Jean-Dominique Bauby - Le Scaphandre et le papillon

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La prière

En fin de compte le choc du fauteuil a été salutaire. Les choses sont devenues plus claires. Je n’ai plus tiré de plans sur la comète et j’ai pu libérer de leur silence les amis qui dressaient un affectueux barrage autour de moi depuis mon accident. Le sujet n’étant plus tabou, nous nous sommes mis à parler du locked-in syndrome . D’abord c’est une rareté. Ce n’est guère consolant mais il y a autant de chances de tomber dans ce piège infernal que de gagner la super-cagnotte du Loto. À Berck, nous ne sommes que deux à en présenter les signes, et encore mon L.I.S. {1} est-il sujet à caution. J’ai le tort de pouvoir pivoter la tête, ce qui n’est pas prévu en principe dans le tableau clinique. Comme la plupart sont abandonnés à une vie végétative, on connaît mal l’évolution de cette pathologie. On sait juste que, s’il prend la fantaisie au système nerveux de se remettre en marche, il le fait à l’allure d’un cheveu qui pousse à partir de la base du cerveau. Il risque donc de se passer quelques années avant que je puisse remuer les doigts de pieds.

En fait, c’est du côté des voies respiratoires qu’il faut chercher d’éventuelles améliorations. À long terme, on peut espérer récupérer une alimentation plus normale sans le secours de la sonde gastrique, une respiration naturelle et un peu du souffle qui fait vibrer les cordes vocales.

Pour l’instant, je serais le plus heureux des hommes si j’arrivais à déglutir convenablement l’excès de salive qui envahit ma bouche en permanence. Le jour n’est pas encore levé que je m’exerce déjà à faire glisser la langue contre l’arrière du palais pour provoquer le réflexe d’avaler. En plus, j’ai dédié à mon larynx les petits sachets d’encens qui pendent à mon mur, ex-voto rapportés du Japon par des camarades voyageuses et croyantes. C’est une pierre du monument d’actions de grâce constitué par mon entourage au gré de ses pérégrinations. Sous toutes les latitudes on aura invoqué pour moi les esprits les plus divers. J’essaie de mettre un peu d’ordre dans ce vaste mouvement des âmes. Si je suis avisé qu’à mon intention on a brûlé quelques cierges dans une chapelle bretonne ou psalmodié un mantra dans un temple népalais, j’assigne aussitôt un but précis à ces manifestations spirituelles. Ainsi j’ai confié mon œil droit à un marabout camerounais mandaté par une amie pour m’assurer la mansuétude des dieux africains. Pour les troubles de l’audition, je m’en remets aux bonnes relations qu’une belle-mère au cœur pieux entretient avec les moines d’une confrérie de Bordeaux. Ils me consacrent régulièrement leurs chapelets et je me glisse parfois dans leur abbaye pour entendre les chants monter vers le ciel. Cela n’a pas encore donné de résultat extraordinaire mais, quand sept frères du même ordre ont été égorgés par des fanatiques islamiques, j’ai eu mal aux oreilles pendant plusieurs jours. Toutefois ces hautes protections ne sont que des remparts d’argile, des murailles de sable, des lignes Maginot à côté de la petite prière que ma fille Céleste récite chaque soir à son Seigneur avant de fermer les yeux. Comme nous nous endormons à peu près en même temps, je m’embarque pour le royaume des songes avec ce merveilleux viatique qui m’évite toutes les mauvaises rencontres.

Le bain

À huit heures trente arrive la kiné. Silhouette sportive et profil de monnaie romaine, Brigitte vient faire fonctionner bras et jambes gagnés par l’ankylose. On appelle cela « mobilisation » et cette terminologie martiale est risible quand on voit la maigreur de la troupe : trente kilos perdus en vingt semaines. Je n’escomptais pas un tel résultat en entreprenant un régime huit jours avant mon accident. Au passage Brigitte vérifie si aucun tressaillement ne vient annoncer une amélioration. « Essayez de serrer mon poing », demande-t-elle. Comme j’ai parfois l’illusion de remuer les doigts, je concentre mon énergie pour lui broyer les phalanges, mais rien ne bouge et elle repose ma main inerte sur le carré de mousse qui leur sert d’écrin. En fait les seuls changements concernent ma tête. Je peux désormais la faire pivoter sur 90° et mon champ visuel va du toit d’ardoise du bâtiment voisin au curieux Mickey à langue pendante dessiné par mon fils Théophile quand je ne pouvais pas entrouvrir la bouche. À force d’exercices nous sommes maintenant sur le point d’y introduire une sucette. Comme dit la neurologue : « Il faut beaucoup de patience. » La séance de kiné se termine par un massage facial. De ses doigts tièdes, Brigitte parcourt tout mon visage, la zone stérile qui me semble avoir la consistance d’un parchemin et la partie innervée où je peux encore froncer un sourcil. La ligne de démarcation passant par la bouche, je n’esquisse que des demi-sourires, ce qui correspond assez aux fluctuations de mon humeur. Ainsi un épisode domestique comme la toilette peut m’inspirer des sentiments variés.

Un jour, je trouve cocasse d’être, à quarante-quatre ans, nettoyé, retourné, torché et langé comme un nourrisson. En pleine régression infantile, j’y prends même un trouble plaisir. Le lendemain, tout cela me semble le comble du pathétique, et une larme roule dans la mousse à raser qu’un aide-soignant étale sur mes joues. Quant au bain hebdomadaire, il me plonge à la fois dans la détresse et la félicité. Au délicieux instant où j’immerge dans la baignoire succède vite la nostalgie des grands barbotages qui étaient le luxe de ma première vie. Muni d’une tasse de thé ou d’un whisky, d’un bon livre ou d’une pile de journaux, je marinais longuement en manœuvrant les robinets avec les doigts de pied. Il y a peu de moments où je ressens aussi cruellement ma condition à l’évocation de ces plaisirs. Heureusement je n’ai pas le temps de m’appesantir. Déjà on me ramène tout grelottant vers ma chambre sur un lève-malade confortable comme une planche de fakir. Il faut être habillé de pied en cap pour dix heures trente, prêt à descendre en salle de rééducation. Ayant refusé d’adopter l’infâme style jogging recommandé par la maison, je retrouve mes hardes d’étudiant attardé. À la façon du bain, mes vieux gilets pourraient ouvrir des pistes douloureuses dans ma mémoire. J’y vois plutôt un symbole de la vie qui continue. Et la preuve que je veux être encore moi-même. Quitte à baver, autant le faire dans du cachemire.

L’alphabet

J’aime bien les lettres de mon alphabet. La nuit, quand il fait un peu trop noir et que la seule trace de vie est un petit point rouge, la veilleuse de la télévision, voyelles et consonnes dansent pour moi sur une farandole de Charles Trenet : « De Venise, ville exquise, j’ai gardé le doux souvenir… » Main dans la main, elles traversent la chambre, tournent autour du lit, longent la fenêtre, serpentent sur le mur, vont jusqu’à la porte et repartent pour un tour.

E S A R I N T U L O M D P C F B V H G J Q Z Y X K W

L’apparent désordre de ce joyeux défilé n’est pas le fruit du hasard mais de savants calculs. Plutôt qu’un alphabet, c’est un hit-parade où chaque lettre est classée en fonction de sa fréquence dans la langue française. Ainsi, le E caracole en tête et le W s’accroche pour ne pas être lâché par le peloton. Le B boude d’avoir été relégué près du V avec lequel on le confond sans cesse. L’orgueilleux J s’étonne d’être situé si loin, lui qui débute tant de phrases. Vexé de s’être fait souffler une place par le H, le gros G fait la gueule et, toujours à tu et à toi, le T et le U savourent le plaisir de ne pas avoir été séparés. Tous ces reclassements ont une raison d’être : faciliter la tâche de tous ceux qui veulent bien essayer de communiquer directement avec moi.

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