Chuck Palahniuk - Fight Club
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Peroxyde de baryum et poussière de zinc.
Nitrate d’ammonium et poudre d’aluminium.
La nouvelle cuisine de l’anarchie.
Nitrate de baryum en sauce soufre garni de charbon de bois. Voilà de la poudre à canon élémentaire.
Bon appétit.
Bourrer l’ordinateur avec ça, ras la gueule, et quand quelqu’un mettra le contact, ça fera cinq ou six livres de poudre à canon qui lui exploseront à la figure.
Le problème est que j’aimais bien comme qui dirait mon patron.
Si vous êtes de sexe masculin, chrétien et si vous vivez en Amérique, votre père est votre modèle de Dieu. Et parfois vous trouvez votre père dans votre carrière professionnelle.
Sauf que Tyler n’aimait pas bien mon patron.
La police doit logiquement être à ma recherche. Je suis la dernière personne à être sortie de l’immeuble vendredi soir dernier. Je me suis réveillé à mon bureau, mon haleine condensée sur le dessus du plateau, avec Tyler au téléphone, en train de me dire : « Va dehors. Nous avons une voiture. »
Nous avons une Cadillac.
L’essence était encore sur mes mains.
Le mécano du fight club avait dit : « Que souhaiterais-tu avoir fait avant de mourir ? »
Je voulais quitter mon boulot. Je donnais la permission à Tyler. Fais comme chez toi. Tue mon patron.
Je pars de mon bureau explosé et je prends le bus jusqu’au rond-point en gravier au terminus de la ligne. C’est là que les parcelles à lotir partent en quenouille pour se transformer en terrains vagues et champs labourés. Le chauffeur sort un déjeuner préemballé et une thermos tout en m’observant dans son rétroviseur.
J’essaie de m’imaginer un endroit où je pourrais aller et où les flics ne me chercheront pas. Depuis l’arrière du bus, je vois peut-être une vingtaine de personnes assises entre le chauffeur et moi. Je compte vingt arrières de crânes.
Vingt crânes rasés.
Le chauffeur se tortille sur son siège et m’appelle sur ma banquette à l’arrière du bus.
— Monsieur Durden, monsieur, j’admire vraiment ce que vous faites.
Je ne l’ai jamais vu de ma vie.
— Il faut que vous me pardonniez pour tout ceci, dit le chauffeur. Le comité dit que c’est votre propre idée, monsieur.
Les crânes rasés se retournent les uns après les autres. Puis, un par un, ils se lèvent. L’un d’eux tient un chiffon à la main, et on sent l’odeur de l’éther. Le plus proche de moi a un couteau de chasse. Le gars au couteau est le mécano du fight club.
— Vous êtes un brave, dit le chauffeur du bus, de vous offrir ainsi comme devoir maison.
Le mécano dit au chauffeur de bus : « La ferme », et « Le coin me dit que dalle, bordel ».
Vous savez que l’un de ces singes de l’espace a un élastique dont il vous entourera les noisettes. Ils remplissent l’avant du bus.
Le mécano dit :
— Vous connaissez le topo, monsieur Durden. Vous l’avez dit vous-même. Vous avez dit : si quiconque essaie un jour de fermer le club, même vous, alors il nous faut le choper aux noisettes.
Gonades. Joyeuses. Glandes. Huevos.
Imaginez la meilleure part de vous-même congelée dans un sachet en plastique à la Compagnie de Savon de Paper Street.
— Vous savez qu’il est inutile de lutter contre nous, dit le mécano.
Le chauffeur de bus mâchonne son sandwich et nous observe dans le rétroviseur en surplomb.
Une sirène de police gémit, elle se rapproche. Un tracteur gronde et cliquette dans un champ au loin. Des oiseaux. Une fenêtre à l’arrière du bus est à moitié ouverte. Des nuages. Des herbes folles poussent en bordure du rond-point en gravier. Des abeilles ou des mouches bourdonnent à l’entour des roues.
— Nous cherchons juste une petite garantie, dit le mécano du fight club. Ce n’est pas simplement une menace, cette fois, monsieur Durden. Cette fois, nous allons devoir les couper.
Le chauffeur de bus dit :
— C’est des flics.
La sirène arrive quelque part à l’avant du bus.
Que me reste-t-il donc pour pouvoir riposter ?
Une voiture de police se range à hauteur du bus, les éclats bleu et rouge de ses gyrophares transperçant le pare-brise du bus, et quelqu’un, dehors, s’écrie :
— Ne bougez plus là-dedans ! Et je suis sauvé.
En quelque sorte.
Je peux parler de Tyler aux flics. Je leur dirai tout concernant le fight club, et peut-être que j’irai en prison, et le Projet Chaos, ce sera alors leur problème, et je n’aurai plus à contempler de poignard devant mes yeux.
Les flics montent les marches du bus, le premier flic disant :
— Vous l’avez déjà coupé ? Le deuxième flic dit :
Faites ça vite, il a un mandat d’amener sur sa tête.
Puis il ôte sa casquette, et à moi, il me dit :
— Rien de personnel, monsieur Durden. C’est un plaisir de pouvoir finalement vous rencontrer.
Je dis : vous êtes tous en train de commettre une grossière erreur. Le mécano dit :
— Vous nous aviez prévenu que vous diriez probablement cela.
Je ne suis pas Tyler Durden.
— Vous nous avez dit que vous diriez cela, aussi.
Je change les règles. Vous pouvez garder le fight club, mais nous n’allons plus châtrer quiconque.
Ouais, ouais, ouais, dit le mécano. Il est à mi-chemin de l’allée et il tient le poignard devant lui.
Vous avez dit que vous diriez cela absolument. OK donc je suis Tyler Durden. Je suis. Je suis Tyler Durden, et je dicte les règles, et je dis : reposez le couteau. Le mécano s’écrie par-dessus l’épaule :
— Quel est notre meilleur temps à ce jour pour un tranche-et-taille ?
Quelqu’un hurle :
— Quatre minutes. Le mécano hurle :
Il y a quelqu’un qui chronomètre ça ? Les deux flics ont maintenant grimpé à l’avant du bus, l’un d’eux consulte sa montre et dit :
— Une seconde. Attendez que la trotteuse arrive à douze.
Le flic dit :
— Neuf.
— Huit.
— Sept.
Je plonge vers la fenêtre ouverte.
Mon ventre heurte le mince rebord de fenêtre en métal, et derrière moi, le mécano du fight club hurle :
— Monsieur Durden ! Vous allez nous faire foirer le chrono !
Basculant à mi-corps par la fenêtre, je plonge mes griffes dans le revêtement noir caoutchouteux du passage de roue arrière. J’agrippe la garniture du passage de roue et je tire. Quelqu’un agrippe mes pieds et tire. Je hurle à l’adresse du petit tracteur au loin : « Hé ! » et « Hé ! ».
J’ai le visage enflé qui bouillonne, plein de sang, je suis pendu tête en bas. Je me propulse à l’extérieur. Un peu. Des mains autour de mes chevilles me retirent à l’intérieur. Ma cravate me bat la figure. Ma boucle de ceinture s’accroche au rebord de la fenêtre. Les abeilles, les mouches, les mauvaises herbes sont à quelques centimètres de mon visage, et moi je hurle :
— Hé !
Des mains me crochètent par l’arrière de mon pantalon, elles me halent vers l’intérieur, et me font glisser pantalon et ceinture sur le cul.
Quelqu’un à l’intérieur du bus hurle :
— Une minute !
Les chaussures glissent de mes pieds.
Ma boucle de ceinture glisse à l’intérieur du rebord de fenêtre.
La main rapproche mes jambes. Le rebord de fenêtre brûlant de soleil me tranche l’estomac. Ma chemise blanche fait voile et se gonfle avant de retomber sur ma tête et mes épaules, mes mains toujours agrippées à la garniture du passage de roue, moi toujours hurlant :
— Hé !
Mes jambes sont étirées collées ensemble bien droites derrière moi. Mon pantalon glisse le long de mes jambes et disparaît. Le soleil me chauffe le cul.
Le sang me cogne la tête, j’ai les yeux qui ressortent des orbites sous la pression, tout ce que je vois, c’est la chemise blanche qui pendouille autour de mon visage. Le tracteur gronde et cliquette quelque part. Les abeilles bourdonnent. Quelque part. Tout est à des millions de kilomètres. Quelque part à des millions de kilomètres derrière moi quelqu’un hurle :
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