Stephen King - Le Pistolero

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Le Pistolero: краткое содержание, описание и аннотация

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« L’homme en noir fuyait à travers le désert, et le Pistolero le suivait… » Ce Pistolero, c’est Roland de Gilead, dernier justicier et aventurier d’un monde qui a changé et dont il cherche à inverser la destruction programmée. Pour ce faire, il doit arracher au sorcier vêtu de noir les secrets qui le mèneront vers la Tour Sombre, à la croisée de tous les temps et de tous les lieux. Roland surmontera-t-il les pièges diaboliques de cette créature ? A-t-il conscience que son destin est inscrit dans trois cartes d'un jeu de tarot bien particulier ? Le Pistolero devra faire le pari de le découvrir, et d’affronter la folie et la mort. Car il sait depuis le commencement que les voies de la Tour Sombre sont impénétrables…
STEPHEN KING
fait partie de ces écrivains qu’il n’est plus besoin de présenter.
autant de romans — et souvent de films — mondialement célèbres. Mais rien ne compte plus à ses yeux que le cycle de
son Grand Œuvre, une saga-fleuve monumentale dont il entama l’écriture alors qu’il était encore étudiant, et qui connaît enfin sa conclusion aujourd’hui.

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Descendre la rue. Sa mère lui laisse de quoi payer un taxi, mais chaque jour il va à l’école à pied, balançant son sac de livres, parfois même son sac de bowling (bien que, la plupart du temps, il le laisse dans son casier), le parfait petit garçon américain, avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus. Les filles commencent déjà à s’intéresser à lui (avec l’accord de leur mère) et il ne se dérobe pas avec cette arrogance et cette coquetterie puériles qu’ont les petits garçons. Il leur parle avec un professionnalisme inconscient qui les laisse perplexes, et elles n’y reviennent pas. Il aime la géographie et jouer au bowling, l’après-midi. Son père possède des parts dans une compagnie qui fabrique des machines automatiques pour redresser les quilles, mais l’Entre-Deux-Quilles n’utilise pas la marque de son père. Il ne se dit pas qu’il a pensé à ça, pourtant c’est le cas.

En descendant la rue, il passe devant Bloomingdale’s, dans la vitrine les mannequins sont vêtus de fourrures, de costumes 1900 à six boutons, certains ne portent rien du tout ; certains sont « nus tout nus ». Ceux-là, ces mannequins, sont parfaitement professionnels, et il déteste tout professionnalisme. Il est trop jeune pour avoir encore appris à se détester lui-même, mais le ver est dans le fruit ; avec le temps, il grossira, et fera tout pourrir.

Il arrive au coin et se plante là, son sac sur l’épaule. La circulation ronronne — des bus bleu et blanc qui grognent, des taxis jaunes, des Volkswagen, un gros camion. Il n’est qu’un petit garçon, mais pas comme les autres, et du coin de l’œil il voit l’homme qui va le tuer. C’est l’homme en noir, et il ne voit pas son visage, rien que la robe qui tourbillonne, les mains tendues et ce sourire dur, professionnel. Il tombe sur la chaussée, les bras en croix, sans lâcher son sac qui contient le déjeuner extrêmement professionnel de M meGreta Shaw. Il jette un bref regard à travers un pare-brise polarisé à un homme d’affaires horrifié qui porte un chapeau bleu nuit dans le rebord duquel est glissée une petite plume coquette. Quelque part une radio hurle du rock’n’roll. Une vieille dame sur le trottoir d’en face pousse un hurlement — elle porte un chapeau noir avec une voilette ; on dirait une voilette de deuil. Jake ne ressent rien d’autre que de la surprise, et cette perplexité vertigineuse dont il est coutumier — c’est donc ainsi que ça se termine ? Avant même d’avoir battu son propre record de deux/soixante-dix ? Il atterrit sur la chaussée dure et regarde une crevasse rebouchée à l’asphalte, à quelques centimètres de ses yeux. Le sac est éjecté de sa main. Il est en train de se demander s’il s’est écorché les genoux quand la voiture de l’homme d’affaires au chapeau bleu à plume coquette lui roule dessus. C’est une grosse Cadillac bleue modèle 1976, avec des pneus Firestone à flanc blanc. La voiture est presque de la même couleur que le chapeau de l’homme d’affaires. Elle brise la colonne de Jake, lui réduit les viscères en bouillie, et fait jaillir le sang de sa bouche en un jet sous pression. Il tourne la tête et voit les feux arrière rougeoyants de la Cadillac et la fumée qui fuse de sous ses roues bloquées. La voiture a aussi écrasé son sac, le barrant d’une large traînée noire. Il tourne la tête de l’autre côté et voit une grosse Ford grise s’immobiliser à quelques centimètres de son corps dans les crissements stridents des pneus. Un type noir qui vendait des bretzels et des sodas dans une carriole accourt vers lui. Le sang s’échappe du nez de Jake, de ses oreilles, de ses yeux, de son rectum. Ses parties génitales ont été écrasées. Il se demande avec irritation s’il s’est beaucoup écorché les genoux. Il se demande s’il sera en retard à l’école. À présent, c’est le conducteur de la Cadillac qui arrive vers lui en courant, incapable de faire une phrase. De quelque part monte une voix calme, terrible, la voix de la fatalité, qui dit : « Laissez-moi passer, je suis prêtre. Un Acte de Contrition… ».

Il voit la robe noire et ressent une horreur soudaine. C’est lui, l’homme en noir. Jake détourne le visage avec les dernières forces qui lui restent. Quelque part une radio joue une chanson du groupe de rock Kiss. Il voit sa propre main qui gît sur le trottoir, petite, bien galbée. Il ne s’est jamais rongé les ongles.

Et, les yeux posés sur sa main, Jake meurt.

IV

Accroupi, les sourcils froncés, le Pistolero était abîmé dans une intense réflexion. Il était fatigué, il avait le corps douloureux et les pensées lui venaient de plus en plus lentement. En face de lui, l’étonnant garçon dormait, les mains entre les genoux, la respiration calme. Il avait raconté son histoire sans trop d’émotion, même si sa voix avait tremblé sur la fin, quand il en était arrivé aux mots « prêtre » et « Acte de Contrition ». Bien sûr, il n’avait pas parlé au Pistolero de sa famille, ou de son propre sentiment de dichotomie et de perplexité, mais cela avait transparu malgré tout — assez pour que le Pistolero se fasse une idée. Le fait qu’il n’ait jamais existé de ville telle que la décrivait le gamin (à moins qu’il se fût agi de la ville mythique de Lud) n’était pas le point le plus troublant de son récit, mais demeurait dérangeant. La totalité était dérangeante. Le Pistolero avait peur des implications.

— Jake ?

— Hein, hein ?

— Veux-tu te souvenir de tout ça à ton réveil, ou l’oublier ?

— L’oublier, fit le garçon sans hésiter. Quand le sang m’est sorti de la bouche, il avait le goût de ma propre merde.

— D’accord. Tu vas dormir, maintenant, compris ? Dormir pour de vrai. Vas-y, allonge-toi bien, si tu veux.

Jake s’allongea, il paraissait petit, paisible et inoffensif. Le Pistolero ne le croyait pas inoffensif. Il se dégageait de lui quelque chose de mortel, un frisson implacable, la puanteur d’un nouveau piège. Il n’aimait pas ce qu’il ressentait, mais il aimait bien le garçon. Il l’aimait beaucoup.

— Jake ?

— Chuuuut. Je dors. Je veux dormir.

— Oui. Et quand tu te réveilleras, tu ne te rappelleras rien de tout ça.

— D’ac’. Bien.

Le Pistolero le regarda pendant un court instant, repensant à sa propre enfance, dont il lui semblait parfois qu’elle avait été vécue par quelqu’un d’autre — quelqu’un qui avait fait un saut à travers un objectif temporel pour devenir un autre —, mais qui à présent lui paraissait d’une proximité poignante. Il faisait très chaud dans l’écurie du relais, et il but de l’eau, avec précaution. Il se leva et se rendit au bout de la grange, s’arrêtant pour jeter un œil à l’intérieur d’une stalle. Dans le coin gisaient un petit tas de foin blanc et une couverture pliée proprement, mais ça ne sentait pas le cheval. Ça ne sentait rien, d’ailleurs. Le soleil avait saigné à blanc toute odeur et n’avait rien laissé. L’air était parfaitement neutre.

La stalle s’ouvrait au fond sur une petite réserve sombre, avec une machine en inox, au milieu. La rouille et la moisissure l’avaient épargnée. On aurait dit une baratte à beurre. À gauche saillait un embout chromé, qui se prolongeait par un tuyau ondulant sur le sol. Le Pistolero avait déjà vu des pompes de ce genre dans des lieux secs, mais jamais d’aussi grosses. Il n’arrivait pas à imaginer à quelle profondeur ils — un « ils » bien lointain — avaient dû creuser avant de tomber sur de l’eau, l’eau secrète, à jamais noire, sous le désert.

Pourquoi n’avait-on pas retiré la pompe, quand la gare avait été désaffectée ?

À cause des démons, peut-être.

Il frissonna violemment, comme une torsion abrupte de la colonne vertébrale. Une chair de poule brûlante lui parcourut la peau, avant de se résorber progressivement. Il s’approcha de l’interrupteur de commande et appuya sur MARCHE. La machine se mit à ronfler. Au bout de trente secondes environ, l’embout éructa un jet d’eau claire et fraîche, qui coula dans le tuyau chargé de la diffuser. Il en coula peut-être dix litres, jusqu’à ce que la pompe s’arrête d’elle-même, dans un « clic » final. Cette machine était aussi déplacée dans cet espace-temps que le grand amour, et pourtant elle était aussi concrète qu’un Jugement, un rappel silencieux du temps où le monde n’avait pas encore changé. Elle fonctionnait probablement sur générateur atomique, vu qu’il n’y avait pas d’électricité à mille cinq cents kilomètres à la ronde et que des piles sèches n’auraient pas tenu aussi longtemps. La machine avait été fabriquée par une firme du nom de North Central Positronics. Le Pistolero n’aimait pas ça.

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