Bravo a neuf vies
Mais la meilleure amie d'une blonde
C'est
Un Scottie doux comme un chat
joli comme une marguerite
fort comme Martyr
un Scottie résiste à l'eau
comme un martin-pêcheur, comme un cormoran blanc
qui sort un par un ou plusieurs à la fois
pour plonger
le long des premiers bas de nylon diaphanes
qui ne demandent pas de petits soins
de petits pieds, de petits attouchements
le bas Fascination est garanti
21 jours d'affilée sans échelles
Au restaurant
assises sur mon mur, toutes belles
avec ce bas dont ils ont raccourci
la bande du haut
pour donner de longues jambes
à toute occasion jolies, confortables
Mon fils résiste à tout lavage
Mais ils y ont mis du tigre
et de l'éléphant blanc
dans Tide, quelle différence !
Confiez le linge bien sale à Tide
Le nouveau détersif survolté
Si vous consacrez la moitié de votre vie à nettoyer
M. Net est là
Et ça se voit
Vive l'armée !
L'armée des cristaux actifs
les sert à plat ventre
Et tous les gens actifs
les gens alertes, les gens heureux
les gens relaxés
les grands chefs
les téméraires
qui avalent des ingrédients médicamenteux
pour avoir l'intérieur
le dedans
propre et luisant comme une carrosserie
de chez General Motors
sans pellicules sur les épaules
comme le père Tanguay
Mon professeur de Belles-Lettres
qui s'entêtait contre ses pellicules
s'il avait connu Head'n Shoulder
Mon loup
Tu peux trouver la joie
même si tu portes de fausses dents
parce que tu ne connaissais pas Crest
qui prend bien soin des dents (de 21 % à 49 %)
au fluoristan
au cabestan
au firmament
la pomme d'Ève, la pomme d'Adam
le péché innocent comme
une tablette de chocolat
où chaque bouchée dégorge un riche caramel
coulant
d'une douceur et d'un velouté sans pareil
Cadbury
des dents blanches, des vêtements propres
une peau sans odeur
des mains douces et belles, éblouissantes
un corps pur
une vie Immaculée-Conception
Je ne vois pas pourquoi
je resterais
derrière les quatre murs de mon jardin
Ces gens ont ardent besoin que je salisse
leurs antisepsies !
Me revoilà boy scout , stie, comme Jacques l'était quand j'avais dix-sept ans et lui vingt, quand nous voulions transformer les choses, croyant que justice et vérité seraient nos jambes, ça m'a repris. Je vais être constructif. Je vais me fabriquer une lectrice idéale, une fille comme dans la publicité, avec des yeux marron et des seins gros comme son nez ; elle sera mon confessionnal, mon psychanaliste, ma silencieuse, ma dévoreuse, je lui apprendrai la saleté. Elle boira mes mots comme si c'était du pepsi glacé, elle sourira, deviendra généreuse comme un enfant de cinq ans. Ils m'ont parti dans l'écriture, comme un sacrement de hors-bord aux régates ? Je vais les éclabousser !
A
- François ! François !
- Vampire, eh ououou...
- François Galarneau !
Arthur et Jacques auront décidé de me faire sortir. Mais ils auront beau klaxonner comme des Grecs à un mariage, ils ne réussiront qu'à m'empêcher de dormir, je ne leur répondrai pas. Ils s'obstineront : j'étais toujours le dernier levé à la maison, ils me secouaient, jetaient mes couvertures par terre, me glissaient un verre d'eau dans le cou ; ils insisteront, je les connais. Quand ils s'y mettent tous les deux, c'est pour gagner. Quand ils feront assez de tapage et que je verrai qu'ils ne veulent pas abandonner et qu'ils m'empêcheront de travailler (parce que je m'étais habitué à un certain silence), j'enfilerai un pantalon, je lancerai l'échelle contre le mur, j'y monterai le cœur battant, pour les voir et parce que ce sera la première fois depuis trois semaines que je céderai à la tentation de regarder par-dessus le mur. Ils seront de l'autre côté, près du fossé debout, les bras en l'air, criant :
- François ! Regarde ce qu'Arthur t'a acheté !
- Si j'ai mis tant de temps à venir c'est que ce n'était pas facile à réparer !
- Comment es-tu ? Viens, on va faire un tour !
- J'ai même fait repeindre les ailes qui étaient touillées. Tu as quatre pneus neufs : regarde !
Ils auront racheté le restaurant ; Arthur aura certainement appris du notaire que je voulais m'en débarrasser, puis il aura confié à un mécanicien le soin de remettre mon vieil autobus en état de marche, sacré Arthur qui pense à tout, gentil comme Aldéric, qui sait quoi donner, et quand ; "Le roi du hot dog" sur quatre roues, rutilant, pimpant, resplendissant comme un char allégorique au Carnaval de Québec. Jacques montera au volant faire le zouave ; c'était donc ça, le klaxon qu'ils égosillaient.
- Tu descends ?
- Nous allons rester ensemble.
- On ne se quittera plus.
- Allez, viens ! Si tu restes sur ta clôture, il va pleuvoir...
- Fais pas le coq d'Inde !
- Il roule du cinquante à l'heure dans les côtes !
- Prends une valise, nous partons tous les trois.
- Où ça ?
- Voir maman.
- Lui apporter du chocolat.
- Des romans.
- Apporte-lui ton livre, elle sera heureuse.
- J'arrive.
Je retournerai dans la maison éteindre les lampes et la télévision, je fourrai quelques chandails dans un sac, mes jeans, des biscuits, mes cahiers.
- Je passe l'échelle de l'autre côté, aidez-moi.
Ils me prendront dans leurs bras, on s'embrassera en riant, en se donnant des coups de poing, des à-la-vie-à-la-mort, des tous pour un, un pour Galarneau, des le-roi-est-mort-vive-le-roi ! Puis nous monterons dans le restaurant en courant ; les voisins seront stupéfaits de nous voir partir en chantant, ils reconnaîtront les airs, les chansons de papa qui couvraient le lac certaines fins de jour, qui rebondissaient sur le mur de pierres de l'église, puis retournaient à l'eau.
Il y aura l'autoroute blanche, les lampadaires comme des soldats au garde-à-vous, la tête un peu penchée, parce qu'ils sont là depuis trois ans, attendant que l'on passe en hurlant. Ce sera un festin aussi : nous arrêterons l'autobus en rase campagne, dans la plaine, je me mettrai au fourneau, je leur ferai griller de la viande et des pains ; ils auront pensé à la bière, c'est certain ; nous dévorerons des saucisses assis sur le toit du restaurant, les jambes pendantes, ballantes, regardant dédaigneusement les voitures passer, se défiler parce que leurs conducteurs auront peur de ces hurluberlus qui dansent sur le porte-bagage d'un autobus démodé, sorti tout droit des années folles ou d'un musée. Puis nous reprendrons la route en lançant des serviettes de papier déchirées en confettis par les fenêtres ouvertes. La nuit viendra. À la frontière, à Rouses Point, ils fouilleront l'autobus de fond en comble, parce que nous aurons des airs de contrebandiers, de conspirateurs ; puis, quand ils comprendront, les douaniers riront avec nous, je leur offrirai des hot dogs du Québec, ils s'en lécheront les babines : ils savent ce que c'est qu'un vrai hot dog, les Américains. Nous dormirons à tour de rôle sur le plancher, nous remplaçant pour conduire, pour arriver frais et dispos à Lowell, pour que maman trouve ses vampires en bonne santé, fringants, ruants, heureux.
Nous aurons de la difficulté à trouver la maison ; ce sont de petites villes, mais les rues zigzaguent et deux ou trois fois nous aboutirons au même cul-de-sac en colimaçon ; mais un laitier généreux, debout depuis quatre heures, nous dira :
"Suivez-moi, je vous y conduis."
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