Jeff Lindsay - Les démons de Dexter

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Les démons de Dexter: краткое содержание, описание и аннотация

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Le jour, Dexter Morgan est expert judiciaire à la police de Miami; la nuit, il se transforme en tueur en série. Pas n’importe lequel, notez bien: un serial-killer justicier qui ne tue que ceux qui le méritent. Un double meurtre particulièrement sordide laisse pourtant notre cher Dexter fort perplexe: serait-il confronté à plus fort que lui?

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Et l’ascenseur s’ouvrit, pile à cet instant. Il redressa les épaules, hocha la tête et me lança :

— Allons-y.

Nous longeâmes le couloir et Vince s’arrêta devant la dernière porte. Il prit une grande inspiration, leva le poing et après une légère hésitation frappa à la porte. Après de longues secondes durant lesquelles rien ne se passa, il me regarda en clignant des yeux, la main toujours levée.

— Peut-être… dit-il.

La porte s’ouvrit.

— Bonjour, Vic ! roucoula la créature devant nous.

Vince se mit à rougir et à balbutier :

— Je… voilà, salut.

Puis il déplaça son poids d’une jambe sur l’autre, bafouilla quelque chose.

C’était une prestation fort remarquable, et je n’étais pas le seul à l’apprécier, de toute évidence. Le nabot qui nous avait ouvert la contemplait avec un sourire qui sous-entendait qu’il prisait le spectacle de la souffrance humaine, et il laissa Vince se tortiller un certain temps avant de se décider à nous dire :

— Mais entrez !

Manny Borque, si c’était bien lui et non un étrange hologramme issu d’un épisode de Star Wars , devait mesurer un bon mètre soixante-cinq, depuis la semelle de ses bottes à talon haut jusqu’à la pointe de ses cheveux orange. Ceux-ci étaient coupés court, à l’exception d’une frange noire qui formait comme la queue d’une hirondelle sur son front et enveloppait une paire d’immenses lunettes ornées de faux diamants. Il portait une longue tunique rouge vif, sans rien dessous apparemment, et celle-ci tournoya autour de lui tandis qu’il s’écartait de la porte pour nous faire signe d’entrer, avant de s’éloigner à petits pas rapides vers une fenêtre panoramique donnant sur la mer.

— Venez par ici, que nous parlions un peu, lança-t-il en contournant un socle qui soutenait un énorme objet, une boule de vomi d’animal géante, semblait-il, qui aurait été plongée dans du plastique puis recouverte de graffitis fluorescents.

Il nous conduisit à une table de verre près de la fenêtre, autour de laquelle étaient disposés quatre sièges que l’on aurait pu prendre pour des selles de chameaux en bronze montées sur des échasses.

— Asseyez-vous, dit-il, avec un geste large de la main.

Je pris le siège le plus proche de la fenêtre ; Vince hésita un instant puis s’assit à côté de moi, et Manny se jucha sur celui situé juste en face de lui.

— Alors, reprit-il. Quoi de neuf, Vic ? Vous voulez du café ?… Eduardo !

Près de moi, Vince prit une longue inspiration saccadée, mais avant qu’elle puisse lui être d’une quelconque utilité, Manny s’était déjà retourné pour s’adresser à moi.

— Et vous , vous devez être le marié rougissant ! s’exclama-t-il.

— Dexter Morgan, répondis-je. Mais je ne rougis pas souvent.

— Oh, je crois que Vic s’en charge à votre place, répliqua-t-il.

Et, illico, Vince eut l’obligeance de devenir aussi cramoisi que son teint le lui permettait. Étant encore en rogne contre lui, je décidai de ne pas venir à sa rescousse en adressant une remarque cinglante à Manny, ou même en le corrigeant sur l’identité réelle de mon collègue, qui ne s’appelait pas « Vic ». J’étais persuadé qu’il connaissait très bien son prénom et qu’il s’amusait simplement à ses dépens. Je n’y voyais aucun inconvénient. Tant mieux si Vince était mal à l’aise ; cela lui apprendrait à parler à Rita dans mon dos et à m’infliger une telle épreuve.

Eduardo s’approcha d’un air affairé, apportant un service à café Fiestaware d’époque aux couleurs vives, disposé sur un plateau en plastique transparent. C’était un jeune homme trapu qui mesurait deux fois la taille de Manny et qui semblait lui aussi très soucieux de contenter le petit troll. Il plaça une tasse jaune devant lui, puis s’apprêta à attribuer la bleue à Vince lorsqu’il fut interrompu par Manny, qui posa un doigt sur son bras.

— Eduardo, murmura-t-il d’une voix mielleuse, et le garçon se figea. Jaune ? On a oublié ? Manny a toujours la bleue.

Eduardo fit aussitôt marche arrière, manquant lâcher le plateau dans sa hâte d’enlever la tasse jaune pour la remplacer par la bleue.

— Merci, Eduardo.

Le garçon marqua un temps d’arrêt, sans doute pour voir si Manny était sincère ou s’il lui reprochait autre chose. Mais celui-ci lui tapota simplement le bras en disant :

— Sers nos amis maintenant, s’il te plaît.

Eduardo hocha la tête et fit le tour de la table.

En fin de compte, c’est moi qui héritai de la tasse jaune, ce qui ne me dérangeait pas, mais je me demandai si cela signifiait qu’on ne m’aimait pas. Une fois qu’il eut servi le café, Eduardo s’empressa de retourner à la cuisine pour revenir avec une petite assiette contenant une demi-douzaine de pastelitos . On aurait cru des porcs-épics fourrés à la crème : c’étaient des boules marron foncé hérissées de piquants qui, à défaut d’être en chocolat, devaient provenir d’anémones de mer. Le centre était ouvert, révélant une sorte de crème anglaise orangée surmontée d’une touche de vert, de bleu ou de brun.

Eduardo posa l’assiette au milieu de la table, et nous la regardâmes tous avec attention pendant un moment. Manny avait l’air de les admirer ; Vince, lui, paraissait sous l’emprise d’un sentiment religieux, tandis qu’il déglutissait bruyamment. Quant à moi, je me demandais si nous étions censés les manger ou les utiliser pour un rituel aztèque, aussi je me contentai de fixer l’assiette, en espérant qu’on me fournirait un indice.

Ce fut Vince finalement qui s’en chargea.

— Mon Dieu ! s’exclama-t-il.

Manny hocha la tête.

— Ils sont magnifiques, n’est-ce pas ? Mais ils sont un peu out maintenant.

Il en prit un, celui décoré de bleu, et le considéra avec une tendresse un peu détachée.

— Les palais se sont lassés des couleurs, et ce vieil hôtel infâme près d’Indian Creek s’est mis à les copier. Mais bon… conclut-il avec un haussement d’épaules avant d’en fourrer un dans sa bouche. On s’attache à ces charmantes créatures, ajouta-t-il en se tournant pour adresser un clin d’œil à Eduardo. Peut-être un peu trop, même, parfois.

Eduardo pâlit et s’enfuit dans la cuisine. Manny se retourna vers nous avec un énorme sourire.

— Goûtez-en un, je vous en prie.

— J’ai peur de mordre dedans, répondit Vince. Ils sont tellement parfaits.

— Moi, j’ai peur qu’ils me mordent, renchéris-je. Vous serviriez ça à mon mariage ? demandai-je, souhaitant trouver un sens à toute cette comédie.

Vince me donna un violent coup de coude, trop tard…

— Je ne sers pas, rétorqua-t-il. Je présente . Et je présente ce que bon me semble.

— Ne pourriez-vous pas me donner une idée du menu ? Supposez par exemple que la mariée soit allergique à l’aspic d’églefin arrosé de wasabi ?

Manny serra les poings si fort que j’entendis les articulations craquer. L’espace de quelques secondes, j’eus un frisson d’espoir à la pensée que mon bel esprit avait peut-être réussi à me priver d’un traiteur. Hélas, Manny finit par se détendre.

— J’aime bien ton ami, Vic, déclara-t-il en riant. Il est très courageux.

Vince reprit sa respiration. Manny, lui, se mit à griffonner sur un bloc-notes. Et c’est ainsi que j’eus l’honneur de voir le grand Manny Borque accepter de s’occuper de mon mariage pour le prix d’ami d’à peine deux cent cinquante dollars l’assiette.

Cela semblait un peu excessif. Mais, après tout, on m’avait expressément demandé de ne pas penser à l’argent. J’étais sûr que Rita trouverait une solution, peut-être en n’invitant que deux ou trois personnes… Quoi qu’il en soit, j’eus peu de temps pour me préoccuper de l’aspect financier, car presque aussitôt mon téléphone mobile entonna sa joyeuse petite mélodie, et quand je répondis, j’entendis Deborah aboyer, sans se soucier de me retourner mon « allô » enjoué :

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