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Fred Vargas: Ceux qui vont mourir te saluent

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Fred Vargas Ceux qui vont mourir te saluent
  • Название:
    Ceux qui vont mourir te saluent
  • Автор:
  • Издательство:
    Éditions Viviane Hamy
  • Жанр:
  • Год:
    1994
  • Город:
    Paris
  • Язык:
    Французский
  • ISBN:
    978-2878580563
  • Рейтинг книги:
    3 / 5
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Ceux qui vont mourir te saluent: краткое содержание, описание и аннотация

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Claude, Tibère, Néron, les trois étudiants, les trois « empereurs », promènent leur nonchalance inquiète dans les rues de Rome. Des dessins de Michel-Ange ont été volés à la Bibliothèque vaticane ! Henri Valhubert, le grand expert d'art parisien — et père de Claude — est assassiné un soir de fête devant le palais Farnèse. Que venait-il faire à Rome et comment a-t-il pu boire de la ciguë ? Fred Vargas est archéologue. Ceux qui vont mourir te saluent L'Homme aux cercles bleus

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— C’est impossible ! cria Néron. Il y a une fête demain soir sur la place Farnèse ! Tout ce que Rome compte d’esprits sophistiqués et décadents y sera… Tu ne peux pas manquer ça, Claude !

— Je ne la manquerai pas, sois tranquille, dit Claude à voix sourde. Monseigneur, vous direz à mon père que son fils débauché est à la fête. S’il veut voir le spectacle, qu’il nous y rejoigne après tout. Sinon, je le verrai plus tard.

— Si tu veux, dit Vitelli en souriant.

L’évêque se leva, rajusta son habit, lissa sa ceinture. Tibère regarda sa montre. Lorenzo Vitelli partait toujours à onze heures.

— Mais tu sais, Claude, reprit-il, ton père est bien capable de venir à cette fête. Qui crois-tu donc défier ? Il y a des fois où je devine Henri bien mieux que toi. Tu vas trop vite en besogne. Toujours trop vite.

L’évêque parti, Claude alla chercher une bouteille, pour se décontracter, expliqua-t-il.

— Excuse-moi, Gabriella, mais des fois, ton Lorenzo me met à cran.

— Tout le monde te met à cran aujourd’hui, lâcha Tibère.

— Depuis combien de temps l’évêque Vitelli connaît-il ton père ? questionna Néron depuis le canapé où il s’était allongé.

De là, il tirait sur le bord de son œil gauche avec son doigt et voyait se détacher devant la lampe le profil intéressant de Gabriella.

— On te l’a déjà dit, dit Claude en se servant un verre. Tu en veux, Tibère ?

— Depuis quand le connaît-il ? répéta Néron.

— Je crois qu’il faut que tu recommences tout à zéro, Claude, dit Gabriella en souriant. Néron a tout oublié. Néron, cesse de tirer sur ton œil, c’est pénible à voir.

— Laura, commença Claude en se tournant vers Néron, tu sais qui c’est au moins, Laura ?

— Oui ! dit Néron en remuant un bras. Divine silhouette, engloutissant sourire…

— Bon, reprit Claude. Néron se souvient de Laura, c’est déjà quelque chose. Laura et l’évêque Lorenzo Vitelli sont des amis d’enfance. Tu suis toujours ? Ils ont poussé ensemble, n’importe comment, comme de l’herbe, dans la même rue délabrée de la banlieue de Rome.

— Est-ce qu’ils ont couché ensemble au moins ? demanda Néron.

— Salaud, dit Gabriella.

— C’est merveilleux. Il suffit d’agiter l’habit violet de l’évêque pour que Gabriella s’énerve instantanément. Pardonne-moi, ma belle. Prends-le comme un compliment : à presque cinquante ans, ton Lorenzo est encore parfait. Visage bien découpé, cheveux argentés. Parfait. Quelle pitié que la religion… Enfin, tant pis. Ça le regarde. Alors, Claude ? Ils ont poussé ensemble, et puis après ?

— Laura et Lorenzo Vitelli sont comme les deux doigts de la main, en tout bien tout honneur, que cela t’arrange ou non. Mon père a connu Lorenzo à Rome quand il n’était encore que coadjuteur. Il devait avoir moins de trente ans, et c’était un type déjà terriblement cultivé. Ils se sont entendus à merveille et Lorenzo a présenté Laura à mon père. Voilà. Et mon père a quitté Rome il y a dix-huit ans en emportant Laura. Voilà. Depuis, quand il vient à Rome, à la saison fraîche, il ne manque jamais d’aller le voir. C’est mon père qui a publié la majeure partie des ouvrages de Lorenzo sur la Renaissance. Tu comprends ? Tu te souviendras maintenant ?

— Pas sûr, dit Néron. Claude, tu bois tout seul. C’est très grave. Laisse-moi te faire un bout de conduite dans ta descente aux enfers.

— C’est gentil de ta part mais ne te dérange pas. Je trouverai bien mon chemin tout seul.

— J’insiste, Claude. Ça me fait plaisir. Je te poserai à la première station.

— Alors, tiens ! dit Claude en lui lançant un verre. Et bonne route, Lucius Domitius Nero !

— Merci, Claudius Drusus. Tu es un frère.

Plus tard, Gabriella s’était endormie. Tibère rabattit sur elle les couvertures du lit et ferma les fenêtres du balcon. Il cala le bras de Néron sur son épaule et lui fit descendre les trois étages. Il eut moins de peine avec Claude qui était plus léger. Il les posa en bas comme deux sacs, remonta éteindre la lumière et fermer l’appartement, et traîna ses deux amis jusqu’à leur maison, de l’autre côté de la rive. De temps en temps, Néron essayait de dire quelque chose et Tibère lui disait de fermer sa gueule. Claude avait vraiment son compte. Tibère le lança sur son lit et lui retira ses chaussures. Il avait l’habitude. Comme il sortait de la chambre, Claude murmura :

— Laura, il ne faut pas, surtout…

Tibère se rapprocha vivement du lit.

— Quoi, Laura ? Quoi ? Qu’est-ce que tu veux lui dire ?

— C’est toi, Laura ? ânonna Claude.

— Oui, souffla Tibère. Qu’est-ce que tu veux dire ?

— Laura… il ne faut pas que tu t’inquiètes…

Tibère le secoua encore pour obtenir d’autres mots, mais cela ne servit à rien.

VI

Tibère avait ôté sa chemise et se laissait chauffer au soleil. Il s’amusait à surveiller, de l’autre côté de la voie antique, le manège d’une femme qui passait et repassait derrière une stèle funéraire. Néron adorait cette promenade sur la via Appia, à cause des alignements de tombeaux qui hérissaient ses talus. Claude l’adorait à cause des prostituées qui campaient à leur ombre. Lui, Tibère, aimait les grosses quantités de grillons.

Claude et Néron étaient affalés dans l’herbe. Il y avait une bête sur la joue de Néron et Tibère frappa dessus.

— Merci, dit Néron. Je n’avais pas la force.

— Ça ne va pas mieux ?

— Non. Et Claude ?

— Claude ne répond même pas. Il a la tête en plomb.

— Qu’est-ce que tu fous torse nu ?

— J’attire la jeune femme d’en face, dit Tibère en souriant.

— Pauvre imbécile, murmura Claude.

— Vous devriez vous excuser auprès de Gabriella, reprit Tibère. Vous avez été ignobles hier soir. De vrais porcs. L’élégance d’un tas de briques. Quel spectacle, bon Dieu ! Et pour finir, ça s’écroule comme deux minables, collants, suants, informes. Deux boules crasseuses que je n’ai eu qu’à lancer dans l’escalier pour que ça arrive en bas tout seul. La boule Néron plus vite que la boule Claude parce qu’il est plus lourd.

— Ça va, Tibère, grogna Néron. Ne fais pas l’ange.

— Et aujourd’hui ça ne s’arrange pas, continua Tibère. C’est ce qu’il est convenu d’appeler un lendemain difficile. Deux paquets de linge sale excrétant l’alcool. La fille d’en face ne voudrait pas de vous pour tout l’argent de papa Valhubert.

— C’est à voir, murmura Claude.

— C’est tout vu, mon ami. Enfin moi, je m’en fous. Je bronze.

— Sain, garçon de ferme, forcené travailleur, renifla Néron avec dédain. Quelle horreur.

— Cause, Néron. Je raflerai ce soir des beautés romaines sous vos yeux de veaux à l’étable. Aucune concurrence en vue.

— Merde ! La soirée ! cria Claude en se dressant sur les coudes.

— Précisément, coupa Tibère. La fête décadente sur la place Farnèse. Et vous avez exactement quatre heures pour vous y préparer. Pas facile. Quatre petites heures pour vous transmuer de l’état de déchet en celui de séducteur.

— Merde ! répéta Claude en rattachant ses chaussures.

— Tu ne pouvais pas nous le rappeler plus tôt ? dit Néron.

— Mon ami, dit Tibère en se relevant, j’attendais de voir remonter vos corps à la surface. Il y a un temps pour tout.

— Pauvre imbécile ! gronda Néron, et Tibère éclata de rire en remettant sa chemise.

VII

À la lumière molle des torches, le sombre palais Farnèse prenait une drôle d’allure. Tibère le regardait bouger en se laissant bousculer par la foule humide. Il avait dansé sans s’interrompre depuis trois heures et il avait les cuisses douloureuses. Il n’avait encore aperçu aucune créature renversante et il commençait à désespérer de la vie. Un verre dans chaque main, il cherchait ses deux amis qu’il avait perdus de vue depuis un bon moment. Il entendit soudain la voix de tribun de Néron qui déclamait que l’École Française brûlerait ce soir, que ce serait le palais Fournaise. Il y eut des hurlements de rire. Tibère leva les yeux au ciel. Un jour, ce cinglé de Néron finirait par foutre le feu quelque part, ça ne faisait pas de doute. Tibère l’attrapa par l’épaule.

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