer seul vers la ruelle, elle entend des cris en hébreu, Ahmad arrive près d’elle essoufflé et se retourne, il hurle : Mais qu’est-ce qu’il fout ce con ? Cours, Habib, cours, lâche-le et cours”, Habib ne lâche pas Marwan, il le tire le plus vite possible, plus que vingt mètres, plus que dix, Intissar s’élance pour l’aider au moment où une timide rafale israélienne parsème de balles le mur sur leur droite, un plop plop plop plop de gros calibre écaille le béton dans la nuit revenue, la fusée éclairante est tombée sur un immeuble, elle attrape les mains de Marwan sans réfléchir, elles sont dures et froides, ce ne sont plus des mains elle le soulève du sol le porte avec Habib il est lourd la rue est à nouveau plongée dans le noir, ça y est ils sont à couvert, le cœur au bord de l’explosion, Intissar a les yeux noyés de larmes et de sueur, elle s’effondre contre le mur pour reprendre son souffle. A quarante centimètres d’elle, le visage de Marwan. Dans la pénombre elle devine son regard fixe, la bouche ouverte, la traînée de sang sur le menton et sur les joues, le treillis remonté jusqu’au cou par la traction, noir de sang lui aussi. Habib murmure : Allez, vite.

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «Zone»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «Zone» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


Отзывы о книге «Zone»

Обсуждение, отзывы о книге «Zone» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x