Маргерит Юрсенар - Les mémoires d'Hadrien
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J’ai résisté ; j’ai lutté contre la douleur comme contre une gangrène. Je me suis rappelé des entêtements, des mensonges ; je me suis dit qu’il eût changé, engraissé, vieilli. Peines perdues : comme un ouvrier consciencieux s’épuise à copier un chef-d’œuvre, je m’acharnais à exiger de ma mémoire une exactitude insensée : je recréais cette poitrine haute et bombée comme un bouclier. Parfois, l’image jaillissait d’elle-même ; un flot de douceur m’emportait ; j’avais revu un verger de Tibur, l’éphèbe ramassant les fruits de l’automne dans sa tunique retroussée en guise de corbeille. Tout manquait à la fois : l’associé des fêtes nocturnes, le jeune homme qui s’asseyait sur les talons pour aider Euphorion à rectifier les plis de ma toge. À en croire les prêtres, l’ombre aussi souffrait, regrettait l’abri chaud qu’était pour elle son corps, hantait en gémissant les parages familiers, lointaine et toute proche, momentanément trop faible pour me signifier sa présence. Si c’était vrai, ma surdité était pire que la mort elle-même. Mais avais-je si bien compris, ce matin-là, le jeune vivant sanglotant à mes côtés ? Un soir, Chabrias m’appela pour me montrer dans la constellation de l’Aigle une étoile, jusque-là assez peu visible, qui palpitait soudain comme une gemme, battait comme un cœur. J’en fis son étoile, son signe. Je m’épuisais chaque nuit à suivre son cours ; j’ai vu d’étranges figures dans cette partie du ciel. On me crut fou. Mais peu importait.
La mort est hideuse, mais la vie aussi. Tout grimaçait. La fondation d’Antinoé n’était qu’un jeu dérisoire : une ville de plus, un abri offert aux fraudes des marchands, aux exactions des fonctionnaires, aux prostitutions, au désordre, aux lâches qui pleurent leurs morts avant de les oublier. L’apothéose était vaine : ces honneurs si publics ne serviraient qu’à faire de l’enfant un prétexte à bassesses ou à ironies, un objet posthume de convoitise ou de scandale, une de ces légendes à demi pourries qui encombrent les recoins de l’histoire. Mon deuil n’était qu’une forme de débordement, une débauche grossière : je restais celui qui profite, celui qui jouit, celui qui expérimente : le bien-aimé me livrait sa mort. Un homme frustré pleurait sur soi-même. Les idées grinçaient ; les paroles tournaient à vide ; les voix faisaient leur bruit de sauterelles au désert ou de mouches sur un tas d’ordures ; nos barques aux voiles gonflées comme des gorges de colombes véhiculaient l’intrigue et le mensonge ; la bêtise s’étalait sur les fronts humains. La mort perçait partout sous son aspect de décrépitude ou de pourriture : la tache blette d’un fruit, une déchirure imperceptible au bas d’une tenture, une charogne sur la berge, les pustules d’un visage, la marque des verges sur le dos d’un marinier. Mes mains semblaient toujours un peu sales. À l’heure du bain, tendant aux esclaves mes jambes à épiler, je regardais avec dégoût ce corps solide, cette machine presque indestructible, qui digérait, marchait, parvenait à dormir, se réaccoutumerait un jour ou l’autre aux routines de l’amour. Je ne tolérais plus que la présence des quelques serviteurs qui se souvenaient du mort ; à leur manière, ils l’avaient aimé. Mon deuil trouvait un écho dans la douleur un peu niaise d’un masseur ou du vieux nègre préposé aux lampes. Mais leur chagrin ne les empêchait pas de rire doucement entre eux en prenant le frais sur le rivage. Un matin, appuyé au bastingage, j’aperçus dans le carré réservé aux cuisines un esclave qui vidait un de ces poulets que l’Égypte fait éclore par milliers dans des fours malpropres ; il prit à pleines mains le paquet gluant des entrailles, et les jeta à l’eau. J’eus à peine le temps de tourner la tête pour vomir. A l’escale de Philæ, au cours d’une fête que nous offrit le gouverneur, un enfant de trois ans, noir comme du bronze, le fils d’un portier nubien, se faufila dans les galeries du premier étage pour regarder les danses ; il tomba. On fit du mieux qu’on put pour cacher l’incident ; le portier retenait ses sanglots pour ne pas déranger les hôtes de son maître ; on le fit sortir avec le cadavre par la porte des cuisines ; j’entrevis malgré tout ces épaules qui s’élevaient et s’abaissaient convulsivement comme sous un fouet. J’avais le sentiment de prendre sur moi cette douleur de père comme j’avais pris celle d’Hercule, celle d’Alexandre, celle de Platon pleurant leurs amis morts. Je fis porter quelques pièces d’or à ce misérable ; on ne peut rien de plus. Deux jours plus tard, je le revis ; il s’épouillait béatement, couché au soleil au travers du seuil.
Les messages affluèrent ; Pancratès m’envoya son poème enfin terminé ; ce n’était qu’un médiocre centon d’hexamètres homériques, mais le nom qui y figurait presque à chaque ligne le rendait plus émouvant pour moi que bien des chefs-d’œuvre. Nouménios me fit parvenir une Consolation dans les règles ; je passai une nuit à la lire ; aucun lieu commun n’y manquait. Ces faibles défenses élevées par l’homme contre la mort se développaient sur deux lignes : la première consistait à nous la présenter comme un mal inévitable ; à nous rappeler que ni la beauté, ni la jeunesse, ni l’amour n’échappent à la pourriture ; à nous prouver enfin que la vie et son cortège de maux sont plus horribles encore que la mort elle-même, et qu’il vaut mieux périr que vieillir. On se sert de ces vérités pour nous incliner à la résignation ; elles justifient surtout le désespoir. La seconde ligne d’arguments contredit la première, mais nos philosophes n’y regardent pas de si près : il ne s’agissait plus de se résigner à la mort, mais de la nier. L’âme comptait seule ; on posait arrogamment comme un fait l’immortalité de cette entité vague que nous n’avons jamais vu fonctionner dans l’absence du corps, avant de prendre la peine d’en prouver l’existence. Je n’étais pas si sûr : puisque le sourire, le regard, la voix, ces réalités impondérables, étaient anéanties, pourquoi pas l’âme ? Celle-ci ne me paraissait pas nécessairement plus immatérielle que la chaleur du corps. On s’écartait de la dépouille où cette âme n’était plus : c’était pourtant la seule chose qui me restât, ma seule preuve que ce vivant eût existé. L’immortalité de la race passait pour pallier chaque mort d’homme : il m’importait peu que des générations de Bithyniens se succédassent jusqu’à la fin des temps au bord du Sangarios. On pariait de gloire, beau mot qui gonfle le cœur, mais on s’efforçait d’établir entre celle-ci et l’immortalité une confusion menteuse, comme si la trace d’un être était la même chose que sa présence. On me montrait le dieu rayonnant à la place du cadavre : j’avais fait ce dieu ; j’y croyais à ma manière, mais la destinée posthume la plus lumineuse au fond des sphères stellaires ne compensait pas cette vie brève ; le dieu ne tenait pas lieu du vivant perdu. Je m’indignais de cette rage qu’a l’homme de dédaigner les faits au profit des hypothèses, de ne pas reconnaître ses songes pour des songes. Je comprenais autrement mes obligations de survivant. Cette mort serait vaine si je n’avais pas le courage de la regarder en face, de m’attacher à ces réalités du froid, du silence, du sang coagulé, des membres inertes, que l’homme recouvre si vite de terre et d’hypocrisie ; je préférais tâtonner dans le noir sans le secours de faibles lampes. Autour de moi, je sentais qu’on commençait à s’offusquer d’une douleur si longue : la violence en scandalisait d’ailleurs plus que la cause. Si je m’étais laissé aller aux mêmes plaintes à la mort d’un frère ou d’un fils, on m’eût également reproché de pleurer comme une femme. La mémoire de la plupart des hommes est un cimetière abandonné, où gisent sans honneurs des morts qu’ils ont cessé de chérir. Toute douleur prolongée insulte à leur oubli.
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