Gérard de Villiers - L'ordre règne à Santiago

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L'ordre règne à Santiago: краткое содержание, описание и аннотация

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— Tu quieres !

Sans attendre la réponse, elle se leva d’un bond, le prit par la main et l’entraîna à travers le living. Ils poussèrent une porte. Oliveira s’arrêta avec une exclamation dépitée. Malko eut le temps d’apercevoir un couple emmêlé sur un lit. En ressortant, il heurta de plein fouet le corps tiède d’Oliveira. Ce fut comme un court-circuit. Collés l’un à l’autre, le sang tapant dans les tempes, ils oscillèrent en s’étreignant furieusement. Malko n’était plus groggy. Il se sentait au contraire merveilleusement lucide, détaché, les nerfs à fleur de peau.

Il la repoussa dans le living, cherchant un autre lit. Tout à coup, elle se détacha de lui et eut un geste inouï. De la main gauche, elle souleva sa robe jusqu’à la hanche. Rapidement, elle arracha un petit slip blanc qu’elle jeta sur le plancher. Puis elle se laissa tomber sur la moquette entraînant Malko avec elle.

Au milieu du living-room ! Près de la rangée de bouteilles. Sans aucune gêne, elle remonta sa robe longue jusqu’aux hanches découvrant un ventre bombé, puis attira Malko. Sa peau nue était brûlante. En quelques secondes, il perdit toute retenue. Roulant l’un sur l’autre, entrechoquant leurs dents, luttant avec le costume d’alpaga, ils atteignirent un degré d’excitation incroyable. Déchaînée, Oliveira lui administra une fellation si furieuse qu’elle faillit mettre un terme à son désir. Mais il s’arracha d’elle, la renversa sur le dos et la prit à même le sol, comme un soudard.

Elle gémit.

Furieusement arcbouté sur elle, sans souci du sol dur sous les reins d’Oliveira qui nouait ses jambes dans son dos. Elle jouit avec de longs feulements, se tordant, se détendant, puis finalement resta allongée de tout de son long sur la moquette, les jambes de part et d’autre de Malko, le souffle régulier, les bras serrés autour de lui.

Il regarda la glace fumée qui descendait jusqu’au soi renvoyant leurs silhouettes enlacées. La robe de soie était descendue, découvrant un de ses seins. Malko se pencha et frotta ses lèvres sur la pointe. La jeune femme frémit, appuya sa tête contre la chair élastique.

— C’était si bon, murmura-t-elle. Je n’aime pas faire l’amour dans un lit. C’est bourgeois. Mon ex-mari n’a jamais voulu le faire autrement.

Malko regarda autour de lui. En dehors du couple encore écroulé sur le canapé, il en distingua un autre enfoncé dans des coussins, emmêlé. Immobile. La fille nue se leva, traversa tranquillement la pièce, les enjamba pour se servir un verre et revint se lover contre l’homme qui l’avait fait jouir. Elle avait des traits grossiers, réguliers, vulgaires. Un peu gêné, Malko demanda, mi-figue, mi-raisin :

— Vous accueillez toujours ainsi vos invités ?

Elle eut un sourire carnassier.

— Je n’avais rien prémédité. J’aimais seulement vos yeux quand je vous ai vu, au club. Mais je crois que quelqu’un a mis de la drogue dans le champagne. Parce que je me suis sentie bizarre. Ça doit être Mercedes. C’est une Mapoucha, une Indienne. Si elle ne prend rien, elle n’arrive pas.

Malko s’expliquait ses sensations bizarres !

Ils se turent. Sur le canapé, cela recommençait. Cette fois, l’indienne s’était allongée, la tête dans les coussins. Malko se redressa, se rajusta et tendit la main à Oliveira. La jeune femme se mit debout, ramassa son slip d’un geste parfaitement naturel, attrapa une bouteille de Pepsi-Cola, la vida d’un trait au goulot, soupira d’aise et demanda :

— Vous voulez prendre une douche ?

Malko regarda sa montre : quatre heures. Encore une heure avant la fin du couvre-feu.

— Volontiers, dit-il.

— Suivez-moi.

En arrivant devant la salle de bains, elle se retourna et se colla de nouveau contre lui.

— Samedi, nous irons à Viña Del Mar. J’ai une maison là-bas.

Malko se dit que beaucoup de choses pouvaient se passer d’ici là.

* * *

Malko avala son troisième comprimé d’aspirine. Son cerveau bouillait. Une rame entière de métro tournait en rond sous sa calotte crânienne. La bouche pâteuse, il avala une pleine bouteille de Perrier, se sentant à peine mieux. Les murs verdâtres de sa chambre tournaient autour de lui. Un soleil radieux brillait sur Santiago. Il n’avait dormi que six heures. Avant de le quitter, Oliveira l’avait encore entraîné dans une prestation improvisée sous le porche de la maison.

Le vacarme de la circulation, treize étages plus bas, ajoutait encore à sa migraine. Maintenant, il se retrouvait plongé dans un autre monde. Le sien. Un marécage dangereux, perfide, traître, où chaque pas dissimulait une chausse-trape. Il trouva un message téléphonique glissé sous sa porte : le colonel Federico O’Higgins l’avait appelé pendant qu’il était sorti déjeuner et demandait qu’il le rappelle à l’Edificio Diego Portales. Malko hésita. En ne rappelant pas, il risquait de se mettre à dos le chef de la D. I. N. A. Mais il avait son rendez-vous avec « Chalo ». Il décida de rappeler plus tard. Il sortit de sa chambre et prit l’ascenseur. La Datsun, au milieu du parking de la Moneda, était une vraie fournaise. Il s’y glissa avec précaution, et prit la direction du quartier de Bilbao.

* * *

Chalo Goulart était en retard. Après avoir sonné trois fois, Malko redescendit le perron et s’installa dans la Datsun. Il ne passait personne dans cette petite avenue calme. Il se mit à réfléchir aux gens qu’il avait rencontrés. À ce mélange de danger et de charme il attirait les deux. En pensant au colonel O’Higgins il éprouvait un dégoût instinctif. Oliveira était un étrange petit animal. Il se demanda ce qu’elle savait réellement des méthodes de la Junte.

Brusquement, il réalisa qu’il attendait depuis trois quarts d’heure. La villa ne donnait toujours aucun signe de vie. C’était étonnant. Le vieux Chalo semblait un monsieur sérieux. Et s’il y avait eu un contretemps, il aurait laissé un message à l’hôtel.

Malko ressortit de la voiture, alla résonner, sans plus de résultats, puis fit le tour de la petite maison isolée dans un jardin. Derrière il y avait une porte vitrée donnant sur une sorte d’appentis. Il essaya la poignée et la porte s’ouvrit. Il y avait quelques plantes tropicales, une odeur lourde et entêtante. Une seconde porte donnait dans la cuisine. Malko l’ouvrit, appela :

— Señor Goulart.

Pas de réponse. Tout à coup, une odeur nouvelle frappa ses narines : le gaz. Il s’immobilisa, regrettant de ne pas avoir pris son pistolet extra-plat. Certain qu’il y avait quelque chose d’anormal. Il appela de nouveau, puis poussa une porte donnant dans une pièce sombre. Il n’osait pas allumer à cause du gaz, de peur de provoquer une explosion. Il se guida à tâtons, devina une chambre, un corps étendu sur un lit. L’odeur était de plus en plus forte. Il retint sa respiration, trouva la fenêtre, ouvrit les volets, puis la fenêtre en grand. Se retourna.

Chalo Goulart était étendu sur le lit vêtu d’un pantalon, d’une chemise ouverte et de son gilet. Le visage calme, les yeux fermés. Une bouteille de butane posée près de lui dont le tuyau était posé sur sa poitrine. Un léger chuintement indiquait que le gaz s’échappait. Malko se précipita et tourna frénétiquement la vanne d’arrivée du gaz. En dépit de la fenêtre ouverte l’atmosphère était encore étouffante. Il dut se pencher à l’extérieur pour reprendre son souffle, au bord de la nausée. Puis il alla dans la cuisine, humecta un torchon et revint, le linge sur le visage.

Avec l’intention de tirer le vieil homme de la pièce. Mais en se penchant sur lui, il réalisa immédiatement que c’était inutile. Chalo Goulart était mort depuis plusieurs heures déjà. Ses lèvres, ses pommettes, ses oreilles avaient une terrifiante couleur bleuâtre. Il souleva une de ses mains : les ongles étaient cyanosés, eux aussi, symptôme évident d’une anoxémie. Les yeux étaient fermés.

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