Umberto Eco - N'espérez pas vous débarrasser des livres

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N'espérez pas vous débarrasser des livres: краткое содержание, описание и аннотация

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Du papyrus au fichier électronique, nous traversons deux mille ans d’histoire du livre à travers une discussion à la fois érudite et humoristique, savante et subjective, dialectique et anecdotique, curieuse et goûteuse. On y parcourt les temps et les lieux, les personnes réelles s’y mêlent aux personnages de fiction, on y fait l’éloge de la bêtise, on y analyse la passion du collectionneur, les raisons pour lesquelles telle époque engendre des chefs-d’œuvre, la manière dont fonctionnent la mémoire et le classement d’une bibliothèque. En ces temps d’obscurantisme galopant, c’est peut-être le plus bel hommage qui se puisse imaginer à la culture de l’esprit, et l’antidote le plus efficace au désenchantement.

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U.E. :Mais qui va vérifier le vérificateur ? Autrefois, les vérificateurs étaient les membres des grandes institutions culturelles, des Académies ou des Universités. Lorsque monsieur Untel, membre de l’Institut Machin, publiait son ouvrage sur Clemenceau, ou sur Platon, il fallait imaginer que les renseignements qu’il nous donnait étaient exacts, parce qu’il avait perdu une vie entière dans les bibliothèques à vérifier toutes ses sources. Mais aujourd’hui on court le risque que monsieur Untel ait lui aussi puisé ses informations sur Internet, et tout devient alors sujet à caution. Pour être honnête, tout cela pouvait se passer même avant Internet. Aussi bien la mémoire individuelle que la mémoire collective ne sont pas des photographies de ce qui s’est réellement passé. Ce sont des reconstructions.

J.-C.C. :Vous savez comme moi à quel point les exigences du nationalisme ont contribué à déformer la vision que nous avons de certains événements. Les historiens, malgré eux, obéissent souvent, et aujourd’hui encore, à l’idéologie, affichée ou souterraine, de leur pays. Les historiens chinois racontent en ce moment n’importe quoi sur les rapports anciens de la Chine avec le Tibet ou la Mongolie, et cela s’enseigne dans les écoles chinoises. Atatürk, à son époque, a fait complètement récrire l’histoire de la Turquie. Il a fait vivre des Turcs en Turquie à l’époque des Romains, des siècles avant leur arrivée. Et ainsi de suite, partout… Si nous voulons vérifier, où vérifions-nous ? Les Turcs, croyons-nous savoir, venaient en réalité d’Asie centrale, et les premiers habitants de la Turquie actuelle n’ont pas laissé de traces écrites. Comment faire ?

U.E. :Le problème est le même avec la géographie. Il n’y a pas très longtemps que nous avons rendu à l’Afrique ses dimensions exactes, longtemps minorées par les idéologies impérialistes.

J.-C.C. :Je me trouvais récemment en Bulgarie, à Sofia. Je descends à l’hôtel Arena Serdica que je ne connais pas. En entrant, je me rends compte que l’hôtel a été construit sur des ruines que l’on peut voir à travers une grande plaque en verre. J’interroge les gens de l’hôtel. Ils m’expliquent qu’il y avait en effet, à cet endroit même, un coliseum romain. Etonnement. Je ne savais pas que les Romains avaient construit un coliseum à Sofia, monument qui, ajoute-t-on, n’avait que dix mètres de moins, en diamètre, que celui de Rome. Enorme, donc. Et sur les murs extérieurs du coliseum, les archéologues ont trouvé des sculptures qui sont comme des affiches représentant les spectacles qui s’y déroulaient. On y voit des danseuses, des gladiateurs bien sûr et une chose que je n’avais encore jamais vue, un combat entre un lion et un crocodile. A Sofia !

Tout d’un coup ma mémoire de la Bulgarie, déjà bouleversée par la découverte des trésors des Thraces quelques années plus tôt, découvertes qui rejetaient ce territoire très loin dans le passé, plus loin que la Grèce, s’est trouvée profondément chahutée. Pourquoi un cirque de cette taille à Sofia ? Parce qu’il existait là, me dit-on, des sources thermales très appréciées des Romains. Je me suis alors souvenu que Sofia n’est pas très éloignée de l’endroit où le pauvre Ovide avait enduré l’exil. Et voilà que la Bulgarie, dont je croyais les attaches slaves incontestables, devenait une colonie romaine !

Le passé n’en finit pas de nous surprendre, plus que le présent, plus que le futur peut-être. Je vous livre, pour en finir avec cette évocation d’une Bulgarie soudain romaine, cette citation du comique bavarois Karl Valentin : « L’avenir aussi était mieux autrefois. » On lui doit aussi cette remarque pleine de bon sens : « Tout a été déjà dit, mais pas par tout le monde. »

Nous sommes en tout cas parvenus à ce moment de notre histoire où nous pouvons déléguer à des machines intelligentes — intelligentes de notre point de vue — le soin de se souvenir à notre place, des bonnes et des mauvaises choses. Michel Serres est revenu sur ce thème dans un entretien donné au Monde de l’Education en disant que, si nous n’avons plus cet effort de mémorisation à fournir, alors « il ne nous reste que l’intelligence ».

U.E. :Bien entendu, apprendre les tables de multiplication à une époque où les machines peuvent compter mieux que n’importe qui, n’a pas grand sens. Mais il reste le problème de notre capacité « gymnastique ». Il est évident qu’avec une voiture je peux aller plus vite qu’à pied. Cependant il faut marcher un peu tous les jours, ou faire du jogging, pour ne pas devenir un légume. Vous connaissez certainement cette belle histoire de science-fiction racontant comment le Pentagone découvre, au siècle prochain, dans une société où désormais seuls les ordinateurs pensent à notre place, quelqu’un qui connaît encore par cœur les tables de multiplication. Les militaires s’accordent alors à penser qu’il s’agit là d’une sorte de génie particulièrement précieux en temps de guerre, le jour où le monde sera victime d’une panne électrique globale.

Il y a une deuxième objection. Dans certains cas, le fait de savoir certaines choses par cœur vous donne des facultés d’intelligence supérieures. Je suis bien d’accord pour dire que la culture n’est pas le fait de savoir la date exacte de la mort de Napoléon. Mais nul doute que tout ce que vous pouvez savoir par vous-même, et même la date de la mort de Napoléon, le 5 mai 1821, vous donne une certaine autonomie intellectuelle.

Cette question n’est pas nouvelle. L’invention de l’imprimerie est déjà cette possibilité offerte de mettre la culture dont on ne veut pas s’encombrer en réserve, au « frigidaire », dans les livres, en sachant simplement où trouver l’information dont on a ponctuellement besoin. Il y a donc délégation d’une partie de la mémoire à des livres, à des machines, mais il demeure une obligation de savoir tirer le meilleur parti de ses outils. Et donc d’entretenir sa propre mémoire.

J.-C.C. :Mais nul ne contestera le fait que, pour pouvoir utiliser ces outils sophistiqués qui, nous l’avons déjà vu, ont tendance à se périmer à une vitesse accélérée, nous sommes tenus de réapprendre sans cesse de nouveaux usages et langages, et de les mémoriser. Notre mémoire est puissamment sollicitée. Plus que jamais, peut-être.

U.E. :Bien entendu. Si vous n’avez pas été capable, depuis l’arrivée des premiers ordinateurs en 1983, de recycler en permanence votre mémoire informatique en passant d’une disquette flexible à une disquette au format plus réduit, puis à un disque et maintenant à une clé, vous avez plusieurs fois perdu vos données, partiellement ou intégralement. Car, bien entendu, aucun ordinateur ne peut lire les premières disquettes appartenant déjà à l’ère préhistorique de l’informatique. J’ai cherché désespérément une première version de mon Pendule de Foucault que j’avais dû enregistrer sur disquette dans les années 1984 ou 1985, sans succès. Si j’avais tapé mon roman à la machine, elle serait encore là.

J.-C.C. :Il y a peut-être quelque chose qui ne disparaît pas, c’est la mémoire que nous conservons de ce que nous avons éprouvé à travers les différents moments de notre existence. La mémoire précieuse — et parfois trompeuse — des sentiments, des émotions. La mémoire affective. Qui voudrait nous en décharger et à quelle fin ?

U.E. :Mais cette mémoire biologique doit être entraînée jour après jour. Si notre mémoire était comme celle d’une disquette, alors nous aurions notre Alzheimer à cinquante ans. Parce qu’une des façons d’éloigner cet Alzheimer, ou toute autre forme de démence sénile, c’est précisément de continuer à apprendre, par exemple un poème par cœur tous les matins. De faire toutes sortes d’exercices d’intelligence. Même des rébus ou des anagrammes. Notre génération était encore obligée d’apprendre des poèmes par cœur à l’école. Mais c’est de moins en moins le cas avec les suivantes. Il s’agissait simplement, en apprenant par cœur, d’exercer nos facultés de mémoire, et donc d’intelligence. Aujourd’hui où nous ne sommes plus obligés de le faire, il nous faut d’une certaine manière nous imposer cet exercice quotidien sans lequel nous risquons d’être atteints précocement de sénilité.

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