— un sergent dans La Veuve de Cancale , parodie en trois actes de Pierre Germain Parisau (1780) ;
— un écuyer ami du duc de Savoie dans Le Page du duc de Savoie d’Alexandre Dumas (1855) ;
— un héros des contes populaires de Haute-Bretagne, Brise-Fer (1869), etc.
C’est dire si Benoît Brisefer, héros de bandes dessinées sorti en 1960 de l’imagination du dessinateur Peyo, eut de nombreux prédécesseurs.
Cette calotte-là n’a qu’un lointain rapport avec celle qui, depuis la fin du XVIII esiècle, symbolise le clergé et que bien des bouffeurs de curés voudraient mettre à bas. Le rapport lointain est la forme arrondie, de la coiffe ecclésiastique pour le clergé (rouge pour les cardinaux [38]), de la main pour celle qui nous concerne puisqu’elle désigne une tape donnée sur la tête (notons que la main épouse alors la forme de la calotte crânienne). Le mot apparaît en 1808 chez D’Hautel : « Donner une calotte ou des calottes à quelqu’un . Signifie, en terme populaire, le frapper durement à la tête ; se porter sur lui à des voies de fait. » D’autres dictionnaires précisent, « donner un coup du plat de la main ». Progressivement, calotte a pris le sens de « gifle », « claque ». Calotter , « donner des calottes » est mentionné chez Lorédan Larchey (1861) avec une citation datée de 1838.
Règle élémentaire de politesse n°1 : toujours accompagner une demande de « s’il vous plaît » ou « s’il te plaît ».
Règle élémentaire de politesse n°2 : ne jamais oublier de dire merci, à table notamment, quand on vous a servi, mais attention ! Même si votre merci est renforcé de « bien » ou « beaucoup », il ne suffit pas !
« S’il te plaît, grand-mère, tu veux bien me donner encore du chocolat ?
— Tiens, encore un carré !
— Merci.
— Merci qui ? Merci, mon chien ?
— Merci, grand-mère.
— Ah, tout de même ! »
L’injonction se trouve chez Balzac, non pas à propos d’un remerciement mais d’une simple réplique à laquelle n’est pas adjoint le nom de l’interlocuteur :
« Je ne sais pas ce que vous voulez dire.
— Mon chien ? dit aigrement la vieille fille.
— Ma cousine, reprit humblement Pierrette. » ( Pierrette in Scènes de la vie de Province , 1839.)
Donner de la confiture à un cochon
« Regarde dans quel état tu as mis la belle chemise que je t’ai offerte ! Autant donner de la confiture à un cochon ! »
On attribue au cochon un estomac solide et une certaine propension à n’aimer que des épluchures, restes de repas et autres détritus. Lui donner de la confiture serait donc un aberrant gâchis : il en est indigne, ce qui ne signifie d’ailleurs nullement qu’il ne l’apprécierait pas.
Un passage du Nouveau Testament a sans doute donné naissance à l’expression : « Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré, ne jetez pas vos perles aux porcs, de peur qu’ils ne les piétinent et que, se retournant, ils ne vous déchirent ». (Matthieu, 7, 6). L’idée biblique, contrairement à celle de la confiture que l’on donnerait aux cochons, ne concerne que le domaine spirituel : seuls les esprits ouverts aux « mondes d’en haut » seraient aptes à comprendre la vérité divine (symbolisée par les perles). Dans le cas contraire, l’homme non touché par la grâce (assimilé aux chiens ou aux porcs) risque de s’en prendre violemment à celui qui tente de le convertir. Ces considérations évangéliques sont évidemment assez loin de l’idée de boustifaille contenue dans l’expression !
Grand-mère prétendait que nous filions un mauvais coton quand nous commettions bêtise sur bêtise ou que, non seulement nous refusions de lui obéir mais qu’en plus nous lui parlions mal. En filant ce mauvais coton , nous nous mettions, paradoxalement, dans de beaux draps.
L’idée est celle d’un coton de mauvaise qualité qui ne peut donner qu’une étoffe cotonneuse, à l’aspect rêche. Les significations propre et figurée se retrouvent au XVIII esiècle dans l’expression Jeter du coton , ainsi mentionnée dans la quatrième édition du Dictionnaire de l’Académie française (1762) : « On dit qu’ Une étoffe jette son coton, du coton , pour dire, qu’Elle jette une espèce de bourre, de duvet, qui ressemble à du coton. On dit figurément et proverbialement, d’Un homme dont la réputation et les affaires sont ruinées, qu’ Il jette un vilain coton . Et ironiquement, Il jette là un beau coton . »
L’équivalence jeter un mauvais coton = « être malade » apparaît plus tard (1835, sixième édition du Dictionnaire de l’Académie française ).
Il ne s’agit ni de cent coups de fouet, ni de cent coups de bâton, de trique, d’épée, de couteau, de poing, de pied, de fusil, de canon, de tonnerre… Ces cent coups sont ceux qui cognent dans votre poitrine quand, sous l’effet d’un énorme stress ou d’une extrême inquiétude, votre cœur se met à battre la chamade, et de tels coups de cœur n’ont rien de très agréable. Être aux cent coups est le lot de tout parent dont l’enfant a disparu, surtout si celui-ci a l’habitude de faire les quatre cents coups ( voir ci-dessous). Même réaction chez celui qui apprend qu’un proche vient d’avoir un accident, chez l’employé consciencieux dont la charge de travail est inversement proportionnelle au délai imparti par le patron et qui doit, pour le coup, en mettre un coup (« Ne pas savoir où donner de la tête » est l’une des acceptions données par Alfred Delvau).
L’expression ne semble pas remonter au-delà du XIX esiècle. Zola, par exemple, l’utilise dans L’Assommoir (1877), décrivant ainsi l’attitude de Coupeau devant les Lorilleux : « […] il faisait le chien couchant, guettait sortir leurs paroles, était aux cent coups quand il les croyait fâchés » (Ch. III). Certains disent, peut-être par confusion, « être aux quatre cents coups ».
Faire les quatre cents coups
En 1959, ceux de François Truffaut ont rendu Jean-Pierre Léaud célèbre dans le rôle d’Antoine Doinel. Faire toutes sortes de frasques, d’excès, de bêtises, autant de folies qu’il est possible d’en faire, au mépris des bonnes manières, de la raison, du danger et des lois, c’est faire les quatre cents coups. Au-delà de l’insouciance, l’expression évoque une vitalité débordante et un désir de « mordre la vie à pleines dents ».
On a d’abord dit faire les quatre coups , où quatre symbolise la totalité (cf. « couper les cheveux en quatre », « se saigner aux quatre veines », etc.) : « […] à la porte des Jacobins, il faut avoir mauvaise mine, être sans-culotte, ressembler à un brigand, et à un scélérat, capable de faire les quatre coups ». ( Le Père Duchesne , 1792.) Dans le Dictionnaire du patois du pays de Bray (1852), de Jean-Eugène Decorde, on trouve : « Quatre-vingt-dix-neuf coups (avoir fait les), avoir mené une vie aventureuse et déréglée. » L’expression s’est aussi beaucoup déclinée avec cent coups , et ce, dès le début du XIX esiècle : elle est ainsi répertoriée dans plusieurs dictionnaires, dont celui de d’Hautel (1808) et celui d’Antoine Caillot (1826) : « Il a fait les cent coups veut dire que l’homme dont on parle a fait toutes sortes de mauvaises actions. » La variante cent dix-neuf coups est aussi attestée chez Mérimée ( Les Mécontens in Revue de Paris , 1830), Eugène Sue ( Le Colonel de Surville in L’Écho des feuilletons , 1859), Zola ( L’Assommoir , 1877), Proust ( Sodome et Gomorrhe in À la recherche du temps perdu , 1921), etc. Complétons la liste avec quatre cent dix-neuf chez Labiche ( La Fille bien gardée , 1850), cinq cents chez Flaubert ( Correspondance , 1853), cinq cent dix-neuf chez le critique littéraire Désiré Nisard ( De quelques parisianismes populaires , 1876), cent ung (sic) chez Balzac ( La Belle Fille du portillon in Contes drolatiques , 1832–1837) et même cent mille coups , aussi chez Balzac ( Le Père Goriot , 1835), à propos des Parisiennes : « Si leurs maris ne peuvent entretenir leur luxe effréné, elles se vendent. Si elles ne savent pas se vendre, elles éventreraient leurs mères pour y chercher de quoi briller. Elles font les cent mille coups. Connu, connu ! »
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