– Tout enfin, dit Jeanne, excepté une chose.
– Excepté une répugnance, voulez-vous dire?
– Oui, de la reine; et cette répugnance, c’est le véritable obstacle. Ce qu’elle aime, la reine, il faut toujours que le roi finisse par l’aimer; ce qu’elle hait, il le déteste d’avance.
– Et elle me hait?
– Oh!
– Soyons francs. Je ne crois pas qu’il nous soit permis de rester en si beau chemin, comtesse.
– Eh bien! monseigneur, la reine ne vous aime pas.
– Alors, je suis perdu! Il n’y a pas de collier qui tienne.
– Voilà en quoi vous pouvez vous tromper, prince.
– Le collier est acheté!
– Au moins la reine verra-t-elle que si elle ne vous aime pas, vous l’aimez, vous.
– Oh! comtesse!
– Vous savez, monseigneur, que nous sommes convenus d’appeler les choses par leur nom.
– Soit. Vous dites donc que vous ne désespérez pas de me voir un jour premier ministre?
– J’en suis sûre.
– Je m’en voudrais de ne pas vous demander quelles sont vos ambitions.
– Je vous les dirai, prince, quand vous serez en état de les satisfaire.
– C’est parler, cela, je vous attends à ce jour.
– Merci; maintenant, soupons.
Le cardinal prit la main de Jeanne, et la serra comme Jeanne avait tant désiré que sa main fût serrée quelques jours avant. Mais ce temps était passé.
Elle retira sa main.
– Eh bien! comtesse?
– Soupons, vous dis-je, monseigneur.
– Mais je n’ai plus faim.
– Alors, causons.
– Mais je n’ai plus rien à dire.
– Alors, quittons-nous.
– Voilà, dit-il, ce que vous appelez notre alliance. Vous me congédiez?
– Pour être vraiment l’un à l’autre, dit-elle, monseigneur, soyons tout à fait l’un et l’autre à nous-mêmes.
– Vous avez raison, comtesse; pardon de m’être encore trompé cette fois sur votre compte. Oh! je vous jure bien que ce sera la dernière.
Il lui reprit la main et la baisa si respectueusement, qu’il ne vit pas le sourire narquois, diabolique, de la comtesse, au moment où ces mots avaient retenti: «Ce sera la dernière fois que je me tromperai sur votre compte.»
Jeanne se leva, reconduisit le prince jusqu’à l’antichambre. Là, il s’arrêta, et tout bas:
– La suite, comtesse?
– C’est tout simple.
– Que ferai-je?
– Rien. Attendez-moi.
– Et vous irez?
– À Versailles.
– Quand?
– Demain.
– Et j’aurai réponse?
– Tout de suite.
– Allons, ma protectrice, je m’abandonne à vous.
– Laissez-moi faire.
Elle rentra sur ce mot chez elle, se mit au lit, et considérant vaguement le bel Endymion de marbre qui attendait Diane:
– Décidément, la liberté vaut mieux, murmura-t-elle.
FIN DU TOME I.
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Décembre 2005
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