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Jean-Paul Sartre: Les Mots

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Jean-Paul Sartre Les Mots

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C'était le Paradis. Chaque matin, je m'éveillais dans une stupeur de joie, admirant la chance folle qui m'avait fait naître dans la famille la plus unie, dans le plus beau pays du monde. Les mécontents me scandalisaient: de quoi pouvaient-ils se plaindre? C'étaient des mutins. Ma grand-mère, en particulier, me donnait les plus vives inquiétudes: j'avais la douleur de constater qu'elle ne m'admirait pas assez. De fait, Louise m'avait percé à jour. Elle blâmait ouvertement en moi le cabotinage qu'elle n'osait reprocher à son mari: j'étais un polichinelle, un pasquin, un grimacier, elle m'ordonnait de cesser mes «simagrées». J'étais d'autant plus indigné que je la soupçonnais de se moquer aussi de mon grand-père: c'était «l'Esprit qui toujours nie». Je lui répondais, elle exigeait des excuses; sûr d'être soutenu, je refusais d'en faire. Mon grand-père saisissait au bond l'occasion de montrer sa faiblesse: il prenait mon parti contre sa femme qui se levait, outragée, pour aller s'enfermer dans sa chambre. Inquiète, craignant les rancunes de ma grand-mère, ma mère parlait bas, donnait humblement tort à son père qui haussait les épaules et se retirait dans son cabinet de travail; elle me suppliait enfin d'aller demander mon pardon. Je jouissais de mon pouvoir: j'étais saint Michel et j'avais terrassé l'Esprit malin. Pour finir, j'allais m'excuser négligemment. A part cela, bien entendu, je l'adorais: puisque c'était ma grand-mère. On m'avait suggéré de l'appeler Mamie, d'appeler le chef de famille par son prénom alsacien, Karl. Karl et Mamie, ça sonnait mieux que Roméo et Juliette, que Philémon et Baucis. Ma mère me répétait cent fois par jour non sans intention: «Karlémami nous attendent; Karlémami seront contents, Karlémami…» évoquant par l'intime union de ces quatre syllabes l'accord parfait des personnes. Je n'étais qu'à moitié dupe, je m'arrangeais pour le paraître entièrement: d'abord à mes propres yeux. Le mot jetait son ombre sur la chose; à travers Karlémami je pouvais maintenir l'unité sans faille de la famille et reverser sur la tête de Louise une bonne partie des mérites de Charles. Suspecte et peccamineuse, ma grand-mère, toujours au bord de faillir, était retenue par le bras des anges, par le pouvoir d'un mot.

Il y a de vrais méchants: les Prussiens, qui nous ont pris l'Alsace-Lorraine et toutes nos horloges, sauf la pendule de marbre noir qui orne la cheminée de mon grand-père et qui lui fut offerte, justement, par un groupe d'élèves allemands; on se demande où ils l'ont volée. On m'achète les livres de Hansi, on m'en fait voir les images: je n'éprouve aucune antipathie pour ces gros hommes en sucre rose qui ressemblent si fort à mes oncles alsaciens. Mon grand-père, qui a choisi la France en 71, va de temps en temps à Gunsbach, à Pfaffenhofen, rendre visite à ceux qui sont restés. On m'emmène. Dans les trains, quand un contrôleur allemand lui demande ses billets, dans les cafés quand un garçon tarde à prendre la commande, Charles Schweitzer s'empourpre de colère patriotique; les deux femmes se cramponnent à ses bras: «Charles! Y songes-tu? Ils nous expulseront et tu seras bien avancé!» Mon grand-père hausse le ton: «Je voudrais bien voir qu'ils m'expulsent: je suis chez moi!» On me pousse dans ses jambes, je le regarde d'un air suppliant, il se calme: «C'est bien pour le petit», soupire-t-il en me rabotant la tête de ses doigts secs. Ces scènes m'indisposent contre lui sans m'indigner contre les occupants. Du reste, Charles ne manque pas, à Gunsbach, de s'emporter contre sa belle-sœur; plusieurs fois par semaine, il jette sa serviette sur la table et quitte la salle à manger en claquant la porte: pourtant, ce n'est pas une Allemande. Après le repas nous allons gémir et sangloter à ses pieds, il nous oppose un front d'airain. Comment ne pas souscrire au jugement de ma grand-mère: «L'Alsace ne lui vaut rien; il ne devrait pas y retourner si souvent»? D'ailleurs, je n'aime pas tant les Alsaciens qui me traitent sans respect, et je ne suis pas si fâché qu'on nous les ait pris. Il paraît que je vais trop souvent chez l'épicier de Pfaffenhofen, M. Blumenfeld, que je le dérange pour un rien. Ma tante Caroline a «fait des réflexions» à ma mère; on me les communique; pour une fois, Louise et moi nous sommes complices: elle déteste la famille de son mari. A Strasbourg, d'une chambre d'hôtel où nous sommes réunis, j'entends des sons grêles et lunaires, je cours à la fenêtre; l'armée! Je suis tout heureux de voir défiler la Prusse au son de cette musique puérile, je bats des mains. Mon grand-père est resté sur sa chaise, il grommelle; ma mère vient me souffler à l'oreille qu'il faut quitter la fenêtre. J'obéis en boudant un peu. Je déteste les Allemands, parbleu, mais sans conviction. Du reste, Charles ne peut se permettre qu'une pointe délicate de chauvinisme: en 1911 nous avons quitté Meudon pour nous installer à Paris, 1 rue Le Goff; il a dû prendre sa retraite et vient de fonder, pour nous faire vivre, l'Institut des Langues Vivantes: on y enseigne le français aux étrangers de passage. Par la méthode directe. Les élèves, pour la plupart, viennent d'Allemagne. Ils paient bien: mon grand-père met les louis d'or sans jamais les compter dans la poche de son veston; ma grand-mère, insomniaque, se glisse, la nuit, dans le vestibule pour prélever sa dîme «en catimini», comme elle dit elle-même à sa fille: en un mot, l'ennemi nous entretient; une guerre franco-allemande nous rendrait l'Alsace et ruinerait l'Institut: Charles est pour le maintien de la Paix. Et puis il y a de bons Allemands, qui viennent déjeuner chez nous: une romancière rougeaude et velue que Louise appelle avec un petit rire jaloux: «La Dulcinée de Charles», un docteur chauve qui pousse ma mère contre les portes et tente de l'embrasser; quand elle s'en plaint timidement, mon grand-père éclate: «Vous me brouillez avec tout le monde!» Il hausse les épaules, conclut: «Tu as eu des visions, ma fille», et c'est elle qui se sent coupable. Tous ces invités comprennent qu'il faut s'extasier sur mes mérites, ils me tripotent docilement: c'est donc qu'ils possèdent, en dépit de leurs origines, une obscure notion du Bien. A la fête anniversaire de la fondation de l'Institut, il y a plus de cent invités, de la tisane de Champagne, ma mère et M lleMoutet jouent du Bach à quatre mains: en robe de mousseline bleue, avec des étoiles dans les cheveux, des ailes, je vais de l'un à l'autre, offrant des mandarines dans une corbeille, on se récrie: «C'est réellement un ange!» Allons, ce ne sont pas de si mauvaises gens. Bien entendu, nous n'avons pas renoncé à venger l'Alsace martyre: en famille, à voix basse, comme font les cousins de Gunsbach et de Pfaffenhofen, nous tuons les Boches par le ridicule; on rit cent fois de suite, sans se lasser, de cette étudiante qui vient d'écrire dans un thème français: «Charlotte était percluse de douleurs sur la tombe de Werther», de ce jeune professeur qui, au cours d'un dîner, a considéré sa tranche de melon avec défiance et fini par la manger tout entière y compris les pépins et l'écorce. Ces bévues m'inclinent à l'indulgence: les Allemands sont des êtres inférieurs qui ont la chance d'être nos voisins; nous leur donnerons nos lumières.

Un baiser sans moustache, disait-on alors, c'est comme un œuf sans sel; j'ajoute: et comme le Bien sans Mal, comme ma vie entre 1905 et 1914. Si l'on ne se définit qu'en s'opposant, j'étais l'indéfini en chair et en os; si l'amour et la haine sont l'avers et le revers de la même médaille, je n'aimais rien ni personne. C'était bien fait: on ne peut pas demander à la fois de haïr et de plaire. Ni de plaire et d'aimer.

Suis-je donc un Narcisse? Pas même: trop soucieux de séduire, je m'oublie. Après tout, ça ne m'amuse pas tant de faire des pâtés, des gribouillages, mes besoins naturels: pour leur donner du prix à mes yeux, il faut qu'au moins une grande personne s'extasie sur mes produits. Heureusement, les applaudissements ne manquent pas: qu'ils écoutent mon babillage ou l'Art de la Fugue, les adultes ont le même sourire de dégustation malicieuse et de connivence; cela montre ce que je suis au fond: un bien culturel. La culture m'imprègne et je la rends à la famille par rayonnement, comme les étangs, au soir, rendent la chaleur du jour.

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