Les Mystères de l’Inconscient, cachés sur l’île de Noureev
Marianna Lanskaya
© Marianna Lanskaya, 2019
ISBN 978-5-0050-0274-7
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Le Livre qui offre un million à mon enfant À toutes les grands-mères…
Tout a commencé un jour de printemps pluvieux et froid, comme il ne l’a jamais été auparavant. Les arbres fleurissaient comme si de rien n’était, mais le ciel ne leur répondait pas, car les nuages épais, couvrant le ciel d’une masse menaçante, étaient prêts à déverser à chaque instant des torrents d’eau sur les têtes des passants. La lumière était très étrange: la masse de l’air, condensée par certains endroits, laissait entrevoir des passages, des couloirs entiers, avec une substance très fragile, ressemblant à une poussière de cristal.
Les rares rayons du soleil jouaient dans des milliers de facettes de cette poussière en s’éclatant en couleurs de l’arc-en-ciel, et cette masse vibrante faisait naître une vague impression que tout était possible à cet endroit. Elle aimait venir sur cette place car ici, et uniquement ici, elle ressentait chaque fois la même chose: que tout est possible dans la vie. Que tout ce qu’elle vivait en ce moment n’était qu’un prélude, une répétition à quelque chose de très magique, à la limite de l’imaginable, du compréhensible.
Chaque fois qu’elle se retrouvait sur cette place, quelque chose se passait. Difficile à décrire: toutes les pensées se condensaient dans sa tête et se cristallisaient en images de sa vie future. Bien que rien dans sa vie actuelle ne lui dît que toutes ces images étaient réellement de sa vie future, elle le savait très précisément. Et pour ces raisons elle aimait se promener sur cette place à cinq heures de l’après-midi dans la foule de gens, rentrant de leur travail, enveloppée par le bruit des Klaxon des voitures, par le gaz d’échappement, par les dialogues imperceptibles de milliers de portables et des chants des oiseaux.
Elle se voyait voyager autour du monde entier, faire des films, monter les marches des festivals en robe de stars, découvrir le sens de l’Univers, aimer l’homme le plus désirable de la planète, monter sur une soucoupe volante et connaître les lois de la gravitation, et tout ça de façon très réelle, matérielle, très saisissable. Il semblait qu’il lui suffirait de tendre la main en avant et elle sentirait les objets, elle sentirait les odeurs, les parfums, les flashs des paparazzi… Un léger sentiment d’extrême puissance commençait à lui tourner la tête.
Brusquement Christine se réveilla et regarda autour d’elle: non, rien d’extraordinaire, «ce n’est pas pour aujourd’hui», se dit-elle dans sa tête. Tout était si réaliste et normal, seules les fleurs sur les gazons avaient poussé davantage, très très jaunes, éclatantes, elles attiraient son regard sur elles. À ce moment, elle entendit une petite voix intérieure: «Attends encore un tout petit peu! Les miracles sont tout près de toi, sois attentive, ne les chasse pas, ils sont très peureux pour l’instant. Il faut faire attention à ne pas les brusquer, sinon, ils ne reviendront que dans très longtemps!» Et la voix disparut aussi soudainement qu’elle était apparue.
Christine n’avait pas peur d’entendre cette petite voix interne car elle l’entendait souvent et était assez habituée à sa présence. «Bon, puisque ce n’est pas pour aujourd’hui, je vais rentrer…», se disait-elle, en pensant à une tasse de thé chaud devant l’écran de la télévision qui remplissait ses douces soirées solitaires. Mais ses soirées ne lui pesaient pas pour autant, car elle savait, qui sait pourquoi, que tout cela allait être bouleversé d’un jour à l’autre et qu’elle se retrouverait dans un tel peloton d’émotions, d’événements, d’actions et de relations, que l’idée de se reposer d’avance ne lui déplaisait pas du tout.
À ce moment précis, chez lui il n’était que huit heures du matin, et le soleil tapait déjà fort sur les toits des maisons voisins, quand il se réveilla pour une ordinaire journée de travail. Ce jour-ci, Bill n’avait pas le temps pour les réflexions matinales, il fallait résoudre les derniers problèmes du scénario, avant de lancer le tournage. Cela lui prenait la tête! Ce scénariste, têtu, comme tous les débutants, il ne voulait, à aucun prix, lui laisser la priorité de la décision, à lui, propriétaire de ses Studios!
Dans sa poitrine commençait à bouillonner une légère colère: «Comment ose-t-il! Lui, aurait-il fait tous les sacrifices que je fais moi, pour construire ces Studios! Savait-il, comment je détestais tous ses producteurs qui m’obligeaient à jouer ce que je ne voulais pas! Moi, moi, moi! Le Grand Patron! Maintenant c’est moi, et moi seul, qui dicte les lois ici! Et lui, s’il s’incruste dans son idée encore une journée de plus, je le vire dehors et je stoppe son film, voilà!» Bill n’était pas du tout fier de lui, car cette colère, il ne la maîtrisait pas en général. Une fois commencée, elle ne cessait pas de grandir, durant la journée entière et à la fin elle éclatait en un grand scandale.
Il devait, alors, se retirer dans sa villa, seul, sans parler à personne, ce qui augmentait la pression de son mécontentement. Mais il ne pouvait vraiment rien faire! Cette force animale était plus forte que lui: il devait toujours avoir raison, quel que soit le prix à payer.
Et le prix souvent était bien cher! La dernière fois, aux Studios, encore Grands Studios où il faisait ses meilleurs films, les conflits étaient vraiment stupides: il refusa de répéter la dernière scène de la journée après le second rôle, puisqu’il lui fallait rentrer plutôt pour passer trois minutes de plus avec sa nouvelle copine. Il éclata tout le tournage, le producteur ne voulait plus entendre parler de lui, et cette copine n’est restée que trois semaines avec lui pour disparaître à jamais.
Bon, d’accord, il a gagné assez d’argent pour pouvoir être totalement indépendant, et il a pu ouvrir sa propre boîte de cinéma indépendante, ce dont il était très fier! Mais l’histoire menaçait de recommencer. C’est vrai, il ne voulait plus de ces conflits, qui risquaient de compromettre ses Studios pour toujours, il fallait freiner fort! Et c’est exactement ce qu’il ne savait pas faire.
Bill était beau, grand et musclé. Il avait tellement travaillé sur son physique, qu’il avait réussi à le transformer complètement. Il était très maigre dans sa jeunesse, puis il était devenu musclé. Il avait un regard troublant et sobre, puis il était devenu un homme souriant avec un air d’une intelligence éclairée. Il n’aimait pas le sport et le mouvement, puis il était devenu un vrai Schumacher! Il n’y avait rien qu’il ne pouvait pas se permettre, mais une chose ne lui obéissait pas. C’était sa conscience! Et plus il avançait dans la vie, plus cela devenait insupportable.
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