Stephen King - Carnets noirs

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Carnets noirs: краткое содержание, описание и аннотация

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En prenant sa retraite, John Rothstein a plongé dans le désespoir les millions de lecteurs des aventures de Jimmy Gold. Rendu fou de rage par la disparition de son héros favori, Morris Bellamy assassine le vieil écrivain pour s’emparer de sa fortune, mais surtout, de ses précieux carnets de notes. Le bonheur dans le crime ? C’est compter sans les mauvais tours du destin… et la perspicacité du détective Bill Hodges.
Après
King renoue avec un de ses thèmes de prédilection : l’obsession d’un fan. Dans ce formidable roman noir où l’on retrouve les protagonistes de
(prix Edgar 2015), il rend un superbe hommage au pouvoir de la fiction, capable de susciter chez le lecteur le meilleur… ou le pire.
STEPHEN KING
« Une déclaration d’amour à la lecture et à la littérature américaine… Merveilleux, effrayant, émouvant. » The Washington Post

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Hodges répète ce qu’il a dit à l’homme en combinaison :

« Pas exactement de la police, mais pas loin.

— Alors bonne continuation, monsieur Pas Loin d’Être Dans La Police. J’ai des rendez-vous, et je suis pas en avance. »

Il s’éloigne vers le Navigator, pas en courant, mais presque.

« Non, vous êtes arrivé pile à l’heure », rétorque aimablement Hodges en lui emboîtant le pas.

Quand il était jeune retraité, il aurait été facile pour lui de se laisser distancer. À l’époque, il vivait de Slim Jim et de Doritos et il aurait été essoufflé au bout du dixième pas. Aujourd’hui, il marche cinq kilomètres par jour, soit dehors, soit sur son tapis de course.

« Laissez-moi tranquille, dit Madden, ou j’appelle la police, la vraie.

— Rien qu’une petite minute », enchaîne Hodges en pensant : Bordel, j’ai l’air d’un témoin de Jéhovah.

Madden contourne le Navigator par l’arrière. Son sac de sport balance comme un pendule.

« Je ne veux rien entendre. Vous êtes complètement fêlé.

— Vous savez ce qu’on dit », répond Hodges alors que Madden saisit la poignée de la portière côté conducteur, « heureux les fêlés car ils laissent passer la lumière. »

Madden ouvre la portière. Ça va comme sur des roulettes, se dit Hodges en sortant le Happy Slapper de la poche de sa veste. Le Slapper est une chaussette nouée. En dessous du nœud, le pied est rempli de billes de roulement. Hodges lui imprime un mouvement de balancier qui le fait entrer en contact avec la tempe gauche de Madden. Un coup style Boucles d’Or, pas trop dur, pas trop mou, juste comme il faut.

Madden chancelle et lâche sa mallette. Ses genoux fléchissent mais sans se dérober totalement. Hodges le saisit au-dessus du coude, une étreinte aussi solide qu’impérieuse perfectionnée durant ses années de service dans la police de cette ville, et l’aide à entrer dans le Navigator. L’homme a le regard vaseux d’un boxeur qui s’est fait salement malmener et peut seulement espérer que le round se termine avant que son adversaire enchaîne et l’amène vraiment au tapis.

« Hop là ! » dit Hodges.

Et quand le cul de Madden est posé sur le siège-baquet en cuir, Hodges se penche et soulève la jambe gauche restée en rade. Il attrape les menottes dans la poche gauche de sa veste et rive Madden au volant en un clin d’œil. Les clés du Navigator, suspendues à un gros porte-clés Hertz jaune, sont dans l’un des porte-gobelets. Hodges les attrape, claque la portière, ramasse la mallette et contourne rapidement la voiture. Avant de monter, il balance les clés dans l’herbe, près du panneau CHARGEMENTS ET LIVRAISONS SEULEMENT. Une bonne idée, parce que Madden a repris ses esprits et qu’il est en train d’appuyer sur le bouton de démarrage automatique du SUV comme un forcené. À chaque tentative, le tableau de bord affiche CLÉ NON DÉTECTÉE.

Hodges claque la portière côté passager et considère Madden gaiement.

« Ah, Oliver, enfin seuls. Comme dans un cocon.

— Vous avez pas le droit de faire ça », dit Madden. Il s’exprime plutôt clairement pour un mec qui devrait voir des petits oiseaux de dessin animé voleter autour de sa tête. « Vous m’avez agressé. Je peux porter plainte. Où est ma mallette ? »

Hodges la soulève.

« En de bonnes mains. Je l’ai ramassée pour vous. »

Madden tend sa main libre.

« Donnez-la-moi. »

Hodges la couche par terre et pose ses pieds dessus.

« Pour le moment, elle est en détention provisoire.

— Qu’est-ce tu veux, connard ? »

Le grognement est en contraste saisissant avec le costard et la coupe de cheveux.

« Allons, Oliver, j’ai pas frappé si fort que ça. L’avion. L’avion de Cramm.

— Il me l’a vendu. J’ai un certificat de cession de véhicule.

— Au nom de James Mallon.

— C’est comme ça que je m’appelle. J’ai changé mon nom légalement il y a quatre ans.

— Oliver, vous et la légalité, ça fait deux. Mais là n’est pas la question. Votre chèque était en bois plus dur que celui des séquoias de Californie.

— C’est impossible. » Il tire d’un coup sec sur son poignet menotté. « Enlevez-moi ça !

— On discutera des menottes une fois qu’on aura discuté du chèque. Mon bonhomme, c’était finaud. La First de Reno existe vraiment et quand Cramm a téléphoné pour vérifier si votre chèque était approvisionné, l’indicateur d’appels a confirmé qu’il appelait bien la First. Il est tombé sur un de ces messages enregistrés, Bienvenue à la First de Reno, où le client est roi, bla-bla-bla, et quand il a tapé le chiffre du service souhaité, il a été redirigé vers une personne prétendant être gestionnaire de compte. Je crois savoir que c’était votre beau-frère, Peter Jamieson, arrêté ce matin à Fields, en Virginie. »

Madden cligne des yeux et se recule brusquement, comme si Hodges l’avait giflé. Jamieson est bien le beau-frère de Madden, mais il n’a pas été arrêté. Du moins pas à la connaissance de Hodges.

« En se faisant passer pour un certain Fred Dawlings, Jamieson a certifié à M. Cramm que vous aviez à peu près douze millions de dollars sur différents comptes de la First. Je suis sûr qu’il a su être très convaincant, mais c’est l’indicateur d’appels qui a été l’élément décisif. De la bidouille réalisée avec un programme informatique clairement illégal. Mon assistante s’y entend en ordinateurs et c’est elle qui a reniflé la combine. Rien que ça, ça pourrait vous valoir seize à dix-sept mois au Club Fed. Mais y a bien plus que ça. Il y a cinq ans, vous et Jamieson avez réussi à pirater la Cour des comptes et à détourner quatre millions de dollars.

— Vous délirez.

— Pour le commun des mortels, quatre millions divisés en deux auraient suffi. Mais vous êtes pas du genre à vous reposer sur vos lauriers. Vous aimez les sensations fortes, hein, Oliver ?

— Je vous parle pas. Vous m’avez agressé et vous allez aller en prison pour ça.

— Donnez-moi votre portefeuille. »

Les yeux écarquillés, Madden le fixe, sincèrement choqué. Comme s’il n’avait pas lui-même dépouillé moult portefeuilles et comptes en banque. Ah, on aime pas ça, se faire prendre à son propre jeu, pas vrai ? pense Hodges. Tout ça c’est pas de pot, hein ?

Il tend la main.

« Donnez.

— Allez vous faire foutre. »

Hodges montre son Happy Slapper à Madden. Le pied blindé de billes de roulement pendouille, larme sinistre.

« Donne, enfoiré, ou j’assombris ton monde et je le prends moi-même. C’est toi qui vois. »

Madden sonde Hodges du regard pour voir s’il est vraiment sérieux. Puis il glisse la main dans la poche intérieure de son veston — doucement, à contrecœur — et en sort un portefeuille bien rempli.

« Waouh, s’exclame Hodges. C’est de l’autruche ?

— C’en est, en effet. »

Hodges comprend que Madden veut qu’il vienne le chercher lui-même. Il pense lui dire de le poser sur la console entre les deux sièges, puis change d’avis. Il semblerait que Madden soit un élève plutôt lent, à qui un petit cours de rattrapage sur qui tient les rênes ici ferait pas de mal. Il tend alors la main, Madden l’agrippe, broyant ses phalanges dans un étau puissant, et Hodges lui fiche un coup de Happy Slapper sur le dos de la main. Le broyage de phalanges cesse aussitôt.

« Aouh ! Aouh ! Putain ! »

Madden a porté sa main à sa bouche. Au-dessus, ses yeux incrédules sont noyés de larmes de douleur.

« On s’empare pas de ce qu’on peut pas garder », dit Hodges.

Il ramasse le portefeuille en se demandant brièvement si l’autruche est une espèce menacée. Pas que ce blaireau en aurait quelque chose à foutre, de toute façon.

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