Gene Wolfe - Le Nouveau Soleil de Teur. Livre 1

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Le Nouveau Soleil de Teur. Livre 1: краткое содержание, описание и аннотация

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Voici Sévérian, devenu Autarque de l’Empire, en route pour Yesod où l’attend le tribunal de Tzadkiel, chargé de le juger et de juger Teur : une épreuve dont il doit triompher pour ramener le Nouveau Soleil, la Fontaine Blanche seule capable de ranimer le Vieux Soleil agonisant. Mais sera-t-il seulement en mesure de se présenter à cette épreuve ?
Dans cette première partie de la coda imaginée par Gene Wolfe pour couronner son
, Sévérian, simple passager d’un voilier stellaire géant, formant un monde à lui tout seul, devra d’abord affronter les avatars déroutants de mystérieux assassin à la solde de ceux qui ne veulent pas du Nouveau Soleil...

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— Pour nous c’est une récompense, lorsque nous avons travaillé beaucoup et dur. Sur Teur, les femmes qui me ressemblent ne travaillent pas du tout – c’est du moins ce que j’ai entendu dire.

— Certaines travaillent », remarqua Gunnie.

Le corridor se divisa une première fois, puis une deuxième. Nous aussi avancions à grande vitesse, et j’avais l’impression de suivre un itinéraire incurvé dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, et descendant. Aphéta m’avait dit combien les siens aimaient les formes spiralées ; peut-être les formes hélicoïdales leur plaisaient-elles aussi.

De même qu’une vague se soulève brusquement devant la proue d’une carraque secouée par la tempête, une porte à double battant, couleur argent terni, se présenta devant nous. Nous fîmes halte d’une façon qui donnait l’impression que nous n’avions fait que marcher. Aphéta eut un geste vers la porte, qui gémit comme des clients mais sur les battants de laquelle je dus aider Aphéta à peser pour qu’elle s’ouvrît.

Gunnie leva les yeux vers le linteau et récita, comme si elle y lisait les mots : « Aucun espoir pour ceux qui entrent ici.

— Non, non, murmura Aphéta. Tous les espoirs. »

Nous avions laissé loin derrière nous la vaste rumeur bruissante.

« Est-ce ici que l’on va m’enseigner comment ramener le Nouveau Soleil ?

— Vous n’aurez pas besoin d’être enseigné. Vous êtes gros de ce savoir, et il s’épanouira dès que vous vous approcherez suffisamment de la Fontaine Blanche pour en avoir conscience. »

J’aurais ri de la métaphore qu’elle venait d’employer si le vide absolu de la salle dans laquelle nous venions d’entrer n’avait eu pour effet de m’en ôter toute envie. Elle était plus vaste que la Salle d’Examen, avec des parois d’argent qui s’élevaient jusqu’à une grande arche dessinée selon la courbe que suit une pierre lancée en l’air ; mais il n’y avait rien dedans, strictement rien, à part notre groupe qui se tenait à l’entrée.

Gunnie répéta : « Aucun espoir », et je compris qu’elle avait été trop effrayée pour faire attention à Aphéta ou à moi. Je passai un bras autour de ses épaules (geste qui paraissait étrange vis-à-vis d’une femme dont la taille et la carrure étaient comparables aux miennes) et tentai de la réconforter, sans pouvoir m’empêcher de penser pendant ce temps qu’il fallait qu’elle soit bien naïve pour accepter de l’être, tant il était manifeste que je ne pouvais rien faire de plus qu’elle ici.

Gunnie reprit : « Il y avait autrefois un marin, parmi nous, qui avait l’habitude de dire cela. Elle espérait toujours retourner chez elle, mais nous n’avons jamais accosté son monde dans son temps, et au bout d’un moment elle est morte. »

Je demandai à Aphéta comment je pouvais être porteur d’un tel savoir sans en avoir conscience.

« Tzadkiel vous l’a communiqué pendant votre sommeil, répondit-elle.

— Vous voulez dire qu’il est venu dans votre chambre, la nuit dernière ? » J’avais parlé avant de me rendre compte que j’allais faire de la peine à Gunnie. Je sentis ses muscles se raidir, et elle rejeta mon bras d’un coup d’épaule.

« Non, dit Aphéta. Sur le vaisseau, je crois. Je ne saurais préciser à quel moment. »

Je me souvins comment Zak s’était incliné sur moi dans ce coin caché que Gunnie avait trouvé pour nous – Tzadkiel devenu le sauvage que nous, ses paradigmes, avions été autrefois.

« Venez, maintenant », nous soufflait Aphéta. Elle nous précéda. Je m’étais trompé en pensant qu’il n’y avait rien dans la salle ; on y voyait une vaste zone de noir sur le sol. Des éclats du revêtement argenté du plafond étaient tombés dessus, où on les distinguait plus qu’ailleurs.

« Vous possédez bien, tous les deux, ces colliers que portent tous les marins ? »

Un peu étonné, je tâtai le mien dans ma poche, imité par Gunnie.

« Mettez-les. Sinon vous ne tarderez pas à manquer d’air. »

Ce n’est qu’alors que je compris ce qu’étaient les points qui scintillaient dans la tache obscure. Je sortis mon collier, non sans me demander, il faut l’avouer, si chacun de ses prismes enchaînés fonctionnait encore. Je le mis et m’avançai pour regarder. Mon manteau d’air me suivit, si bien que je ne sentais aucun vent ; mais je vis les cheveux de Gunnie agités par une bouffée d’air impalpable pour moi ; ils ondoyèrent jusqu’à ce que son collier fût en place. Les étranges cheveux d’Aphéta ne s’agitaient pas comme ceux d’une femme de Teur, mais se dressaient comme une bannière.

Cette obscurité était le vide ; cependant il s’éleva tandis que je m’avançais, comme s’il sentait mon approche, devenant une sphère avant que je l’atteignisse.

Je voulus m’arrêter.

L’instant suivant Gunnie était à mon côté et, se débattant, me saisit le bras. La sphère était comme un mur. En son centre, exactement comme je l’avais vu représenté à bord, se trouvait le vaisseau.

J’ai écrit que je cherchai à m’arrêter. C’était difficile, et je ne tardai pas à ne plus pouvoir résister. Peut-être ce vide possédait-il quelque pouvoir d’attraction comme un monde. Ou peut-être était-ce la pression de l’air sur celui m’enveloppant qui était si forte que j’étais poussé en avant.

À moins que le vaisseau n’ait eu une sorte de prise sur nous. Si j’osais, je dirais que mon destin me tirait ; mais Gunnie ne subissait pas l’impact d’un destin semblable, même si, peut-être, son destin tout à fait différent du mien était ce qui la poussait vers le même lieu. Car si ce n’était que le vent, ou l’aveugle appétit de la matière pour la matière, comment se faisait-il qu’Aphéta ne fût pas entraînée avec nous ?

Je te laisse le soin, lecteur, d’expliquer ces choses. Emporté étais-je, et Gunnie avec moi ; je la voyais voler dans le vide derrière moi, se contorsionnant et tourbillonnant comme se contorsionne et tourbillonne l’univers, je la voyais comme une feuille morte emportée par une bourrasque d’automne pourrait en voir une autre. Quelque part derrière ou devant nous, au-dessus ou au-dessous de nous, se trouvait un cercle de lumière tournant frénétiquement sur lui-même, quelque chose comme une lune, si l’on peut concevoir une lune d’un tel éclat. Gunnie passa une ou deux fois devant avant de se perdre à nouveau dans l’obscurité cloutée de diamants. (Et une fois il me sembla – et j’ai toujours la même impression lorsque j’évoque ce souvenir – que je vis le visage d’Aphéta se pencher de cette lune.)

Une furieuse culbute de plus, et ce ne fut pas Gunnie que je perdis de vue, mais ce rond d’une éclatante blancheur, au milieu du scintillement de milliards de soleils. Gunnie n’était pas loin, et je la vis qui tournait la tête pour me regarder.

En revanche, le vaisseau était également bien visible ; de fait, il se trouvait si près que j’apercevais un marin ici et là dans le gréement. Peut-être tombions-nous toujours. Nous nous déplacions certainement à une grande vitesse, car le vaisseau lui-même devait foncer d’un monde à l’autre. Vitesse qui restait cependant invisible comme s’évanouit le vent quand un chébec élancé fuit grand largue la tempête qui monte sur un océan de Teur. Nous dérivions si lentement que si je n’avais pas éprouvé une confiance absolue en Aphéta et dans les hiérarques, j’aurais redouté de ne jamais atteindre le vaisseau et de nous voir perdus pour toujours dans cette nuit sans fin.

Il n’en fut rien. Un marin nous repéra et nous le vîmes bondir de l’un à l’autre de ses camarades avec des gestes de la main jusqu’à ce qu’il fût assez près pour que se touchent leurs manteaux d’air et qu’ils puissent parler.

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