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Stephen King: Carnets noirs

Здесь есть возможность читать онлайн «Stephen King: Carnets noirs» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию). В некоторых случаях присутствует краткое содержание. Город: Paris, год выпуска: 2016, ISBN: 9782226319227, издательство: Éditions Albin Michel, категория: Триллер / Ужасы и Мистика / на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале. Библиотека «Либ Кат» — LibCat.ru создана для любителей полистать хорошую книжку и предлагает широкий выбор жанров:

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Stephen King Carnets noirs

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En prenant sa retraite, John Rothstein a plongé dans le désespoir les millions de lecteurs des aventures de Jimmy Gold. Rendu fou de rage par la disparition de son héros favori, Morris Bellamy assassine le vieil écrivain pour s’emparer de sa fortune, mais surtout, de ses précieux carnets de notes. Le bonheur dans le crime ? C’est compter sans les mauvais tours du destin… et la perspicacité du détective Bill Hodges. Après King renoue avec un de ses thèmes de prédilection : l’obsession d’un fan. Dans ce formidable roman noir où l’on retrouve les protagonistes de (prix Edgar 2015), il rend un superbe hommage au pouvoir de la fiction, capable de susciter chez le lecteur le meilleur… ou le pire. STEPHEN KING « Une déclaration d’amour à la lecture et à la littérature américaine… Merveilleux, effrayant, émouvant. » The Washington Post

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STEPHEN KING

Carnets noirs

Une pensée pour John D. MacDonald

« C’est en nous enfonçant dans les abysses que nous recouvrons les trésors de la vie. »

Joseph Campbell

« Cette connerie c’est des conneries. »

Jimmy Gold

PREMIÈRE PARTIE

UN TRÉSOR ENTERRÉ

1978

« Hé, le génie, on s’réveille. »

Rothstein ne voulait pas se réveiller. Son rêve était trop bien. Il y avait sa première épouse, des mois avant qu’elle devienne sa première épouse : dix-sept ans, parfaite de la tête aux pieds. Nue, corps scintillant. Nus tous les deux. Lui, dix-neuf ans, du cambouis sous les ongles, mais elle s’en balançait, du moins à l’époque, parce qu’il avait la tête pleine de rêves et que c’était ça qui comptait pour elle. Elle croyait à ces rêves bien plus que lui, et elle avait raison d’y croire. Dans ce rêve, elle riait en essayant d’attraper la partie de lui la plus facile à attraper. Il chercha à s’enfoncer plus profondément dans son rêve mais une main se mit à lui secouer l’épaule et le rêve éclata comme une bulle de savon.

Il n’avait plus dix-neuf ans et n’habitait plus un deux-pièces dans le New Jersey : il fêterait ses quatre-vingts ans dans six mois et vivait dans une ferme du New Hampshire où son testament précisait qu’il devait être enterré. Il y avait trois hommes dans sa chambre. Ils portaient des passe-montagnes : un rouge, un bleu, un jaune canari. Voyant ça, il tenta de se convaincre que c’était juste un autre rêve — le chouette qu’il était en train de faire avait glissé vers le cauchemar, comme il arrive parfois — mais c’est là que la main lui lâcha l’épaule, l’attrapa par le bras et le jeta à bas du lit. Sa tête heurta le sol et il poussa un cri.

« Arrête, dit l’homme à la cagoule jaune. Tu veux le sonner ou quoi ?

— Visez-moi ça. » Celui à la cagoule rouge pointait le doigt. « Le vieux a la trique. Devait être en train de faire un putain de rêve. »

Celui qui l’avait secoué, Cagoule Bleue, dit :

« Il a envie de pisser, c’est tout. À cet âge-là, c’est le seul truc qui peut les faire bander. Mon grand-père…

— Ça va, dit Cagoule Jaune. On s’en tape de ton grand-père. »

Bien que sonné et toujours empêtré dans un rideau de sommeil s’effilochant peu à peu, Rothstein savait qu’il était en mauvaise posture. Un mot émergea dans son esprit : cambrioleurs . Sa vieille tête lui faisait mal (il allait avoir un énorme bleu sur le côté droit, merci les anticoagulants), son cœur aux parois dangereusement minces cognait contre le côté gauche de sa cage thoracique, mais il leva les yeux vers le trio qui s’était matérialisé dans sa chambre. Trois hommes dressés au-dessus de lui, mains gantées, vestes d’automne à carreaux sous les terrifiantes cagoules. Des cambrioleurs. Et il était perdu ici, à huit kilomètres de la ville.

Rothstein rassembla ses esprits de son mieux, chassant le sommeil tout en se disant qu’il y avait au moins un point positif dans cette situation : si ces types-là ne voulaient pas qu’il voie leurs visages, c’est qu’ils comptaient le laisser en vie.

Peut-être.

« Messieurs », dit-il.

M. Jaune rigola et leva le pouce.

« Bon début, le génie. »

Rothstein inclina la tête, comme s’il venait de recevoir un compliment. Il consulta furtivement le réveil, vit qu’il était deux heures et quart du matin, puis regarda de nouveau M. Jaune, qui était peut-être bien le meneur.

« J’ai un peu d’argent seulement, mais prenez-le, je vous en prie. Pourvu que vous partiez sans me faire de mal. »

Le vent soufflait en rafales, projetant des feuilles d’automne contre le mur ouest de la maison. Rothstein remarqua que la chaudière s’était déclenchée pour la première fois de l’année. Est-ce qu’on sortait pas tout juste de l’été ?

« D’après ce qu’on sait, t’as beaucoup plus qu’un peu. »

Ça, c’était M. Rouge.

« La ferme. » M. Jaune tendit une main à Rothstein. « Relève-toi, le génie. »

Rothstein saisit la main tendue, se remit sur ses pieds en chancelant et s’assit sur le lit. Il respirait fort, affreusement conscient du tableau qu’il devait présenter (sa conscience aiguë de lui-même avait été sa malédiction et sa bénédiction toute sa vie) : un vieillard flottant dans un pyjama bleu, ne restant de sa chevelure que quelques pelotes de pop-corn blanc au-dessus des oreilles. Voilà ce qu’était devenu l’écrivain qui, l’année où JFK avait été élu président, avait fait la une du magazine Time : JOHN ROTHSTEIN, LE GÉNIE RECLUS DE L’AMÉRIQUE.

Hé, le génie, on s’réveille.

« Reprends ton souffle », dit M. Jaune. Son ton était plein de sollicitude mais ça n’inspirait pas confiance à Rothstein. « Puis on ira au salon, où vont les gens civilisés pour bavarder. Prends ton temps. Retrouve ta sérénité. »

Rothstein respira lentement, profondément, et son cœur se calma un peu. Il essaya de penser à Peggy, avec ses petits seins en pomme (petits mais parfaits) et ses longues jambes lisses, mais le rêve s’était envolé, tout comme Peggy elle-même, vieille bique vivant désormais à Paris — avec le fric qu’il lui versait. Yolande au moins, sa deuxième tentative d’accès au bonheur conjugal, était morte, mettant ainsi un terme au versement de la pension.

Cagoule Rouge quitta la pièce et Rothstein entendit qu’on farfouillait dans son bureau. Quelque chose tomba. On ouvrait et fermait des tiroirs.

« Ça va mieux ? » demanda M. Jaune. Et quand Rothstein acquiesça : « Alors, on y va. »

Rothstein se laissa conduire dans le petit salon, escorté par M. Bleu sur sa gauche et M. Jaune sur sa droite. Dans son bureau, la fouille continuait. M. Rouge n’allait pas tarder à ouvrir le placard, écarter ses deux vestes et trois pulls, et découvrir le coffre-fort. C’était inévitable.

D’accord. Du moment qu’ils laissent les carnets. Pourquoi ils les prendraient ? Des voyous comme ça s’intéressent qu’à l’argent. Ils savent probablement rien lire de plus compliqué que le courrier des lecteurs dans Penthouse.

Sauf qu’il avait des doutes concernant l’homme à la cagoule jaune. Celui-là parlait comme quelqu’un d’instruit.

Toutes les lumières étaient allumées au salon et les rideaux n’étaient pas tirés. Des voisins insomniaques auraient pu se demander ce qui se passait dans la maison du vieil écrivain… s’il avait eu des voisins. Les plus proches étaient à trois kilomètres de là, sur la route principale. Il n’avait pas d’amis, aucun visiteur. Les rares démarcheurs se faisaient rembarrer. Rothstein était juste ce vieux mec bizarre. L’écrivain à la retraite. L’ermite. Il payait ses impôts et on lui foutait la paix.

Bleu et Jaune le conduisirent jusqu’au fauteuil face à la télé qu’il regardait rarement et lorsqu’il tarda à s’y asseoir, M. Bleu l’y poussa sans ménagement.

« Doucement ! » dit Jaune sèchement, et Bleu se recula un peu en marmonnant.

OK, c’était bien M. Jaune le patron. C’était M. Jaune le chef de la meute.

Il se pencha vers Rothstein, les mains sur les genoux de son pantalon de velours côtelé.

« Tu veux une petite goutte de quelque chose pour te détendre ?

— Si c’est d’alcool que vous parlez, j’ai arrêté il y a vingt ans. Ordre du médecin.

— Tant mieux pour toi. T’es allé aux réunions ?

— J’étais pas alcoolique », dit Rothstein agacé.

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