Bernard Werber
L'Encyclopédie du savoir relatif et absolu
Au commencement, tout n'était que simplicité. L'univers, c'était du rien avec un peu d'hydrogène. H. Et puis il y a eu le réveil. L'hydrogène détone. Le Big bang explose et ses éléments bouillants se métamorphosent en se répandant dans l'espace. H, l'élément chimique le plus simple, se casse, se mélange, se divise, se noue pour former des choses nouvelles. L'univers est expérience. Tout part de 1, mais tout se répand dans tous les sens et dans toutes les formes. Dans la fournaise initiale, H, l'origine de tout, se met à accoucher d'atomes nouveaux. Comme He: l'hélium. Et puis tous se mélangent pour donner le jour à des atomes de plus en plus complexes. On peut actuellement constater les effets de l'explosion initiale.
L'ensemble de notre univers-espace-temps local, qui était composé à 100% d'hydrogène, est maintenant une soupe remplie de tas d'atomes bizarres selon les proportions suivantes: 90% d'Hydrogène9% d'Hélium0,1% d'Oxygène0,060% de Carbone0,012% de Néon0,010% d'Azote0,005% de Magnésium0,004% de Fer0,002% de Soufre. En ne citant que les éléments chimiques les plus répandues dans notre univers-espace-temps.
La réalité dans laquelle nous sommes n'est peut-être pas la seule. Il existerait d'autres réalités parallèles. Par exemple, alors que vous lisez ce livre dans cette réalité, dans une autre réalité vous êtes en train de vous faire assassiner, dans une troisième réalité vous avez gagné au loto, dans une quatrième réalité vous avez soudain envie de vous suicider, etc. Il y aurait comme cela des centaines, voire des milliers de réalités parallèles qui se répandraient en permanence comme les branche d'un arbre.Mais au bout d'un certain temps, une voie de réalité serait choisie, figée, et les autres réalités s'évaporeraient. Dès qu'une ligne de réel serait durcie, une multitude de nouvelles réalités en découlerait. Peu à peu le tronc d'où partent les branches se fixerait. Dès lors il n'y aurait plus accès aux anciennes ébauches de réalité.Visiblement, il semblerait ici et maintenant que la réalité où vous êtes en train de lire l'ESRA est celle qui a été choisie, durcie et fixée (par qui? selon quels critères? On l'ignore).Cela peut sembler évidemment complètement loufoque mais la physique quantique arrive à ces mêmes conclusions.
L'observateur modifie ce qu'il observe. Certains événements ne se produisent que parce qu'ils sont observés. Sans personne pour les voir ils n'existeraient pas. C'est le sens même de l'expérience dite "du chat de Schrödinger".Un chat est enfermé dans une boite hermétique et opaque. Un appareil délivre au hasard une décharge électrique capable de le tuer. Mettons une seconde l'appareil en marche, puis arrêtons le. Est ce que l'appareil a lâché sa décharge mortelle? Est ce que le chat est encore vivant? Pour un physicien classique le seul moyen de le savoir est d'ouvrir la boite et de regarder. Pour un physicien quantique il est acceptable de dire que le chat est à 50% mort et à 50% vivant. Tant qu'on n'aura pas ouvert la boite, on considérera qu'il y a à l'intérieur une moitié de chat vivant.Mais au delà de ce débat sur la physique quantique il existe une personne qui sait si le chat est mort ou si le chat est vivant même sans ouvrir la boite: c'est le chat lui même.
L'univers va vers la complexité. De l'hydrogène à l'hélium, de l'hélium au carbonne. Toujours plus complexe, toujours plus sophistiqué est le sens de l'évolution des choses.De toutes les panètes connues, la Terre est la plus complexe. Elle se trouve dans une zone où sa température peut varier. Elle est couverte d'océans et de montagnes.Mais si son éventail de combinaisons chimiques est pratiquement inépuisable, il ressort deux pointes, deux forment de vie qui culminent par leur intelligence.Les hommes et les fourmis.
Autour d'un atome, on trouve plusieurs orbites d'électrons. Certains sont tout proches du noyau. D'autres sont éloignés.Mais si un événement extérieur les oblige à changer d'orbite, s'ils s'éloignent du noyau, il y a aussitôt émission d'énergie sous forme de lumière, de chaleur et de rayonnement.Déplacer un électron d'une couche basse pour l'amener à une couche plus haute, c'est comme emporter un borgne au pays des aveugles: il rayonne, il n'a aucun mal à impressionner, il est le roi.Par contre, si on déplace un électron d'une orbite haute pour l'amener dans une orbite plus basse, c'est le contraire qui se produit.De la même manière, l'univers est construit en lasagne. Des espaces-temps différents se côtoient, agencés en couches superposées. Certains sont rapides et sophistiqués, dautres sont lents et primaires.On retrouve ces strates à tous les niveaux.Une fourmi très intelligente et très débrouillarde, placée dans l'univers humain, n'est qu'une petite bête maladroite et craintive. Un humain stupide et attardé placé à coté d'une fourmilière est un dieu omnipotent. Mais… la fourmi qui aura été en contact avec les humains aura beaucoup appris de cette expérience. Lorsqu'elle retournera auprès des siens, la connaissance de l'espace-temps supérieur lui donnera un pouvoir sur tous ses semblables.L'un des moyens de progresser est de se retrouver un instant paria dans la dimension supérieure puis de revenir dans la dimension inférieure.
Tout, objet, idée, personne, peut se ramener à une onde. Onde de forme, onde de son, onde d'image, onde d'odeur. Ces ondes entrent forcément en interférence avec d'autres ondes.L'étude des interférences entre les ondes objets, idées, personnes est passionnante. Que se passe-t-il lorsqu'on mélange le rock and roll et la musique classique? Que se passe-t-il lorsqu'on mélange la philosophie et l'informatique? Que se passe-t-il lorsqu'on mélange l'art asiatique et la technologie occidentale?Quand on verse une goutte d'encre dans de l'eau, les deux substances ont un niveau d'information très bas, uniforme. La goutte d'encre est noire et le verre d'eau est transparent. L'encre, en tombant dans l'eau, génère une crise.Dans ce contact, l'instant le plus intéressant est celui où des formes chaotiques apparaissent, l'instant avant la dilution. L'interaction entre les deux éléments différents produit une figure très riche. Il se forme alors des volutes compliquées, des formes torturées et toutes sortes de filaments qui peu à peu se diluent pour donner de l'eau grise. Dans le monde des objets, cette figure très riche est difficile à immobiliser. Mais dans le monde du vivant, une rencontre peut s'incruster et rester figée dans la mémoire.
L'ordre génère le désordre, le désordre génère l'ordre. En théorie, si on brouille un úuf pour en faire une omelette, il existe une probabilité infime que l'omelette puisse reprendre la forme de l'oeuf dont elle est issue. Mais cette probabilité existe. Et plus on introduira de désordre dans cette omelette, plus on multipliera les chances de retrouver l'ordre de l'oeuf initial.
L'ordre n'est donc qu'une combinaison de désordres. Plus notre univers ordonné se répand, plus il entre en désordre. Désordre qui, se répandant lui-même, génère des ordres nouveaux dont rien n'exclut que l'un ne puisse être identique à l'ordre primitif. Droit devant nous, dans l'espace et dans le temps, au bout de notre univers chaotique se trouve, qui sait, le Big Bang originel.
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