Lisa Smith - Le reveil

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L’histoire se déroule dans la petite ville de Fell’s Church, calme et sans histoires.
Ce calme apparent est chamboulé le jour de l’arrivée de Stefan Salvadore, un jeune lycéen italien mystérieux.
Une vague de meurtres et d’agressions secoue alors la ville, Stefan est le coupable idéal désigné.
Elena, folle amoureuse du jeune garçon, croit envers et contre tous en l’innocence de ce dernier. En effet, elle seule partage son terrible secret, secret qui risque bien de la mettre en danger.
Quelques siècles plus tôt, Katherine, la femme qu’il aimait et qui ressemble étrangement à Elena, l’avait transformé en vampire. Mais pas lui uniquement, Damon — son frère, aussi…
Depuis la mort de la jeune femme dont Stefan se sent inutilement responsable, les deux frères nourrissent l’un envers l’autre une haine féroce qui les conduit à vouloir se détruire mutuellement.
Insouciante, Elena est loin de se douter qu’elle est l’objet des convoitises des deux frères et que l’amour qu’elle porte à Stefan risque bien de la conduire à sa propre perte…

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Il chassa brusquement ses souvenirs, avec une seule idée en tête : quitter cet endroit pour retourner à la soirée. Il y retrouverait Caroline, cette créature hâlée qui ne courait aucun danger, car elle ne représentait rien pour lui. Pourtant quelque chose le retenait : il savait qu’Elena était là et qu’elle avait des ennuis. Il devait l’aider.

À mi-parcours, la tête commença à lui tourner : il dut lutter pour garder le cap qu’il s’était fixé. Il avait toutes les peines du monde à avancer, envahi par une indicible faiblesse, et impuissant face au vertige qui le menaçait.

«Je dois… trouver Elena… Je dois… trouver… la force… d’aider Elena. Mais j’ai trop… besoin… de… »

Il s’arrêta devant la porte béante de l’église.

Elena apercevait la lune par-dessus l’épaule gauche de Tyler. « C’est la dernière chose que je vois », pensa-t-elle. Elle tremblait tellement que son cri resta bloqué dans sa gorge.

Soudain, Tyler fut soulevé et projeté contre la tombe de son grand-père. Elena roula aussitôt sur le côté, une main retenant les pans de sa robe déchirée, l’autre cherchant une arme pour se défendre — une pierre ou un bâton. Mais en reconnaissant la silhouette devant elle, elle comprit qu’elle n’en avait pas besoin : celui qui l’avait débarrassée de Tyler n’était autre que Stefan Salvatore. Cependant, sa métamorphose la stupéfia. Son visage aux traits si fins était défiguré par la fureur, et ses yeux verts étincelaient d’une lueur meurtrière. Elena en regrettait presque Tyler.

— J’ai tout de suite réalisé que tu n’avais aucune manière, dit Stefan d’un ton méprisant à l’intention de Tyler.

Elena ne le quittait pas des yeux : il s’approcha lentement de Tyler — qui essayait de se relever — avec des mouvements étonnamment souples et maîtrisés.

— Mais je m’aperçois maintenant que tu es un rustre de la pire espèce.

Le coup qu’il assena à Tyler le propulsa contre une autre tombe. Le nez sanguinolent, celui-ci se redressa, cherchant à reprendre son souffle, et chargea.

— Sache qu’un gentleman n’impose jamais sa présence, reprit Stefan en repoussant son attaque avec une facilité surprenante.

Tyler alla s’étaler dans les ronces. Cette fois, il fut plus long à se remettre d’aplomb. La lèvre ensanglantée et soufflant comme un bœuf, il se jeta sur Stefan, qui, insensible à son assaut, l’attrapa par le revers de la veste ; il secoua violemment son adversaire, tandis que celui-ci brassait l’air dans l’espoir de l’atteindre. Stefan finit par le laisser tomber.

— Un gentleman respecte les femmes. Le visage tordu par la douleur, Tyler tenta de saisir la main de son assaillant. Stefan riposta en l’agitant avec une ardeur décuplée, tout en ponctuant d’un coup de poing chacune de ses paroles :

— Et surtout, surtout, un gentleman ne frappe jamais une femme.

— Stefan ! cria Elena.

Tyler ressemblait maintenant à un pantin désarticulé : sa tête dodelinait et ses membres étaient inertes. Elena, effrayée par cette vague de violence, décida qu’il était temps d’intervenir. La voix dénuée de toute pitié, Stefan ne maîtrisait plus sa colère.

— Stefan, arrête !

Il tourna brusquement la tête vers elle. À son expression de surprise, la jeune fille devina qu’il avait oublié sa présence ; l’espace d’un instant, il la regarda sans paraître la reconnaître, et elle eut l’impression de se trouver en face d’un prédateur dérangé en pleine chasse. Puis, les lueurs bestiales disparurent de ses yeux, son visage retrouvant son humanité. Stefan posa enfin Tyler contre la tombe en marbre rouge. L’œil gauche de celui-ci s’ouvrit, au grand soulagement d’Elena ; le droit, tuméfié, n’en était en revanche plus capable.

— Il s’en remettra, commenta froidement Stefan.

Même si sa peur s’était presque évanouie, Elena était sous le choc ; elle combattit l’envie de hurler comme une hystérique.

— Est-ce que tu as quelqu’un pour te ramener chez toi ? demanda Stefan de cette voix glaciale qui effrayait tant l’adolescente.

Elle pensa à Vickie et à Dick, restés à côté de la sépulture des Fell, mais sans doute trop occupés pour se soucier d’elle.

— Non.

Soudain, elle s’aperçut que sa robe déchirée laissait entrevoir sa peau nue : elle serra les bras sur sa poitrine.

— Alors je te raccompagne.

Un frisson lui parcourut le dos. La silhouette de Stefan était si élégante au milieu des tombes, et son visage exposé au clair de lune, si pâle… Il était incroyablement beau, et projetait une telle aura de puissance qu’il en paraissait inhumain.

— Merci, c’est très gentil, dit-elle avec difficulté.

Ils abandonnèrent Tyler, qui s’agrippait à la tombe de ses ancêtres, pour ce diriger vers le pont.

— J’ai laissé ma voiture près de la pension, dit Stefan. A pieds c’est le chemin le plus court.

— Tu es venu par là ?

— Non, mais de toute façon tu n’as rien à craindre.

Le ton ferme de sa voix rassura un peu Elena. Stefan jeta sa veste sur les épaules nue de sa protégée, puis ils se mirent en route sans un mot. A son air déterminé, elle comprit qu’elle était en sécurité avec lui.

Le pont était illuminé d’une clarté blanche et la rivière courrait sous son arche en tourbillonnant. Ils passèrent sous les chênes et atteignirent la route sans incident, dans le silence le plus total. Après avoir longés des champs noyés dans l’obscurité, ils parvinrent à la pension de Stefan, une grande bâtisse en brique rouge flanqué de cèdres et d’érables. Seule une fenêtre était encore éclairée.

Ils pénétrèrent dans un petit vestibule où ils empruntèrent un escalier à la rambarde cirée. Au premier étage, Stefan fit entrer Elena dans l’une des chambres : elle fut invitée à franchir une porte de placard, derrière laquelle se trouvait une autre série de marches, plus étroites, et beaucoup plus raides.

« Quel drôle d’endroit ! » pensa-t-elle. Aucun bruit ne pouvait parvenir dans cet escalier dérobé au cœur de la maison. L’ascension les fit déboucher dans une pièce spacieuse, qui constituait apparemment le deuxième étage de la pension. Elle distingua dans la pénombre un plancher et des poutres sous un plafond en pente. Les murs étaient percés de hautes fenêtres, et la chambre était sommairement meublée. Plusieurs malles étaient posées sur le sol. Gênée par le regard de Stefan, elle demanda :

— Est-ce que… Est-ce qu’il y a une salle de bains où je pourrais… ?

Il lui indiqua une porte d’un mouvement de tête. Elle ôta la veste, qu’elle lui tendit sans oser le regarder, et entra.

8.

Elena avait franchi le seuil de la salle de bains avec un sentiment de vive reconnaissance envers Stefan. Pourtant, lorsqu’elle en ressortit, elle était furieuse.

Passant en revue ses égratignures malgré l’absence de miroir, elle avait laissé une foule de sentiments l’assaillir. Et celui qui avait fini par la dominer, c’était la colère envers ce Stefan Salvatore qui lui avait sauvé la vie si froidement. Qu’il aille se faire voir avec sa politesse, sa galanterie, et sa stupide réserve qui l’empêchait de se livrer !

Elle retira l’épingle de ses cheveux pour fermer le haut de sa robe. Après avoir remis de l’ordre dans sa coiffure à l’aide d’un peigne en os trouvé sur le lavabo, elle sortit en affichant un air de défi.

Stefan se tenait à la fenêtre, dans une attitude un détendue. Sans se retourner, il lui indiqua un vêtement de velours posé sur le dossier d’un fauteuil.

— Si tu veux mettre ça par-dessus ta robe…

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