Henry-Pierre Jeudy - Addiction

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Addiction: краткое содержание, описание и аннотация

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" Ce matin, je me lève décidé à ne pas prendre une cigarette après mon café, comme je l'ai fait depuis une trentaine d'années. Si l'envie est trop forte, je pourrai toujours me recoucher. " Fumer tue, paraît-il. Mais vivre aussi, alors pourquoi s'en faire ? C'est que l'esprit du temps est à l'hygiène de soi, au corps immaculé, à l'extermination des mauvaises habitudes. Le narrateur se donne donc trois jours pour arrêter de fumer. Niais on ne se défait pas facilement d'une pratique devenue une seconde nature : et voilà notre anti-héros contemporain arrêté, rêveur, au milieu des volutes de fumée. Plusieurs fois par jour, il prend une dernière cigarette en se posant la question obsédante : pourquoi fume-t-on ? La réponse, enfin, est au cœur de cette fiction théorique, élégante et burlesque loin, très loin des méthodes soporifiques supposées nous délivrer de la nicotine.

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J'ai retiré mon timbre. Je ne souhaite plus d'aide. Si je craque, tant pis. Je dois m'habituer à la lenteur de mon esprit. Qu'importe si je ne pense à rien pendant plusieurs jours. Je ne serai pas un légume, mais une fleur. Je respirerai tôt le matin, je m'ouvrirai au soleil, je tendrai les bras vers le ciel, chanterai, et lorsque j'aurai épuisé le peu d'énergie qui me restera, je m'allongerai dans l'herbe en attendant midi.

Finalement, je retourne dans mon bureau. Je suis gêné d'avoir fumé. Ce que je vais consigner maintenant sur mon carnet est faussé. Je n'écrirai que demain. Demain sera mon vrai premier jour.

Le paradoxe est inouï : il s'agit de ne pas penser un instant à ce qui fait l'unique objet de nos préoccupations. Les armes de la distraction ne manquent pas, leur efficacité ne dure guère, l'envie revient après avoir été oubliée un moment, elle se fera d'autant plus vive qu'elle aura été durablement congédiée. Il faut dépenser beaucoup d'énergie à construire des alternatives qui nous paraissent aussi insensées les unes que les autres, des alternatives qui, ajoutées les unes aux autres, permettent au temps de passer malgré son insupportable lenteur.

Il est minuit. Je dois l'avouer, je viens de craquer. J'ai fumé une nouvelle cigarette. J'aurais pu monter l'escalier pour aller me coucher sans me laisser tenter, je ne l'ai pas fait.

Je crois toujours que je réussirai à contrôler la quantité de cigarettes que je fume. Il est vrai que je suis allé dîner chez des amis, que j'ai bu du vin, que je me suis senti mal, que j'ai peu parlé. Il faudrait que je sois seul, que je vive pendant quelques jours comme un ermite. L'acupuncteur que j'ai rencontré un jour me l'a dit, je fumais pour des raisons sociales, parce que la fumée elle-même me séparait des autres, me donnait une contenance, parce que j'ai besoin de ce halo derrière lequel je me retire selon ma convenance. Je suis sûr que si je me couchais à neuf heures le soir, je n'aurais pas envie de fumer. Je lirais davantage.

De plus, j'ai mal au ventre J'aimerais vomir. Les gens se battent en vieillissant contre les maux qui les préoccupent. Moi, j'ai l'impression d'accepter tout ce qui m'arrive comme si je devais intégrer les signes d'une décrépitude que je provoque. Je ne développe aucune résistance, je laisse mes organes, mes muscles faire avec ce qui advient, et cela diminue inéluctablement leur force. En somme, je me laisse vieillir, j'accepte mes petits malheurs comme des qualités de mon être. Est-ce la meilleure manière de se préparer à mourir ?

La nuit est noire, très noire. Je la regarde depuis la fenêtre. Je me souviens du jour où j'ai bourré ma première pipe, là, près de la cheminée. Je devais avoir quatorze ans. J'ai vomi. Mon ami d'enfance s'était allongé sur le divan, il avait tellement bu qu'il ne bougeait plus. Jamais je n'aurais imaginé, à cet âge, que je vivrais si longtemps.

J'ai pensé, adolescent, que je mourrais dans la fulgurance de la vie. A l'époque, les jeunes gens se défonçaient par amour fou de la vie. Aujourd'hui, ils ne le font même plus par désespoir, ils prennent l'habitude de se détruire parce que la vie perd de son intérêt, parce qu'elle ne leur offre plus d'illusions. Je songe à James Dean. Jamais l'injonction à cesser de fumer n'a été présentée publiquement comme un appel à la fureur de vivre. La confiance effrénée en notre propre corps, en ses capacités d'être et de vivre, est devenue un tabou. Il est de bon ton moral et sanitaire d'entretenir une méfiance constante à son égard comme s'il était capable de toutes les trahisons. Voilà ce qui nous est dit : il faut protéger notre corps malgré lui. Le bénéfice des interdits n'est pas de nous donner envie de vivre, mais de garantir, par la négative, notre survie.

J'ai ouvert la porte. Je regarde le ciel, il n'y a pas d'étoile. J'aspire l'air frais, je gonfle mes poumons, je pense à mes petits enfants. On m'a dit que si je voulais les voir vivre encore longtemps, il fallait que j'arrête de fumer. Eux-mêmes, ils ne m'ont jamais fait de remarques, ils n'ont pas écrasé mes cigarettes devant moi. Il est vrai que j'évite de fumer devant eux.

Je dois admettre, comme tout le monde, que les méfaits du tabac entrent dans la transmission génétique, que les symptômes de la dégénérescence par la nicotine concernent les lignées familiales. C'est la même chose que pour l'éthylisme transmissible d'une génération à l'autre.

La société contemporaine s'organise, elle s'acharne contre l'individu à risques pour faire oublier tout ce qu'elle développe comme potentiel de destruction. Les responsabilités incombent aux individus qui sont eux-mêmes pris pour des objets de menace alors que prolifèrent en toute liberté les substances cancérigènes.

Je devrais retourner dormir. Depuis mon lit, j'écouterai les bruits de la nuit. J'aime les oiseaux nocturnes, ils ont l'air de ne pas savoir où ils vont. Leur musique m'endort. Et lorsque je m'éveille, à quatre heures du matin, je les entends à nouveau, ils me rappellent qu'ils n'abandonneront jamais leur rôle. Ils accompagnent les noctambules, leur donnent une âme. Parfois les hiboux poursuivent leur chant longtemps après le lever du soleil. Pendant que j'écris, je l'écoute, il me calme comme si la nuit ne quittait plus le jour.

Le deuxième jour

Les gens qui ont cessé de fumer pendant plusieurs mois reprennent souvent leur première cigarette le jour où la mort d'un proche leur est annoncée. C'est l'affliction brutale qui les pousse à fumer de nouveau, comme s'ils n'avaient aucun autre moyen de chasser l'angoisse. C'est une compensation qu'ils apprécient parce qu'elle leur donne la sensation instantanée d'éviter la détresse. Ils attendent de la cigarette non point un changement d'état d'âme mais la possibilité d'une réversion, du passage d'un état d'âme en son contraire.

Quand je suis heureux, ou du moins si je crois l'être, je fume aussi une cigarette comme si je me faisais un cadeau. Mon envie irrésistible de fumer est également liée à l'irruption de la joie. Si elle ne dépendait que d'un genre d'état d'âme, il serait plus aisé de la combattre. Je ne saurais sans doute jamais pourquoi mes états d'âme subissent une variation aussi rapide. Je peux passer de la sérénité à l'angoisse en un temps record. J'ai toujours l'impression d'avoir un objet d'anxiété refoulé prêt à resurgir dès que mon esprit n'est occupé par rien. Il suffit que la représentation de ce qui me fait souffrir fasse retour sans crier gare pour que je sois immédiatement plongé dans un état mélancolique. L'angoisse et la joie sont les expressions alternatives d'un même état d'âme.

Les mouches sont de plus en plus nerveuses. Est-ce l'orage qui les affole ? J'en écrase quelques-unes avec la tapette. J'attends qu'elles se posent sur le mur ou sur un livre, et je frappe. Elles meurent d'un seul coup. J'en ai vu souvent agoniser quand elles sont collées sur le ruban gluant qui les attire. Elles battent des pattes jusqu'à l'épuisement. Comme elles se ressemblent toutes, il est impossible de savoir laquelle a trépassé sauf à se dire que c'est bien celle qu'on vient de frapper.

Il y a le battement régulier de l'horloge, celui de l'œil-de-bœuf près de la cheminée. Quand je me lève pour regarder durant quelques instants la progression des aiguilles, je ne dois pas être le seul à me dire que le temps met du temps à passer quand on ne fume plus. C'est une horloge de gare, elle a longtemps scandé le rythme des trains à vapeur qui circulaient sur une voie désormais désaffectée. Chaque minute de vie est-elle si précieuse ?

Dans la gare du bourg, le train s'arrêtait une minute. Il fallait se presser de monter ou de descendre. Je me remémore sur le quai de la gare cette belle femme vêtue d'une longue robe rose, d'un chapeau à larges bords, tenant un fume-cigarettes entre ses dents. Je crois que c'est ma tante. Je la revois comme si elle posait pour une carte postale, dont le rôle est de garder une minute de vie pour les temps à venir.

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