Pierre Corneille - Médée

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La pièce se situe à Corinthe. L'héroïne de la pièce, la magicienne Médée, est répudiée par Jason après lui avoir donné deux enfants et est condamnée à l'exil par Créon, roi de Corinthe. Ce dernier, père de Créuse consent au mariage de sa fille avec Jason. Folle de rage, Médée accomplit sa vengeance en brûlant Créuse à l'aide d'une robe enchantée, et en égorgeant ses propres enfants. Le dernier acte se termine sur la fuite de Médée sur un char tiré par deux dragons et sur le suicide de Jason.

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MÉDÉE Pierre Corneille MÉDÉE Tragédie

Adresse Adresse Épître de Corneille à Monsieur P.T.N.G. Monsieur, Je vous donne Médée, toute méchante qu’elle est, et ne vous dirai rien pour sa justification. Je vous la donne pour telle que vous la voudrez prendre, sans tâcher à prévenir ou violenter vos sentiments par un étalage des préceptes de l’art, qui doivent être fort mal entendus et fort mal pratiqués quand ils ne nous font pas arriver au but que l’art se propose. Celui de la poésie dramatique est de plaire, et les règles qu’elle nous prescrit ne sont que des adresses pour en faciliter les moyens au poète, et non pas des raisons qui puissent persuader aux spectateurs qu’une chose soit agréable quand elle leur déplaît. Ici vous trouverez le crime en son char de triomphe, et peu de personnages sur la scène dont les mœurs ne soient plus mauvaises que bonnes ; mais la peinture et la poésie ont cela de commun, entre beaucoup d’autres choses, que l’une fait souvent de beaux portraits d’une femme laide, et l’autre de belles imitations d’une action qu’il ne faut pas imiter. Dans la portraiture, il n’est pas question si un visage est beau, mais s’il ressemble ; et dans la poésie, il ne faut pas considérer si les mœurs sont vertueuses, mais si elles sont pareilles à celles de la personne qu’elle introduit. Aussi nous décrit-elle indifféremment les bonnes et les mauvaises actions, sans nous proposer les dernières pour exemple ; et si elle nous en veut faire quelque horreur, ce n’est point par leur punition, qu’elle n’affecte pas de nous faire voir, mais par leur laideur, qu’elle s’efforce de nous représenter au naturel. Il n’est pas besoin d’avertir ici le public que celles de cette tragédie ne sont pas à imiter : elles paraissent assez à découvert pour n’en faire envie à personne. Je n’examine point si elles sont vraisemblables ou non : cette difficulté, qui est la plus délicate de la poésie, et peut-être la moins entendue, demanderait un discours trop long pour une épître : il me suffit qu’elles sont autorisées ou par la vérité de l’histoire, ou par l’opinion commune des anciens. Elles vous ont agréé autrefois sur le théâtre ; j’espère qu’elles vous satisferont encore aucunement sur le papier, et demeure, Monsieur, Votre très humble serviteur, Corneille.

Examen

Acteurs

Acte premier

Scène première

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Acte II

Scène première

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Acte III

Scène première

Scène II

Scène III

Scène IV

Acte IV

Scène première

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Acte V

Scène première

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Scène VI

Scène VII

Pierre Corneille

MÉDÉE

Tragédie

Adresse Épître de Corneille à Monsieur PTNG Monsieur Je vous donne Médée - фото 1Adresse

Épître de Corneille à Monsieur P.T.N.G.

Monsieur,

Je vous donne Médée, toute méchante qu’elle est, et ne vous dirai rien pour sa justification. Je vous la donne pour telle que vous la voudrez prendre, sans tâcher à prévenir ou violenter vos sentiments par un étalage des préceptes de l’art, qui doivent être fort mal entendus et fort mal pratiqués quand ils ne nous font pas arriver au but que l’art se propose. Celui de la poésie dramatique est de plaire, et les règles qu’elle nous prescrit ne sont que des adresses pour en faciliter les moyens au poète, et non pas des raisons qui puissent persuader aux spectateurs qu’une chose soit agréable quand elle leur déplaît. Ici vous trouverez le crime en son char de triomphe, et peu de personnages sur la scène dont les mœurs ne soient plus mauvaises que bonnes ; mais la peinture et la poésie ont cela de commun, entre beaucoup d’autres choses, que l’une fait souvent de beaux portraits d’une femme laide, et l’autre de belles imitations d’une action qu’il ne faut pas imiter. Dans la portraiture, il n’est pas question si un visage est beau, mais s’il ressemble ; et dans la poésie, il ne faut pas considérer si les mœurs sont vertueuses, mais si elles sont pareilles à celles de la personne qu’elle introduit. Aussi nous décrit-elle indifféremment les bonnes et les mauvaises actions, sans nous proposer les dernières pour exemple ; et si elle nous en veut faire quelque horreur, ce n’est point par leur punition, qu’elle n’affecte pas de nous faire voir, mais par leur laideur, qu’elle s’efforce de nous représenter au naturel. Il n’est pas besoin d’avertir ici le public que celles de cette tragédie ne sont pas à imiter : elles paraissent assez à découvert pour n’en faire envie à personne. Je n’examine point si elles sont vraisemblables ou non : cette difficulté, qui est la plus délicate de la poésie, et peut-être la moins entendue, demanderait un discours trop long pour une épître : il me suffit qu’elles sont autorisées ou par la vérité de l’histoire, ou par l’opinion commune des anciens. Elles vous ont agréé autrefois sur le théâtre ; j’espère qu’elles vous satisferont encore aucunement sur le papier, et demeure,

Monsieur,

Votre très humble serviteur,

Corneille.

Examen

Cette tragédie a été traitée en grec par Euripide, et en latin par Sénèque ; et c’est sur leur exemple que je me suis autorisé à en mettre le lieu dans une place publique, quelque peu de vraisemblance qu’il y ait à y faire parler des rois, et à y voir Médée prendre les desseins de sa vengeance. Elle en fait confidence, chez Euripide, à tout le chœur, composé de Corinthiennes sujettes de Créon, et qui devaient être du moins au nombre de quinze, à qui elle dit hautement qu’elle fera périr leur roi, leur princesse et son mari, sans qu’aucune d’elles ait la moindre pensée d’en donner avis à ce prince.

Pour Sénèque, il y a quelque apparence qu’il ne lui fait pas prendre ces résolutions violentes en présence du chœur, qui n’est pas toujours sur le théâtre, et n’y parle jamais aux autres acteurs ; mais je ne puis comprendre comme, dans son quatrième acte, il lui fait achever ses enchantements en place publique ; et j’ai mieux aimé rompre l’unité exacte du lieu, pour faire voir Médée dans le même cabinet où elle a fait ses charmes, que de l’imiter en ce point.

Tous les deux m’ont semblé donner trop peu de défiance à Créon des présents de cette magicienne, offensée au dernier point, qu’il témoigne craindre chez l’un et chez l’autre, et dont il a d’autant plus de lieu de se défier, qu’elle lui demande instamment un jour de délai pour se préparer à partir, et qu’il croit qu’elle ne le demande que pour machiner quelque chose contre lui, et troubler les noces de sa fille.

J’ai cru mettre la chose dans un peu plus de justesse, par quelques précautions que j’y ai apportées : la première, en ce que Créuse souhaite avec passion cette robe que Médée empoisonne, et qu’elle oblige Jason à la tirer d’elle par adresse ; ainsi, bien que les présents des ennemis doivent être suspects, celui-ci ne le doit pas être, parce que ce n’est pas tant un don qu’elle fait qu’un payement qu’on lui arrache de la grâce que ses enfants reçoivent ; la seconde, en ce que ce n’est pas Médée qui demande ce jour de délai qu’elle emploie à sa vengeance, mais Créon qui le lui donne de son mouvement, comme pour diminuer quelque chose de l’injuste violence qu’il lui fait, dont il semble avoir honte en lui-même ; et la troisième enfin, en ce qu’après les défiances que Pollux lui en fait prendre presque par force, il en fait faire l’épreuve sur une autre, avant que de permettre à sa fille de s’en parer.

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